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26/03/2024 | FRANCE | N°22/01807

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 26 mars 2024, 22/01807


26/03/2024



ARRÊT N° 104



N° RG 22/01807 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OY6E

MN/CD



Décision déférée du 20 Avril 2022 - Tribunal de Commerce de TOULOUSE ( 2020J649)

M. [X]

















[K] [P]

[G] [P]





C/



S.A. BANQUE COURTOIS




















































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CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT SIX MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANTS



Monsieur [K] [P]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représenté par Me Rebecca-brigitte BARANES, avocat au barreau de TOULOUSE

...

26/03/2024

ARRÊT N° 104

N° RG 22/01807 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OY6E

MN/CD

Décision déférée du 20 Avril 2022 - Tribunal de Commerce de TOULOUSE ( 2020J649)

M. [X]

[K] [P]

[G] [P]

C/

S.A. BANQUE COURTOIS

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT SIX MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTS

Monsieur [K] [P]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représenté par Me Rebecca-brigitte BARANES, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur [G] [P]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Rebecca-brigitte BARANES, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

LA SOCIETE GENERALE

venant aux droits et obligations de la société BANQUE COURTOIS en suite de la fusion-absorption intervenu en date du 01/01/2023

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Elisabeth LAJARTHE de la SELARL DBA, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. NORGUET, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

M. NORGUET, conseillère

S.MOULAYES, conseillère

Greffier, lors des débats : A. ASDRUBAL

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre

Faits et procédure :

Le 23 novembre 2018, la SA Banque Courtois a consenti à la Sas Eat A Lherm un prêt professionnel d'un montant de 40 000 euros payable en 60 mensualités de 713,36 euros au taux de 1,9%. Le prêt a été assorti d'un nantissement sur le fonds de commerce et d'une garantie de la société BpifFrance Financement.

Le même jour, [G] [P], président de la Sas Eat A Lherm, et [K] [P], son frère, se sont portés, ensemble, cautions de 50% des engagements de la Sas pour un montant maximal de 26 000 euros en principal, intérêts, commissions et accessoires.

Le 28 mai 2020, le tribunal de commerce de Toulouse a prononcé la liquidation judiciaire de la Sas Eat A Lherm et désigné la Selas Egide en la personne de Maitre [H] en qualité de mandataire liquidateur.

Le 16 juin 2020, la SA Banque Courtois a déclaré sa créance pour la somme de 30 670,93 euros outre intérêts au taux contractuels de 4,9 %, entre les mains du mandataire judiciaire, admise par ordonnance du juge commissaire du 25 mai 2021 à hauteur de 29 732,10 euros avec un taux de 1,9% l'an et une clause de majoration ramenée à 1 euro.

Le 24 juin 2020 et le 9 juillet 2020, la SA Banque Courtois a mis en demeure [K] [P] et [G] [P] de lui payer les sommes restant dues au titre de leur engagement de caution solidaire.

Le 10 novembre 2020, la SA Banque Courtois a assigné [G] et [K] [P] devant le tribunal de commerce de Toulouse en paiement des sommes dues outre leur condamnation à lui verser à 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Reconventionnellement, [K] [P] a contesté la compétence du tribunal de commerce pour connaître de son engagement de caution. Les défendeurs ont soutenu la nullité de leurs engagement de caution et le manquement de la banque à son devoir d'information.

Le 29 juillet 2021, la liquidation judiciaire de la de la Sas Eat A Lherm a été clôturée pour insuffisance d'actif.

Le 20 avril 2022, le tribunal de commerce de Toulouse s'est déclaré compétent pour connaître du litige opposant la SA Banque Courtois à [K] [P] et a condamné solidairement [G] [P] et [K] [P] à payer à la SA Banque Courtois la somme de 14 866,05 euros augmentée des intérêts au taux de 1,9 % à compter du 24 juin 2020 date de la mise en demeure, débouté [G] [P] et [K] [P] de l'intégralité de leurs demandes, condamnés in solidum [G] [P] et [K] [P] à payer a la SA Banque Courtois la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par déclaration en date du 15 mai 2022, [K] et [G] [P] ont relevé appel du jugement du tribunal de commerce de Toulouse aux fins de le voir réformé en intégralité.

Le 9 octobre 2023, en vertu de la fusion-absorption intervenue entre elles le 1er janvier 2023, la Société Générale a déclaré venir aux droits de la Sa Banque Courtois.

L'ordonnance de clôture a été rendue en date du 13 novembre 2023.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions N° 2 notifiées le 9 octobre 2023, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles [K] et [G] [P] sollicitent :

l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions,

que leurs cautionnements soient reconnus nuls pour erreur,

ou a minima que le cautionnement signé par [K] [P] soit reconnu nul pour erreur,

le rejet de toutes les prétentions de la SA Société Générale venant aux droits de la SA SA Banque Courtois,

subsidiairement, qu'il soit reconnu que la SA Société Générale venant aux droits de la SA Banque Courtois ne saurait alléguer les cautionnements souscrits, pour avoir engagé sa responsabilité à l'égard des cautions et leur avoir causé un préjudice égal au montant de leur engagement en raison de l'inobservation des conditions de la garantie de Bpifrance,

plus subsidiairement encore, qu'il soit reconnu que la SA Société Générale venant aux droits de la SA Banque Courtois, a engagé sa responsabilité pour violation de son obligation d'information contractuelle et doit réparation du préjudice qui en est résulté, au moyen d'une somme équivalente à celle qui lui serait allouée au titre de la caution,

la condamnation de la la SA Société Générale venant aux droits de la SA Banque Courtois à leur payer cette somme et qu'il soit ordonné la compensation entre lesdites sommes,

en toutes hypothèses, la condamnation de la SA Société Générale venant aux droits de la SA Banque Courtois à leur verser une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du NCPC et aux dépens,

à titre infiniment subsidiaire, qu'il soit reconnu que les cautions ne se sont pas engagées solidairement entre elles et que, dès lors, [G] [P] ne doit répondre que de 50% du montant qui serait retenu, et [K] [P] de 50%, de manière divise,

qu'il soit pris acte de la distribution de la somme de 2 327.06 euros effectuée par la Selas Egide en qualité de liquidateur judiciaire de la société Eat A Lherm entre les mains de la SA Société Générale venant aux droits de la SA Banque Courtois, réduisant le solde dû par la société à 27 261.04 euros et donc, le montant cautionné à 13 630.52 euros et le montant incombant à chaque caution à 6 815.26 euros outre intérêt légal et, dès lors, ne condamner les cautions qu'à hauteur de cette somme chacune,

qu'il soit dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions N°2 notifiées le 9 novembre 2023, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la SA Société générale, venant aux droits de la SA SA Banque Courtois, sollicite, au visa des articles 1103 et suivants, 2298 et suivants du code civil et les articles L 331-1 et suivants du code de la consommation :

qu'il soit donné acté à la SA Société générale de ce qu'elle vient aux droits et obligations de la SA SA Banque Courtois, en suite de la fusion-absorption intervenue le 1er janvier 2023,

la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions,

y ajoutant, la condamnation solidaire de [G] [P] et de [K] [P] à payer à la SA Société Générale venant aux droits de la SA SA Banque Courtois la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

la condamnation solidaire de [G] [P] et de [K] [P] à payer les dépens d'appel.

MOTIFS

En préambule, la cour note que les appelants abandonnent dans leurs écritures leurs prétentions relatives à l'incompétence du tribunal de commerce pour trancher le litige relativement au cautionnement de [K] [P], ce dont l'intimée prend acte.

Sur la nullité des actes de cautionnement de [G] et [K] [P] pour erreur sur la portée de leurs engagements

Aux termes des articles 6 et 9 du code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder. Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Aux termes des articles 1130, 1132 et 1133 du code civil, dans leur version applicable aux contrats en cause, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné. L'erreur de droit ou de fait, à moins qu'elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu'elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant. Les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté. L'erreur est une cause de nullité qu'elle porte sur la prestation de l'une ou de l'autre partie. L'acceptation d'un aléa sur une qualité de la prestation exclut l'erreur relative à cette qualité.

La cour rappelle que la garantie Bpifrance est subsidiaire des autres garanties obtenues par l'organisme de crédit, qu'elle ne peut bénéficier qu'à l'établissement prêteur, ce après épuisement des recours contre le débiteur et ses garants, afin de supporter avec la banque sa perte finale au prorata de la part de risque qu'elle a contractuellement accepté.

[G] et [K] [P] soutiennent avoir été induits en erreur quant à la portée de leurs engagements de caution par la banque quant au rôle et à l'étendue du cautionnement complémentaire qu'apportait la société Bpifrance. Ils disent avoir été convaincus par la banque de ce que la garantie apportée par Bpifrance venait en diminution de leur propre risque et de ce que, couplée au nantissement pris sur le fonds de commerce, elle les déchargeait en totalité de leurs propres engagements de caution, lesquels devenaient non avenus.

La Banque conteste tout possibilité d'erreur des appelants sur la portée de leurs engagements et plus encore toute fourniture d'informations mensongères de sa part notamment sur la couverture apportée par la société Bpifrance en rappelant que les conditions d'intervention de la garantie de Bpifrance figuraient dans le contrat de prêt consenti à la société dont [G] [P] était le gérant, et dont les cautions ont eu copie de sorte qu'elles ne pouvaient l'ignorer. Elle affirme qu'au surplus, il leur a été donné à chacune un exemplaire des conditions générales de la société Bpifrance présentant le fonctionnement subsidiaire dudit dispositif. Elle renvoie également à l'article 10 des actes de cautionnement signés indiquant clairement que ceux-ci viennent s'ajouter à toutes les autres garanties obtenues ou pouvant être obtenues par la banque.

En réplique, les appelants soulignent le caractère obscur et incompréhensibles des conditions générales de la garantie de Bpifrance transmises pour les cautions non averties qu'elles sont, [G] [P] étant un ancien agent SNCF et [K] [P] un employé technico-commercial.

C'est aux appelants, qui soutiennent la nullité des contrats, d'en rapporter la preuve.

Le courrier produit par les appelants au terme duquel ils estiment avoir interpellé en vain la banque sur ce qu'ils avaient compris de la subsidiarité de leurs engagements, en l'absence de toute preuve de réception par la banque, ne sera pas retenu dans la mesure où nul ne peut démontrer ce qu'il allègue par un acte dont il est seul l'auteur.

Il n'est pas plus matérialisé la teneur des échanges ayant pu avoir lieu en amont comme au jour de la conclusion du prêt et des garanties, de sorte qu'il n'est pas établi, comme le soutiennent les appelants, qu'ils auraient été volontairement induits en erreur par la banque afin de les amener à conclure leurs engagements de cautions par la croyance erronée que la garantie BpiFrance rendrait leur cautionnement personnel non avenu.

Enfin, il est relevé qu'à aucun moment les appelants ne produisent d'éléments de nature à attester de ce que la question de la subsidiarité de leurs propres engagements par rapport aux autres garanties contractées par la banque était bien entrée dans le champ contractuel et que l'erreur sur le caractère subsidiaire de la garantie BpiFrance était déterminante de leur consentement.

A cet égard, il est constaté que leur engagement a été conclu bien avant celui de la BpiFrance, ce qui rend d'autant moins soutenable que l'intervention de celle-ci ait été déterminante de leur propre accord, notamment en l'absence de toute clause contractuelle subordonnant expressément la validité de leur engagement à l'engagement ultérieur de BpiFrance.

Au surplus, de l'examen des pièces produites, la cour constate que l'acte de prêt énonce clairement au paragraphe 8.1 relatif à la garantie de Bpifrance « [elle] ne pourra en aucun cas être invoquée par les tiers et notamment l'emprunteur et ses garants pour contester tout ou partie de leurs dettes. [Elle] ne bénéficie qu'au Prêteur ».

Elle constate également que cette mention figure, dans les mêmes termes quoiqu'inversés, dans les conditions générales de la garantie Bpifrance financement annexées au contrat de prêt mais que celles-ci sont à l'évidence très difficilement lisibles et compréhensibles.

Les appelants contestent que ces dispositions puissent être opposables à [K] [P], non signataire de l'acte de prêt.

Cependant, la cour relève que l'acte de cautionnement signé par les deux cautions le même jour comprend une clause indiquant que « la caution ne fait pas [..] du maintien d'autres cautions la condition déterminante de son cautionnement » ainsi que « le présent cautionnement s'ajoute [..] à toutes garanties réelles et personnelles qui ont pu ou pourront être fournies au profit de la banque par la caution, le cautionné ou des tiers ».

Dès lors, le caractère subsidiaire de la garantie comme le fait que les cautionnements consentis par les appelants s'ajoutaient aux autres garanties obtenues par le prêteur ressortaient clairement des mentions du contrat de prêt comme de l'acte de caution signés par ceux-ci.

Il découle de l'ensemble de ces éléments qu'il n'est pas matérialisé d'erreur ayant vicié le consentement des appelants lors de la conclusion de leur acte de cautionnement et il n'y a pas lieu à annulation de celui-ci.

La cour confirme le jugement de première instance en ce qu'il a reconnu les engagements de caution de [G] [P] et [K] [P] valables.

Sur la violation des conditions de cautionnements physiques solidaires exigés par les conditions générales de la garantie Bpifrance financement

Les appelants reprochent à la banque de leur avoir fait signer un acte d'engagement de cautions excédant les 50% de l'encours, ici 40 000 euros, en principal, intérêts, et le cas échéant pénalités de retard ainsi que, aux termes des mentions manuscrites portées par les cautions en fin d'acte, un cautionnement non solidaire entre elles alors que les conditions générales de la garantie Bpifrance financement imposent à la banque de ne pas excéder ce seuil de 50% et de prévoir, en cas de pluralité de cautionnements annexes consentis, qu'ils soient de nature solidaire. Les appelants indiquent dès lors ne pas pouvoir être tenus dans d'autres conditions que celles imposées par la société Bpifrance.

La banque demande que soit constaté qu'elle a respecté les conditions imposées par la société Bpifrance en ce que les 50% de l'encours ne sont pas les 50% du principal du prêt mais de l'ensemble de la somme, intérêts compris, et que l'acte de cautionnement était bien solidaire entre les deux cautions, peu important qu'elles n'aient pas mentionné renoncer au bénéfice de division dans leurs mentions manuscrites.

En l'espèce, le respect ou non des conditions imposées par la société Bpifrance à l'organisme bancaire n'a vocation à jouer que dans le cadre des relations contractuelles entre la société Bpifrance et l'organisme bancaire concerné dans la mesure où leur non respect emporterait pour ce dernier l'impossibilité de se prévaloir de la garantie donnée.

Ces conditions ne peuvent être évoquées au soutien d'une éventuelle diminution des engagements contractuels annexes consentis par les cautions personnes physiques envers la banque.

Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de leurs demandes visant à limiter le montant de leurs engagements aux conditions imposées par la société Bpifrance à l'organisme bancaire.

Sur la responsabilité contractuelle de la banque pour manquement à son devoir d'information des cautions sur le mécanisme de la garantie Bpifrance et son caractère subsidiaire

Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Les appelants soutiennent qu'en ne les informant pas de manière claire sur le fonctionnement de la garantie subsidiaire apportée par la société Bpifrance, la banque a commis une faute leur ayant causé un préjudice, en l'espèce une perte de chance de ne pas conclure leurs engagements de caution. Ils en demandent réparation par l'allocation de dommages et intérêts équivalents au montants des condamnations en paiement qui seraient éventuellement mises à leur charge.

La banque conteste toute faute en affirmant qu'elle a correctement rempli son obligation d'information envers les cautions et qu'elle en justifie en produisant les divers documents remis, soit le contrat de prêt, les conditions générales de la garantie BpiFrance financement et l'acte de cautionnement dont les mentions ont porté à la connaissance des cautions les informations dont elles avaient besoin pour s'engager en toute connaissance de cause.

L'appréciation du caractère suffisant ou non de l'information donnée par les banque sur le fonctionnement de la garantie Bpifrance est une question ressortant du pouvoir souverain des juges du fond.

Ainsi qu'il l'a été établi plus haut, les cautions ont reçu suffisamment d'informations dans les divers documents remis pour comprendre la portée de leurs engagements.

Dès lors, il ne peut être retenu de faute à l'encontre de la banque pour défaut d'information suffisante des appelants. Ceci est suffisant pour confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [G] et [K] [P] de leurs demandes visant à voir retenue la responsabilité de la banque pour manquement à son devoir d'information.

Sur le montant de la créance finale de la banque, l'imputation du paiement partiel reçu et le caractère solidaire des engagements de caution de [G] et [K] [P]

Les appelants soutiennent que la créance de la banque envers les cautions doit être réduite du paiement reçu des mains du mandataire liquidateur à la clôture de la procédure collective soit la somme de 2 327,06 euros.

La banque réplique en indiquant que cette somme ne peut être déduite que de la partie non cautionnée de la dette restant due.

Il est de jurisprudence constante que le paiement partiel doit, sauf clause contraire, être imputé d'abord sur la partie non cautionnée de la dette, la caution restant tenue envers le créancier tant que la dette n'est pas intégralement soldée.

C'est à tort que les appelants soutiennent que la créance de la banque serait cautionnée en intégralité du fait de l'adjonction de la garantie de Bpifrance puisque celle-ci n'a pas vocation à se superposer aux cautionnements accordés par les personnes physiques. Dès lors, la dette en cause n'est que partiellement cautionnée par [G] et [K] [P] et le paiement partiel réalisé par le mandataire liquidateur a bien vocation à s'imputer sur la partie non cautionnée de la dette.

La cour note que les parties sollicitent l'éventuelle condamnation en paiement à la somme maximale prononcée par le tribunal de commerce en première instance, lequel a estimé que le cautionnement de [G] et [K] [P] était bien donné pour 50% de l'encours restant dû, qui s'établit selon la créance admise dans la procédure collective à la somme de 29 732,10 + 1 euro.

La partie non cautionnée de la dette se monte donc à la somme de 14 866,55 euros et l'imputation du paiement partiel de 2 327,06 euros. sur la partie non cautionnée de la dette n'est pas de nature à modifier le montant des sommes dues par les appelants au titre de leur engagement de cautions.

Les appelants contestent ensuite le caractère solidaire du cautionnement conclu par acte du 23 novembre 2018 en raison de l'absence de toute mention relative au bénéfice de division dans les mentions manuscrites portées en pied d'acte.

La banque renvoie aux mentions portées en tête d'acte indiquant que les parties agissent conjointement et solidairement.

Les articles L331-1 et L331-2 du code de la consommation, dans leur version applicable aux cautionnements en cause, prévoyaient les mentions manuscrites qui devaient être portées en pied des contrats de cautionnement des personnes physiques s'engageant envers des créanciers professionnels, conditionnant la validité de leur engagement.

La cour constate que dans le contrat de cautionnement du 23 novembre 2018 paraphé et signé par [G] et [K] [P], produit en pièce 3 par la banque, les mentions manuscrites apposées par chacune des cautions respectent le formalisme imposé par lesdits articles, ce qui permet d'affirmer la validité de l'engagement de chacune des caution aux côtés de la société débitrice principale.

Cependant, contrairement à ce que soutiennent les appelants, la solidarité entre les cautions elles-même, cofidéjusseurs, n'a pas à figurer dans les mentions manuscrites, n'étant pas légalement prévue par les textes, mais est, en l'espèce, bien établie par la mention figurant en en-tête de l'acte, après la présentation de l'identité des deux personnes physiques, « agissant conjointement et solidairement entre eux sans que cette solidarité soit expressément rappelée dans le corps de l'acte, Messieurs [G] [P] et [K] [P], ci-après dénommés dans le corps de l'acte « La caution ».

L'engagement des cautions est en l'espèce bien un engagement solidaire et le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il lui a prononcé une condamnation solidaire entre [G] et [K] [P] pour la somme totale de 14 866,55 euros.

Sur la déchéance du droit aux intérêts en l'absence d'information annuelle des cautions et les intérêts au taux légal

Les appelants sollicitent de la cour l'application des intérêts au taux légal en lieu et place du taux conventionnel demandé par la banque à compter de la dernière information annuelle reçue par elles soit le 2 février 2020.

La banque reconnaît ne plus avoir procédé à l'information annuelle des cautions à compter de cette date mais indique avoir dès lors manqué à son obligation à compter de la date légale de l'information due soit le 31 mars 2020. Elle sollicite que la déchéance du droit au taux d'intérêt conventionnel ne débute qu'à compter de la mise en demeure du 24 juin 2020.

En application des dispositions de l'article L333-2 du code de la consommation, dans sa version applicable au cautionnement en cause, en l'absence de respect de son obligation annuelle d'information des cautions sur le montant de l'encours et de la durée de l'engagement au titre de la dette cautionnée, et conformément à l'énoncé des prétentions des parties, les intérêts au taux légal seront substitués aux intérêts au taux conventionnel à compter de la date de la dernière information due, soit ici le 31 mars 2020.

Cependant, afin de garantir l'effectivité des règles de protection des consommateurs prévues par la directive 2008/48/CE, il incombe au juge de réduire d'office dans une proportion constituant une sanction effective et dissuasive du manquement du prêteur à son obligation légale d'information, le taux résultant de l'application des articles 1231-6 du Code civil et L. 313-3 du Code monétaire et financier, lorsque celui-ci est supérieur ou équivalent au taux conventionnel.

En l'espèce, le taux légal est, au jour du présent arrêt, supérieur au taux conventionnel du contrat en cause, tel que fixé par l'ordonnance du juge commissaire admettant la créance, à 1,90% puisqu'il s'établit aux taux de 5,07%. L'effectivité de la sanction sera donc assurée en plafonnant le taux d'intérêt légal à 1,5%.

Les cautions devront donc paiement de leur dette avec intérêts au taux légal, plafonné à 1,5% à compter du 31 mars 2020.

Le jugement de première instance sera infirmé en ce qu'il a assorti la créance de la banque d'un taux d'intérêt de 1,9% à compter du 24 juin 2020.

Sur les frais irrépétibles,

Au vu de la succombance des appelants, il convient de confirmer les chefs du jugement entrepris relatifs aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance.

[G] [P] et [K] [P], parties succombantes, seront condamnés aux dépens d'appel.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a assorti la créance de la banque d'un taux d'intérêt de 1,9% à compter du 24 juin 2020,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a assorti la créance de la banque d'un taux d'intérêt de 1,9% à compter du 24 juin 2020,

Et, statuant à nouveau du chef infirmé,

Dit que les sommes dues par [G] [P] et [K] [P] envers la Société Générale porteront intérêts au taux légal plafonné au taux de 1,5% à compter du 31 mars 2020,

Y ajoutant,

Condamne [G] [P] et [K] [P] aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/01807
Date de la décision : 26/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-26;22.01807 ?
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