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02/02/2023 | FRANCE | N°22/00735

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 02 février 2023, 22/00735


02/02/2023



ARRÊT N° 97/2023



N° RG 22/00735 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OT74

CBB/CD



Décision déférée du 03 Février 2022 - Président du TJ de MONTAUBAN ( 21/00308)

M. [X]

















[Y] [J]





C/



S.A.S. IFB

S.A.S. EDELIS




















































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

***

ARRÊT DU DEUX FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANT



Monsieur [Y] [J]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Sabrina PAILLIER, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et Me Thibault...

02/02/2023

ARRÊT N° 97/2023

N° RG 22/00735 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OT74

CBB/CD

Décision déférée du 03 Février 2022 - Président du TJ de MONTAUBAN ( 21/00308)

M. [X]

[Y] [J]

C/

S.A.S. IFB

S.A.S. EDELIS

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

***

ARRÊT DU DEUX FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANT

Monsieur [Y] [J]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Sabrina PAILLIER, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et Me Thibault DU MANOIR DE JUAYE de la SELEURL DU MANOIR DE JUAYE ET ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMÉES

S.A.S. IFB

Pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Olivier THEVENOT de la SELARL THEVENOT MAYS BOSSON, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.S. EDELIS

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 4]

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée par Me Stéphane VOLIA de la SCP VOLIA, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. BENEIX-BACHER, Présidente, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BENEIX-BACHER, président

E.VET, conseiller

A. MAFFRE, conseiller

Greffier, lors des débats : M. BUTEL

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par M. BUTEL, greffier de chambre

FAITS

Dans le cadre d'une opération de défiscalisation dite De Robien, sur la base d'une étude financière de IBF France, conseil en gestion de patrimoine, M. [J] a suivant acte du 25 avril 2006, acquis auprès de la société 4 M Promotion devenue Akerys Promotion un appartement de Type T2, situé à [Adresse 8], au prix de 110 000 euros financé par un prêt.

Après plusieurs évaluations, Monsieur [Y] [J] a revendu ce bien par acte du 19 octobre 2021, au prix de 51 908 euros.

PROCEDURE

Par acte en date du 2 décembre 2021, M. [J] a fait assigner la SAS IFB France et la SAS Edelis (anciennement Akerys Promotion) devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Montauban pour obtenir la désignation d'un expert Afin d'évaluer le bien à la date d'acquisition et aux fins de vérifier l'intérêt financier d'une telle acquisition'; il sollicitait également la communication de l'étude réalisée par l'association EDC mentionnée dans le fascicule de présentation adressé aux investisseurs, et ce sous astreinte.

Par ordonnance contradictoire en date du 3 février 2022, le juge a':

- déclaré recevable l'action de M. [Y] [J] ;

- rejeté les demandes de M. [Y] [J] ;

- rejeté les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile et en distraction,

- laissé les dépens à la charge de M. [Y] [J];

- rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit en application de l'article 514 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 17 février 2022, M. [J] a interjeté appel de la décision. L'ordonnance est critiquée en ce qu'elle a':

- rejeté les demandes de M. [Y] [J] ;

- rejeté les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile et en distraction,

- laissé les dépens à la charge de M. [Y] [J].

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

M. [J], dans ses dernières écritures en date du 21 novembre 2022, demande à la cour de':

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel, fins et conclusions,

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 3 février 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Montauban,

statuant a nouveau

- lui accorder l'expertise sollicitée,

- désigner tel expert qu'il appartiendra avec mission de :

* après avoir pris connaissance de tous les documents utiles et notamment après avoir obtenu des défenderesses toutes les informations qu'elles possédaient antérieurement à la signature du contrat préliminaire sur l'équilibre financier de l'opération, convoquer les parties et se rendre sur les lieux et les décrire,

* procéder à l'évaluation du bien immobilier acquis par M. [J] au jour de l'acquisition ainsi qu'à celui de l'expertise,

* utiliser pour ce faire, conformément à la Charte de l'expertise en évaluation immobilière, en priorité la méthode par capitalisation du revenu et éventuellement celle par comparaison,

* dans l'hypothèse où la multiplication de programmes immobiliers neufs à Caussade ou sur les communes avoisinantes serait de nature à impacter de manière artificielle la valeur vénale du bien au jour de l'acquisition, retenir, pour évaluer le bien à cette date, uniquement la méthode d'évaluation par capitalisation du revenu ou, à défaut, procéder également avec la méthode par comparaison en retenant une commune non impactée par de tels programmes et située à proximité ;

* analyser l'étude financière réalisée par la SAS IFB France et se prononcer sur sa qualité et sa pertinence, ainsi que sur la crédibilité de ses hypothèses notamment en termes de revente ;

* dire si son contenu était de nature à éclairer M. [J] sur les risques et les opportunités de leur investissement, notamment, et le cas échéant, en raison de la multiplication de programmes immobiliers à proximité de Caussade ;

* d'une manière générale, donner tous éléments techniques et de faits propres à éclairer la juridiction saisie au fond sur les responsabilités de chacun et de nature à lui permettre d'évaluer le préjudice subi par M. [J] ;

* se faire remettre de la part de la SASU Akerys Promotion tout document utile concernant la construction, les caractéristiques et la qualité des biens ;

* fournir tous éléments de fait nécessaires à la solution du litige ;

- dire que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport au greffe dans les trois mois de sa saisine ;

- fixer la provision à consigner au greffe à titre d'avance sur les honoraires de l'expert dans le délai qui sera précisé dans l'ordonnance ;

- mettre à la charge de la SAS IFB France, la SASU Akerys Promotion, et l'association EDC les frais d'expertise,

- condamner in solidum la SAS IFB France, la SASU Akerys Promotion et l'association EDC à payer à M. [J] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner à la SASU Akerys Promotion de communiquer au demandeur sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du quinzième jour suivant celui de l'ordonnance à intervenir :

* les études préalables à la réalisation du projet et notamment le bilan promoteur de l'opération réalisée par cette dernière, à savoir coût d'acquisition du terrain, coût de viabilisation, construction, aménagements extérieurs,

* la dommage ouvrage afin de connaître le coût de la construction,

- ordonner à la SAS IFB France de communiquer l'étude réalisée par l'association EDC mentionnée dans le fascicule de présentation adressé aux investisseurs, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du quinzième jour suivant celui de l'ordonnance à intervenir,

- condamner in solidum les sociétés IFB France, Akerys Promotion et l'association EDC aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL du Manoir de Juaye.

Il soutient que':

- néophyte en matière de placements financiers il a fait confiance à IBF France qui lui a présenté une Simulation Financière Personnalisée qui s'est avérée trompeuse'; la constitution d'un capital à terme était l'argument principal'; acheté au prix de 110'000 € le bien était estimé à 48'000 € en 2017'; finalement il l'a revendu à l'issue de la période de défiscalisation 51'000 € soit une perte de 52'% qui ne peut s'expliquer par la baisse du marché immobilier alors que la prévision de valeur s'établissait à 131'000€,

- IBF France a fait appel à EDC, association présentée à tort comme un label garantissant la sécurité de l'investissement'; Monsieur [J] a adhéré à cette association 17 juin 2006';

- malgré la vente du bien sa qualité à agir est incontestable s'agissant d'engager la responsabilité du promoteur vendeur et de la société de commercialisation,

- il soupçonne les divers intervenants de lui avoir caché des éléments déterminants de son consentement,

- la prescription échappe à la compétence du juge des référés mais en tout état de cause l'action éventuelle en responsabilité comme en nullité pour dol n'est pas prescrite'; le point de départ des actions au fond envisagées est fixée au jour de la révélation de l'impossibilité d'obtenir la rentabilité prévue lors de la conclusion du contrat et non l'acte de vente du 26 avril 2006 puisqu'il recherche la cause de la perte de valeur à l'issue de la période d'immobilisation fiscale;

- il justifie également de motifs légitimes à solliciter une expertise judiciaire; il convient de connaître précisément la valeur du bien lors de son achat, en fonction de ses qualités de construction, de son emplacement dans un secteur, de ses potentialités de revente etc., ces nombreux paramètres étant de la compétence d'un expert foncier ou en immobilier,

- ainsi, les faits allégués sont plausibles, la projection financière est de toute évidence erronée et la perte de valeur du bien à la revente à l'issue de la période fiscale, établie'; l'action n'est pas manifestement vouée à l'échec': elle peut être fondée sur le dol et sur le défaut d'information et de conseil sur les risques de l'opération ou de l'évolution du marché,

- il convent donc de vérifier la valeur du bien tant au jour de son acquisition qu'au jour de l'expertise en procédant en priorité, s'agissant d'un investissement dans un produit fiscal, par la méthode d'évaluation par le revenu et, éventuellement, en lui adjoignant la méthode d'évaluation par comparaison; de vérifier si les informations remises étaient réalistes compte tenu tant du marché immobilier que de la nature particulière des immeubles vendus sous un régime de défiscalisation et du fait du différentiel entre le neuf et l'ancien à l'issue de la période d'immobilisation et de vérifier si la plus-value promise était envisageable au jour de la simulation,

- les pièces dont il demande communication permettront de connaître le coût de la construction, la qualité des matériaux qui peuvent jouer sur la valeur du bien.

La SAS IFB France, dans ses dernières écritures en date du 1er juillet 2022 demande à la cour au visa des articles 145, 146, 232 et 238 du code de procédure civile, de':

- à titre principal, confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise

- débouter M. [J] l'ensemble de ses demandes fins et conclusions

y ajoutant

- condamner M. [Y] [J] à payer à la SAS IFB France une indemnité de 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Thevenot & Associés sur affirmation de son droit conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

à titre subsidiaire

- dire et juger que les frais de consignation seront à la charge du requérant

- débouter M. [J] de sa demande de condamnation sous astreinte dirigée à l'encontre de la SAS IFB France à communiquer l'étude réalisée par la SAS IFB France

- débouter le requérant de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- dire et juger que le requérant supportera les dépens de l'instance.

Elle soutient que':

- elle est intervenue suivant les conditions définies par le promoteur, et notamment en se conformant pour les prix de vente aux grilles tarifaires qu'il avait établies,

- M. [J] a vendu le bien le 19 octobre 2021 de sorte qu'il ne justifie plus d'un intérêt à agir,

- l'action en nullité des ventes, et en responsabilité contractuelle pour manquement à l'obligation de conseil que le demandeur déclare vouloir engager soit à l'égard de son vendeur et/ou à l'égard des intermédiaires qui ont commercialisé le bien, sont largement prescrites considérant que le délai pour les exercer est de 5 ans et qu'il court nécessairement à compter de la signature de l'acte notarié date à laquelle le demandeur « aurait dû connaître les faits leur permettant de les exercer » (article 2224)

- dans l'hypothèse du dol le point de départ du délai de prescription est la date de la vente où l'investisseur était en mesure de prendre conscience des mensonges: les plaquettes de commercialisation n'ont aucun caractère contractuel ainsi qu'il est clairement indiqué'; et l'économie générale de l'opération ne peut être appréciée à l'issue de la période de défiscalisation en raison des aléas spéculatifs,

- il en est de même dans le cadre d'une action en responsabilité pour manquement à l'obligation d'information pré-contractuelle qui se manifeste dès la signature du contrat

- l'erreur sur la valeur ne peut justifier la nullité d'un contrat,

- la suspicion de sur-valorisation du bien ne peut être justifiée par le prix de revente dans la mesure où on ne connaît pas l'état de l'immeuble à cette date,

- toute action est donc manifestement vouée à l'échec,

- Subsidiairement, la mission sollicitée est inutile': l'expert ne peut donner aucune appréciation juridique, la mission ne peut être une mesure générale d'investigation';

et l'expert ne pourra évaluer le bien au jour de l'expertise puisqu'il a été vendu sans que l'on connaisse l'état des lieux,

La SASU Edelis anciennement dénommé Akerys Promotion, dans ses dernières écritures en date du 24 novembre 2022 demande à la cour au visa des articles 122, 145 et 238 du code de procédure civile, de':

- réformer l'ordonnance du 3 février 2022 en ce qu'elle a déclaré recevables les demandes de M. [J] en ce qu'il a qualité à agir,

- déclarer M. [J] irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir,

- confirmer l'ordonnance du 3 février 2022 en toutes ses autres dispositions,

- débouter en conséquence M. [J] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. [J] à payer à la SASU Edellis la somme de 2500 € en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

à titre subsidiaire,

- dire que la mission confiée à l'Expert sera limitée à la détermination de la valeur du bien et que la détermination de cette valeur se fera par rapport à des biens similaires au regard de leur standing, de leur situation, et de leur éventuelle aptitude à profiter des mécanismes de défiscalisation mis en oeuvre en l'espèce.

- débouter M. [J] de toute autre demande et notamment de sa demande de communication sous astreinte dirigée contre la SASU Edellis.

- donner acte à la SASU Edellis qu'elle émet toutes protestations et réserves sur la mesure d'expertise d'évaluation du bien.

- mettre les frais d'expertise et les dépens à la charge de M. [J].

Elle soutient que':

- elle avait confié la commercialisation de l'immeuble à IBF France par l'intermédiaire de laquelle M. [J] a réalisé son acquisition,

- sa demande est irrecevable pour défaut de qualité à agir puisqu'il a vendu le bien et qu'il ne justifie pas de l'autorisation de l'actuel propriétaire pour investiguer sur l'immeuble,

- l'objet de l'expertise est de vérifier l'opportunité du projet financier sous couvert d'une demande d'évaluation ce qui ne relève pas des compétences d'un expert qui est un technicien'; le caractère strictement probatoire de l'expertise n'est donc pas démontré,

- d'autant qu'il justifie d'éléments suffisants pour engager une action au fond,

- si l'action est fondée sur le dol, la prescription est acquise'considérant le point de départ du délai au jour de la vente ; il en est de même de toute action fondée sur un manquement à l'obligation d'information pré-contractuelle ; or, M.[J] était dès l'origine informé des variations possibles du prix de revente de l'immeuble et ce sans lien avec quelque manquement du vendeur,

- il ne justifie d'aucun indice permettant d'affirmer une sur-évaluation du bien en 2006,

- il ne justifie donc pas d'un intérêt légitime,

- subsidiairement, l'expertise ne peut qu'être limitée à la stricte évaluation de l'immeuble sans aucune analyse juridique ni aucune analyse de l'opération d'ensemble,

- par ailleurs, il conviendra de restreindre les éléments de comparaison puisqu'il faut tenir compte de la défiscalisation,

- les pièces dont il est demandé communication sont sans intérêt probatoire s'agissant en réalité d'éléments comptables.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 28 novembre 2022.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'action

S'il est exact que M. [J] n'a pas qualité à agir en nullité de la vente de l'immeuble dès lors qu'il n'en est plus le propriétaire, il demeure qu'il n'envisage pas seulement une action portant sur l'immeuble mais sur l'éventuelle responsabilité contractuelle et pré-contractuelle de la SAS IFB France et de la SAS Edelis dans l'opération de défiscalisation réalisée par l'achat du dit bien immobilier.

Dans ces conditions, la vente de l'immeuble n'est pas un obstacle à la demande d'expertise dans le domaine comptable et financier de sorte qu'il ne peut être soutenu l'irrecevabilité de l'action dans son ensemble pour défaut de qualité à agir.

Sur les conditions de l'article 145 du code de procédure civile

L'article 145 du Code de procédure civile dispose que s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées en référé à la demande de tout intéressé.

La mise en oeuvre de ce texte ne se concevant qu'en prévision d'un possible litige, elle n'exige pas que le fondement et les limites d'une action par hypothèse incertaine, soient déjà fixées.

Le motif légitime est rapporté dès lors que l'éventuelle action au fond n'est pas manifestement vouée à l'échec, que la mesure demandée est légalement admissible, qu'elle est utile et améliore la situation probatoire des parties et qu'elle ne porte pas atteinte aux intérêts légitimes de l'adversaire.

Cette exigence de motivation fait obstacle à ce qu'il soit recouru à la procédure de l'article 145 de avec légèreté : elle ne doit pas permettre de pallier les erreurs ou négligences d'un plaideur, pour qui il serait aisé de réunir les preuves demandées sans recourir au juge.

Les intimés soutiennent d'une part, que le juge des référés n'a pas le pouvoir de trancher la question de la prescription qui relève du juge du fond et d'autre part, que toute action étant prescrite la demande est irrecevable.

Or, c'est dans le cadre de l'appréciation du caractère manifeste de l'échec de toute action envisageable que le juge des référés, juge de l'évidence, tient le pouvoir de vérifier le moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription.

Et, dans la mesure où en l'espèce, le demandeur soutient avoir l'intention d'agir en responsabilité contractuelle et/ou délictuelle pour manquement à l'obligation de conseil et d'information contre Edelis, le promoteur vendeur auteur de la plaquette de présentation du projet et pour tromperie contre SAS IFB France à l'origine de l'étude patrimoniale et de la projection financière du projet, l'action entre dans les prévisions de l'article 2224 du code civil qui dispose que la prescription d'une action en responsabilité, contractuelle ou délictuelle, court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

S'agissant d'un investissement immobilier locatif avec défiscalisation, ce n'est qu'au jour de l'estimation immobilière destinée à la revente de l'immeuble que M. [J] titulaire de l'action en responsabilité, a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, soit au plus tôt le 16 août 2017 date à laquelle l'agent immobilier De Freitas l'a informé de la baisse de valeur se situant entre 45 et 49 000€ alors qu'il avait acquis l'immeuble 110 000€ en 2006.

Dans ces conditions dès lors que l'assignation du 2 décembre 2021 a été délivrée dans le délai de prescription de 5 ans à compter du 16 août 2017, l'action en réparation d'une perte de chance d'éviter la réalisation du risque de dévaluation n'apparaît pas manifestement prescrite ni donc manifestement vouée à l'échec. Elle sera déclarée recevable et la décision complétée dès lors que le premier juge n'a pas répondu à cette question.

M. [J] fait état d'une baisse de valeur de l'immeuble puisqu'il aurait revendu le bien 51 908€ en octobre 2021 soit une perte de la moitié de sa valeur initiale environ. Il soutient que cette baisse ne peut trouver son explication dans les seuls aléas du marché immobilier dont chacun peut se convaincre aisément. Or, il ne produit pas l'acte définitif de vente mais seulement un projet de vente au prix indiqué de 55 900€ soit entre 10 000 et 6000€ de plus que l'estimation de 2017'; il ne produit non plus aucun état des lieux du bien au jour de la vente afin d'en vérifier l'état d'entretien et de vétusté et enfin, il ne produit aucun élément de comparaison de ventes de biens identiques dans la même période sur le même secteur voire un extrait d'un document spécialisé utilisé par les professionnels dont les notaires tel que les éditions [I] de l'année 2007 dont il est généralement fait état dans ce type d'affaires.

Dans ces conditions, M. [J] ne justifie pas d'un motif légitime à solliciter avant tout procès l'organisation d'une expertise destinée à faire la preuve d'une sur-évaluation du bien acquis en défiscalisation en 2007.

La décision sera confirmée de ce chef.

L'équité commande qu'il ne soit pas fait droit à la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour

- Confirme l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Montauban en date du 3 février 2022 tant en ce qui concerne la recevabilité de l'action quant à l'intérêt à agir sauf à la compléter quant à l'absence de prescription, qu'en ce qui concerne le rejet de la demande d'expertise, des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile et des dépens de première instance

Y ajoutant

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute les intimées de leur demande de ce chef.

- Condamne M. [J] aux dépens d'appel.

- Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. BUTEL C. BENEIX-BACHER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/00735
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;22.00735 ?
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