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11/01/2023 | FRANCE | N°21/01228

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 11 janvier 2023, 21/01228


11/01/2023





ARRÊT N°26



N° RG 21/01228 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OBJZ



VS AC



Décision déférée du 08 Février 2021 - Tribunal de Commerce de FOIX - 2020J00029

Monsieur LOUSTEAU

















[S] [E]





C/



S.A.S.U. ARIEGE TUNGSTENE





























































Infirmation







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU ONZE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANT



Monsieur [S] [E]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE



INTIMEE



S.A....

11/01/2023

ARRÊT N°26

N° RG 21/01228 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OBJZ

VS AC

Décision déférée du 08 Février 2021 - Tribunal de Commerce de FOIX - 2020J00029

Monsieur LOUSTEAU

[S] [E]

C/

S.A.S.U. ARIEGE TUNGSTENE

Infirmation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU ONZE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANT

Monsieur [S] [E]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

S.A.S.U. ARIEGE TUNGSTENE

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Christine CASTEX de la SAS CABINET CASTEX, avocat au barreau d'ARIEGE

Assistée par Me Romain LANTOURNE et Maître Alexandre Ebtedaei, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant V. SALMERON, Présidente chargée du rapport et de P.BALISTA, Conseiller. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

P. BALISTA, conseiller

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par C. OULIE, greffier de chambre.

Exposé des faits et procédure :

[S] [E], spécialiste en recherches minières, a créé en 2011 la société E-Mines dont l'objet est le conseil et le service à l'exploration minière.

[S] [E] était également depuis 2011 le directeur général de la société Variscan Mines, titulaire du permis d'exploration de la mine du Salau située en Ariège.

En 2017, la société Mines du Salat a été créée avec pour vocation de constituer la société d'exploitation de la mine du Salau. 80 % des titres de la société Mines du Salat étaient détenus par la société Ariège Tungstène, créée en 2016, et les 20% restant par la société Variscan Mines.

[S] [E] était le président des sociétés Mines du Salat et Ariège Tungstène.

Dans le cadre d'un projet d'exploitation de la mine de Salau, la société de droit australien Apollo Minerals a acquis des titres en 2017 de la société Tungstène, et en 2018 de la société Variscan Mines.

Par décision du 25 juillet 2017 de l'assemblée générale de la société Variscan Mines, [S] [E] a été révoqué de son mandat de directeur général de cette société.

Le 18 juillet 2019, la société Variscan Mines a acquis les titres de la société Mines du Salat détenus par la société Ariège Tungstène.

Par décisions du 31 juillet 2019 des assemblées générales des sociétés Ariège Tungstène et Mines du Salat, [S] [E] a été révoqué de ses mandats de président de ces sociétés.

La société Ariège Tungstène a fait l'objet d'une décision de dissolution anticipée par l'assemblée générale extraordinaire du 30 juin 2020.

Par acte d'huissier du 28 juillet 2020, [S] [E] a assigné la société Ariège Tungstène devant le tribunal de commerce de Foix aux fins de la voir condamnée à lui verser la somme de 30.000 € de dommages et intérêts en réparation de son préjudice né du caractère abusif de sa révocation.

Par jugement du 8 février 2021, le tribunal de commerce de Foix a :

dit que [S] [E] ne rapportait pas la preuve d'avoir été victime d'une révocation abusive de la part de la Sas Ariège Tungstène,

déclaré [S] [E] mal fondé en toutes ses demandes et l'en a débouté

condamné [S] [E] à verser à la Sas Ariège Tungstène la somme de 2.500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile (cpc),

condamné [S] [E] aux entiers dépens.

Par déclaration en date du 16 mars 2021, [S] [E] a relevé appel du jugement. La portée de l'appel est l'infirmation de l'ensemble des chefs du jugement, que la déclaration d'appel critique tous expressément.

La clôture était prévue pour le 8 août 2022. et a été prononcée le 31 août 2022.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions n°2 notifiées le 22 novembre 2021 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de [S] [E] demandant, au visa des articles 1240 et 1363 du code civil, de :

déclarer [S] [E] recevable et bien fondé en son appel

en conséquence, infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu entre les parties par le tribunal de commerce de Foix le 8 février 2021

statuant à nouveau,

déclarer abusive et brutale la révocation en date du 31 juillet 2019 de [S] [E] de son mandat de président de la société Ariège Tungstène

condamner en conséquence la société Ariège Tungstène à régler à [S] [E] la somme de 30.000 € en indemnisation du préjudice moral subi

condamner la société Ariège Tungstène à régler à [S] [E] la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

la condamner aux entiers dépens et allouer à la Scp Sorel le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les conclusions n°2 notifiées le 26 juillet 2022 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la société SAS Ariège Tungstène, demandant de :

dire que [S] [E] ne rapporte pas la preuve du caractère abusif de sa révocation de président de la société Ariège Tungstène, ni celle d'un préjudice ;

en conséquence, confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Foix du 8 février 2021

débouter [S] [E] de ses demandes, fins et conclusions;

condamner [S] [E] à verser à la société Ariège Tungstène la somme de 2.500 € ;

condamner [S] [E] aux entiers dépens.

Motifs de la décision :

La cour d'appel ne tranche que les demandes présentées dans le dispositif des conclusions des parties en application de l'article 954 du cpc.

En l'espèce elle n'est saisie, par l'effet dévolutif de l'appel, que de la révocation abusive du mandat de président de [S] [E] au sein de la seule société Ariège Tungstène, société à associé unique, par révocation décidée le 31 juillet 2019.

Les parties s'entendent pour constater que les statuts de la dite société avaient prévu en leur article 18 que le président pouvait être révoqué ad nutum « sans motif et sans indemnité ».

Le litige ne porte donc que sur le fait de déterminer si la SASU Ariege Tungstène a manqué à son devoir de loyauté à l'égard de son mandataire social en le révoquant de façon brutale ou vexatoire et le cas échéant s'il en est résulté un préjudice indemnisable.

[S] [E] reproche à la SAS Ariège Tungstène de l'avoir révoqué sans le convoquer pour pouvoir présenter ses explications, préalablement à sa révocation ce qui constitue, selon lui, un manquement au devoir de loyauté de la société pour défaut de respect du principe du contradictoire et une révocation vexatoire et brutale.

La SASU Ariège Tungstène lui rétorque qu'elle n'avait pas à le convoquer comme mandataire social et que, de surcroît, il avait préalablement été entendu à l'occasion de son entretien préalable à son licenciement et avait pu prendre connaissance des griefs portés à son encontre et s'expliquer.

Il y a abus de droit de révocation lorsque la révocation du dirigeant a été accompagnée de circonstances ou a été prise dans des conditions qui portent atteinte à sa réputation ou à son honneur ou si elle a été décidée brutalement, sans respecter l'obligation de loyauté dans l'exercice du droit de révocation.

La révocation d'un dirigeant est abusive lorsqu'elle est intervenue en dehors du conseil d'administration et sans que l'intéressé ait été mis en mesure de présenter préalablement ses observations.

En l'espèce, [S] [E] n'a pu s'expliquer que sur les griefs reprochés en tant que salarié de la société Varisacan Mines dans le cadre de l'entretien préalable à son licenciement. En revanche, il n' a jamais été convoqué pour s'expliquer préalablement à sa révocation en tant que président de la SASU Ariege Tungstene ni mis en mesure d'apporter des explications préalablement à cette décision de révocation.

Le procès-verbal d'assemblée générale du 31 juillet 2019 précise qu'il n'a pas été convoqué et ne dit pas qu'il a été mis en mesure de s'expliquer, peu important que la révocation nécessite ou pas la justification de motifs et peu important que les griefs portent sur les mêmes griefs que ceux évoqués dans le cadre de son licenciement au sein d'une autre société. En effet, rien ne lui permettait d'en être convaincu puisque les faits portent sur des agissements à l'égard de deux personnes morales distinctes, fussent elles du même groupe.  Et la lettre de licenciement au sein de la société Variscan Mines du 24 juillet 2019 ne fait nullement état de ses fonctions de mandataire social au sein d'autres entités du groupe.

Les circonstances de la révocation de ses fonctions de président au sein de la SASU Ariege Tungstene sont donc abusives par leur immédiateté et leur brutalité, le principe du contradictoire n'ayant pas été respecté à son égard en qualité de président de la société.

Les griefs portaient sur les mêmes faits que ceux à l'origine de son licenciement pour ne pas avoir respecté la politique de communication du groupe et avoir répondu à un entretien avec des journalistes sans en avoir obtenu l'autorisation préalable des dirigeants du groupe.

Il convient d'infirmer le jugement de ce chef.

Pour obtenir condamnation à des dommages-intérêts, il appartient à [S] [E] d'établir le préjudice qui en découle et dont il demande réparation. Il forme une demande forfaitaire au titre de son préjudice moral.

La SASU Ariège Tungstène dénonce le fait qu'il ne justifie pas de la réalité de son préjudice.

Force est de constater qu'il ne produit aucune pièce ni attestation justifiant du préjudice moral subi du seul fait des circonstances de sa révocation abusive. Si une révocation est vexatoire du seul fait de ne pas avoir pu s'expliquer devant l'associé unique de la société, le préjudice moral existe mais il est nécessairement réduit du seul fait des griefs à l'origine de son licenciement et de sa révocation face à un associé unique qui est également son employeur.

La cour lui alloue 1.000 euros de dommages-intérêts.

-sur les demandes accessoires :

La SASU Ariege Tungstene sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Eu égard à l'issue du litige et à la situation respective des parties, chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

-infirme le jugement

et statuant à nouveau

-dit que la révocation de [S] [E] de ses fonctions de président de la SASU Ariège Tungstène est vexatoire

-condamne la SASU Ariège Tungstène à verser à [S] [E] 1.000 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice moral.

-condamne la société SASU Ariège Tungstene aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

-dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/01228
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;21.01228 ?
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