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26/10/2022 | FRANCE | N°21/00698

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 26 octobre 2022, 21/00698


26/10/2022





ARRÊT N°368



N° RG 21/00698 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N7IV

IMM/CO



Décision déférée du 17 Décembre 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTAUBAN - 20/00288

M.REDON

















Organisme CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 4]





C/



S.A.S. AUCHAN HYPERMARCHE



































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Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT SIX OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



Organisme CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 4]

[Adresse 1]

[Localité 4]

...

26/10/2022

ARRÊT N°368

N° RG 21/00698 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N7IV

IMM/CO

Décision déférée du 17 Décembre 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTAUBAN - 20/00288

M.REDON

Organisme CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 4]

C/

S.A.S. AUCHAN HYPERMARCHE

confirmation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT SIX OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Organisme CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 4]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Olivier MASSOL de la SELARL MASSOL AVOCATS, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

assisté de Me Yvan DAUMIN de la SELARL DAUMIN COIRATON-DEMERCIERE - AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMEE

S.A.S. AUCHAN HYPERMARCHE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP DESSART-DEVIERS, avocat au barreau de TOULOUSE

assistée de Me PLANCKEEL Frédéric, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant V.SALMERON, présidente, I.MARTIN DE LA MOUTTE, Conseiller , chargée du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseiller

P. BALISTA, conseiller

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente et par C.OULIE , greffier de chambre.

Exposé des faits et procédure :

Selon bail commercial du 28 avril 2010, le Centre hospitalier de [Localité 4] a donné à bail à la société Auchan Hypermarché pour une durée de neuf années à compter du 1er mars 2010 un ensemble immobilier [Adresse 5].

Le préambule du bail précise qu'il est conclu dans le cadre d'une importante opération de transfert et d'extension de l'hypermarché existant et de sa galerie marchande et le preneur est ainsi autorisé à étendre la surface de vente jusqu'à 13.500 m2 et à édifier à ses frais, sur les lieux loués, toutes constructions ou adjonction de constructions nouvelles compatibles avec les réglementations en vigueur.

Ce bail est en outre assorti d'une promesse de renouvellement par laquelle le bailleur renonce à solliciter le déplafonnement et accepte que le loyer du bail renouvelé corresponde au loyer du bail initial majoré en fonction de l'indice Insee du coût de la construction.

Par exploit en date du 30 août 2018, la société Auchan a sollicité le renouvellement du bail pour une durée de 9 ans.

Par exploit du 30 août 2018, le CHU de [Localité 4] a accepté le renouvellement, sollicitant que le loyer du bail renouvelé soit fixé à la somme de 924.736, 85 € HT.

Par acte d'huissier de justice du 26 février 2020, la société Auchan Hypermarché a assigné le Centre hospitalier de [Localité 4] devant le tribunal judiciaire de Montauban, en contestation de la clause d'indexation insérée au bail et remboursement du trop versé ainsi qu'en fixation du montant du loyer renouvelé en application de la convention des parties.

Le Centre hospitalier a reconventionnellement demandé au tribunal de désigner un expert aux fins de déterminer la surface de vente et de donner son avis sur la valeur locative.

Par ordonnance du 29 septembre 2020, le juge de la mise en état a déclaré recevables devant le tribunal judiciaire les demandes des parties tendant à la fixation d'un loyer de renouvellement et par application de l'article 789 du code de procédure civile, a renvoyé devant le tribunal statuant au fond la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir du Centre hospitalier aux fins d'expertise de la valeur locative, l'affaire étant en état d'être clôturée et fixée.

Par jugement du 17 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Montauban a:

- dit réputée non écrite la clause d'indexation prévue au bail commercial du 28 avril - en conséquence, condamné le Centre hospitalier à restituer à la société Auchan Hypermarché la somme de 560.090,62 €, sous réserve du remboursement effectif de la somme de 143.825,22 € HT correspondant à l'erreur de calcul reconnue par le Centre hospitalier pour la période du 1er mars 2019 au 29 février 2020 à déduire, et ce avec les intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 1er août 2019,

- ordonné la capitalisation annuelle des intérêts,

- rejeté la fin de non-recevoir relative à la demande du centre hospitalier de [Localité 4] en fixation judiciaire du loyer de renouvellement,

- dit que le loyer de renouvellement au 1er mars 2019 est de 800.000€ HT par an,

débouté le Centre hospitalier de [Localité 4] de ses demandes,

- condamné le Centre hospitalier de [Localité 4] à payer à la société Auchan Hypermarché la somme de 6.000 € en application de l'article 700 du CPC

- condamné le Centre Hospitalier de [Localité 4] aux dépens,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration en date du 15 février 2021, le Centre Hospitalier de [Localité 4] a relevé appel du jugement. L'appel porte sur l'ensemble des chefs du jugement, que la déclaration d'appel critique tous expressément.

Le 16 juin 2021, la société Auchan a notifié des conclusions d'appel incident.

La clôture est intervenue le 9 mai 2022.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions notifiées le 15 mars 2022 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, du Centre Hospitalier de [Localité 4], demandant, au visa des articles L112-1 du code monétaire et financier, 122 du CPC, R145-23 et R145-30 du code de commerce, et 1134 ancien du code civil, de :

- infirmer le jugement dont appel, en ce qu'il a 'dit réputée non écrite la clause d'indexation prévue au bail commercial du 28 avril 2010, et en conséquence ;

-condamné le Centre hospitalier à restituer à la société Auchan Hypermarché la somme de 560.090,62 €, sous réserve du remboursement effectif de la somme de 143.825,22 € HT correspondant à l'erreur de calcul reconnue par le Centre hospitalier avec les intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 1er août 2019, et ordonné la capitalisation annuelle des intérêts ;

- et statuant à nouveau, déclarer que la clause d'indexation du loyer insérée dans le bail conclu entre le centre hospitalier de [Localité 4] et la société Auchan n'a pas créé de distorsion entre l'intervalle de variation indiciaire et la durée s'écoulant entre deux révisions du loyer ;

- déclarer que ladite clause d'indexation du loyer n'a pas méconnu les dispositions de l'article L112-1 alinéa 2 du code monétaire et financier ;

- en conséquence, déclarer que la clause d'indexation prévue au bail commercial du 28 avril 2010 est licite,

- rejeter la demande de la société Auchan Hypermarché de voir condamner le centre hospitalier à lui restituer la somme de 560.090,62 €, et ce avec les intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 1er août 2019,

- rejeter la demande de la société Auchan Hypermarché de voir ordonner la capitalisation annuelle des intérêts,

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir relative à la demande du centre hospitalier de [Localité 4] en fixation judiciaire du loyer de renouvellement,

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le loyer de renouvellement au 1er mars 2019 est de 800.000 € HT par an et débouté le Centre hospitalier de [Localité 4] de ses demandes,

- et statuant à nouveau, déclarer que la société Auchan a manqué à l'obligation contractuelle d'exécuter de bonne foi le bail en n'informant pas le Centre hospitalier des augmentations de surfaces réalisées,

- déclarer que la société Auchan a manqué à l'obligation contractuelle de respecter la destination du bail en créant des restaurants et une station-service,

en conséquence, déclarer qu'en application des stipulations contractuelles le loyer du bail renouvelé doit être déplafonné, et a minima, fixé en tenant compte de l'augmentation de surface réalisée par la société Auchan sans en informer le Centre hospitalier,

- désigner ainsi tel expert qu'il lui plaira avec pour mission notamment de mesurer les surfaces de vente et déterminer la valeur locative de l'ensemble des éléments objet du bail commercial conclu entre le centre hospitalier de [Localité 4] et la société Auchan Hypermarché à compter du 1er mars 2019, soit :

- entendre les parties en leurs explications,

se rendre sur les lieux loués, les décrire et les photographier, déterminer leur surface, - dire et justifier le cas échéant l'application d'un coefficient de pondération,

de déterminer la surface de vente de l'ensemble des constructions situées sur les parcelles soumises au bail conclu entre le centre hospitalier de [Localité 4] et la société Auchan,

- procéder à l'examen des faits allégués par les parties et à celui des éléments mentionnés aux articles L145-33, L145-34 et R145-2 et suivants du code de commerce,

- fournir tous éléments d'information permettant de déterminer si le montant du loyer du bail renouvelé est susceptible ou non de fixation à la valeur locative,

- donner son avis, en s'attachant aux prix du marché locatif et non aux seules références judiciaires, sur la valeur locative des lieux loués à la date de renouvellement du bail, soit le 1er mars 2019

au vu du rapport, fixer le loyer révisé à compter du 1er mars 2019 ;

- dans l'hypothèse où la surface de vente est comprise entre 11.501 et 13.500 m²,

- majorer le loyer d'un montant annuel de 60 € par m² supplémentaire de surface de vente et condamner la société Auchan Hypermarché à verser rétroactivement au centre hospitalier de [Localité 4] le montant du loyer majoré à compter de la date à laquelle la surface de vente a dépassé 11.501 m² ;

- dans l'hypothèse où la surface de vente est comprise entre 11.501 et 13.500 m², déclarer que la société Auchan a méconnu ses obligations issues du bail et, par conséquent, fixer le loyer révisé à compter du 1er mars 2019 en le déplafonnant

en tout état de cause,

- rejeter l'ensemble des demandes de la société Auchan ;

- condamner la société Auchan Hypermarché à verser au centre hospitalier de [Localité 4] la somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Auchan Hypermarché aux entiers dépens de l'instance et de ses suites, dont ceux distraits au profit de Me Olivier Massol sur son affirmation de droit.

Vu les conclusions notifiées le 5 mai 2022 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la Sas Auchan Hypermarché, demandant, au visa des articles L112-1 du code monétaire et financier, 1234, 1376, 1134, 1156 et 1162 anciens du code civil et 122 du code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement rendu le 17 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montauban en toutes ses dispositions, sauf à ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir de la société Auchan Hypermarché relative à la demande reconventionnelle du Centre Hospitalier de [Localité 4] de 'xation judiciaire du loyer de renouvellement,

- statuant à nouveau, déclarer irrecevables pour défaut de droit d'agir les demandes reconventionnelles du Centre Hospitalier de [Localité 4] de 'xation du loyer de renouvellement et d'expertise judiciaire,

- débouter le Centre Hospitalier de [Localité 4] de toutes ses demandes, fins et moyens, en ce compris son moyen nouveau concernant la prétendue violation de la destination du bail,

- à titre subsidiaire, si la clause d'indexation est jugée valable, dire et juger que le loyer du bail renouvelé à compter du 1er mars 2019, par application de la promesse de renouvellement stipulée dans le bail du 28 avril 2010, est de 923.035,95 € HT par an,

- en tout état de cause,

débouter le Centre hospitalier de [Localité 4] de toutes ses demandes, fins et moyens,

- condamner le Centre hospitalier de [Localité 4] à payer à la société Auchan

Hypermarché une indemnité de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de l'indemnité déjà allouée par le jugement du 17 décembre 2020,

le condamner aux entiers dépens d'appel.

Motifs:

- sur la clause d'indexation :

La société Auchan demande que cette clause soit réputée non écrite faisant valoir qu'elle permet la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision.

Aux termes de l'article L. 112-1, alinéa 2, du code monétaire et financier, « est

réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision ».

Cette disposition ne prohibe pas le recours à un indice de base fixe. Toutefois, l'indexation calculée sur cette base ne peut engendrer une distorsion entre l'intervalle de variation indiciaire et la durée s'écoulant entre deux révisions.

La sanction prévue au texte susvisé n'est applicable que lorsque la distorsion résulte de l'application de la clause et non de circonstances fortuites.

En l'espèce, et compte tenu de l'autorisation donnée au preneur d'étendre la surface de vente jusqu'à 13.500 m2, le montant du loyer annuel a été contractuellement fixé par paliers ainsi qu'il suit :

- à 600.000 € HT, TVA en sus, à compter du 1er mars 2010,

- puis à 726.000 € HT, TVA en sus à compter de l'ouverture au public de la surface de vente d'ores et déjà autorisée de 10.100 m2 et au plus tard le 1er octobre 2010.

Dans l'hypothèse ou la surface de vente autorisée serait comprise entre 10.101 m2 et 11.500 m2, les parties sont convenues que le loyer annuel sera porté immédiatement à 800.000 € hors taxes, TVA en sus, à la date d'ouverture au public dont il devra être justifiée par le preneur à bail.

Le bail prévoit que le loyer annuel des premières et deuxième années ne sera pas indexé et que le loyer sera indexé annuellement à partir du 1er mars 2013 en fonction de la variation de l'indice national du coût de la construction publié par l'INSEE, l'indice de référence étant le dernier publié à la date de prise d'effets du nouveau bail (en l'espèce, celui du troisième trimestre 2009, ci-après indice 3T 2009), et ultérieurement, l'indice du même trimestre de l'année de l'indexation.

Contrairement à ce que soutient la bailleresse, ces trois loyers de 600.000 €, 726.000 € et 800.000 € sont distincts et ne s'analysent pas comme la variation d'un loyer unique. Ils ne sont d'ailleurs pas le produit d'un prix au m2 commun et s'agissant du loyer de 800.000 €, son entrée en vigueur, conditionnée à l'obtention d'une autorisation administrative demeurait éventuelle lorsque le bail a été souscrit.

S'agissant de loyers autonomes, c'est bien leur date propre d'entrée en vigueur qui permet d'apprécier l'ampleur de la variation indiciaire.

Ainsi, la première indexation du 1er mars 2013 s'est réalisée, conformément à la clause d'indexation, en fonction des indices 3T 2009 et 3T 2012, correspondant à trois ans de variation indiciaire alors que le loyer de 726.000 € était en vigueur depuis le 1er octobre 2010, soit seulement 2 ans et 5 mois.

Le premier juge a retenu avec pertinence par des motifs que la cour fait siens que la même distorsion pouvait être constatée à l'occasion des indexations successives et qu'ainsi les loyers ont systématiquement été indexés sur la base d'une variation indiciaire calculée sur une période plus longue que la période locative écoulée.

Cette distorsion résulte bien de la clause d'indexation elle même qui fait référence à un indice de base unique et fixe, applicable à des loyers futurs, dont la date d'entrée en vigueur n'était pas connue lors de l'entrée en vigueur du bail et ce sont bien les termes de cette clause qui ont permis, outre la distorsion constatée lors de la première indexation ci-dessus décrite, que les loyers successifs de 726.000 € et 800.000 € soient indexés sur la base d'une variation de 4 trimestres alors qu'ils étaient en vigueur depuis moins d'un an.

Enfin, le seul constat de ce que l'application de la clause a pour effet d'engendrer une distorsion entre l'intervalle de variation indiciaire et la durée s'écoulant entre deux révisions suffit à justifier la sanction prévue au texte susvisé, sans qu'il y ait lieu d'établir une intention particulière de la part de la bailleresse. Il est donc inopérant pour le CHU appelant d'invoquer l'absence de fraude.

Le jugement doit donc être confirmé en ce que, faisant application des dispositions de l'article L. 112-1, alinéa 2, du code monétaire et financier, il a dit que la clause d'indexation insérée au bail devait être réputée non écrite et a condamné le bailleur à rembourser les sommes perçues par le bailleur au titre de l'indexation des loyers.

- sur la fixation du loyer de renouvellement :

Le bail contient en page 5 une clause dénommée ' promesse de renouvellement du bail' par laquelle 'le bailleur confère au preneur une promesse de renouvellement du bail commercial pour une durée de 9 ans à compter de l'expiration du bail. Afin d'exercer son option, le preneur devra faire connaître au bailleur son intention de le renouveler par acte d'huissier, six mois avant l'expiration du bail. Ainsi, le bailleur renonce à sa faculté de délivrer congé sans offre de renouvellement. Pour tenir compte des investissements réalisés par la société Auchan France, le bailleur accepte que le renouvellement s'opère sur la base du loyer déterminé ci-après' Loyer' majoré en fonction de l'indice INSEE de la construction. Le bailleur renonce, y compris au titre des constructions réalisées par le preneur sur le terrain, à demander lors du renouvellement, le déplafonnement du loyer, sauf violation des obligations et conditions du bail dont, notamment la destination du bail. Lors du renouvellement du bail, le bailleur renonce également à prendre en compte les constructions réalisées par le preneur en cours du présent bail pour la détermination de la valeur locative, l'accession des constructions réalisées par le preneur étant d'un commun accord entre les parties, différée à la fin du premier renouvellement'.

L'article 6 du bail dénommé 'majoration des surfaces de vente' prévoit en outre que 'les parties sont convenues de la possibilité pour Auchan sous réserve de l'obtention des autorisations administratives nécessaires, d'une augmentation limitée de la surface de vente de 11.501 à 13.500 m2 maximum. En contrepartie, le loyer annuel convenu sera majoré d'un montant annuel de 60 € par m2 supplémentaire de surface de vente, majoration elle même actualisée suivant l'évolution de l'indice INSEE du coût de la construction dans les mêmes conditions que le loyer de base, c'est à dire à compter de l'ouverture au public de l'extension. Au delà de 13.500 m2, les parties conviennent de renégocier le prix unitaire au m2 supplémentaire'.

La société Auchan demande qu'en application de l'article 5 du bail, le loyer du bail renouvelé soit fixé à la somme de 800.000 € correspondant au loyer en cours, sans les indexations qui avaient été calculées sur la base de la clause désormais réputée non écrite.

Le CHU soutient que la société Auchan a augmenté sa surface de vente sans l'en tenir informé, afin d'échapper aux stipulations contractuelles relatives à l'augmentation du loyer au delà de certaines surfaces et qu'elle a sous-loué une partie des surfaces louées à des entreprises exploitant une activité distincte, en violation de la destination des lieux loués. Elle estime que ces infractions justifient la fixation du loyer à la valeur locative puisque l'article 5 susvisé a expressément réservé l'hypothèse d'une violation des obligations et conditions du bail.

Contrairement à ce que soutient la société Auchan, la demande formée par le CHU tendant à l'organisation d'une mesure d'expertise afin de fixer le loyer du bail renouvelé à la valeur locative est recevable dès lors que la bailleresse a intérêt et qualité à agir et que sa demande présente un lien suffisant avec la demande principale.

L'existence d'une renonciation contractuelle au bénéfice de la fixation du loyer du bail renouvelé à la valeur locative, telle qu'elle est invoquée par la société preneuse, n'affecte pas la recevabilité de la demande reconventionnelle mais son bien fondé. Le premier juge doit donc être approuvé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de cette demande.

Il y a donc lieu de rechercher si le preneur a manqué à ses obligations.

Le premier juge a relevé à juste titre que les paliers de loyer ont été fixés en considération des éventuelles extensions de surfaces soumises à autorisation de la commission départementale et qu'ainsi, la majoration par m2 supplémentaires ne s'applique qu'à ces seules surfaces que les parties ont entendu prendre en considération. Il a ainsi retenu par des motifs pertinents que la cour fait siens que n'étant pas soumises à la réglementation des extensions de surfaces de vente des hypermarchés, la station de lavage, les deux restaurants aux enseignes ' Pizza del arte ' et 'Burger King' et le stand sous l'enseigne ' Save ' destiné à la réparation de téléphones mobiles, commerces situés en dehors de l'emprise du magasin Auchan et dédiés non à la vente de détail mais à des prestations de service, ne constituent pas des surfaces de vente au sens du bail et n'ouvraient pas droit à la majoration par m2 supplémentaire au delà de 11.500 m2.

La société preneuse justifie par la production d'une décision de la commission nationale ayant rejeté le 18 octobre 2018 le recours de la société preneuse contre un refus d'extension de la surface de vente pour l'implantation d'un magasin Fnac, que sa surface de vente est limitée à 11.500 m2 et n'a donc pas excédé le palier de 11.500 m2 à partir duquel devait s'appliquer la majoration de 60 € par m2 supplémentaires.

Le bail permet à la société preneuse de créer des surfaces supplémentaires sans autorisation et ne lui impose pas d'en informer la bailleresse.

Il en résulte que seules devaient être portées à la connaissance du CHU bailleur, les extensions de surfaces de vente soumises à autorisation, dès lors qu'excédant les paliers fixés au bail, elles avaient une incidence sur le prix du loyer.

En l'espèce, le palier de 11.500 m2 n'ayant pas été franchi, le preneur n'a nullement, contrairement à ce qui est soutenu par le bailleur, dissimulé la création de surface de vente de nature à justifier une augmentation du loyer.

Le CHU soutient également et pour la première fois devant la cour que la société preneuse n'a pas respecté la destination du bail en permettant l'implantation des deux restaurants et de la station de lavage.

La clause de destination précise que ' le preneur pourra utiliser les lieux loués à usage commercial pour l'exercice d'activités d'hypermarché, de galeries commerciales, de moyennes surfaces, de 'drive' ainsi que de toutes les activités définies à l'objet social de la société preneuse et annexé au présent bail'.

La société Auchan est bien fondée à relever que les activités de restaurant et de station lavage appartiennent traditionnellement à celles exploitées dans le cadre des 'galeries commerciales' et entrent ainsi dans le champ des activités définies au bail, de manière particulièrement large quand bien même, la mention 'tous commerces' n'a pas été utilisée par les parties.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce que, ayant retenu que le bailleur ne justifiait pas d'une violation des obligations et conditions du bail imputable au preneur, il n'était pas fondé, eu égard à sa renonciation expresse résultant de la clause'promesse de renouvellement', à solliciter le déplafonnement et la fixation du loyer du bail renouvelé à la valeur locative.

Il sera également confirmé, en ce que, après avoir constaté que la surface de vente actuelle, limitée à 11.160 m2, n'excède pas le palier de 11.500 m2 et a fortiori, le palier suivant de 13.500 m2, et rappelé que la clause d'indexation était réputée non écrite, il a retenu que le loyer de renouvellement au 1er mars 2019, correspondant au loyer en cours, était de 800.000 € HT.

Partie perdante en cause d'appel, le CHU de [Localité 4] supportera les dépens.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas qu'il soit fait application à son encontre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

y ajoutant,

Condamne le CHU aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu à nouvelle application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier La présidente

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/00698
Date de la décision : 26/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-26;21.00698 ?
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