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05/10/2022 | FRANCE | N°21/00628

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 05 octobre 2022, 21/00628


05/10/2022



ARRÊT N°347



N° RG 21/00628 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N67J

PB/CO



Décision déférée du 07 Décembre 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Toulouse ( 18/02796)

M.GUICHARD

















[K] [E]





C/



[S] [B]

S.A. BANQUE COURTOIS













confirmation























































Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU CINQ OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTE



Madame [K] [E]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Annabel DELANGLADE-DALMAYRAC de l'AARPI BLEUROI, a...

05/10/2022

ARRÊT N°347

N° RG 21/00628 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N67J

PB/CO

Décision déférée du 07 Décembre 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Toulouse ( 18/02796)

M.GUICHARD

[K] [E]

C/

[S] [B]

S.A. BANQUE COURTOIS

confirmation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU CINQ OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

Madame [K] [E]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Annabel DELANGLADE-DALMAYRAC de l'AARPI BLEUROI, avocat au barreau de TOULOUSE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 31555.2021.000895 du 25/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)

INTIMES

Monsieur [S] [B]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Jacques MONFERRAN de la SCP MONFERRAN-CARRIERE-ESPAGNO, avocat au barreau de TOULOUSE

assisté de Me Olivier MORINO de la SAS BDO AVOCATS ATLANTIQUE, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

S.A. BANQUE COURTOIS

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean-charles BOURRASSET de la SCP DUSAN-BOURRASSET-CERRI, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant P. BALISTA, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseiller

P. BALISTA, conseiller

Greffier, lors des débats : C. OULIE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par A.CAVAN, greffier de chambre

EXPOSE DU LITIGE

Les 3 et 4 août 2009, la Sa Banque Courtois a consenti à la Sarl Vs Locations un découvert en compte de 30000 € et un prêt professionnel de 86000 €, remboursable en 60 mensualités au taux de 4,35 % l'an.

Madame [K] [E] et Monsieur [S] [B] se sont portés caution solidaire du prêt de 86000 € à concurrence de 55900 € dans la limite de 50 % des encours du prêt incluant le principal, les intérêts, les commissions et les frais et accessoires.

Madame [K] [E] s'est portée caution solidaire des engagements de la Sarl Vs Locations à concurrence de la somme de 71500 €.

La société débitrice a été placée en redressement judiciaire le 17 janvier 2012 puis en liquidation judiciaire le 22 janvier 2013, suivant décision du tribunal de commerce de Pau.

La banque a déclaré sa créance.

Par actes en date des 24 et 25 juillet 2018, la Sa Banque Courtois a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Toulouse Madame [K] [E] et Monsieur [S] [B] en paiement des sommes dues en exécution de leurs engagements de caution.

Par jugement du 7 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

-dit que la déchéance du terme a été prononcée le 20 décembre 2011;

-dit que la prescription a couru jusqu'au 17 janvier 2012 date du jugement d'ouverture et qu'elle a été interrompue jusqu'à la date de clôture de la procédure ;

-dit en conséquence que l'action n'était pas prescrite à la date du 24 juillet 2018 ;

-dit en conséquence que l'action de la banque est recevable ;

-constaté que l'acte de caution de Madame [E] a été pris le 9 février 2007 postérieurement à l'ouverture du compte et antérieurement à l'autorisation de découvert du 4 août 2009 ;

-dit valable ce cautionnement et dit qu'il couvre les dettes futures afférentes audit compte ;

-constaté que la banque produit les conditions de la garantie Oseo paraphées par Madame [E] et dit qu'il en résulte que la banque n'a pas manqué à son devoir d'information ;

-débouté Madame [E] de sa demande en paiement de la somme de 24 804,78 € ;

-dit que la banque n'a pas à apporter la preuve de ce qu'elle s'est renseignée sur la situation de Madame [E], ni celle qu'au jour des poursuites elle posséderait un patrimoine lui permettant de faire face à ses engagements ;

-dit que la banque apporte la preuve du respect de son obligation d'information annuelle ;

-dit que la banque rapporte la preuve d'une créance certaine ;

-dit que la créance sur le second engagement est de 46415,08 € ;

-condamné Madame [E] à payer la somme de 24804,78 € au titre du solde du compte et l'a condamné solidairement avec Monsieur [B] à payer la somme de 23207,54 € avec sur la première somme l'intérêt légal à compter du 28 février 2018 et sur la seconde l'intérêt conventionnel de 4.35% à compter du 20 décembre 2011 ;

-ordonné l'exécution provisoire ;

-condamné in solidum [K] [E] et [S] [B] aux dépens et à payer la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-accordé à Madame [K] [E] un délai de grâce de 24 mois ;

-débouté Monsieur [S] [B] de sa demande de délais de grâce.

Par déclaration en date du 10 février 2021, Madame [K] [E] a relevé appel du jugement dont elle critique toutes les dispositions.

Dans ses conclusions notifiées le 29 avril 2021, auxquelles il est fait référence pour un énoncé complet de l'argumentaire, Madame [K] [E] a demandé à la cour de :

-déclarer l'appel de Madame [E] recevable et bien fondé;

-infirmer le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Toulouse en date du 7 décembre 2020 en toutes ses dispositions contraires aux présentes ;

-statuant à nouveau,

-à titre principal,

-juger prescrite et forclose l'action intentée par la Banque Courtois ;

-en conséquence, juger irrecevable son action à l'encontre de Madame [E] ;

-subsidiairement,

-juger que les actes de caution des 9 février 2007 et 29 juillet 2009 souscrits par Madame [E] étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus ;

-en conséquence, ordonner la décharge de la caution ;

-juger que l'acte de caution du 9 février 2007 pris par Madame [E] ne peut garantir le solde débiteur du compte courant de la société Vs Locations, dès lors que l'autorisation de découvert est postérieure audit acte ;

-en conséquence débouter la Banque Courtois de sa demande en paiement formée à l'encontre de Madame [E] d'un montant de 24804,78€ correspondant au solde débiteur du compte courant ;

-juger que la Banque Courtois a manqué à son obligation d'information précontractuelle concernant la garantie Oseo ;

-ordonner, en conséquence, la compensation entre la dette réclamée par la Banque Courtois au titre de l'engagement de caution du 29 juillet 2009, d'un montant de 23207,54 € et l'indemnisation de Madame [E] au titre de la perte de chance de ne pas contracter ;

-plus subsidiairement,

-juger que la Banque Courtois ne rapporte pas la preuve de l'information annuelle de la caution ;

-en conséquence ordonner la déchéance du droit aux intérêts de la banque ;

-en tout état de cause, condamner la Banque Courtois à payer à Madame [E] la somme de 2500 €, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, dont distraction au profit de Maitre Delanglade Dalmayrac :

-condamner la Banque Courtois aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, le tout avec distraction au profit de Maitre Delanglade Dalmayrac, en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées le 16 juillet 2021, auxquelles il est fait référence pour un exposé complet de l'argumentaire, Monsieur [S] [B] a demandé à la cour de :

-infirmer le jugement entrepris en toute ses dispositions ;

-juger prescrite l'action de la Banque Courtois ;

-subsidiairement,

-juger forclose l'action de la Banque Courtois ;

-subsidiairement,

-juger nul l'engagement de Monsieur [S] [B] ;

-subsidiairement,

-juger que la Banque Courtois a manqué à son obligation d'information annuelle de la caution ;

-juger que la Banque Courtois ne rapporte pas la preuve de sa créance et la débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de Monsieur [S] [B] ;

-subsidiairement,

-juger que la Banque Courtois ne peut prétendre à l'encontre de Monsieur [S] [B] au paiement d'une somme supérieure à 15909,40 € avec intérêt au taux légal ;

-encore plus subsidiairement,

-échelonner dans la limite de deux années le paiement des sommes dues, moyennant 23 versements de 750 € par mois et le solde à la 24ème mensualité, avec intérêts au taux légal ;

-condamner la société anonyme Banque Courtois à payer la somme de 4000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens ;

-dire que, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Maître Olivier Morino pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Par conclusions notifiées le 27 juillet 2021, auxquelles il est fait référence pour un exposé complet de l'argumentaire, la Sa Banque Courtois a demandé à la cour de :

-à titre principal : dire et juger que l'action de la Banque Courtois n'est pas prescrite, ni forclose, que l'engagement de cautionnement du 9 février 2007 est valable et couvre les dettes futures afférents au compte, que la Banque Courtois n'a pas manqué à son devoir d'information, que les engagements de cautions ne sont pas manifestement disproportionnés à la situation de Madame [E] au moment où ils ont été donnés, que la banque prouve avoir respecté son obligation d'information annuelle et que sa créance est certaine ;

-déclarer irrecevable la demande de nullité formée par Monsieur [S] [B], ou à tout le moins infondée et l'en débouter ;

-confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 décembre 2020 ;

-à titre subsidiaire, en ce qui concerne l'engagement de caution du 29 juillet 2009, et à supposer que la cour retienne un manquement à l'obligation d'information annuelle de la banque, condamner solidairement Madame [E] et Monsieur [B] à payer à la Banque Courtois, au titre de l'engagement de caution du 29 juillet 2009, la somme de 20703,80 €, assortie des intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 28 février 2018, date de la mise en demeure et jusqu'à parfait paiement ;

-confirmer le jugement pour le surplus ;

-à titre infiniment subsidiaire, et à supposer que la cour retienne une disproportion manifeste de l'engagement de caution du 29 juillet 2009 de Madame [E] ou un manquement au devoir d'information : condamner Monsieur [B] à payer à la Banque Courtois, au titre de l'engagement de caution du 29 juillet 2009, la somme de 20703,80 €, assortie des intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 28 février 2018, date de la mise en demeure et jusqu'à parfait paiement ;

-confirmer le jugement pour le surplus ;

-en toutes hypothèses et y ajoutant,

-condamner in solidum Madame [E] et Monsieur [B] à payer à la Banque Courtois la somme de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; les condamner in solidum à payer les dépens de la procédure d'appel.

La clôture est intervenue le 07 mars 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la prescription de l'action et de la demande en paiement de la banque

Le tribunal a jugé que l'action de la banque, soumise au délai quinquennal visé à l'article 2224 du Code civil, avait été interrompue par la déclaration de créance faite par le créancier dans la procédure collective ouverte au profit du débiteur principal, la société Vs Locations, et que cet effet interruptif s'était poursuivi jusqu'à la clôture de la procédure collective, intervenue pour insuffisance de l'actif, suivant jugement du 7 avril 2015.

Madame [K] [E] et Monsieur [S] [B] font valoir que cet effet n'a pu se prolonger jusqu'à la clôture de la procédure, la banque n'étant pas empêchée d'agir contre la caution, à la suite de la liquidation judiciaire de la société débitrice, en date du 22 janvier 2013, de sorte que l'action engagée les 24 et 25 juillet 2018 est irrecevable.

Au visa de l'article 2245 du Code civil, l'interpellation faite à l'un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d'exécution forcée ou la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, même contre leurs héritiers.

Au visa de l'article 2246 du même code, l'interpellation faite au débiteur principal ou sa reconnaissance interrompt le délai de prescription contre la caution.

La déclaration de créance au passif de la procédure collective ouverte au bénéfice du débiteur principal, qui équivaut à une demande en justice, interrompt la prescription à l'égard de la caution et cette interruption se prolonge jusqu'à la clôture de la procédure collective (Com., 23 octobre 2019, pourvoi n° 18-16.515).

En l'espèce, la Sa Banque Courtois a déclaré sa créance au passif de la Sarl Vs Locations le 23 mars 2012, ce dont elle justifie, interrompant la prescription vis à vis des cautions, et la clôture de la procédure collective n'est intervenue, pour insuffisance d'actif, que le 7 avril 2015.

L'action engagée par la Sa Banque Courtois en juillet 2018, moins de cinq ans après la clôture de la procédure collective, n'était en conséquence pas prescrite comme l'a jugé à bon droit le premier juge.

Les appelants font encore valoir, en appel, que les cautionnements étaient à durée limitée (7 ans et 10 ans) et que la Sa Banque Courtois était tenue d'engager son action dans le délai fixé par les cautionnements.

Le premier cautionnement a été souscrit le 09 février 2007 par Madame [K] [E] dans les termes suivants : « en me portant caution solidaire de la société Vs Locations dans la limite de 71500 € (') et pour la durée de 10 ans ».

Le second cautionnement a été souscrit le 29 juillet 2009 par Madame [K] [E] et Monsieur [S] [B] dans les termes suivants : « en me portant caution solidaire de la Sarl Vs Locations dans la limite de la somme de 55900 € (') et pour la durée de 7 ans ».

Les termes des cautionnements ne fixaient aucun délai au créancier pour agir en recouvrement de sa créance, la durée de dix ans évoquée étant relative à la durée de couverture des dettes de la société cautionnée et non à la durée maximale d'engagement de l'action par la banque.

Le moyen est inopérant.

Madame [E] fait également voir que le cautionnement signé le 9 février 2007 ne pouvait couvrir les dettes résultant de l'autorisation de découvert consentie le 4 août 2019 à la société cautionnée, postérieurement à son engagement de caution.

Comme l'a retenu à bon droit le tribunal, le cautionnement du 9 février 2017 portait, aux termes de l'acte, sur 'toutes les sommes, dans la limite du V des présentes (soit 71500 €) que le cautionné peut ou pourra devoir à la banque au titre de l'ensemble de ses engagements, sous quelque forme que ce soit'.

Ce cautionnement, de portée générale, incluait donc les dettes futures de la société et particulièrement le solde débiteur du compte de dépôt, ouvert avant le cautionnement et qui avait fait l'objet d'une autorisation de découvert, postérieurement à ce cautionnement.

Sur la disproportion manifeste des engagements de caution de Madame [K] [E]

Au visa de l'article L 341-4 du Code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Comme rappelé par le tribunal, lors du cautionnement souscrit en 2007, Madame [K] [E], marié sous un régime de séparation de biens, n'avait pas signé de fiche de renseignements sur son patrimoine de sorte qu'elle est admise à faire la preuve d'une disproportion manifeste.

La seule pièce qu'elle produit pour le faire est son avis d'impôts sur les revenus de 2007 qui mentionne : un salaire annuel pour elle de 22000 €, un salaire annuel pour le conjoint de 12807 €, des revenus annuels de capitaux mobiliers pour le couple de 25600 €.

Madame [K] [E] était également propriétaire de parts de la Sci Ty Ker, ce qu'elle ne conteste pas.

Le tribunal ne s'est pas fondé sur la fiche de renseignements signée en 2009 pour apprécier le patrimoine de l'appelante en 2007 mais a déduit de cette fiche que la Sci était propriétaire, en 2009, de trois appartements (T3, T4, T5) ainsi que d'un terrain, valorisés cette année là par la déclarante dans la fiche précitée à 870000 € dont à déduire le solde restant dû sur les prêts contractés pour l'acquisition, dont le montant n'était pas mentionné.

Madame [K] [E], sur qui repose la charge de la preuve de la disproportion, ne justifie par aucune pièce de la valorisation, en 2007, du patrimoine de la Sci dont elle détenait 20 % des parts, ni des charges de cette Sci à cette époque.

Elle ne démontre en conséquence pas la disproportion manifeste de son engagement, limité à la somme de 71500 €, et c'est à bon droit que le premier juge ne l'a pas retenu.

Concernant le cautionnement signé en 2009, Madame [K] [E] produit uniquement son avis d'impôts sur les revenus de 2009 duquel il ressort : un salaire annuel pour elle de 24333 €, un salaire annuel pour le conjoint de 12983 €, des revenus annuels de capitaux mobiliers pour le couple de 25600 €.

La fiche de renseignements signée par Madame [K] [E] et qui lui est donc opposable valorisait le patrimoine de la Sci, dont l'appelante détenait des parts, à 870000 €.

Le solde restant dû sur les prêts destinés aux acquisitions immobilières n'était pas précisé dans la fiche, étant uniquement mentionnés le montant annuel des échéances et une date de fin de prêt exprimée en année, sans que soit précisé par les cautions le mois de la dernière échéance.

Au vu de cette fiche incomplètement renseignée, l'encours déclaré des prêts était supérieur à 550200 € et inférieur à 597000 €, le patrimoine net déclaré pour la Sci étant compris dans une fourchette allant de 273000 € à 319800 €.

Madame [K] [E] et Monsieur [S] [B] n'ayant jamais mentionné dans la fiche qu'ils ont signée que d'autres personnes étaient titulaires de parts dans la Sci, la banque pouvait croire à un partage égalitaire des parts entre les cautions signataires de la fiche de renseignements, ce dont il résultait que le montant cumulé des cautionnements souscrits, soit 127400 €, n'excédait pas la moitié du seul patrimoine net de la Sci, sans même compter les revenus de la caution.

Par ailleurs, en tout état de cause, Madame [K] [E], à qui incombe la charge de la preuve, se doit de démontrer le caractère manifestement excessif du cautionnement signé en 2009.

Si elle justifie, dans le cadre de l'instance, n'être propriétaire que de 20 % des parts de la Sci en question, ce qui n'était pas mentionné dans la fiche, elle ne justifie par aucune pièce du prix d'acquisition des immeubles par la Sci, de leur valorisation.

C'est donc à bon droit que le tribunal n'a pas retenu la disproportion manifeste de l'engagement.

Sur la perte de garantie invoquée par Monsieur [S] [B] et la garantie Oseo

La cour ne retenant pas l'inopposabilité du cautionnement souscrit par Madame [K] [E], Monsieur [S] [B] ne peut invoquer une perte de garantie liée à la disparition de ce cautionnement et donc une erreur ayant vicié son consentement de ce chef.

Par ailleurs, comme retenu par le tribunal, Madame [K] [E] ne peut soutenir avoir été trompée par le caractère subsidiaire de la garantie Oseo alors que la caution avait connaissance des conditions générales de cette garantie, paraphées par ses soins, et qu'aux termes de ces conditions la garantie « ne bénéficie qu'à l'établissement intervenant » et est subordonnée à l'épuisement « de toutes les poursuites utiles » (articles 2 et 10 des CG).

Sur le défaut d'information annuel des cautions

Au visa de l'article L 313-22 du Code monétaire et financier, les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement.

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette. Cette disposition étant d'ordre public, les parties ne peuvent y renoncer par avance.

Est par ailleurs abusive une clause permettant à la banque de rapporter irréfragablement la preuve de l'exécution de son obligation d'information annuelle à l'égard de la caution par des documents qu'elle avait élaborés unilatéralement, et, le cas échéant, d'examiner, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, la valeur et la portée des éléments de preuve invoqués par la banque à titre de preuve de l'exécution de cette obligation (Com., 19 janvier 2022, pourvoi n° 20-13.719).

La banque ne peut donc invoquer les stipulations contractuelles selon lesquelles « la caution et la banque conviennent que la production du listage informatique récapitulant les destinataires de l'information, édité simultanément avec les lettres d'information, constitue la preuve de renvoi de la lettre adressée par courrier simple », en se référant à des documents établis unilatéralement.

Par ailleurs, en l'espèce, elle ne produit pas une copie des lettres d'information alors même que, comme le soutient la caution, la cour se doit de vérifier que le contenu de l'information est conforme aux prescriptions de l'article L 313-22 précité, ce qui ne peut se déduire de la seule production d'un listing informatique et des frais mentionnés sur les relevés de compte.

Il sera en conséquence prononcé, par voie d'infirmation, la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour le cautionnement souscrit le 29 juillet 2009.

Contrairement à ce que soutient un des appelants, cette déchéance n'a pas pour effet de rendre la créance incertaine.

La déchéance, comme soutenu par le banque, ne peut commencer qu'à compter du 01 avril suivant la conclusion du contrat de sorte que la créance s'établit comme suit :

-capital restant dû au 01 avril 2010 suivant tableau d'amortissement 76901,71 €

à déduire :

-mensualités ultérieures versées 28753,92 €

-versements pendant le RJ 6740,20 €

Montant exigible des cautions 41407,59 €

Dont 50 % aux termes du cautionnement Solde dû 20703,80 €.

Contrairement à ce que soutient la banque, la déchéance du droit aux intérêts contractuels affecte également le cautionnement «tous engagements» souscrit le 9 février 2007 dès lors que si la banque ne sollicite, au titre du solde débiteur du compte de dépôt, que des intérêts au taux légal à compter du 28 février 2018, elle le fait sur une somme en principal de 24804,78 € qui comprend elle même des intérêts à un taux conventionnel de 11,25 % l'an et divers frais prévus dans la convention portant autorisation de découvert signée par la société en liquidation judiciaire.

Il sera en conséquence prononcé, par voie d'infirmation, la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour le cautionnement souscrit le 9 février 2007.

La cour n'étant pas en mesure de déterminer le solde dû à ce titre par la caution, il sera, avant dire droit, enjoint à la banque de produire un décompte du compte de dépôt de la société Vs Locations, expurgé, depuis le 01 avril 2007, des intérêts et frais prélevés sur ce compte de dépôt.

Sur les délais de grâce

Monsieur [S] [B] n'ayant fait aucune proposition d'apurement, même partiel, de sa dette, et ce depuis la date de l'assignation en 2018, et n'ayant pas justifié du sort des ventes immobilières réalisées par la Sci pour apurer la situation, sa demande de délai de grâce a, à bon droit, été écartée par le tribunal.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens

Les demandes seront réservées dans l'attente de la production par la banque du décompte du compte de dépôt de la société Vs Locations expurgé des intérêts et frais.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant contradictoirement, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 7 décembre 2020 sauf en ce qu'il a :

-dit que la banque apporte la preuve du respect de son obligation d'information annuelle ;

-dit que la créance sur le second engagement est de 46415,08 € ;

-condamné Madame [E] à payer la somme de 24804,78 € au titre du solde du compte et l'a condamné solidairement avec Monsieur [B] à payer la somme de 23207,54 € avec sur la première somme l'intérêt légal à compter du 28 février 2018 et sur la seconde l'intérêt conventionnel de 4.35% à compter du 20 décembre 2011 ;

-condamné in solidum [K] [E] et [S] [B] aux dépens et à payer la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau,

Prononce à l'égard des cautions la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la Sa Banque Courtois, au titre des cautionnements des 9 février 2007 et 29 juillet 2009.

Condamne solidairement Madame [K] [E] et Monsieur [S] [B] à payer à la Sa Banque Courtois la somme de 20703,80 €, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, au titre du cautionnement du 29 juillet 2009.

Avant dire droit sur les demandes au titre du cautionnement du 9 février 2017, de l'article 700 du Code de procédure civile et des dépens,

Enjoint à la Sa Banque Courtois de produire un solde du compte de dépôt de la société Vs Locations, expurgé, depuis le 01 avril 2007, des intérêts et frais prélevés.

Renvoie l'examen de l'affaire à l'audience du 7 DECEMBRE 2022 à 14 Heures

Le greffier La présidente

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/00628
Date de la décision : 05/10/2022
Sens de l'arrêt : Renvoi

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-05;21.00628 ?
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