COUR D'APPEL DE TOULOUSE
Minute 2022/444
N° RG 22/00441 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O6IZ
O R D O N N A N C E
L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 09 Aout à 14H15
Nous , S.LECLERCQ,, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 06 JUILLET 2022 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu l'ordonnance rendue le 06 Août 2022 à 19H01 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :
[Y] [M]
né le 05 Décembre 1996 à TLEMCEN (ALGERIE) (13000)
de nationalité Algérienne
Vu l'appel formé le 08/08/2022 à 08 h 49 par courriel, par Me Florence GRAND, avocat au barreau de TOULOUSE;
A l'audience publique du 09/08/2022 à 09h15, assistée de M.TACHON lors des débats et K. MOKHTARI lors du prononcé, greffiers avons entendu :
[Y] [M]
assisté de Me Florence GRAND, avocat au barreau de TOULOUSE
qui a eu la parole en dernier ;
avec le concours de [G] [J], interprète, qui a prêté serment,
En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En présence de M.[D] représentant la PREFECTURE DE LA HAUTE-GARONNE ;
avons rendu l'ordonnance suivante :
[Y] [M], né le 5 décembre 1996 à Tlemcem (Algérie), est de nationalité algérienne.
Vu la décision de placement en rétention de l'autorité administrative concernant M. [M] prise le 3 août 2022 par le préfet de la Haute Garonne, notifiée le 4 août 2022 à 9 h 54, à sa levée d'écrou.
Vu la requête de M. [M] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative du 5 août 2022 réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention le 5 août 2022 à 14 h 31.
Vu la requête de l'autorité administrative du 5 août 2022 reçue et enregistrée le 5 août 2022 à 13 h 42 tendant à la prolongation de la rétention de M. [M] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de 28 jours.
Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse a ordonné la jonction des procédures, constaté leur régularité et ordonné la prolongation de la mesure de rétention pour une durée de 28 jours par ordonnance du 6 août 2022 à 19 h 01.
M. [M] a interjeté appel de cette décision, par courriel de son conseil reçu au greffe de la cour le 8 août 2022 à 8 h 49.
A l'appui de sa demande d'annulation de l'ordonnance entreprise et de mise en liberté, le conseil de M. [M] a principalement soutenu que :
- il n'est pas justifié de l'habilitation spéciale pour l'interrogation du fichier visabio et sa transmission ;
- la décision de placement en rétention administrative n'est pas suffisamment motivée.
À l'audience, Maître Florence Grand a repris oralement les termes de son recours et souligné que :
- absence d'habilitation visabio : au dossier, il y a la saisine des autorités consulaires en date du 3 août 2022, et cette saisine fait référence aux données issues de l'exploitation du fichier visabio le 12 juillet 2021. Ces données ont été transmises avec la lettre de saisine des autorités consulaires. Il n'est pas justifié d'une habilitation spéciale de la personne qui a interrogé le fichier et de celle qui a été destinataire du fichier ;
- sur la décision de placement en rétention administrative : la décision est insuffisamment motivée en ce qu'elle ne prend pas en considération le fait que le requérant souffre de problèmes de santé d'ordre psychiatrique. Il avait une obligation de soins. Il n'a pas de carte vitale. Il a besoin de soins. Ses problèmes psychiatriques n'ont pas été pris en considération par la préfecture.
Le préfet de la Haute Garonne, régulièrement représenté à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en s'en remettant a la motivation de celle-ci et en soulignant que :
- la saisine des autorités consulaires du 3 août 2022 est accompagnée de la fiche visabio établie le 12 juillet 2021. Ceci était nécessaires car M. [M] utilise plusieurs identités. Ceci est régulier.
- sur la motivation : Il a fait l'objet d'un SME qui a été révoqué pour non-respect de l'obligation de soins. Le préfet a procédé à l'évaluation de la situation personnelle de M. [M]. Il n'a pas respecté les mesures d'éloignement, n'a pas de passeport, ne justifie pas d'un domicile.
Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.
M. [M] qui a demandé à comparaître indique : "Je n'ai rien à ajouter."
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'appel :
L'appel est recevable pour avoir été interjeté dans les formes et les délais légaux.
Sur l'exception de nullité tenant à l'habilitation pour l'interrogation du fichier visabio et sa transmission :
La base de données relatives aux étrangers sollicitant la délivrance d'un visa en France, dite visabio, est prévue par les articles L 142-1 et R 142-1 et suivants du CESEDA.
En vertu de l'article R 142-4 du CESEDA, ont accès aux données à caractère personnel et aux informations enregistrées dans le traitement automatisé mentionné à l'article R. 142-1, à raison de leurs attributions et dans la limite du besoin d'en connaître :
2° Les agents des préfectures, y compris dans le cadre de la procédure d'évaluation prévue par l'article R. 221-11 du code de l'action sociale et des familles, et ceux chargés de l'application de la réglementation relative à la délivrance des titres de séjour, au traitement des demandes d'asile et à la préparation et à la mise en 'uvre des mesures d'éloignement individuellement désignés et spécialement habilités par le préfet.
En vertu de l'article R 142-6 du CESEDA, peuvent être destinataires des données à caractère personnel et des informations enregistrées dans le traitement mentionné à l'article R. 142-1, à raison de leurs attributions et dans la limite du besoin d'en connaître :
1° Les agents chargés du contrôle aux frontières de la police et de la gendarmerie nationales et des douanes, individuellement désignés et spécialement habilités par le chef de service dont ils relèvent.
En l'espèce, la demande de laisser-passer formée par le préfet de la Haute Garonne au consulat d'Algérie, concernant M. [Y] [M], faite le 3 août 2022, s'accompagne d'une identification biométrique par système visabio effectuée le 12 juillet 2021 par le ministère de l'intérieur, police judiciaire, dans le cadre d'une enquête d'identification effectuée par les agents de la police de l'air et des frontières de la Haute Garonne.
Aucun élément ne permet d'établir qu'une personne non habilitée a exploité ou s'est vu transmettre les données issues de la base visabio qui ont transité entre la police de l'air et des frontières et la préfecture.
En conséquence, l'exception de nullité de la procédure sera rejetée.
Sur la motivation du placement en rétention administrative :
Dans la décision de placement en rétention administrative du 3 août 2022, le préfet de la Haute Garonne indique que l'intéressé fait valoir qu'il est suivi psychologiquement au centre pénitentiaire de [Localité 1]. Cependant, il estime qu'aucun état de vulnérabilité ni situation de handicap n'est caractérisé tant au regard de ses déclarations, peu circonstanciées et évasives, qu'en l'absence de tout document probant versé à cet égard et susceptible de corroborer ses dires ; que si l'intéressé fait valoir qu'il est suivi psychologiquement au centre pénitentiaire de [Localité 1], cela ne fait pas obstacle à son placement en rétention administrative et que ses conditions de placement seront adaptées à sa situation.
M. [M] ne saurait alléguer de troubles psychiatriques alors que le juge d'application des peines du tribunal judiciaire de Caen a révoqué par jugement du 8 février 2022 un sursis avec mise à l'épreuve prononcé par le tribunal correctionnel de Caen le 24 décembre 2018 pour des faits d'agression sexuelle par une personne en état d'ivresse manifeste, de vol, usage illicite de stupéfiants commis le 20 décembre 2018 et rébellion commis le 21 décembre 2018.
Cette révocation est motivée par le non-respect de l'obligation de soins et commission d'une nouvelle infraction en se maintenant sur le territoire français en dépit d'une obligation de quitter le territoire.
La préfecture a donc exactement apprécié sa situation.
La décision querellée sera donc confirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,
Recevons l'appel ;
Confirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse le 6 août 2022 à 19 h 01,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de la Haute Garonne, service des étrangers, à [Y] [M], ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public.
LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE
K. MOKHTARI S.LECLERCQ.