COUR D'APPEL DE TOULOUSE
Minute 2022/366
N° RG 22/00363 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O4SQ
O R D O N N A N C E
L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 15 juillet 2022 à 10 h 30
Nous , C. ROUGER,, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu l'ordonnance rendue le 11 Juillet 2022 à 16H38 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant la prolongation du maintien au centre de rétention de :
[G] [I]
né le 16 Mars 1977 à [Localité 3] (ALGERIE) (99)
de nationalité Algérienne
Vu l'appel formé le 12 JUILLET 2022 à 14 h 10 par courriel, par Me Elodie BAYER, avocat au barreau de TOULOUSE;
A l'audience publique du 13 juillet 2022 à 9 h 30, assisté de , D. BARO, greffier,lors des débats, avons entendu:
[G] [I]
assisté de Me Elodie BAYER, avocat au barreau de TOULOUSE
qui a eu la parole en dernier
En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En présence de Mme [V] représentant la PREFECTURE DES PYRENEES ORIENTALES ;
avons rendu l'ordonnance suivante :
M.[I] [G], ressortissant algérien né le 16 mars 1977 à [Localité 3] (Algérie) qui serait arrivé sur le territoire français le 10 mai 2017 sous couvert d'un visa de court séjour, a sollicité son admission au bénéfice de l'asile le 14 septembre 2017. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile et sa demande de réexamen. L'intéressé a fait l'objet de deux mesures d'éloignement en 2018 et 2020. Il a été interpellé par les services de police aux frontières de [Localité 5] le 10 juin 2022 alors qu'il se trouvait au sein de la gare Sncf muni uniquement d'une attestation de demandeur d'asile expirée, de copies de son passeport algérien valide jusqu'en août 2025 mais dépourvu de tout document justifiant la régularité de sa situation administrative au regard du séjour en France et dans l'espace Schengen. Par arrêté du 11 juin 2022 le Préfet des Pyrénées Orientales l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de renvoi, l'a interdit de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, et dans l'attente de la décision de reconduite, l'a maintenu dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pendant 48 heures
M.[I] a saisi le tribunal administratif de Toulouse le 13 juin 2022 aux fins d'annulation de cet arrêté.
Par décision du 15 juin 2022 le tribunal administratif a rejeté sa requête.
Par requête du 12 juin 2022 le Préfet des Pyrénées Orientales a sollicité du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse la prolongation de la rétention. M.[I] a quant à lui saisi le même magistrat le 13 juin 2022 contestant l'arrêté de placement en rétention.
Par ordonnance du 13 juin 2022 à 15h23 le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de la rétention pour une durée de 28 jours. Cette décision a été confirmée par le magistrat délégué par le Premier président de la cour d'appel de Toulouse par ordonnance du 15 juin 2022 à15h, écartant toute erreur manifeste d'appréciation quant à l'état de vulnérabilité de l'intéressé et toute incompatibilité avec sa rétention, retenant pour le surplus l'absence de garantie de représentation effective propre à prévenir le risque de soustraction à la décision d'éloignement permettant d'ordonner une assignation à résidence.
Par requête du 10 juillet 2022 enregistrée au greffe à 11h23, le Préfet des Pyrénées Orientales a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de seconde prolongation de la mesure de rétention administrative pour une durée de trente jours maximum, exposant que par télécopie du 30 juin 2022 le greffe du centre de rétention administrative avait informé le Consul d'Algérie de la présentation de M.[G] [I] le mercredi 6 juillet 2022 au centre de rétention de [Localité 7] ; que par télécopie du 6 juillet 2022 le greffe du centre de rétention de [Localité 9] avait informé que suite à des problèmes d'escorteurs, la présentation pour audition consulaire comme prévue par le protocole était reportée au mercredi 13 juillet 2022 à 14h30 au centre de rétention de [Localité 7] et que dans ces conditions il ne serait pas à même de rendre effectif l'éloignement de l'intéressé avant l'expiration du délai initialement accordé, soit le 11 juillet 2022 à 15h23.
Par ordonnance du 11 juillet 2022 à 16h38 le juge des libertés et de la détention a prolongé le placement en rétention administrative de M.[G] [I] pour une durée maximale de trente jours à l'expiration du précédent délai de vingt-huit jours imparti par l'ordonnance du 13 juin 2022 confirmée par ordonnance de la cour d'appel de Toulouse du 15 juin 2022.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 12/07/2022 à 14h10, Me Elodie BAYER, avocat de M.[G] [I] a interjeté appel de cette décision pour le compte de son client, sollicitant l'infirmation de la décision entreprise et invoquant un défaut de diligence de l'administration, estimant qu'il aurait été aisé de faire reconnaître M.[I] alors que ce dernier devait déjà être reconduit en 2020, que le retard d'une semaine de l'audition de l'intéressé avec les services consulaires n'était pas justifié, et soutenant que la situation personnelle de M.[I] avait été insuffisamment examinée par les services préfectoraux alors que ce dernier fait l'objet d'une prise en charge psychiatrique sur le territoire, qu'il est actuellement confus, situation que sa rétention a nécessairement aggravée.
A l'audience du 13 juillet 2022 à 9h30 l'avocat de M.[I] a soutenu oralement les prétentions et moyens de son client au soutien de son appel, sollicitant l'infirmation de la décision de première instance, mettant en exergue le fait qu'en 2020 s'il n'y avait plus de vols en raison de la période Covid, il n'y avait pas de difficultés pour la validation de l'identité de l'intéressé, de sorte que la nécessité d'une audition à [Localité 7] n'est pas expliquée et que ne sont pas justifiées les conditions d'organisation de l'escorte. Elle en déduit l'absence de caractérisation suffisante des diligences de nature à justifier une seconde prolongation de la mesure de rétention. Concernant la situation de santé de M.[I] elle indique que ce dernier aurait dû être vu par un psychiatre au centre d'urgences psychiatriques de [Localité 5] le 20/07 prochain selon convocation produite et que M.[I] a du mal à supporter la rétention, soutenant que la question de la vulnérabilité se pose et que la demande de prolongation ne prend pas en compte son état.
La représentante de la Préfecture rappelle qu'il y a déjà eu plusieurs obligations de quitter le territoire français, que M.[I] a de nouveau été interpellé. Elle explique qu'au regard du lieu d'interpellation c'est le Consul d'Algérie de [Localité 4] qui est compétent pour l'examen de la situation de M.[I] et qu'en cette période estivale se pose un problème d'organisation de l'escorte devant initialement le conduire le 6/07 au centre de rétention de [Localité 7] pour son audition par le Consul d'Algérie, transport reporté au 13/07 faute d'effectifs suffisants. Elle relève qu'il n'y a pas de doute sur son identité puisqu'il disposait d'un passeport valide, ce qui devrait accélérer la délivrance du laissez-passer. En ce qui concerne l'état de santé elle indique que ce problème n'est pas récent et que l'intéressé n'est pas laissé à l'abandon compte tenu de l'unité médicale disponible sur place au centre de rétention et que rien à ce jour sur le plan médical ne s'oppose au maintien en rétention.
M.[I] indique qu'il demande d'abord la santé avant de pouvoir partir volontairement.
SUR CE,
L'appel diligenté dans les formes et délai légaux est recevable.
M.[I] s'est vu notifier le 25/02/2020 une obligation de quitter le territoire français sans délai, soit juste avant la période de confinement liée à la circulation du virus de la Covid 19, période sanitaire qui a entraîné l'interruption des vols notamment pour l'Algérie, lesquels n'ont repris que récemment, et qui a de surcroît suspendu pendant toute l'année 2020 et une partie de l'année 2021 les diligences des autorités consulaires des pays du Magreb, particulièrement de l'Algérie,qui ne procédaient plus à l'établissement de laissez-passer et corrélativement aux auditions de leurs présumés ressortissants.
M.[I] n'étant détenteur que d'une copie de son passeport et d'une attestation de demandeur d'asile périmée au moment de son interpellation en juin 2022, la délivrance d'un laissez-passer consulaire par les autorités consulaires d'Algérie constitue le préalable nécessaire à l'organisation de la mesure d'éloignement en application du protocole d'accord de coopération entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire en date des 27 et 28/04/1994, de sorte qu'il ne peut être reproché à l'administration française d'avoir accompli des démarches en ce sens auprès du Consul de [Localité 4] territorialement compétent au regard du lieu d'interpellation, à savoir [Localité 5], le 30 juin 2022 après avoir initialement saisi le Consul d'Algérie à [Localité 9] le 12/06/2022.
L'audition consulaire était initialement fixée pour trois retenus du centre de rétention de [Localité 9] au centre de rétention de [Localité 7] le 6/07/2022 à 14h30. En raison d'un problème d'escorteurs dû aux multiples présentations au centre de rétention de [Localité 7] et éloignements, le 6/07/2022 le major de police en charge de l'unité de greffe et de routing, chef du greffe du centre de rétention de [Localité 9] [Localité 1], a avisé tant les autorités chargées du suivi de la procédure d'éloignement que les autorités consulaires de [Localité 4] du report de l'audition au 13/07/2022 à 14h30. La difficulté d'organisation des escortes en période estivale liée à l'état variable des demandes de transfert et au nombre de transferts à opérer sur une même journée en des lieux différents constitue une circonstance de nature à justifier un report d'audition, aucun défaut de diligence de l'administration ne pouvant résulter de ce report de nature à affecter le bien fondé de la demande de seconde prolongation de la mesure de rétention.
S'agissant de l'état de santé de M.[I], s'il ressort de son audition du 10 juin 2022 qu'il serait arrivé en France en 2017, initialement comme touriste, pour finalement rester à Perpignan pour se faire soigner, ce qui a justifié sa demande d'asile, demande définitivement rejetée, s'il a indiqué qu'il bénéficiait d'une ordonnance médicale en cours délivrée le 25/05/2022 par le docteur [D], psychiatre du centre hospitalier [2] à [Localité 8] et qu'il était suivi à [Localité 6] pour des problèmes d'estomac, et s'il a produit au magistrat délégué par le Premier président de la cour d'appel lors de la précédente instance sur première prolongation un certificat médical indiquant qu'il souffrait « d'un trouble anxieux dépressif avec raptus anxieux pour lesquels un traitement à base d'antidépresseur et anxiolytique dont l'arrêt pouvait entraîner des conséquences sévères sur son état de santé », il a déjà été retenu par l'ordonnance du 15 juin 2022 que M.[I] bénéficiait au sein du centre de rétention d'un suivi lui donnant accès aux soins et aux prescriptions médicamenteuses, qu'aucune erreur manifeste d'appréciation quant à l'état de vulnérabilité n'était caractérisée ni qu'était démontré, en l'absence de production d'élément de preuve médicale en ce sens, un état incompatible avec la rétention. Il n'est pas davantage produit à ce jour de preuve médicale de nature à établir objectivement un état de vulnérabilité ou d'incompatibilité de la mesure de rétention avec l'état de santé de l'intéressé, la simple justification d'un rendez-vous prévu pour le 20 juillet prochain avec un psychiatre du centre d'urgences psychiatrique de [Localité 5] étant sur ce point insuffisante, alors que M.[I] est en mesure de suivre ses prescriptions médicales en rétention tout comme d'obtenir au sein de l'unité médicale du centre de rétention toute prescription qui s'avérerait nécessaire.
Compte tenu des formalités à accomplir par le Consulat d'Algérie avant la délivrance du laissez-passer nécessaire à l'exécution de la mesure d'éloignement, en l'absence de toute irrégularité de la procédure et en l'absence de garanties suffisantes de représentation, le premier juge a justement prolongé la rétention administrative dont fait l'objet M.[I] [G] pour une durée supplémentaire de trente jours maximum.
PAR CES MOTIFS :
Statuant, au terme de débats tenus publiquement, par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties ;
Déclarons l'appel recevable mais mal fondé
Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse du 11 juillet 2022 par laquelle le premier juge a prolongé le placement en rétention administrative de M.[I] [G] pour une durée maximale de trente jours à l'expiration du précédent délai de vingt-huit jours imparti par l'ordonnance du 13 juin 2022 confirmée par ordonnance de la cour d'appel de Toulouse du 15 juin 2022
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la PREFECTURE DES PYRENEES ORIENTALES, service des étrangers, à [G] [I], ainsi qu'à son conseil et communiquée au Ministère Public.
LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE
C. GIRAUDC. ROUGER.