COUR D'APPEL DE TOULOUSE
Minute 22/353
N° RG 22/00348 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O4H3
O R D O N N A N C E
L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 11 juillet 2022 à 10h30
Nous F. CROISILLE-CABROL, Conseiller, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 modifiée par ordonnance du 4 juillet 2022 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu l'ordonnance rendue le 07 Juillet 2022 à 16H26 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant la prolongation du maintien au centre de rétention de :
X SE DISANT [T] [B]
né le 18 Mars 1984 à [Localité 3] (MAROC)
de nationalité Marocaine
Vu l'appel formé le 08/07/2022 à 11 h 36 par courriel, par Me Marie DUPEYRON, avocat au barreau de TOULOUSE;
A l'audience publique du 8 juillet 2022 à 15h00, assisté de C. GIRAUD, directrice des services de greffe, lors des débats et de I. ANGER, greffier, lors de la mise à disposition, avons entendu :
X SE DISANT [T] [B]
assisté de Me Marie DUPEYRON, avocat au barreau de TOULOUSE, substituée par Me DEMOURANT, avocat au barreau de TOULOUSE ;
qui a eu la parole en dernier
avec le concours de [P] [Y], interprète,
En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En présence de M. [Z] représentant la PREFECTURE DU LOT ET GARONNE ;
avons rendu l'ordonnance suivante :
M. X se disant [B] [T], de nationalité marocaine, a été interpellé le 4 juillet 2022 à [Localité 4] pour des faits de vol aggravé.
Il a été fait l'objet d'un arrêté du 4 juillet 2022 du préfet du Lot-et-Garonne portant obligation de quitter le territoire français sans délai.
Il a été placé en rétention administrative suivant décision préfectorale du 4 juillet 2022.
Par requête du 6 juillet 2022, le préfet a sollicité la prolongation pour une durée de 28 jours de son placement en rétention.
Par ordonnance du 7 juillet 2022 rendue à 16h26, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse a rejeté les moyens de M. X se disant [B] [T], rejeté la demande d'assignation à résidence et ordonné la prolongation pour une durée de 28 jours de la rétention.
M. X se disant [B] [T] en a interjeté appel le 8 juillet 2022 à 11h36.
Il soutient que :
- la procédure est irrégulière faute d'interprète pendant la garde à vue et de notification des droits par un formulaire en langue arabe ;
- la décision du préfet de placement en rétention administrative est irrégulière car insuffisamment motivée en fait et en droit concernant la vulnérabilité de M. X se disant [B] [T], ayant un suivi médical en France, et le fait que le préfet n'en ait pas tenu compte caractérise une erreur manifeste d'appréciation ;
- il a des garanties de représentation (hébergement par sa cousine).
Il demande la réformation de l'ordonnance, et sa remise en liberté ou à défaut une assignation à résidence.
Dans son mémoire, le préfet du Lot-et-Garonne sollicite la confirmation de la décision entreprise en soulignant que :
- la compréhension du français par M. X se disant [B] [T] a été vérifiée par les services de gendarmerie ; il a signé les procès-verbaux sans réserves ;
- il a été tenu compte de l'état de vulnérabilité de l'intéressé ; aucun élément médical ne s'oppose à son placement en rétention administrative ;
- la requête a été motivée ;
- il n'a pas de garanties de représentation.
MOTIVATION :
L'appel est recevable pour avoir été interjeté dans les formes et les délais légaux.
Sur l'interprète :
Pendant la garde à vue, M. X se disant [B] [T] n'a effectivement pas bénéficié d'un interprète. En effet, lors du procès-verbal d'audition du 4 juillet 2022, les gendarmes indiquaient avoir vérifié auprès de M. X se disant [B] [T] son niveau de compréhension du français et sa capacité à s'exprimer sans le truchement d'un interprète ; arrivé en France en 2011, il disait parler français. Il a répondu aux questions des enquêteurs de manière détaillée, ne se contentant pas de réponses oui/non ; il a signé ses procès-verbaux d'audition sans émettre de réserves. Le fait que l'administration ait demandé l'assistance d'un interprète en langue arabe pour les notifications liées à son statut d'étranger sans titre (obligation de quitter le territoire français, placement en rétention administrative, droits en matière d'asile etc) s'expliquait par la complexité des procédures et par le souci de l'administration qu'il comprenne bien ses droits, mais ne signifiait pas que M. X se disant [B] [T] ne comprenait pas suffisamment le français pour s'expliquer sur les faits en garde à vue.
Le moyen sera donc écarté.
Sur la motivation de la requête au regard de la vulnérabilité et l'erreur manifeste d'appréciation :
L'article L 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que la décision de placement en rétention administrative prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.
M. X se disant [B] [T] produit des pièces médicales datant de 2011 et 2014 relatives à un ulcère et à un suivi psychologique, dont on ignore si elles sont toujours d'actualité. Lors de son audition en garde à vue, il disait avoir été opéré pour un ulcère à l'estomac il y a 4 ans, sans prétendre qu'il était toujours traité pour cet ulcère ; il disait être sous méthadone, et une ordonnance de prescription lui a été délivrée par le médecin en garde à vue, lequel n'a relevé ni trouble mental ni lésion traumatique visible récente. L'arrêté de placement en rétention administrative visait la prise de méthadone, estimant que cela ne faisait pas obstacle à la rétention.
La décision était ainsi motivée et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur le maintien en rétention administrative et l'assignation à résidence :
L'article L 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ.
L'article L 743-13 permet au juge d'ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original de son passeport et de tout document justificatif d'identité.
En l'espèce, l'appelant n'a pas remis à un service de police ou de gendarmerie un passeport en cours de validité, puisqu'il indique que son passeport est chez son frère.
Il ne justifie pas non plus d'une résidence effective certaine et stable en France :
- en garde à vue il se disait domicilié chez un ami, [X], au [Adresse 1] ;
- à l'audience, il se dit domicilié chez son frère, [N], au [Adresse 2] ;
- dans son mémoire d'appel, il se dit domicilié chez sa cousine Mme [K], sans préciser son adresse.
Dans ces conditions, faute de garanties de représentation, ses demandes de remise en liberté et d'assignation à résidence doivent être rejetées et l'ordonnance du juge des libertés et de la détention confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant, au terme de débats tenus publiquement, par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties ;
Déclarons l'appel recevable ;
Au fond, CONFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de TOULOUSE le 07 Juillet 2022;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la PREFECTURE DU LOT ET GARONNE, service des étrangers, à X SE DISANT [T] [B], ainsi qu'à son conseil et communiquée au Ministère Public.
LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE
I. ANGER F. CROISILLE-CABROL, Conseiller