COUR D'APPEL DE TOULOUSE
Minute 2022/344
N° RG 22/00341 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O4AE
O R D O N N A N C E
L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 07 juillet à 08h45
Nous A. DUBOIS, Président de chambre, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu l'ordonnance rendue le 04 Juillet 2022 à 16H42 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :
[T] [R]
né le 21 Octobre 1995 à CATAGENA (ESPAGNE) (99)
de nationalité Espagnole
Vu l'appel formé le 05/07/2022 à 16 h 29 par télécopie, par Me Amadou NJIMBAM, avocat au barreau de TOULOUSE;
Vu les procès-verbaux relatifs aux opérations techniques portant sur l'audience en visio-conférence, établis le 06 Juillet 2022 par le greffier du Centre de Rétention Administrative de [Localité 2] et le greffier de la Cour d'appel de Toulouse ;
A l'audience publique du 06/07/2022, assistée de K. MOKHTARI avons entendu:
[T] [R]
assisté de Me Amadou NJIMBAM, avocat au barreau de TOULOUSE
qui a eu la parole en dernier
avec le concours de [L] [M], interprète,
En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En présence de M.[O] représentant la PREFECTURE DE LA HAUTE-GARONNE ;
avons rendu l'ordonnance suivante :
[T] [R], de nationalité marocaine, a fait l'objet d'un arrêté du préfet de Haute Garonne portant obligation de quitter le territoire français le 2 juillet 2022.
Il a été placé en rétention administrative suivant décision préfectorale du 2 juillet 2022.
Par requête du 3 juillet 2022, le préfet a sollicité la prolongation pour une durée de 28 jours de son placement en rétention, lequel a été contesté par [T] [R] par requête du 4 juillet 2022.
Par ordonnance du 4 juillet 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse a joint les procédures, rejeté l'exception de procédure, déclaré régulière la décision de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation pour une durée de 28 jours de la rétention de [T] [R].
Ce dernier en a interjeté appel par courrier de son conseil reçu au greffe de la cour le 5 juillet 2022 à 16 h 29.
Il soutient par la voie de son avocat, à l'appui de ses demandes principales d'infirmation de l'ordonnance et de remise en liberté, que :
- les informations prévues par l'article L813-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent figurer dans un procès-verbal de clôture de la procédure de retenue et non de manière éparse et que le certificat médical doit y être joint,
- l'arrêté de placement en rétention est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation faute de prise en compte de l'existence de sa famille en France et de son cousin qui l'héberge.
Subsidiairement, il sollicite le bénéfice de l'assignation à résidence.
A l'audience, il a précisé qu'il veut repartir en Espagne où il a toute sa famille et qu'il ne comprend pas pourquoi il devrait être éloigné vers le Maroc.
Le préfet de Haute Garonne, représenté à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en soulignant qu'aucun texte n'impose l'établissement du procès-verbal de clôture évoqué par l'étanger, que l'arêté de placement en rétention administrative est suffisamment motivé au regard des éléments d'information communiqué au préfet lorsqu'il a pris sa décision et enfin que l'assignation à résidence ne peut être prononcée faute pour l'appelant de justifier d'une résidence stable et effective au sens du du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observation.
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MOTIVATION :
L'appel est recevable pour avoir été interjeté dans les formes et les délais légaux.
Sur la contestation de la retenue
Selon l'article 813-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, un agent de police judiciaire mentionne, dans un procès-verbal, les motifs qui ont justifié le contrôle, ainsi que la vérification du droit de circulation ou de séjour et les conditions dans lesquelles la personne a été présentée devant lui, informée de ses droits et mise en mesure de les exercer. Il précise le jour et l'heure du début et de la fin de la retenue et la durée de celle-ci et, le cas échéant, la prise d'empreintes digitales ou de photographies ainsi que l'inspection visuelle ou la fouille des bagages et effets personnels et les dates et heures de début et de fin de ces opérations. Il y annexe le certificat médical établi à l'issue de l'examen éventuellement pratiqué.
Ce procès-verbal est présenté à la signature de l'étranger intéressé qui est informé de la possibilité de ne pas le signer. S'il refuse de le signer, mention est faite du refus et des motifs de celui-ci.
Le procès-verbal est transmis au procureur de la République, copie en ayant été remise à la personne intéressée. Les mentions de chaque procès-verbal concernant l'identité de la personne, le jour et l'heure du début et de la fin de la retenue et la durée de celle-ci figurent également sur un registre spécial, tenu à cet effet dans le local de police ou de gendarmerie. Ce registre peut être tenu sous forme dématérialisée.
En l'espèce, contrairement à la thèse de l'appelant et comme valablement retenu par le premier juge dont la cour s'approprie les motifs, le procès-verbal dressé les 1er et 2 juillet 2022, au demeurant signé par l'étranger, comporte l'ensemble des informations exigées par le texte. Il contient également le certificat médical établi par le Dr [V] ayant examiné l'intéressé.
Le moyen tenant à la nullité de la procédure doit donc être écarté.
Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention administrative
En application de l'article L741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.
Aux termes de l'article L612-3 le risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.
En l'espèce la décision de placement en rétention cite les textes applicables à la situation de [T] [R] et énonce les circonstances de fait qui justifient l'application des ces dispositions.
Elle précise en effet notamment que l'intéressé n'a pas de ressources ni de billet de transport pour exécuter la mesure, qu'il n'a pas de visa sur son passeport, qu'il n'a effectué aucune démarche de régularisation, qu'il n'a pas de résidence effective sur le territoire, qu'il est recherché par les autorités de police espagnole, qu'il ne présente pas d'état de vulnérabilité même s'il fait état d'hémorroïdes et de maux de dos et n'est pas accompagné d'un enfant mineur.
Le préfet n'est pas tenu de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'étranger dès lors que les motifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention au regard des critères légaux, étant souligné que les circonstances doivent être appréciées au vu des éléments dont il disposait au jour de sa décision.
Dans la mesure où l'appelant a précisé qu'il avait toute sa famille en Espagne et voulait y retourner car il y est né et y vit depuis toujours, il importe peu que l'arrêté critiqué ne mentionne pas l'existence de tante et cousins en France, d'autant que l'étranger s'est contredit en déclarant aux gendarmes qu'il logeait chez son cousin à Montpellier, puis dans sa requête en contestation du placement en rétention administrative qu'il pouvait être hébergé par un ami qu'il visitait et enfin devant la cour d'appel qu'il pourrait être hébergé par une cousine résidant à [Localité 1].
L'arrêté préfectoral querellé comporte ainsi les motifs de droit et de fait suffisants et le grief tiré d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
Et [T] [R] a pu être regardé comme ne présentant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire dès lors qu'il n'a pas de visa sur son passeport, qu'il n'a pas de résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale, l'attestation qu'il produit devant la cour étant inopérante à cet égard, et qu'il est recherché par les autorités espagnoles.
C'est donc sans méconnaître le principe de proportionnalité et de nécessité et en procédant à un examen de la situation de l'étranger que la décision de placement en rétention a été prise.
Sur la prolongation de la rétention
En application de l'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.
En l'espèce, l'appelant ne conteste pas les démarches entreprises par l'administration pour exécuter la décision d'éloignement.
Sur l'assignation à résidence :
Aux termes de l'article L 743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.
L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.
En l'espèce, la demande de l'appelant, qui soutient avoir sa vie en Espagne où il vit depuis sa naissance, aux fins de bénéficier d'une assignation à résidence doit être rejetée, étant souligné que l'attestation d'hébergement qu'il fournit aujourd'hui est insuffisante à démontrer qu'il justifie d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale sur le territoire français.
La décision déférée sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.
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PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,
Confirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Toulouse le 4 juillet 2022,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de Haute Garonne, à [T] [R] ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public.
LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE
K. MOKHTARI A. DUBOIS Président de chambre