COUR D'APPEL DE TOULOUSE
Minute 2022/327
N° RG 22/00324 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O3XY
O R D O N N A N C E
L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 01 juillet à 15h40
Nous A. MAFFRE, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu l'ordonnance rendue le 29 Juin 2022 à 16H10 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :
[X] [H] [O]
né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 4] (POLOGNE) (99)
de nationalité Polonaise
Vu l'appel formé le 30/06/2022 à 16 h 04 par télécopie, par Me Stéphane SOULAS, avocat au barreau de TOULOUSE;
A l'audience publique du 01/07/2022 à 10h30, assisté de K. MOKHTARI avons entendu:
[X] [H] [O]
assisté de Me [J] sous tutorat de Stéphane SOULAS, avocat au barreau de TOULOUSE
qui a eu la parole en dernier
En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En présence de M.[U] représentant la PREFECTURE DE L'ALLIER ;
avons rendu l'ordonnance suivante :
M. [X] [O], âgé de 50 ans et de nationalité polonaise, a été interpellé le 26 juin 2022 à 18h35 à [Localité 3] (03) et a été placé en garde à vue le à 20h10 pour maintien irrégulier sur le territoire français.
M. [O] avait fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et avec interdiction de retour pendant 3 ans pris par le préfet de l'Orne le 14 mai 2020 et notifié le 15 mai 2020.
Le 27 juin 2022, le préfet de l'Allier a pris à son encontre une décision de placement en rétention administrative, notifiée le même jour à 15h45 à l'issue de la garde à vue.
M. [O] a été conduit au centre de rétention administrative de [Localité 2] (31) en exécution de cette décision.
Indiquant n'avoir pu l'éloigner dans le délai de rétention initial de quarante huit heures, le préfet de l'Allier a sollicité du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse, la prolongation du maintien de M. [X] [O] en rétention pour une durée de vingt huit jours suivant requête du 28 juin 2022 parvenue au greffe du tribunal le même jour à 14h12.
Ce magistrat a déclaré la procédure régulière et ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du 29 juin 2022 à 16h10.
M. [X] [O] a interjeté appel de cette décision, par courriel de son conseil adressé au greffe de la cour le 30 juin 2022 à 16h04.
A l'appui de sa demande d'infirmation de l'ordonnance entreprise et de mise en liberté, le conseil de M. [X] [O] a principalement soutenu, sur l'information tardive du procureur de la République, qu'il a été contrôlé à 18h35 et placé en garde à vue à 20h10 et le procureur de la République a été informé deux heures plus tard, à 20h35, en violation de l'article 63 du code de procédure pénale, et cette irrégularité lui fait nécessairement grief.
À l'audience, Maître Soulas a repris oralement les termes de son recours et souligné que la décision de placement en garde à vue a été prise dès 18h45 et que rien n'empêchait l'OPJ décisionnaire d'en aviser immédiatement le procureur de la République.
M. [O], dont la comparution a été demandée par son conseil, a indiqué ne pas avoir de démarche en ce sens mais néanmoins maintenir l'appel interjeté par son conseil, et ne s'est pas davantage exprimé.
Le préfet de l'Allier, régulièrement représenté à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en s'en remettant à la motivation de celle-ci et à l'appréciation de la cour.
Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Selon les dispositions de l'article 63 I du code de procédure pénale, seul un officier de police judiciaire peut, d'office ou sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à vue et dès le début de la mesure, l'officier de police judiciaire informe le procureur de la République, par tout moyen, du placement de la personne en garde à vue.
Au cas d'espèce, Il ressort du dossier que le procureur de la République a été informé de la mesure de garde à vue en cours 25 minutes après sa notification à M. [O].
Cependant, il résulte des mentions du procès-verbal d'interpellation que, contrôlé à 18h35, M. [O] a présenté des documents administratifs semblant faux et s'est révélé inscrit au fichier des personnes recherchées : les APJ indiquent avoir, à 18h45, rendu compte de ces éléments à l'OPJ de permanence de leur unité, M. [S], et que "M. [O] est placé en garde à vue à effet rétroactif à compter de 18 h35 pour maintien irrégulier sur le territoire français".
La décision de placement en garde à vue a donc été prise à 18h45, et le procureur de la République devait être informé dès cette décision, peu important que sa notification à l'intéressé ait été différée du fait des circonstances particulières relevées par le juge des libertés et de la détention.
Il en découle que l'information du placement en garde à vue donnée à 20h35, 1h50 après qu'il a été décidé, ne respecte pas la prescription légale d'une information "dès le début de la mesure".
Partant, la mesure de garde à vue doit être considérée comme irrégulière, ce qui entache la procédure qui a suivi et la mesure de rétention administrative prise à son issue d'irrégularité.
La décision déférée doit donc être infirmée en toutes ses dispositions et la mise en liberté de l'appelant, ordonnée.
PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,
Infirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse le 29 juin 2022,
Ordonnons la mainlevée de la mesure de maintien en rétention sans délai de M. [X] [O],
Rappelons à M. [X] [O] qu'il a l'obligation de quitter le territoire français,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de l'Allier, service des étrangers, à M. [X] [O], ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGUÉ
K. MOKHTARI A. MAFFRE