COUR D'APPEL DE TOULOUSE
Minute 2022/300
N° RG 22/00297 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O3JZ
O R D O N N A N C E
L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 27 juin à 09h00
Nous A. MAFFRE, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu l'ordonnance rendue le 23 Juin 2022 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :
[N] [B]
né le 12 Avril 1999 à [Localité 3]
de nationalité Algérienne
Vu l'appel formé le 24/06/2022 à 13 h 01 par télécopie, par Me Téta AGBE, avocat au barreau de TOULOUSE;
A l'audience publique du 24/06/2022 à 15h30, assisté de C.GIRAUD directrice des greffes lors des débats et K. MOKHTARI greffier lors de la mise à disposition avons entendu:
[N] [B]
assisté de Me Téta AGBE, avocat au barreau de TOULOUSE
qui a eu la parole en dernier
avec le concours de [W] [G], interprète, qui a prêté serment
En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En présence de Mme [T] représentant la PREFECTURE DE L'HERAULT
avons rendu l'ordonnance suivante :
M. [N] [B], âgé de 23 ans et de nationalité algérienne, a fait l'objet d'un contrôle le 20 juin 2022 à 14h50 à la gare SNCF de[Localité 2]r sur le fondement de l'article 78-2 alinea 9 du code de procédure pénale. Démuni de documents d'identité et de circulation, il a été placé en retenue à 15h10.
M. [B] avait fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et avec interdiction de retour pendant 4 mois pris par le préfet de l'Hérault le 16 septembre 2021 et notifié le 21 septembre 2021 par lettre recommandée avec accusé de réception non réclamée.
Le 21 juin 2022, le préfet de l'Hérault a pris à son encontre une décision de placement en rétention administrative, notifiée le même jour à 9h20 à l'issue de la retenue.
M. [B] a été conduit au centre de rétention administrative de [Localité 1] (31) en exécution de cette décision.
1) M. [N] [B] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse par requête parvenue au greffe le 22 juin 2022 à 7h54 pour contester la régularité de la procédure et de l'arrêté en placement en rétention.
2) Indiquant n'avoir pu l'éloigner dans le délai de rétention initial de quarante huit heures, le préfet de l'Hérault a pour sa part sollicité du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse, la prolongation du maintien de M. [N] [B] en rétention pour une durée de vingt huit jours suivant requête du 22 juin 2022 parvenue au greffe du tribunal le même jour à 14h14.
Ce magistrat a ordonné la jonction des requêtes, déclaré recevable la requête et réguliers la procédure et l'arrêté de placement en rétention administrative, rejeté la demande d'assignation à résidence et ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du 23 juin 2022 à 15h00.
M. [N] [B] a interjeté appel de cette décision, par courriel de son conseil adressé au greffe de la cour le 24 juin 2022 à 13h01.
A l'appui de sa demande d'infirmation de l'ordonnance entreprise et de mise en liberté, le conseil de M. [B] a principalement soutenu que l'arrêté de placement en rétention administrative est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et viole l'article 8 de la CEDH et l'article 3 de la CIDE :
. la décision ne contient pas de considérations relatives à sa situation personnelle, elle est insuffisamment motivée,
. son hébergement est bien fixe contrairement à ce que retenu par le préfet,
. il est titulaire de l'autorité parentale conjointe sur son fils et bénéficie d'un droit de visite adapté à sa situation : la séparation avec la mère de l'enfant ne l'empêche pas d'avoir des droits et des devoirs envers l'enfant, il ne peut être raisonnablement envisagé de les séparer, il aurait dû être placé sous assignation à résidence.
À l'audience, Maître [F] a repris oralement les termes de son recours et souligné particulièrement que :
. le préfet disposait d'éléments sur sa situation personnelle qui ne sont pas repris,
. outre l'adresse de domiciliation, il bénéficie d'un hébergement gratuit et d'un accompagnement dans ses démarches d'insertion,
. il a respecté son droit de visite et le juge aux affaires familiales a été re-saisi en vue d'une modification, quoiqu'il en soit de sa séparation avec la mère de son fils,
. on peut tenter une mesure d'assignation à résidence, il n'en a jamais bénéficié.
M. [B] qui a demandé à comparaître, insiste sur ses attaches montpelliéraines et, interrogé sur sa dernière rencontre avec son fils, précise l'avoir vu le 28 mai pour un rendez-vous de droit de visite médiatisé.
Le préfet de l'Hérault, régulièrement représenté à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en s'en remettant à la motivation de celle-ci et en soulignant notamment que dans son audition, M. [B] s'est dit domicilié au CCAS sans profession ni revenus : rien n'empêche de le reconduire et qu'il régularise sa situation depuis son pays d'origine et puisse retrouver son enfant
Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'arrêté de placement en rétention administrative
L'article L741-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise notamment que la décision de placement en rétention est écrite et motivée.
Et en application des articles L741-1 et 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.
La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.
Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.
Au cas d'espèce, il est soutenu en premier lieu que l'arrêté de placement en rétention administrative est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation aux motifs que la décision ne contient pas de considérations relatives à sa situation personnelle, et mentionne à tort que son hébergement n'est pas fixe.
L'arrêté contesté mentionne bien la paternité de l'appelant mais il retient qu'il n'est pas justifié d'une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant depuis sa naissance, ce qui n'est pas inexact au vu des seuls achats de vêtements démontrés.
Le préfet conclut ensuite que les liens personnels et familiaux de M. [B] en France ne sont pas anciens, intenses et stables : le fait est que s'il démontre le contraire à l'audience en produisant les éléments relatifs à l'exercice de son droit de visite à l'égard de son enfant, l'appelant n'avait pas évoqué ces rencontres lors de son audition, de sorte qu'il ne peut être fait grief à l'administration de son appréciation.
C'est donc à tort qu'une erreur manifeste d'appréciation lui est imputée.
De même, il ne peut être soutenu, au vu des éléments fournis par l'appelant, que la décision de placement en rétention administrative porte atteinte au respect de la vie privée et familiale de M. [B] ou à l'intérêt supérieur de l'enfant : en effet, l'atteinte ici redoutée résulte en fait de la décision d'éloignement, laquelle ne peut être remise en question devant et par le juge judiciaire. Et le placement en rétention administrative, lui, ne le privera au plus que de deux de ses rencontres mensuelles avec son fils, ce qui ne constitue pas le non-respect de sa vie privée et familiale ou de l'intérêt supérieur de l'enfant ici dénoncés.
Partant, la décision déférée sera donc confirmée en toutes ses dispositions, et la la mesure de rétention administrative, prolongée.
PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,
Confirme l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Toulouse le 23 juin 2022,
Dit que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de l'Hérault, service des étrangers, à M. [N] [B], ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public,
Dit que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de l'Hérault, service des étrangers, à M. [N] [B], ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public.
LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE
K. MOKHTARI A. MAFFRE