08/06/2022
ARRÊT N° 454/2022
N° RG 21/03207 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OJFC
EV/IA
Décision déférée du 09 Juin 2021 - Juge des contentieux de la protection de Toulouse - 20/02480
[G]
S.A. LA CITE JARDINS
C/
[O] [M]
[H] [M]
S.A. PACIFICA
RECTIFICATION ET CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX
***
APPELANTE
S.A. LA CITE JARDINS Agissant par son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Isabelle BAYSSET de la SCP INTER-BARREAUX D'AVOCATS MARGUERIT BAYSSET RUFFIE, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉS
Monsieur [O] [M]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par Me Flavie DE MEERLEER, avocat au barreau de TOULOUSE
Madame [H] [M]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Flavie DE MEERLEER, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A. PACIFICA
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Odile LACAMP de la SCP LERIDON LACAMP, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant O.STIENNE et E. VET, conseillers, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BENEIX-BACHER, président
O. STIENNE, conseiller
E.VET, conseiller
Greffier, lors des débats : M. BUTEL
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par M. BUTEL, greffier de chambre.
La SA La Cité Jardins est propriétaire d'un ensemble immobilier réceptionné le 1er décembre 2012.
Par acte du 26 novembre 2012, la SA La Cité Jardins avait donné à M. [O] [M] et Mme [H] [M] un appartement situé dans cet immeuble.
Des infiltrations ayant été constatées, la SA La Cité Jardins a régularisé une déclaration de sinistre auprès de l'assureur dommages ouvrage, la SMABTP qui a fait réaliser une expertise par le cabinet Polyexpert.
Les locataires ont quitté les lieux le 28 février 2021.
Par actes du 1er et du 2 octobre 2020, la SA Cité Jardins a fait assigner M. et Mme [M] ainsi que la SA Pacifica devant le juge des contentieux de la protection du Tribunal Judiciaire de Toulouse, pour obtenir sur le fondement des articles 1732 du code civil et L 213-4-4 du code de l'organisation judiciaire, la résiliation du contrat de bail aux torts exclusifs de M. et Mme [M], leur expulsion ainsi que celle de tous occupants de leur chef des locaux avec si nécessaire le concours de la force publique et d'un serrurier, leur condamnation au règlement d'une indemnité d'occupation équivalente au loyer conventionnel majoré des charges jusqu'à la libération effective des locaux ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 5000 € à titre de dommages-et-intérêts, la condamnation solidaire de M.et Mme [M] et de la SA Pacifica au paiement de la somme de 26 845.93 € correspondant au coût des travaux ainsi celle de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Par un jugement contradictoiredu 9 juin 2021, le juge de la protection a :
- jugé qu'il n'y a pas lieu de joindre le dossier enregistré sous le numéro, 20/2654 concernant Mme [X],
- constaté le désistement des demandes de résiliation de bail et d'expulsion,
- débouté la SA Cité Jardins de ses demandes en paiement,
- rejeté les autres demandes principales, accessoires et reconventionnelles,
- condamné la SA Cité Jardins à payer à Mme «[B]» [M] et M. [O] [M] ainsi qu'à la SA Pacifica la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit,
- condamné la SA Cité Jardins aux dépens de l'instance.
Par déclaration du 16 juillet 2021, la SA Cité Jardins a interjeté appel de la décision en ce qu'il a :
- débouté la SA Cité Jardins de ses demandes en paiement,
- rejeté les autres demandes principales, accessoires et reconventionnelles,
- condamné la SA Cité Jardins à payer à Mme [B] [M] et M. [O] [M] ainsi qu'à la SA Pacifica la somme de 500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SA Cité Jardins aux dépens de l'instance.
La SA Cité Jardins, dans ses dernières écritures en date du 7 octobre 2021 demande à la cour au visa des articles 1732 du code civil et L213-4-4 du code de l'organisation judiciaire, de :
- réformer le jugement dont appel,
- condamner in solidum M.et Mme [M] ainsi que la SA Pacifica au paiement de la somme de 28 359,54 € TTC correspondant au coût des travaux de réparation,
- condamner in solidum M. et Mme [M] ainsi que la SA Pacifica aux entiers dépens ainsi qu'au règlement d'une indemnité de 5000 € au visa des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens.
M. et Mme [M], dans leurs dernières écritures en date du 21 mars 2022, portant appel incident, demandent à la cour au visa des articles 32-1 et 700 du code de procédure civile, 1240 du Code Civil, de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SA Cité Jardins de ses demandes de paiement,
- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes reconventionnelles des époux [M] ;
En conséquence, statuant à nouveau :
- condamner la SA Cité Jardins à verser à M. et Mme [M] la somme de 1.500 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner la SA Cité Jardins à verser à M. et Mme [M] la somme de 1.000 € au titre du préjudice de jouissance lié aux travaux subis du 5 janvier au 28 février 2021 au sein de leur appartement,
En tout état de cause,
- condamner la SA Cité Jardins à verser à M. et Mme [M] la somme de 3.000 € à M. et Mme [M] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La SA Pacifica, dans ses dernières écritures du 28 septembre 2021 demande à la cour au visa des articles 1103, 1104, 1353, 1732 et 1964 du code civil et L.1 13-1 alinéa 2 du code des assurances, de :
- confirmer le jugement du 9 juin 2021 en toutes ses dispositions,
En conséquence,
A titre principal,
- débouter la SA Cité Jardins de I'intégralité de ses demandes à I'encontre de la SA Pacifica faute de preuve que le stockage des matériaux à I'origine des désordres pourrait être imputé à M. et Mme [M],
- condamner la SA Cité Jardins à payer à la SA Pacifica une indemnité de 3.000€ sur le fondement de I'articIe 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de I'instance,
A titre subsidiaire, le jugement du 9 juin 2021 n 'a pas eu à statuer sur la garantie de la SA Pacifica, toutefois, si la cour venait à réformer le jugement,
- débouter, en toute hypothèse, la SA Cité Jardins de I'intégralité de ses demandes à I'encontre de la SA Pacifica dès lors que si les désordres étaient imputés aux consorts [M], ils seraient nécessairement le résultat d'un usage anormal et d'une négligence des consorts [M], constitutifs d'une faute dolosive qui prive d'aléa le contrat d'assurance souscrit auprès de la SA Pacifica,
- condamner la SA Cité Jardins ou les consorts [M] à payer à la SA Pacifica une indemnité de 3.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de I'instance,
A titre infiniment subsidiaire,
- autoriser la SA Pacifica à opposer à M. et Mme [M] leur franchise contractuelle à hauteur de 150 €.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 avril 2022.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS :
Sur l'erreur matériel affectant le jugement déféré :
L'article 462 du code de procédure civile prévoit: « Les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande. ».
En l'espèce, le jugement déféré indique « [B] » comme étant le prénom de Mme [M] dont le prénom est en fait « [H] ».
Il convient en conséquence de rectifier cette erreur purement matérielle qui n'appelle aucune contestation.
Sur la demande de condamnation de M.et Mme [M] :
Pour justifier sa demande de condamnation des époux [M] et de leur assureur à prendre en charge le coût des travaux de reprise des terrasses, la SA La Cité Jardins explique que l'immeuble a subi deux sinistres le premier dans l'appartement A 42 que l'assureur dommages ouvrage, la SMABTP, a accepté de prendre en charge, le second dans les appartements B 41, B 44 et B 45 dont elle a refusé la prise en charge et dont les conséquences sont l'objet du présent litige.
Elle explique en effet que le cabinet Polyexpert qui a fait appel à la société ETS a considéré s'agissant du second sinistre qu'un usage anormal d'une terrasse non-accessible excepté par l'appartement des époux [M] et de la terrasse de l'appartement loué par eux était responsable des infiltrations, des gravats stockés ayant entraîné des blessures à l'étanchéité et bouché les évacuations d'eaux pluviales.
Elle précise que la société SOPREMA qui a effectué les travaux d'étanchéité a constaté la présence d'eau dans le complexe iso-étanche due à des perforations dans l'étanchéité au niveau du muret séparatif des terrasses.
M.et Mme [M] opposent qu'il ressort du rapport d'expertise qui n'a pas été établi contradictoirement, qu'aucun test n'a été réalisé et que son impartialité est sujette à caution dès lors qu'il a été réalisé par l'assureur dommages-ouvrage.
En tout état de cause ils affirment que les gravats litigieux étaient présents dès l'origine sans doute laissés par les entreprises au moment de la livraison de l'immeuble et que depuis la livraison de l'immeuble des problèmes récurrents d'étanchéité sont déplorés par les locataires, ces infiltrations ayant été constatées dans plusieurs endroits de l'immeuble et eux-mêmes en ayant été victimes et que d'ailleurs tout le système d'étanchéité de l'immeuble a dû être repris.
La SA Pacifica, assureur des locataires au titre de leur contrat multirisque habitation, considère que les infiltrations ne peuvent être imputées à M.et Mme [M] alors que l'état de la terrasse non accessible avant leur arrivée n'est pas démontré et qu'en tout état de cause l'article 1732 du Code civil ne concerne que les parties privatives du logement et non les parties communes que dès lors il appartient à la bailleresse d'établir la faute de ses locataires ce qu'elle ne fait pas.
Elle relève que le cabinet Polyexpert n'a effectué aucune photographie,au contraire de la société ayant réalisé les travaux, lesquelles ne peuvent être considérées comme reflétant la réalité de la situation alors que le complexe d'étanchéité a été mis à nu par les ouvriers qui ont retiré les cailloux destinés à le protéger avant de prendre les photographies.
Elle en déduit que la SA La Cité Jardins est dans l'impossibilité matérielle de prouver que les matériaux présents sur la terrasse ont été déposés par les locataires.
La cour rappelle qu'il résulte des explications données par les parties que M.et Mme [M] ont pris à bail un appartement comportant une terrasse privative séparée par un muret d'une hauteur d'un mètre d'une terrasse dite « non-accessible » relevant des parties communes dont l'accès ne peut se faire que par l'appartement occupé par les époux [M].
Si l'article 1732 du Code civil prévoit que le locataire répond des dégradations et pertes qui arrivent pendant sa jouissance à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute, cette présomption ne se limite pas aux dégâts constatés dans les lieux loués, mais s'étend aux dommages occasionnés aux parties communes.
Cependant, cette présomption n'est applicable qu'aux parties privatives dont le locataire a la jouissance exclusive et doit être considéré comme en étant le gardien.
Elle ne peut donc pas s'appliquer aux parties communes quand bien même, lorsque comme l'espèce, ces parties ne seraient accessibles que par un appartement donné à bail. D'ailleurs, le locataire ne bénéficie pas pour les parties communes de la garantie que représente l'établissement d'un état des lieux d'entrée contradictoire qui permet de déterminer l'état du bien lorsque la jouissance lui en'est donnée.
Il appartient donc dans un premier temps à la bailleresse d'établir que les désordres dont elle réclame réparation trouvent leur origine dans les locaux dont les locataires avaient la jouissance exclusive.
Il est constant que le logement a été donné à bail aux époux [M] selon bail du 26 novembre 2012 alors que l'immeuble a été réceptionné par la bailleresse le 1er décembre 2012.
Suite aux infiltrations constatées, la bailleresse a alerté la SMABTP, assureur dommage-ouvrage de la SARL BTP MP ayant réalisé le gros 'uvre, qui a fait réaliser une expertise amiable par le cabinet Polyexpert en recherche des causes des infiltrations constatées dans les appartements B 41, B 44 et B 45 de l'immeuble. La bailleresse n'établit pas le caractère contradictoire de cette expertise à l'égard des locataires, aucune des convocations annexées au rapport ne portant leur nom.
Il ressort du rapport de l'expert que les pièces sinistrées dans les appartements visés sont sous l'emprise de la terrasse de l'appartement occupé par M.et Mme [M] ou de la terrasse non-accessible.
Et que la visite des deux terrasses a permis de constater que la terrasse des locataires était très encombrée , celle de la partie non-accessible indiquée comme servant de « décharge » aux locataires de l'appartement voisin. La présence importante de gravats (poutre bois, chutes de carrelage, barres de fer, pneu') était constatée sans que des photographies aient été jointes au rapport.
Des investigations en recherche de fuite ont été confiées à la société ETS qui a d'une part constaté que l'évacuation des eaux pluviales était bouchée par des gravats (torchons, vêtements..), d'autre part démontré que l'usage anormal de la toiture terrasse par le stockage d'objets était à l'origine de blessures causées à l'étanchéité engendrant des infiltrations dans le complexe d'étanchéité des deux terrasses. L'évacuation des eaux pluviales étant bouchée une mise en charge des deux toitures terrasses en résultait ainsi que des venues d'eau à l'arrière des relevés.
Aucun vice de construction n'a été détecté.
Enfin, la SOPREMA, qui a effectué les travaux de reprise atteste que lors du démarrage des travaux le 5 janvier 2021 les perforations dans l'étanchéité «sont certainement dues à la présence d'objets en tout genre stockés sur la terrasse, parmi lesquels nous avons trouvé des planches de bois avec des clous, du carrelage et autre mobilier de jardin. ».
Cette société a réalisé une planche photographique le 8 février 2021 permettant de constater sur la terrasse non-accessible la présence de deux pots de fleurs, d'un morceau de palette en bois, d'un pneu, de morceaux de carton d'un plot de signalisation coupé, d'une grande bassine, de mobilier de jardin.
S'agissant de la terrasse de l'appartement des époux [M], l'expert a relevé qu'elle « était très encombrée ». Cependant, il ne résulte ni du rapport ni des photographies ni d'aucune autre pièce que les biens se trouvant sur cette terrasse, ont pu être à l'origine des infiltrations constatées et qu'il s'y trouvait des biens susceptibles de blesser le système d'isolation ou d'empêcher l'écoulement des eaux pluviales, de nature à engager la responsabilité des locataires.
D'ailleurs, par courrier du 8 janvier 2021, le conseil de la bailleresse précisait que les travaux commandés à la SOPREMA concernent exclusivement la reprise de l'étanchéité de la toiture terrasse attenante à l'appartement des époux [M], ce qui confirme qu'aucun désordre n'affectait la terrasse du logement donné à bail.
Au regard de ces éléments, il n'apparaît pas que l'utilisation de la terrasse privative des époux [M] a pu être à l'origine du sinistre et leur responsabilité ne peut être retenue sur le fondement de l'article 1732 du Code civil.
La terrasse non- accessible, relevant des parties communes, aucun état des lieux n'a évidemment été dressé à l'arrivée des locataires et la bailleresse ne produit aucune pièce démontrant que lorsqu'ils ont aménagé la terrasse non-accessible était vide de tout objet ou gravats alors qu'ainsi qu'il a été dit l'immeuble venait d'être terminé.
De plus, les désordres affectant la terrasse non-accessible, partie commune, ne relèvent pas de la présomption de l'article 1732 du Code civil puisque les locataires n'en étaient pas les gardiens. En conséquence, il appartient à la bailleresse d'établir la faute des locataires qui l'auraient utilisée comme lieu de stockage.
Or, s'il est démontré que la cause des désordres est pour partie la présence de gravats (carrelage, barres de fer, poutre en bois) ayant blessé l'étanchéité il n'est pas démontré que ceux-ci n'ont pas été laissés par les entreprises lorsque l'immeuble a été terminé alors qu'au surplus des problèmes d'infiltration ont été signalés très rapidement après leur arrivée par plusieurs locataires de l'immeuble, ainsi qu'il résulte des attestations produites par les époux [M].
De plus, s'il est vraisemblable que certains objets proviennent de l'appartement des époux [M] (pots de fleurs, caissette, roue, mobilier, plots..) , cette vraisemblance est insuffisante à établir leur responsabilité ces objets n'étant d'ailleurs pas spécialement incriminés comme étant la cause du sinistre, contrairement à ceux relevant de la catégorie « gravats » (planche en bois avec des clous, barre de fer').
Enfin, l'obstruction des évacuations des eaux pluviales par des torchons et vêtements a contribué aux infiltrations et il convient de rechercher l'éventuelle responsabilité des locataires à ce titre.
Si par courrier du 17 décembre 2020, M. [M] écrivait à la bailleresse avoir «reçu des petits vêtements (type slip, tee-shirts) et poches plastiques transportés par le vent » ce qui peut paraître surprenant alors que l'appartement est situé au cinquième étage, il n'en demeure pas moins que la bailleresse ne conteste pas l'existence alléguée par les locataires de deux studios au sixième étage. Dès lors, il est impossible d'imputer avec certitude aux époux [M] la présence des torchons et vêtements évoqués dans l'expertise, alors qu'ils peuvent provenir des appartements situés à l'étage supérieur.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SA La Cité Jardins de ses demandes.
Sur la demande de dommages-intérêts des époux [M] pour trouble de jouissance :
Les époux [M] font valoir qu'ils ont subi des travaux du 5 janvier jusqu'au 28 février 2021, date de leur départ.
Ils rappellent que n'ayant reçu aucune information, leur conseil a alerté la bailleresse le 6 janvier 2021 du préjudice de jouissance qu'ils subissaient avec leur fils âgé de six ans.
Ils soulignent que les ouvriers entraient chez eux en pleine période de crise sanitaire ce qui a entraîné un risque de contamination.
La bailleresse n'a pas répondu à cette demande.
L'article 1724 du Code civil prévoit : « Si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puisse être différées jusqu'à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelqu' incommodité qu'elles lui causent, et qu'il soit privé, pendant qu'elles se font, d'une partie de la chose louée.
Mais si ces réparations durent plus de 21 jours, le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aurait été privé. ».
Ce texte n'est pas d'ordre public mais l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989 répute non écrite toute clause qui interdit au locataire de demander une indemnité au bailleur lorsque ce dernier réalise des travaux d'une durée supérieure à 21 jours.
Enfin, le bail liant les parties prévoit que la bailleresse peut faire exécuter dans l'immeuble toute réparation, tous travaux de transformation, de surélévation d'aménagement quelle qu'en soit la cause, le tout sans indemnité ni diminution de loyer et que si ces travaux durent plus de 40 jours, le loyer sera, à l'expiration de ce délai, diminué dans la proportion du temps et de la partie des lieux dont le locataire aurait été privé.
Ainsi qu'il a été dit, cette clause est réputée non écrite et une indemnité peut être due aux locataires à compter du 22e jour à proportion du temps et de la partie de la chose dont ils ont été privés.
En l'espèce, les travaux nécessités par la réfection de l'étanchéité de l'immeuble ont débuté le 5 janvier 2021 et, par courrier recommandé du 31 janvier 2021, les locataires ont donné congé à effet au 28 février suivant. Ce courrier ne précise pas que leur départ est causé par les travaux qui étaient prévus pour une durée de cinq semaines et se sont terminés avant leur départ le 8 février 2021. Ils ont donc duré 34 jours.
Il est constant que la réfection de l'étanchéité de leur terrasse mais aussi de la terrasse dite « non accessible » obligeait les salariés de l'entreprise chargée des travaux à traverser l'appartement des époux [M].
De plus, par courrier du 6 janvier 2021 leur conseil sollicitait l'arrêt des travaux jusqu'à leur relogement et à défaut, une information précise sur les modalités d'exécution des travaux et d'indemnisation proposée.
Ces demandes se voyaient opposer un refus au motif que les locataires étaient responsables des désordres.
Si la famille [M] a subi une gêne résultant des allées et venues des ouvriers chargés de la reprise de l'étanchéité, susceptible d'être indemnisée pour une période ne pouvant dépasser 13 jours, ils n'ont, à aucun moment, été privés d'une partie de la chose donnée à bail, la gêne occasionnée ne pouvant à elle seule caractériser un préjudice susceptible d'indemnisation alors qu'au surplus ces travaux étaient indispensables pour faire cesser les infiltrations subies par les occupants et assurer la pérennité de l'immeuble.
Il convient en conséquence de rejeter cette demande par confirmation du jugement déféré.
Sur la demande de dommages-intérêts pour appel abusif :
Aux termes des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile l'engagement d'une action en justice et sa poursuite en appel constituent un droit dont l'exercice ne dégénère en abus qu'en cas de démonstration d'une faute non caractérisée en l'espèce.
La demande de dommages-intérêts pour procédure abusive présentée par les époux [M] doit en conséquence être rejetée.
Sur les demandes annexes :
L'équité commande de faire droit à la demande présentée par les époux [M] au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 1000 € et de rejeter la demande présentée par la SA Pacifica.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine :
Rectifie la décision rendue le 9 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Toulouse,
En conséquence :
Dit que le prénom « [B] » sera remplacé par « [H] » dans l'en-tête et le corps de ce jugement,
Rappelle que ces modifications seront mentionnées sur la minute et sur les expéditions de la décision qui en seront faites,
Confirme le jugement déféré ainsi rectifié,
Condamne la SA d'HLM La Cité Jardins à verser à M. [O] [M] et Mme [H] [M] 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande de la SA Pacifica au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SA La Cité Jardins aux dépens.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
M.BUTELC. BENEIX-BACHER