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19/05/2022 | FRANCE | N°22/00224

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Etrangers, 19 mai 2022, 22/00224


COUR D'APPEL DE TOULOUSE









Minute 2022/226

N° RG 22/00224 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OZLR



O R D O N N A N C E



L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 19 mai à 09h30



Nous A. MAFFRE, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.



Vu l'ordonnance rendue le 16 Mai 2022 à 16H26 par le juge des lib

ertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :



[K] [I]

né le 15 Décembre 2002...

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

Minute 2022/226

N° RG 22/00224 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OZLR

O R D O N N A N C E

L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 19 mai à 09h30

Nous A. MAFFRE, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu l'ordonnance rendue le 16 Mai 2022 à 16H26 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :

[K] [I]

né le 15 Décembre 2002 à BENIN CITY (NIGERIA) (99)

de nationalité Nigériane

Vu l'appel formé le 17/05/2022 à 15 h 00 par télécopie, par Me Sandrine NEFF, avocat au barreau de TOULOUSE;

A l'audience publique du 18/05/2022 à 15h00, assisté de K. MOKHTARI avons entendu:

[K] [I]

assisté de Me Sandrine NEFF, avocat au barreau de TOULOUSE

qui a eu la parole en dernier

En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;

En présence de M.[Y] représentant la PREFECTURE DE LA LOIRE ;

avons rendu l'ordonnance suivante :

M. [K] [I], âgé de 19 ans et de nationalité nigériane, a été interpellé le 13 mai 2022 à 19h15 rue de la république à [Localité 4] (42) et a été placé en garde à vue à 19h40 pour violences volontaires, menace de délit, outrage.

Le 14 mai 2022, le préfet de la Loire a pris à son encontre un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et avec interdiction de retour pendant un an, ainsi qu'une mesure de placement en rétention administrative, tous deux notifiés le même jour à 16h55 à l'issue de la garde à vue.

M. [I] a été conduit au centre de rétention administrative de [Localité 1] (31) en exécution de cette décision.

1) Indiquant n'avoir pu l'éloigner dans le délai de rétention initial de quarante huit heures, le préfet de la Loire a sollicité du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse, la prolongation du maintien de M. [K] [I] en rétention pour une durée de vingt huit jours suivant requête du 15 mai 2022 parvenue au greffe du tribunal le même jour à 14h47.

2) M. [I] a pour sa part saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse par requête parvenue au greffe le 16 mai 2022 à 11h38 pour contester la régularité de la procédure et de l'arrêté en placement en rétention.

Ce magistrat a ordonné la jonction des requêtes, constaté la régularité de la procédure et de l'arrêté de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du 16 mai 2022 à 16h26.

M. [K] [I] a interjeté appel de cette décision, par courriel de son conseil adressé au greffe de la cour le 17 mai 2022 à 15h00.

A l'appui de sa demande d'infirmation de l'ordonnance entreprise et de mise en liberté,, le conseil de M. [I] a principalement soutenu que :

- ses droits en rétention lui ont été notifiés 4h38 après son placement, il a été privé de la possibilité d'exercer ses droits fondamentaux et la mesure de rétention doit être annulée,

- sur le fond

. la décision de placement en rétention administrative ne répond pas aux exigences d'une motivation qui doit permettre au juge d'apprécier le caractère nécessaire et proportionné du placement en rétention, puisqu'il habite avec sa compagne et a des garanties,

. les conditions du placement ne sont pas remplies et le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation puisqu'il habite avec sa compagne est arrivé mineur en France où il a fait des études et que les possibilités d'assignation à résidence n'ont même pas été écartées, de sorte que la décision est irrégulière et doit être annulée.

À l'audience, Maître Neff a repris oralement les termes de son recours et souligné notamment que :

. Il y a une distinction entre l'information sur les droits et le fait de les rendre effectifs,

. il n'y a aucun élément sur sa situation personnelle, scolaire et sur son placement à l'ASE,

. il était inséré et le préfet aurait dû le prendre en compte et prendre une autre décision.

M. [I], qui a demandé à comparaître, a déclaré que rien ne l'attend au Nigéria alors que son patron est content de son travail et veut l'embaucher. Interrogé, il a indiqué avoir obtenu son CAP au printemps 2021 après sa première OQTF et a le projet de revenir à l'école pour un nouvel apprentissage : il doit attendre décembre pour cela et travaille au black de temps en temps cette année. Il s'engage à respecter la loi et demande une dernière chance et sa mise en liberté.

Le préfet de la Loire, régulièrement représenté à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en s'en remettant à la motivation de celle-ci et en soulignant que :

. les droits en rétention s'entendent à l'arrivée au centre de rétention administrative,

. le tribunal administratif a confirmé l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français ce matin,

. l'évaluation de la préfecture est faite en fonction des éléments de l'audition dont il est justifié et il n'y a pas à rapporter des éléments non justifiés,

. M. [I] n'a pas de garanties de représentation en l'absence de passeport, de résidence fixe, de respect de l'assignation à résidence et de la décision d'éloignement, et en raison de son refus de revenir dans son pays.

Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la procédure

En vertu de l'article L744-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une personne placée en rétention administrative est informée dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, d'un certain nombre de droits.

Ces différents droits entrent en vigueur à l'arrivée au centre de rétention administrative et non avant. Et en l'espèce, M. [I], arrivé au centre de rétention administrative de [Localité 1] le 14 mai 2022 à 21h30 , s'est vu notifier ses droits à la même heure, soit au moment même de leur entrée en vigueur : il n'a donc pas été privé un instant de pourvoir exercer ses droits.

Le moyen soulevé ne peut donc prospérer.

Sur l'arrêté de placement en rétention administrative

En application des articles L741-1 et 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.

La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.

Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.

Et l'article L741-6 du même code précise que la décision de placement en rétention est prise par l'autorité administrative, après l'interpellation de l'étranger ou, le cas échéant, lors de sa retenue aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de sa période d'incarcération en cas de détention et qu'elle est écrite et motivée.

Il est ici soutenu en premier lieu que la décision de placement en rétention administrative est insuffisamment motivée faute de mentionner que M. [I] habite avec sa compagne et d'évoquer son parcours scolaire et à l'ASE.

De fait, Mme [R] déclare l'héberger depuis le mois de mars 2022 à son domicile [Adresse 2] et M. [I] justifie de sa prise en charge jusqu'au printemps 2021.

Pour autant, entendu le 14 mai 2022, il n'évoquait pas de compagne et déclarait habiter [Adresse 3] : l'arrêté de placement en rétention administrative reprenait donc cet élément, seule information fournie par l'intéressé à ce sujet, pour en critiquer la valeur, s'agissant d'un logement procuré par le 115.

Et par ailleurs, les éléments relatifs au parcours d'insertion poursuivi jusqu' à l'été 2021, s'ils pouvaient avoir un impact sur la décision d'éloignement, étaient sans pertinence sur les garanties de représentation de M. [I] 10 mois plus tard et n'avaient donc pas à être repris dans l'arrêté de placement en rétention administrative. Or, l'audition ne contenait aucun détail sur son parcours depuis juin 2021.

Il ne saurait donc être reproché au préfet de ne pas faire état d'une information dont il ne disposait pas, et l'arrêté n'encourt pas le reproche d'insuffisance de motivation.

L'appelant considère par ailleurs qu'une erreur manifeste d'appréciation entache l'arrêté au motif, outre cette adresse et cette vie de couple non indiquées aux services de police, qu'il a été pris en charge depuis son arrivée mineur, ce dont il justifie jusqu'au printemps 2021, et que la possibilité d'une assignation à résidence n'est pas évoquée.

En réalité, l'arrêté critiqué a bien écarté cette éventualité puisqu'il énonce notamment 'qu'aucune autre mesure n'apparaît pas suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision'.

Et s'agissant par ailleurs de l'appréciation des garanties de représentation, l'intéressé indiquait alors être hébergé par le 115 et être sans ressources. Il se disait étudiant mais les pièces fournies ne sont pas en faveur d'une poursuite d'un cursus scolaire au-delà du printemps 2021. Et il n'avait pas respecté la précédente décision d'éloignement devenue définitive depuis le rejet de sa requête en annulation suivant jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 3 décembre 2021, non plus que l'assignation à résidence du 13 juillet 2021.

Considérant que la prise en charge et l'insertion sociale dont M. [I] a bénéficié durant sa minorité et un peu au-delà n'était plus d'actualité au moment de l'arrêté, et sa relation sentimentale récente non connue, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet a pu décider de le placer en rétention.

La décision prise s'avère donc régulière, et proportionnée au but recherché, l'exécution de la décision d'éloignement.

Considérant enfin que M. [I] déclare ne pas vouloir revenir au Nigéria et que l'hébergement offert par Mme [R] est si récent et constitue une attache si peu solide que l'appelant ne l'a pas mentionné lors de son audition, il apparaît que le maintien en rétention administrative est la seule mesure permettant d'assurer l'exécution d'une arrêté portant obligation de quitter le territoire français devenue définitive : l'appelant ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et ne dispose pas d'un passeport, de sorte qu'aucune autre mesure suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision ne peut être prise.

Dès lors, il convient de faire droit à la demande de maintien en rétention.

La décision déférée sera donc confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,

Confirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Toulouse le 16 mai 2022,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de la Loire, service des étrangers, à M. [K] [I], ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public.

LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE

K. MOKHTARI A. MAFFRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 22/00224
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;22.00224 ?
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