11/05/2022
ARRÊT N°361/2022
N° RG 21/02461 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OGKC
EV/CD
Décision déférée du 08 Mars 2021 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTAUBAN ( 19-000460)
Mme [O]
[X] [J] [L]
C/
S.A. MERCEDES- BENZ FINANCIAL SERVICES FRANCE
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU ONZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX
***
APPELANTE
Madame [X] [J] [L]
Rue du CHATEAU
82160 PUYLAGARDE
Représentée par Me Anna-stephanie ELKIESS, avocat au barreau de TOULOUSE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 82121.2021.001682 du 06/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)
INTIMÉE
S.A. MERCEDES-BENZ FINANCIAL SERVICES FRANCE
7 avenue de Niepce
78180 MONTIGNY LE BRETONNEUX
Représentée par Me Anne MARIN de la SELARL MARIN AVOCATS, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Marion HAAS, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant E.VET, président, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
E.VET, président
O. STIENNE, conseiller
A. MAFFRE, conseiller
Greffier, lors des débats : I. ANGER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par E.VET, président, et par I. ANGER, greffier de chambre
Par acte du 14 mars 2017, la SA Mercedes-Benz Financal Services France a consenti une location avec option d'achat à Mme [X] [L] pour un véhicule Mercedes-Benz immatriculé EK- 961- WY.
Le prix d'achat comptant était de 44'070 €, la durée de location de 37 mois et le loyer mensuel fixé à 613,18 €.
Le 5 décembre 2018, Mme [L] apprenait à la SA Mercedes-Benz Financal Services France que le véhicule avait été volé.
Par acte du 17 septembre 2019, la SA Mercedes-Benz Financal Services France a fait assigner Mme [X] [L] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Montauban en paiement de sommes.
Par décision du 8 mars 2021, le juge des contentieux de la protection de Montauban a :
' débouté Mme [X] [L] de ses demandes de nullité du contrat de location avec option d'achat, de dommages-intérêts de compensation avec l'indemnité de résiliation,
' débouté Mme [L] de sa demande tendant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts,
' condamné Mme [L] à payer à la SA Mercedes-Benz Financal Services la somme de 31'633,05 euro avec intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2020 sur la somme de 31'446,75 € jusqu'à parfait paiement,
' condamné Mme [L] à verser 350 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
' rappelé que l'exécution provisoire de droit.
Par déclaration du 1er juin 2021, Mme [J] [L] a formé appel de la décision ce qu'elle :«N'a pas jugé que la société Mercedes Benz Financial a manqué à ses obligations d'information et de conseil, - N'a pas jugé que le contrat de location avec offre d'achat était disproportionné au regard de la capacité financière de Mme [L] Infirmer le jugement en ce qu'il a :
- Débouté Mme [X] [L] de ses demandes de nullité du contrat de location avec option d'achat, de dommages et intérêts et de compensation avec l'indemnité de résiliation ; - Débouté Mme [X] [L] de sa demande tendant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts, - Condamné Mme [L] à payer à la SA Mercedes-Benz Financal Services la somme de 31633€05 avec intérêts au taux légal qui courront à compter du 11 décembre 2020 sur la somme de 31446€ 75, et ce jusqu'à parfait paiement,
- Condamné Mme [L] au paiement de la somme de 350 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile. Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [L] aux entiers dépens et en ce qu'il a prononcé l'exécution provisoire. Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [L] de sa demande relative à l'article 700 du Code de Procédure Civile. ».
Par dernières conclusions du 16 juillet 2021, Mme [L] demande à la cour de :
Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Montauban
Et statuer de nouveau
Débouter Mercedes-Benz Financal Services de I'intégralité de ses demandes
A titre principal,
- juger que la Société Mercedes-Benz Financal a manqué à ses obligations d'information consistant à expliquer à Mme [L] le contrat en vérifiant que le prêt est adapté à ses besoins, et à son obligation de conseil impliquant de vérifier la solvabilité de l'emprunteur,
Et dès lors,
- juger que le contrat de location avec offre d'achat était disproportionné au regard des capacités financiéres de Mme [L],
En conséquence,
- Prononcer la nullité du contrat de location avec offre d'achat et ses conséquences,
A titre reconventionnel et subsidiaire,
Si le Tribunal ne prononçait pas la nullité du contrat,
- juger que la société Mercedes-Benz Financal Services France a engagé sa
responsabilité et notamment pour défaut de mise en garde
En conséquence,
- condamner la société Mercedes-Benz Financal Services à verser en reparation du préjudice subi par Mme [L] une somme équivalente à celle qui serait mise à sa charge au titre du contrat litigieux.
Juger que les frais de résiliation sont exorbitants et qu'ils ne sont pas dus par Mme [L] en compensation de son préjudice,
- juger que la Société Mercedes-Benz Financal a manqué à ses obligations découlant des articles du Code de la Consommation en ce que le contrat assorti d'une assurance n'a pas mentionné la durée du contrat d'assurance ni les causes d'exclusion ou de garantie, et que le contrat est rédigé avec des caracteres dont la hauteur est inférieure à celle du corps huit faisant subir à Mme [L] un préjudice,
En conséquence,
Prononcer la déchéance de la totalité des taux d'intérét,
En tout état de cause,
- condamner la Société Mercedes-Benz Financal à verser à Mme [L] la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du CPC, et condamner la société aux entiers dépens de l'instance.
Par dernières conclusions du 28 juillet 2021, la SA Mercedes-Benz Financal demande à la cour de :
Déclarer Mme [X] [L] mal fondée en son appel
' débouter Mme [X] [L] de toutes ses demandes, fins et conclusions
' confirmer le jugement en toutes ses dispositions
' condamner Mme [X] [L] à payer à la société Mercedes-Benz Financal Services France la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,
' condamner Mme [X] [L] aux dépens de première instance et d'appel, distraits au profit de Maître Anne Marin, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction est intervenue le 7 mars 2022.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS
sur la demande en nullité de contrat :
Mme [L], qui conteste toute fraude, fait valoir que la société a manqué à son obligation de conseil et d'information ce qui l'a conduite à souscrire le contrat qui a entraîné un endettement de 47 %.
Au terme des dispositions de l'article 1131 du Code civil, les vices du consentement sont une cause de nullité du contrat. La cour rappelle qu'il s'agit de l'erreur, du dol et de la violence conformément aux dispositions de l'article 1130 du Code civil.
En l'espèce, Mme [L] invoque exclusivement le manquement de son cocontractant à son obligation d'information qui ne peut se résoudre que par l'octroi de dommages-intérêts sous réserve de la démonstration de la responsabilité de la société. Ce principe résulte d'ailleurs de la jurisprudence qu'elle produit.
Enfin, les manquements résultant pour l'intimé du non-respect des dispositions de l'article L 312-12 du code de la consommation invoqués par Mme [L] dans la rubrique relative à la nullité du contrat ne peuvent qu'entraîner la déchéance du droit aux intérêts.
En conséquence, le moyen tiré de la nullité du contrat doit être rejeté.
Sur la responsabilité de la société Mercedes-Benz Financial :
Mme [L] indique que si la cour ne devait pas retenir la nullité du contrat elle ne pourra que constater que la société bailleresse a engagé sa responsabilité à son égard et sollicite en conséquence sa condamnation à lui verser une somme équivalente à celle mise à sa charge dans le cadre du contrat pour manquement à la bailleresse à son obligation de mise en garde.
La cour rappelle que Mme [L] ne fait pas l'objet d'une mesure de protection, ainsi peu importe que le véhicule lui ait été destiné ou qu'il ait été destiné à M. [Z] puisqu'en tout état de cause c'est elle qui a contracté pour acquérir le véhicule. D'ailleurs, elle indique « M. [Z] qui de toute évidence avait son plan en tête a rassuré son amie en lui indiquant qu'il allait reprendre son contrat aussitôt ses déboires financiers terminés ». La société bailleresse ne peut être considérée comme responsable des man'uvres éventuelles de M. [Z].
D'ailleurs, si comme elle l'envisageait le contrat avait été transféré à M. [Z], elle n'aurait pas été engagée dans la présente procédure. Cependant, celui-ci n'a pas demandé que le contrat lui soit transféré.
De même, Mme [L] a choisi de renoncer à son droit de rétractation sans établir une quelconque pression à ce titre de la société bailleresse alors qu'elle a de sa main écrit :« Je demande à être livrée immédiatement (ou à bénéficier immédiatement de la prestation de services). Le délai légal de rétractation de mon contrat de location avec option d'achat arrive dès lors à échéance à la date de la livraison, sans pouvoir être inférieur à trois jours ni inférieur à14 jours suivants sa signature. ». Le législateur a prévu l'obligation pour le cocontractant d'écrire de sa main cette formule afin de lui permettre de prendre conscience de la réduction de son délai de réflexion. Dès lors, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de la société bailleresse.
Mme [L] a signé la fiche de dialogue mentionnant qu'elle est exploitante agricole (éleveur canin), propriétaire de sa résidence principale et que ses revenus mensuels s'élèvent à 1521 € aucun autre emprunt ou charge n'étant indiqué. Elle a au surplus produit sa déclaration de revenus et un projet d'acte de donation de 2012 confirmant ses affirmations. Peu importe que son adresse soit différente de celle du bien donné qui comporte une maison alors qu'elle n'a évoqué aucun loyer à sa charge.
D'ailleurs, le jugement du tribunal judiciaire de Montauban du 24 février 2020 qui a suspendu pour une durée de deux ans les obligations de Mme [L] à l'égard de quatre sociétés de crédit ne relève aucune charge au titre de son hébergement.
Célibataire sans enfant, elle n'a indiqué aucune autre charge particulière, emprunt ou autre, la société n'ayant pas à se substituer à Mme [L] dans ses choix de vie et de dépenses.
Enfin, le montant des loyers mensuels de la location avec option d'achat s'élevait à 645,71 €, soit un reste à vivre de 874,29 € pour Mme [L].
En conséquence, l'endettement induit par la souscription de la location avec option d'achat n'était pas disproportionné et de nature à justifier une mise en garde particulière de l'emprunteur dont la demande en dommages-intérêts doit être rejetée.
Sur la demande de la société crédit :
Mme [L] fait valoir que le décompte de la société est obscur. Elle affirme que les demandes au titre de l'assurance et de l'entretien pour des montants respectifs de 211,53 et 114,84 € ne sont pas justifiés, l'entretien n'ayant pas été effectué. Elle sollicite la déchéance du droit aux intérêts en raison des imprécisions du contrat d'assurance et du fait que le contrat a été rédigé à un corps inférieur à huit.
L'intimée a produit le détail de l'indemnité de résiliation calculée conformément aux dispositions de l'article 1-5 du contrat lui-même reprenant les dispositions de l'article D 312- 18 du code de la consommation , la valeur actualisé des loyers non encore échus étant calculée selon la méthode des intérêts composés en prenant comme taux annuel de référence le taux moyen de rendement des obligations émises au cours du semestre civil précédant la date de conclusion du contrat majoré de la moitié, le taux retenu figurant au décompte de la société n'étant pas critiqué par Mme [L].
Mme [L] n'a pas estimé utile de produire l'original de son contrat alors que l'exemplaire de la bailleresse est bien en corps huit et que le premier juge a relevé que l'original du contrat n'avait été pas produit par elle. Ce moyen ne peut en conséquence être retenu.
Si Mme [L] produit à l'appui de ses affirmations des documents illisibles, la notice d'assurance versée par la société Mercedes-Benz, dont Mme [L] ne prétend pas qu'elle ne lui a pas été remise, précise les risques couverts et les exclusions de garantie ainsi que sa durée qui est celle du financement du véhicule assuré sauf résiliation. En conséquence, ce moyen ne peut être retenu.
Il n'y a donc pas lieu d'ordonner la déchéance du droit aux intérêts.
Enfin, s'agissant des sommes réclamées au titre de l'assurance et de l'entretien, elle n'apparaissent pas comme identifiées dans le détail du calcul de l'indemnisation de la résiliation mais devaient à juste titre être incluses dans le montant des échéances impayées conformément au contrat (721,97 €). En conséquence la demande à ce titre doit être rejetée.
Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Mme [L] à verser à l'intimé 31'633,05 € outre intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2020 sur la somme de 31'446,75 €.
Sur les demandes annexes :
L'équité commande de rejeter la demande présentée par la SA Mercedes-Benz Financal Services France au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance par infirmation de la décision déférée et en appel.
Mme [L] qui succombe gardera la charge des dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine :
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'elle a condamné Mme [X] [L] à verser 350 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant :
Déboute la SA Mercedes-Benz Financal Services France de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel,
Condamne Mme [X] [L] aux dépens avec distraction profit de Maître Anne Marin conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT
I. ANGERE. VET