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11/05/2022 | FRANCE | N°20/03642

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 11 mai 2022, 20/03642


11/05/2022





ARRÊT N°194



N° RG 20/03642 - N° Portalis DBVI-V-B7E-N3ZQ

IMM - AC



Décision déférée du 16 Novembre 2020 - Juge des contentieux de la protection d'ALBI - 11-19-0438

M.[K]

















S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE





C/



[I] [D]





























































infirmation







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU ONZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTE



S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audi...

11/05/2022

ARRÊT N°194

N° RG 20/03642 - N° Portalis DBVI-V-B7E-N3ZQ

IMM - AC

Décision déférée du 16 Novembre 2020 - Juge des contentieux de la protection d'ALBI - 11-19-0438

M.[K]

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

[I] [D]

infirmation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU ONZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-charles BOURRASSET de la SCP DUSAN-BOURRASSET-CERRI, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur [I] [D]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représenté par Me Philippe REYNAUD de la SCP PALAZY-BRU ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ALBI

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant I. MARTIN DE LA MOUTTE, Conseillère V.SALMERON, présidente, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère

P. BALISTA, conseiller

Greffier, lors des débats : C. OULIE

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par C. OULIE, greffier de chambre.

Exposé des faits et procédure :

Par offre de prêt acceptée le 21 mai 2016, la SA BNP Paribas Personal Finance a accordé à Monsieur [I] [D] un crédit affecté à l'achat d'un véhicule Audi A4 d'un montant de 20.700 € au taux annuel de 5,20 % remboursable en 72 mensualités de 390,73 €.

Monsieur [I] [D] a cessé d'honorer les échéances du prêt au mois de juillet 2018. Par courrier recommandé du 11 octobre 2018, la SA BNP Paribas Personal Finance a mis en demeure Monsieur [I] [D] de régulariser ses échéances impayées dans un délai de 10 jours.

Par courrier recommandé du 8 novembre 2018, la SA BNP Paribas PF a prononcé la déchéance du terme et a mis en demeure Monsieur [I] [D] de solder sa dette sous 8 jours.

Par acte du 19 novembre 2019, la SA BNP Paribas PF a assigné Monsieur [I] [D] devant le Tribunal d'instance d'Albi aux fins notamment d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 17.237,12 € assortie des intérêts au taux de 5,20% à compter du 28 octobre 2019 et jusqu'au parfait paiement.

Monsieur [I] [D] a demandé reconventionnellement la condamnation de la SA BNP Paribas à lui payer la somme de 17.237,12 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de sa responsabilité civile.

Par jugement du 16 novembre 2020, le Juge des contentieux de la protection du Tribunal Judiciaire d'Albi a :

- Dit que la SA BNP Paribas qui a manqué à son devoir de mise en garde de l'emprunteur au titre du risque d'endettement excessif induit par la

souscription de l'emprunt litigieux, a engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de

Monsieur [I] [D] ;

- Condamné la SA BNP Paribas à verser à Monsieur [I] [D] une somme de 10.000 € de dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié à la perte de chance de ne pas souscrire le contrat litigieux ;

- Condamné la SA BNP Paribas à verser à Monsieur [I] [D] une somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la SA BNP Paribas PF aux entiers dépens.

Par déclaration en date du 16 décembre 2020, la SA BNP Paribas Personal Finance a relevé appel du jugement.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions notifiées le 9 décembre 2021 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la SA BNP Paribas Personal Finance demandant, au visa des articles L. 312-1 et s. du code de la consommation, de :

- Réformer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de la banque au titre de son devoir de mise en garde et l'a condamné au paiement de la somme de 10.000€ à titre de dommages et a omis de statuer sur les demandes de la société BNP PARIBAS PF,

- Débouter Monsieur [D] de l'ensemble de ses demandes, les disant injustes et mal fondées,

- Condamner Monsieur [D] payer à la société BNP Paribas PF la somme de 17.237,12€, augmentée des intérêts au taux contractuel dus à compter du 28 octobre 2019 et ce jusqu'au parfait paiement,

- Le condamner à payer à la société BNP Paribas PF la somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Vu les conclusions notifiées le 15 juillet 2021 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de Monsieur [I] [D] demandant, au visa des articles L. 311-8 et -9 du code de la consommation devenus L. 312-14 et -16, 1147 ancien du code civil devenu 1231-1 et 1343-5 du code civil, de :

A titre principal, il est demandé à la Cour de :

- dire que la SA BNP Paribas personal finance n'a pas prononcé la déchéance du terme,

- débouter la SA BNP Paribas personal finance de ses demandes au titre du capital non échu et de JUGER que la condamnation de Monsieur [I] [D] ne saurait excéder 2.767,85 €,

- dire que la SA BNP Paribas personal finance a failli à l'ensemble des obligations précontractuelles lui incombant aux termes des dispositions du Code de la consommation,

- condamner la SA BNP Paribas personal finance à verser à Monsieur [D] la somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts,

- ordonner la compensation des sommes dues,

A titre subsidiaire, si la faute de la banque n'était pas retenue, il est demandé à la Cour de:

- débouter la SA BNP Paribas personal finance de ses demandes au titre du capital non échu et de JUGER que la condamnation de Monsieur [I] [D] ne saurait excéder 2.767,85 €

- prononcer l'échelonnement du paiement de la dette de Monsieur [D] qui se réalisera comme suit : 23 mensualités de 100,00 euros et Une 24ème et dernière mensualité d'un montant de 467,85 euros à parfaire

A titre encore plus subsidiaire, si la faute de la banque n'était pas retenue et que la déchéance du terme est considérée acquise, il est demandé à la Cour de :

- Ramener l'indemnité légale de 8% qui constitue une clause pénale à l'€ symbolique,

- Prononcer l'échelonnement du paiement de la dette de Monsieur [D] qui se réalisera comme suit : 23 mensualités de 250,00 euros et Une 24ème et dernière mensualité d'un montant de 11.487,12 € à parfaire

- ordonner que les paiements à intervenir s'imputent sur le capital et non sur les intérêts

- débouter la SA BNP Paribas personal finance de sa demande au titre de l'article 700

du Code de procédure civile

En tout état de cause,

- condamner la SA BNP Paribas personal finance à verser à Monsieur [D] la somme de 1.500,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la SA BNP Paribas personal finance aux entiers dépens.

L'instruction de la procédure a été clôturée par ordonnance du 10 janvier 2022.

MOTIFS:

Le prêt litigieux est soumis aux dispositions du code de la consommation dans sa numérotation et rédaction en vigueur entre le 1er mai 2011 et le 1er juillet 2016.

- sur le manquement au devoir de mise en garde :

Monsieur [I] [D] soutient que le crédit qui lui a été accordé le 21 mai 2016 était disproportionné à ses revenus et charges.

L'article L.311-9 du code de la consommation, impose au prêteur, de vérifier préalablement la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à sa demande du et, sauf dans les cas d'une opération mentionnée au 1 de l'article L. 511-6 du code monétaire et financier, étrangers au présent litige, de consulter le ficher prévu à l'article L. 333-4 du code de la consommation dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5.

Le banquier dispensateur de crédit est ainsi tenu d'un devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur non averti à raison de ses capacités financières et des risques de l'endettement nés de l'octroi du prêt.

En matière de crédit à la consommation, il est satisfait à cette obligation notamment par l'établissement de la fiche de dialogue prévue par l'article L. 311-10 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016 le 1erjuillet 2016, sur la base des renseignements fournis par l'emprunteur.

Selon les articles D. 311-10-2 et D. 311-10-3 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date du prêt litigieux, lorsque le crédit affecté excède un montant fixé par décret, en l'occurrence 3.000,00 euros, cette fiche de dialogue doit être corroborée par la production de toute pièce justificative du revenu de l'emprunteur.

En l'espèce la banque verse aux débats une fiche de dialogue, signée mais dont la partie relative au budget mensuel n'a pas été complétée, à laquelle est toutefois annexée une fiche précisant que l'emprunteur vit en concubinage avec Madame [G] [R], aide à domicile, qu'il a un enfant à charge, qu'il perçoit 1.800 €, Madame [R] percevant 1.200 €, qu'il est propriétaire depuis août 2015 de son logement financé par un emprunt dont les échéances mensuelles sont de 580 €. L'ensemble des justificatifs visés à l'article D.311-10-3 du code de la consommation, et notamment les bulletins de paie de Monsieur [D] pour les mois d'avril, mai et juin 2016 sont joints à ces documents.

Le prêteur justifie ainsi avoir satisfait à ses obligations de vérification de la solvabilité de l'emprunteur. Il justifie également d'une consultation préalable du FICP qui ne fait état d'aucun incident de paiement.

Monsieur [I] [D], emprunteur non averti, ne disposant pas de compétences particulières pour analyser le risque d'endettement auquel il s'exposait, était créancier d'une obligation de mise en garde.

Il incombe ainsi à l'établissement de crédit de démontrer qu'il a satisfait à son devoir de mise en garde. Toutefois, pour rechercher la responsabilité de la banque, l'emprunteur doit, au préalable, apporter la preuve de l'inadaptation de son engagement par rapport à ses capacités financières ou d'un risque d'endettement qui serait né de l'octroi du crédit.

En l'espèce, eu égard aux informations communiquées, Monsieur [I] [D] disposait d'un reste à vivre de 830 € avec un enfant à charge, de sorte que le taux d'endettement à hauteur de 53,94 % est excessif.

Le manquement de la banque à son devoir de mise en garde est à l'origine pour M.[D] d'un préjudice résultant de la perte d'une chance de ne pas contracter ce crédit.

L'indemnisation de ce préjudice ne peut toutefois être égale au montant de la créance du prêteur mais doit être appréciée en fonction de la probabilité pour l'emprunteur de renoncer au crédit s'il avait été mis en garde. En l'espèce, eu égard à l'importance de l'usage de ce véhicule pour M. [D], la perte de chance de ne pas recourir à l'emprunt litigieux est seulement de 10%'.

Sur la créance de la banque :

Le premier juge n'a pas statué sur les demandes de la banque.

Il résulte de l'application combinée des articles 1134, 1147 et 1184 du code civil, pris dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 entrée en vigueur le 1er octobre 2016, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf stipulation expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier qu'après la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant à l'emprunteur le délai dont il dispose pour y faire obstacle.

En l'espèce, l'appelante justifie préalablement au prononcé de la déchéance du terme par LR/AR du 8 novembre 2018, d'une mise en demeure par LR/AR du 11 octobre 2018, de régler les échéances impayées s'élevant à 1.595,03 euros dans un délai de 10 jours, assortie de l'information qu'à défaut de règlement dans ce délai, l'intégralité du capital restant dû ainsi que les diverses indemnités et pénalités prévues au contrat deviendraient immédiatement exigibles. Monsieur [D] n'est donc pas fondé à soutenir que la banque n'a pas régulièrement prononcé la déchéance du terme.

La banque justifie par la production du contrat de prêt, du tableau d'amortissement, d'un historique de compte, de l'ensemble des éléments précontractuels et d'un décompte de sa créance s'établissant comme suit :

- mensualités échues impayées : 1954, 70 €

- mensualités impayées reportées : 813, 15 €

- capital non échu : 13.397, 48 €

- indemnité légale de 8 % : 1.071, 79 €.

L'indemnité de résiliation prévue au contrat qui s'analyse en une clause pénale au sens de l'article 1152 du code civil peut, même d'office, être modérée ou augmentée si elle est manifestement excessive ou dérisoire. En l'espèce, eu égard aux paiements intervenus et au solde restant dû, son montant à hauteur de 1.071, 79 € n'apparaît pas manifestement excessif. Il n'y a donc pas lieu de la réduire.

Monsieur [D] sera en conséquence condamné au paiement de la somme de 17.237, 12 € avec intérêts au taux de 5,20 % l'an à compter du 28 octobre 2019 sur la somme de 16.165, 33 €.

- sur les délais de grâce :

L'article 1343 -5 du code civil permet au juge compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues

Monsieur [D] sollicite l'échelonnement de sa dette par 23 mensualités de 100 € mais ne justifie pas qu'il sera en situation de régler la 24eme échéance équivalente au reliquat de sa dette. La banque est en outre fondée à souligner que l'ancienneté du litige, et l'absence de toute condamnation en première instance, eu égard à l'omission du premier juge de statuer sur les demandes de la banque lui a permis de bénéficier de délais de paiement.

Il n'y a donc pas lieu d'accueillir cette demande.

Sur les frais irrépétibles et les dépens:

Partie perdante Monsieur [I] [D] supportera les dépens de première instance et d'appel.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant après en avoir délibéré, publiquement par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu le 16 novembre 2020 par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire d'Albi, sauf en ce qu'il a dit que la BNP a manqué à son devoir de mise en garde et engagé sa responsabilité à l'égard de Monsieur [D] ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés ;

Condamne la SA BNP Paribas personal finance à payer à Monsieur [I] [D] la somme de 2.070 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du manquement à l'obligation de mise en garde ;

Condamne Monsieur [I] [D] à payer à la SA BNP Paribas personal finance la somme de 17.237, 12 € avec intérêts au taux de 5,20 % l'an à compter du 28 octobre 2019 sur la somme de 16.165, 33 €.

Ordonne la compensation de ces condamnations réciproques ;

Condamne Monsieur [I] [D] aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le greffier, La présidente,

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/03642
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;20.03642 ?
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