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15/04/2022 | FRANCE | N°22/00147

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Etrangers, 15 avril 2022, 22/00147


COUR D'APPEL DE TOULOUSE









Minute 2022/148

N° RG 22/00147 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OXQA



O R D O N N A N C E



L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 15 avril à 14h10



Nous A. MAFFRE, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.



Vu l'ordonnance rendue le 14 Avril 2022 à 15H51 par le juge des

libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :



[D] [I]

né le [Date naissa...

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

Minute 2022/148

N° RG 22/00147 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OXQA

O R D O N N A N C E

L'an DEUX MILLE VINGT DEUX et le 15 avril à 14h10

Nous A. MAFFRE, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 21 DECEMBRE 2021 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu l'ordonnance rendue le 14 Avril 2022 à 15H51 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :

[D] [I]

né le [Date naissance 1] 1992 à [Localité 2]

de nationalité Algérienne

Vu l'appel formé le 14/04/2022 à 20 h 35 par télécopie, par Me Fanny SARASQUETA, avocat au barreau de TOULOUSE;

A l'audience publique du 15/04/2022 à 10h00, assisté de K. MOKHTARI avons entendu:

[D] [I]

assisté de Me Fanny SARASQUETA, avocat au barreau de TOULOUSE

qui a eu la parole en dernier

En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;

En présence de Mme [N] représentant la PREFECTURE DU PUY DE DOME ;

avons rendu l'ordonnance suivante :

M. [D] [I], âgé de 29 ans et de nationalité algérienne, a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français assorti d'une assignation à résidence, pris par le préfet de l'Ain le 30 janvier 2022 et notifié le même jour.

Le 15 mars 2022, le préfet du Puy-de-Dôme a pris à son encontre une décision de placement en rétention administrative, notifiée le même jour.

Saisi par le préfet du Puy-de-Dôme en prolongation de la rétention et par M. [D] [I] en contestation de l'arrêté de placement en rétention administrative, le juge des libertés et de la détention de Toulouse a ordonné la jonction des procédures, rejeté les exceptions de procédure, constaté la régularité du placement en rétention administrative et ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du 17 mars 2022 confirmée en appel le 21 mars 2022.

Indiquant n'avoir pu l'éloigner dans le délai de rétention de 28 jours, le préfet du Puy-de-Dôme a sollicité du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse une deuxième prolongation du maintien de M. [D] [I] en rétention pour une durée de trente jours suivant requête datée du 13 avril 2022 parvenue au greffe du tribunal le même jour à 13h47.

Ce magistrat a ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du14 avril 2022 à 15 heures 18.

M. [D] [I] a interjeté appel de cette décision, par courriel de son conseil adressé au greffe de la cour le 14 avril 2022 à 20h35.

A l'appui de sa demande d'infirmation de l'ordonnance entreprise et de mise en liberté, le conseil de M. [D] [I] a principalement soutenu que :

- sur l'irrecevabilité de la requête, les pièces relatives à la garde à vue (heures, modalités, issue), utiles et conditionnant la recevabilité sont manquantes alors que le juge des libertés et de la détention doit s'assurer de la situation de la personne tout au long de la rétention et de l'exercice de ses droits,

- sur le fond, aucun routing n'est réservé malgré une demande en date du 15 mars 2022 pour un vol à compter du 22 mars 2022 et ce, parce que toutes les frontières avec l'Algérie sont fermées et que les tensions diplomatiques ne permettent pas leur réouverture.

À l'audience, Maître Sarasqueta a repris oralement les termes de son recours et souligné notamment que :

. la garde à vue doit pouvoir être contrôlée pour s'assurer du respect des droits de l'étranger en rétention : il a été privé de ces droits pendant le temps où il a été sorti du centre de rétention administrative alors que la garde à vue n'interrompt pas la rétention, et il n'est pas établi que le procureur de la République qui doit être informé de tout pendant la rétention a été avisé de cette garde à vue,

. il n'y a pas de vol pour l'Algérie : quoiqu'en dise la préfecture, sans le prouver, elle n'a aucun retour sur sa demande de routing faite il y a un mois.

M. [I] qui a demandé à comparaître, a sollicité sa mise en liberté, indiquant n'avoir rien fait et n'être pas le véritable auteur des dégradations à l'origine de la garde à vue. Il a remis son passeport aux gendarmes qui lui ont dit qu'il n'était pas obligatoire de revenir signer et il demande un vol pour retourner en Algérie.

Le préfet du Puy-de-Dôme, régulièrement représenté à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en s'en remettant à la motivation de celle-ci et en expliquant que le pôle central d'Eloignement gère les demandes des différents CRA et fait des regroupements (notamment le 26 avril) car les vols commerciaux n'autorisent qu'un certain nombre de retenus.

Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la requête

En vertu de l'article R743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2.

Doivent être considérées des pièces justificatives utiles dont la production conditionne la recevabilité de la requête les pièces qui sont nécessaires à l'appréciation par le juge des éléments de fait et de droit dont l'examen lui permet d'exercer son plein pouvoir.

Au cas particulier, il est soutenu que les pièces relatives à la garde à vue sont des pièces justificatives utiles au contrôle de la rétention qui incombe au juge des libertés et de la détention.

Pour autant, il est constant que pendant sa garde à vue, M. [I] n'était pas en rétention et au centre de rétention administrative : si cette procédure pénale n'a pas interrompu la mesure de rétention prise le 15 mars 2022, elle en a néanmoins suspendu le cours, un autre régime juridique et d'autres droits s'appliquant à l'intéressé pendant ce laps de temps, sur la régularité desquels il n'appartient pas au juge du contrôle de la rétention de se prononcer.

Au demeurant, l'article L744-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile impose d'informer dans les meilleurs délais une personne placée en rétention administrative qu'elle bénéficie d'un certain nombre de droits dans le lieu de rétention : or, pendant un temps, M. [I] n'était pas au centre de rétention et ne peut donc revendiquer l'accès auxdits droits et son contrôle par le juge.

Et le juge de la rétention n'a à vérifier la régularité de la garde à vue d'un étranger que pendant la période ayant précédé la notification de la décision de placement en rétention administrative, ce qui n'est pas le cas ici, la mesure de garde à vue s'étant déroulée pendant la période de rétention et les restrictions des droits imposées par le régime de la garde à vue résultant d'une décision rendue dans le cadre d'une procédure judiciaire indépendante de la rétention.

Les pièces relatives à la garde à vue ne peuvent donc être analysées comme des pièces justificatives utiles, de sorte qu'elles n'avaient pas à être jointes à la requête en prolongation de la rétention : celle-ci sera en conséquence déclarée recevable.

Sur la prolongation de la rétention

En application de l'article L741-3 du CESEDA, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.

Il s'en évince que les diligences de l'administration doivent être mises en oeuvre dès le placement en rétention et qu'elles doivent être effectives : le maintien en rétention ne se conçoit que s'il existe des perspectives d'éloignement et il convient de se demander non seulement si la préfecture a effectué les démarches nécessaires mais également si les diligences ont une chance d'aboutir dans le délai de la durée légale de la rétention.

Au cas particulier, si le routing a été sollicité dès le 15 mars 2022 et le placement en rétention administrative de M. [I], aucune réservation n'a encore été prise un mois plus tard, sans que le pôle central d'éloignement témoigne de quelque obstacle temporaire ou structurel.

Dans ces conditions, il n'apparaît pas que les diligences effectuées, certes sans délai, soient efficaces et de nature à limiter la rétention au temps strictement nécessaire à l'éloignement de l'intéressé.

Dès lors, la prolongation de la mesure n'est pas suffisamment justifiée.

La décision déférée sera donc infirmée et la mise en liberté de M. [I], ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,

Infirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse le 14 avril 2022,

Ordonnons la mainlevée de la mesure de maintien en rétention (zone d'attente) sans délai de M. [D] [I],

Rappelons à M. [D] [I] qu'il a l'obligation de quitter le territoire français,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture du Puy-de-Dôme, service des étrangers, à M. [D] [I], ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public.

LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE

K. MOKHTARI A. MAFFRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 22/00147
Date de la décision : 15/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-15;22.00147 ?
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