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16/07/2021 | FRANCE | N°18/045351

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 43, 16 juillet 2021, 18/045351


16/07/2021

ARRÊT No21/328

No RG 18/04535 - No Portalis DBVI-V-B7C-MS6Q

CD/KB

Décision déférée du 18 Octobre 2018 - Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du TARN ET GARONNE

(21600444)

[D] [K]

[R] [A] épouse [Q]

C/

CAISSE ASSURANCE RETRAITE ET DE SANTE AU TRAVAIL MIDI-PYRENEES

RÉFORMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème chambre sociale - section 3
***
ARRÊT DU SEIZE JUILLET DEUX MILLE VINGT ET UN
***

APPELANTE

Madame [R]

[A] épouse [Q]
[Adresse 1]
[Localité 1]

représentée par Me Erwan VIMONT de la SCP LEX ALLIANCE, avocat au barreau d'AGEN substitué par Me Maëlle BLAZEJCZYK,...

16/07/2021

ARRÊT No21/328

No RG 18/04535 - No Portalis DBVI-V-B7C-MS6Q

CD/KB

Décision déférée du 18 Octobre 2018 - Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du TARN ET GARONNE

(21600444)

[D] [K]

[R] [A] épouse [Q]

C/

CAISSE ASSURANCE RETRAITE ET DE SANTE AU TRAVAIL MIDI-PYRENEES

RÉFORMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème chambre sociale - section 3
***
ARRÊT DU SEIZE JUILLET DEUX MILLE VINGT ET UN
***

APPELANTE

Madame [R] [A] épouse [Q]
[Adresse 1]
[Localité 1]

représentée par Me Erwan VIMONT de la SCP LEX ALLIANCE, avocat au barreau d'AGEN substitué par Me Maëlle BLAZEJCZYK, avocat au barreau D'AGEN

INTIMÉE

CAISSE ASSURANCE RETRAITE ET DE SANTE AU TRAVAIL MIDI-PYRENEES
[Adresse 2]
[Localité 2] / FRANCE

représentée par Me Ludovic MARIGNOL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945.1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Juin 2021, en audience publique, devant Mme C. DECHAUX, conseillère faisant fonction de président, chargée d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

C. DECHAUX, conseillère faisant fonction de président
P. POIREL, conseiller
A. MAFFRE, conseiller

Greffier, lors des débats : K. BELGACEM

ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
- signé par C. DECHAUX, conseillère faisant fonction de président, et par K. BELGACEM, greffier de chambre.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [R] [A] veuve [Q], née le [Date naissance 1] 1947, bénéficie depuis le 1er avril 2005, d'une pension de réversion et depuis le 1er décembre 2006 d'une pension de retraite personnelle. Ces pensions sont toutes deux versées par la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail de Midi-Pyrénées.

Après contrôle ayant révélé des revenus et avantages non déclarés, la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail Midi-Pyrénées a notifié le 30 septembre 2014 à Mme [Q] la révision de sa pension de réversion avec d'une part une diminution de son montant et d'autre part un trop perçu de 33 478.36 euros pour la période du 1er mai 2008 au 31 août 2014, indu ramené ensuite à 10 929.96 euros au titre de la période du 1er février 2013 au 31 janvier 2015.

La caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail a ensuite notifié à Mme [Q] deux mises en demeure, en date des 9 octobre 2015 et 17 février 2016, portant sur la somme de 10 929.96 euros, la seconde précisant que la période concernée par l'indu est celle du 1er février 2013 au 31 janvier 2015, puis a saisi le 29 novembre 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Tarn et Garonne en sollicitant la condamnation de Mme [Q] au paiement de la somme de 10 929.96 euros.

Par jugement en date du 18 octobre 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Tarn et Garonne a:
* débouté Mme [Q] de ses demandes en annulation de la décision de révision de sa pension de réversion et en paiement de celle-ci depuis le 1er septembre 2014,
* débouté Mme [Q] de sa demande tendant à voir reconnaître la prescription de l'indu et de l'action de la caisse,
* condamné Mme [Q] à payer à la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail la somme de 10 929.96 euros au titre de l'indu de pension de réversion pour la période du 1er février 2013 au 30 janvier 2015,
* débouté Mme [Q] de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [Q] a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

En l'état de ses conclusions réceptionnées par le greffe le 11 juillet 2019, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, Mme [Q] demande à la cour de:
* réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
* déclarer forclose la demande de révision de la pension de réversion en date du 30 septembre 2014,
* condamner la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail au paiement de la somme de 455.78 euros au titre de la pension de réversion et ce à compter du 1er septembre 2014,
* condamner la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail au paiement de la somme de 26 891.02 euros arrêtée au 31 janvier 2020, outre la somme mensuelle de 455.78 euros à compter de février 2020,
* débouter la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail de toutes ses demandes.
Subsidiairement, elle demande à la cour de:
* dire prescrite la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail en sa demande de restitution de la somme de 10 929.96 euros,
* dire que la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail ne peut solliciter la restitution du trop versé au-delà du 9 octobre 2013, soit du 9 octobre 2013 au 31 août 2014.
En tout état de cause, elle demande à la cour de:
* condamner la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail au paiement de la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts,
* dire n'y avoir lieu à compensation,
* condamner la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En l'état de ses conclusions réceptionnées par le greffe le 30 décembre 2019, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail Midi-Pyrénées demande à la cour de:
* confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
* constater que Mme [Q] est redevable du solde de sa dette qui s'élève à 10 929.98 euros au titre d'échéances de pension de réversion indûment versées,
* condamner Mme [Q] au remboursement de cette dette,
* rejeter l'ensemble des demandes de Mme [Q].

MOTIFS

* sur la révision du montant de la pension de réversion:

L'article L.353-1 du code de la sécurité sociale dispose qu'en cas de décès de l'assuré, son conjoint survivant a droit à une pension de réversion à partir d'un âge et dans les conditions déterminées par décret si ses ressources personnelles ou celles du ménage n'excèdent pas des plafonds fixés par décret.

L'article R.353-1 du code de la sécurité sociale stipule que la pension de réversion est attribuée lorsque le conjoint de l'assuré décédé ou disparu ne dispose pas de ressources dépassant un montant fixé par décret. Ces ressources sont appréciées selon les modalités et dans les conditions fixées par les articles R.815-18 à R.815-20, R.815-22 à R.815-25, R.815-27 et au deuxième alinéa de l'article R.815-29.

Aux termes de l'article R.353-1-1 du code de la sécurité sociale, la pension de réversion est révisable en cas de variation dans le montant des ressources, calculé en application des dispositions de l'article R.353-1 dans les conditions et selon les modalités fixées aux articles R.815-20, R.815-38, R.815-39 et R.815-42. La date de la dernière révision ne peut être postérieure:
a) à un délai de trois mois après la date à laquelle le conjoint survivant est entré en jouissance de l'ensemble des avantages personnels de retraite de base et complémentaire lorsqu'il peut prétendre à de tels avantages,
b) à la date à laquelle il atteint l'âge prévu par l'article L.161-17-2, lorsqu'il ne peut pas prétendre à de tels avantages.

Les articles R.815-18 et R.815-38 du code de la sécurité sociale auxquels renvoient les articles R.353-1 et R.353-1-1 du même code, font peser sur l'assuré une obligation déclarative envers l'organisme chargé de la liquidation non seulement de ses ressources mais aussi de tout changement survenu dans celles-ci.

Il résulte en conséquence de la combinaison des dispositions des articles R.353-1-1, R.815-18 et R.815-38 du code de la sécurité sociale, que si la date de la dernière révision de la pension de réversion ne peut être postérieure, notamment, à un délai de trois mois après la date à laquelle le conjoint survivant est entré en jouissance de l'ensemble des avantages personnels de retraite de base complémentaire lorsqu'il peut prétendre à de tels avantages, c'est à la condition que l'intéressé ait informé de cette date l'organisme auquel incombe le paiement de la pension de réversion.

Mme [Q] soutient que la demande de révision de la pension de réversion n'ayant pas été régularisée dans le délai de trois mois suivant l'entrée en jouissance de l'ensemble de ses avantages personnels de retraite de base et complémentaire, la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail est forclose à réviser la pension de réversion, le point de départ du délai de forclusion étant la date à laquelle la caisse a été informée de la date de perception des droits personnels de l'assuré, alors que:
* d'une part elle l'a informée de sa date de mise à la retraite dès le 1er décembre 2006, puis le 22 avril 2013 des droits perçus au titre de sa retraite personnelle, sans que la caisse lui notifie dans le délai de trois mois la révision de la pension de réversion,
* d'autre part, elle a rempli le 18 avril 2013 le questionnaire de ressources informant la caisse de ses revenus et de son patrimoine, qui l'a réceptionné le 22 avril 2013, et ce n'est que le 30 septembre 2014, soit 17 mois plus tard qu'elle lui a notifié un versement indu ainsi que la révision du montant de la pension de réversion.
Elle soutient que le délai de trois mois ne constitue pas un délai de cristallisation des ressources qui pourraient être prise en compte pour une révision de la pension de réversion à quelque moment que de soit y compris au-delà de ce délai de 3 mois et en déduit que la caisse ne pouvait pas procéder à une révision de la pension de réversion au-delà du 22 juillet 2013, étant alors forclose en sa demande de révision de la pension de réversion.

La caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail lui oppose d'une part que le délai de trois mois permet de cristalliser le montant des ressources et n'est pas un délai dans lequel elle a l'obligation d'agir et d'autre part qu'en cas de déclarations incomplètes, tardives ou d'absence de déclaration, la caisse débitrice de la pension de réversion peut procéder à une révision de son montant passé le délai de trois mois, et que ce délai de trois mois, après la date à laquelle le conjoint survivant est entré en jouissance de l'ensemble des avantages personnels de retraite de base complémentaire lorsqu'il peut y prétendre, est subordonné à la condition que l'intéressé ait informé de cette date l'organisme auquel incombe le paiement de la pension de réversion.
Elle souligne le caractère évolutif des déclarations de Mme [Q] qui a omis de déclarer plus de 2 000 euros de ressources mensuelles et que ce n'est que:
* le 6 mai 2014 qu'elle lui a indiqué la date d'attribution de sa retraite personnelle ARRCO dont elle bénéficiait depuis le 1er décembre 2006,
* le 31 juillet 2014 qu'elle a reconnu percevoir depuis sept ans un loyer commercial, mentionné pour la première fois le 18 avril 2013.
Elle soutient que ce n'est qu'à compter du 1er août 2014, date de réception de ce courrier, qu'elle a été en mesure de connaître les ressources réelles de l'assurée, et souligne lui avoir notifié à l'intérieur du délai de trois mois, le 30 septembre 2014, la révision de son dossier et la détermination d'un trop perçu.

En l'espèce, il est établi que Mme [Q] a rempli:
* le 20 avril 2005 un questionnaire de demande de retraite de réversion, en lien avec le décès de son conjoint survenu le 4 février 1996, en indiquant que ses revenus de profession artisanale pour 2004 se sont élevés à 11 220 euros auxquels se sont ajoutées des indemnités journalières pour un montant de 1519 euros, en précisant disposer de capitaux mobiliers s'élevant à 355 euros et être propriétaire d'une maison dont sa mère a l'usufruit mais dans laquelle elle habite,
* le 20 septembre 2006, un deuxième questionnaire "retraite de réversion", en y mentionnant avoir perçu en juin 2006 une pension de réversion de la M.S.A (33.20 euros, annuelle), une pension de réversion de Pro Btp (1 910 euros, annuelle), une pension de réversion de la CRAM (440.31 euros, mensuelle), que son BIC est de 15 037 euros par an, avoir des capitaux placés pour un montant de 8 000 euros et évaluer sa maison avec un local professionnel à 200 000 euros (dont sa mère a l'usufruit),
* le 18 avril 2013, un questionnaire "retraite de réversion contrôle à compter de l'âge légal d'obtention du taux plein", en y mentionnant avoir perçu en décembre 2012, janvier 2013 et février 2013:
- des pensions de réversion de la M.S.A (4.34 euros, annuelle), de Pro Btp (520.16 euros, annuelle), de la CRAM (619.71 euros, mensuelle),
- des pensions, retraites, rentes, retraites personnelles du R.S.I (mensuelles, de montants respectifs pour ces trois mois de 1 276.53 euros, 1 142.10 euros et 1 142.10 euros), de UGRR-ISICA (60.38 euros en janvier 2013), de ACGM (188.45 euros en janvier 2013),
- être propriétaire d'un local commercial d'une valeur de 60 000 euros,
- être titulaire d'un contrat financement obsèques d'une valeur de 2 505.58 euros.

La caisse justifie également que sur sa demande en date du 21 juillet 2014, Mme [Q] lui a répondu le 30 juillet 2014, que la date exacte de sa fin d'activité du salon de coiffure est le 18 août 2007 et qu'elle a commencé à louer son local commercial le 20 août 2007, cette réponse ayant été réceptionnée le 1er août 2014 et que ce n'est que le 6 mai 2014 que Mme [Q] lui a retourné la copie de la notification de la retraite complémentaire ARRCO mentionnant comme date de prise d'effet celle du 1er décembre 2006.

Alors que Mme [Q] ne s'explique pas sur ses absences d'informations spontanées des changements survenus dans ses ressources, comme sur l'absence de mention des loyers commerciaux perçus, notamment en réponse au questionnaire retourné le 18 avril 2013, la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail justifie que ce n'est que par suite du contrôle opéré à partir d'avril 2013 et des réponses et justificatifs transmis successivement et en réponse aux questions posées, que ce n'est qu'à compter du 1er août 2014 qu'elle a été en possession d'informations complètes sur les ressources de cette assurée alors que celles-ci sont prises en compte dans le montant de la pension de réversion.

Il s'ensuit que la date du 1er août 2014 est le point de départ du délai de révision.

En notifiant à Mme [Q], par lettre recommandée avec avis de réception en date du 30 septembre 2014, la révision de la pension de réversion, la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail l'a effectuée dans le délai de trois mois imparti par les dispositions de l'article R.351-1-1 du code de la sécurité sociale.

Le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a retenu que la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail a ainsi pu régulièrement procéder à la révision de la pension de réversion sur la base des nouveaux éléments portés à sa connaissance et débouté Mme [Q] de sa demande subséquente en annulation de sa décision de révision de la pension de réversion.

* sur la prescription de l'indu:

Il résulte de l'article L.355-3 du code de la sécurité sociale que toute demande de remboursement de trop-perçu en matière de prestation de vieillesse et d'invalidité se prescrit par deux ans à compter de la date du paiement des dites prestations entre les mains du bénéficiaire sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration et l'article L.815-11 du code de la sécurité sociale dispose que les arrérages versés sont acquis aux bénéficiaires sauf lorsqu'il y a fraude, absence de déclaration de ressources ou omission de ressources dans les déclarations et que toute demande de remboursement de trop perçu se prescrit par deux ans à compter de la date du paiement de l'allocation entre les mains du bénéficiaire, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration.

Il s'ensuit que les arrérages versés sont acquis aux bénéficiaires sauf lorsqu'il y a fraude, absence de déclaration de ressources ou omission de ressources dans les déclarations, et que le point de départ de la prescription biennale est la date à laquelle l'organisme prestataire a eu une connaissance complète des dites ressources.

Pour juger que l'action de la caisse en paiement de l'indu portant sur la période du 1er février 2013 au 30 janvier 2015 n'est pas prescrite, les premiers juges ont retenu qu'elle a notifié une mise en demeure du 9 octobre 2015 réceptionnée le 12 octobre 2015 et confirmé cet indu par une mise en demeure du 17 février 2016 réceptionnée le 26 février 2016.

Mme [Q] soutient que des mises en demeure ne constituent pas des actes interruptifs de prescription, que seule une demande en justice étant susceptible d'interrompre le délai de prescription, la caisse est irrecevable en son action en paiement de l'indu, alors qu'elle n'a pas procédé par voie d'assignation et qu'en procédure orale seul le dépôt de conclusions à l'audience permet d'invoquer l'interruption de la prescription à condition que le demandeur y soit présent.

Elle soutient en outre que si la cour jugeait les mises en demeure en date des 9 octobre 2015 et 17 février 2016 constitutives d'actes interruptifs, la caisse ne peut solliciter la restitution des pensions versées que sur la période du 9 octobre 2013 au 31 août 2014, soit dans les deux ans précédents.

La caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail lui oppose avoir retenu que la date du fait générateur de la prescription biennale pour agir en recouvrement et notifier l'indu est le 1er août 2014, qu'elle a notifié à l'assurée la révision de son dossier en septembre 2014 puis demandé le 16 février 2015 le remboursement du trop perçu dans la limite de 24 mois, en notifiant deux mises en demeure réceptionnées respectivement les 12 octobre 2015 et 26 février 2016, puis en saisissant le 29 novembre 2016 le tribunal des affaires de sécurité sociale.

L'article 2241 du code civil dispose qu'une demande en justice, même en référé interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion, et il résulte de l'article 1345 alinéa 3 du code civil qu'une mise en demeure n'interrompt pas la prescription.

Il s'ensuit que seule la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 29 novembre 2016 constitue un acte interruptif de la prescription.

La cour vient de juger que la date à laquelle la caisse a eu une connaissance complète de la situation de ressources de Mme [Q] est celle du 1er août 2014.

Cette date constitue le point de départ de la prescription de l'action en paiement de l'indu de la caisse, qui reconnaît ne pas avoir retenu de fraude et que la prescription biennale est applicable.

Il s'ensuit que la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail qui a saisi le 29 novembre 2016 le tribunal des affaires de sécurité sociale de sa demande portant sur la condamnation au paiement de l'indu afférent à la période du 1er février 2013 au 31 janvier 2015, a engagé son action en paiement de l'indu à une date à laquelle la prescription était acquise pour les cotisations indûment payées avant le mois de novembre 2014.

Par réformation du jugement entrepris, la cour dit la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail irrecevable en son action en recouvrement de l'indu de pension de réversion portant sur la période antérieure au mois de novembre 2014.

* Sur le montant de l'indu:

En raison de ressources dépassant le plafond, il n'est pas contesté que Mme [Q] ne pouvait bénéficier, sur la période non prescrite de novembre 2014 à janvier 2015 du versement d'une pension de réversion.

Elle doit donc être condamnée au paiement de l'indu de pension de réversion perçu sur cette période soit de la somme de 1 367.24 euros (455.78 x 3).

* Sur la demande indemnitaire de Mme [Q]:

L'article 564 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers de la survenance, ou de la révélation d'un fait et l'article 565 du même code dispose que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

Mme [Q] soutient que le délai de 17 mois mis par la caisse pour réviser la pension de réversion puis solliciter le remboursement d'une partie de la pension versée de septembre 2012 à septembre 2014 est à l'origine du litige alors que le montant des sommes à restituer aurait été moindre si la révision avait été initiée dans les trois mois comme l'impose l'article R.351-1-1 du code de la sécurité sociale. Elle en déduit que la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail a manqué à ses obligations légales et lui a causé un préjudice justifiant sa demande de la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts.

La caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail lui oppose que ce faisant Mme [Q] formule une nouvelle demande en cause d'appel, comme telle irrecevable, et qu'en l'absence de faute, de dommage et de lien de causalité entre les deux, une telle demande doit être rejetée.

Mme [Q] qui n'a pas saisi les premiers juges d'une demande indemnitaire en raison d'une faute imputée à la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail dans la mise en oeuvre de son action en recouvrement d'indu de pension de réversion, est effectivement irrecevable en cause d'appel en ce chef de demande.

Succombant principalement en son appel, Mme [Q] ne peut utilement solliciter l'application à son bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et doit être condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

- Réforme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [Q] de sa demande tendant à voir reconnaître la prescription de l'indu et de l'action de la caisse ainsi que de sa demande subséquente en annulation de sa décision de révision de la pension de réversion et l'a condamnée au paiement à la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail de la somme de 10 929.96 euros au titre de l'indu de pension de réversion pour la période du 1er février 2013 au 30 janvier 2015,

- Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs réformés et y ajoutant,

- Dit la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail irrecevable en son action en recouvrement de l'indu de pension de réversion antérieur au mois de novembre 2014,

- Condamne Mme [R] [A] veuve [Q] à payer à la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail Midi-Pyrénées la somme de 1 367.24 euros au titre de l'indu de pension de réversion afférent aux mois de novembre 2014 à janvier 2015 inclus,

- Déboute la caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail Midi-Pyrénées du surplus de ses demandes,

- Dit Mme [Q] irrecevable en sa demande indemnitaire,

- Dit n'y avoir lieu à application au bénéfice de Mme [Q] des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne Mme [R] [A] veuve [Q] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par C. DECHAUX, conseillère faisant fonction de président et K. BELGACEM, greffier.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

K. BELGACEM C. DECHAUX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 43
Numéro d'arrêt : 18/045351
Date de la décision : 16/07/2021
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2021-07-16;18.045351 ?
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