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14/03/2008 | FRANCE | N°06/04698

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 2 - chambre sociale, 14 mars 2008, 06/04698


No RG : 06 / 04698
Décision déférée du 21 Septembre 2006- Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE-03 / 02924

Christian X...

C /
ASSOCIATION AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES ASSEDIC MIDI PYRENEES

COUR D'APPEL DE TOULOUSE 4ème Chambre Section 2- Chambre sociale *** ARRÊT DU QUATORZE MARS DEUX MILLE HUIT ***

APPELANT (S)
Monsieur Christian X......... 31540 ST FELIX LAURAGAIS

représenté par Me Philippe GRIMALDI, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIME (S)
ASSOCIATION AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES Base aérienne de Lasbordes 34 avenue J

ean-René Lagasse 31130 BALMA

représentée par la SCP CABINET CAMILLE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau...

No RG : 06 / 04698
Décision déférée du 21 Septembre 2006- Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE-03 / 02924

Christian X...

C /
ASSOCIATION AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES ASSEDIC MIDI PYRENEES

COUR D'APPEL DE TOULOUSE 4ème Chambre Section 2- Chambre sociale *** ARRÊT DU QUATORZE MARS DEUX MILLE HUIT ***

APPELANT (S)
Monsieur Christian X......... 31540 ST FELIX LAURAGAIS

représenté par Me Philippe GRIMALDI, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIME (S)
ASSOCIATION AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES Base aérienne de Lasbordes 34 avenue Jean-René Lagasse 31130 BALMA

représentée par la SCP CABINET CAMILLE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau de TOULOUSE
ASSEDIC MIDI PYRENEES Immeuble Diagonale Rue Marco Polo BP 900 31692 LABEGE CEDEX

représentée par la SCP SAINT GENIEST-GUEROT, avocats au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 31 Janvier 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
P. de CHARETTE, président C. PESSO, conseiller C. CHASSAGNE, conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER
ARRET :- CONTRADICTOIRE-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile-signé par P. de CHARETTE, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.

OBJET DU LITIGE
M. X... a été embauché le 1er juillet 1986 par l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES en qualité d'instructeur vol moteur. Il a été désigné chef pilote en 1991. Il a suivi pendant un an à compter du 1er octobre 2002 un congé individuel de formation. Il a contesté les conditions de la reprise de son contrat de travail au sein de l'aéro-club à compter du 1er octobre 2003 et a été licencié pour faute grave le 27 novembre 2003. La lettre de licenciement lui reproche d'avoir eu une attitude incompréhensible et inadmissible de remise en cause de l'intégralité de l'organisation de l'aéro-club, conduite perturbant la bonne marche du service et pouvant affecter la sécurité aérienne des membres du club.
Par jugement de départage en date du 21 septembre 2006, le conseil de prud'hommes de Toulouse a considéré que le poste de chef pilote occupé par M. X... avait été supprimé et a reproché à l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES de ne pas avoir laissé à celui-ci le délai de réflexion d'un mois de l'article L. 321 du code du travail. Il en a déduit que l'inobservation de ce délai rendait le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement a alloué à M. X... les sommes de 15 780 € à titre de dommages-intérêts, 5 260 € à titre d'indemnité de préavis avec les congés payés correspondants, 2 278 € au titre de la mise à pied et 4 500 € à titre d'indemnité de licenciement. Pour le chiffrage des indemnités de rupture, le conseil de prud'hommes a écarté l'application des dispositions du code de l'aviation civile revendiquée par M. X....
Celui-ci a régulièrement relevé appel de ce jugement. Il exprime son incompréhension devant la motivation retenue par le conseil de prud'hommes. Il considère que la faute grave reprochée par la lettre de licenciement n'est pas établie dès lors que l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES avait l'obligation de le réintégrer dans son emploi à l'issue de son congé individuel de formation. Il soutient que la qualité de chef pilote lui a été retirée et que la rémunération qui lui était proposée avait subi une diminution par rapport à son salaire antérieur. Il fait état de l'importance de son préjudice et demande la somme de 69 576, 96 € à titre de dommages-intérêts.
Il soutient par ailleurs qu'en sa qualité de personnel navigant chargé d'un travail aérien, il doit bénéficier du code de l'aviation civile pour la durée du préavis fixée à trois mois et pour le montant de l'indemnité de licenciement égale à un mois de salaire mensuel minimum garanti par année de service dans la limite de 12 mois. Il soutient sur ce point qu'il y a lieu de prendre en compte le salaire mensuel brut moyen effectivement perçu. Il demande les sommes de 8 696, 91 euros à titre d'indemnité de préavis et les congés payés correspondants et la somme de 34 787, 64 € à titre d'indemnité de licenciement, sur la base d'un salaire brut moyen de 2 898, 97 euros. Il demande enfin la somme de 2 382, 52 € correspondant à son salaire pendant la mise à pied conservatoire.
L'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES relève l'erreur fondamentale de la motivation du conseil de prud'hommes dès lors que le poste de M. X... n'a pas été supprimé. Il soutient qu'aucune modification n'a été apportée au contrat de travail du salarié à son retour de son congé individuel de formation. Il fait valoir en conséquence que le licenciement pour faute grave est justifié. Il conteste l'application du code de l'aviation civile à la situation de M. X.... Il demande l'infirmation du jugement et le rejet de toutes les demandes du salarié.
L'ASSEDIC MIDI PYRÉNÉES demande la confirmation du jugement sur le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage versées à M. X...
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le licenciement
C'est à tort que le conseil de prud'hommes a retenu que l'employeur avait méconnu le délai de réflexion d'un mois qui doit être laissé au salarié en cas de modification du contrat de travail dans le cadre d'un licenciement pour motif économique.
En premier lieu, ce moyen de droit a été retenu d'office par les premiers juges sans que ceux-ci aient préalablement invité les parties à présenter leurs observations. De plus, alors que le licenciement avait été prononcé pour faute grave et que la lettre de licenciement fixe le cadre du litige, le conseil de prud'hommes ne pouvait faire application des règles du licenciement pour motif économique, après avoir d'ailleurs, non sans contradiction, rappelé les règles régissant le licenciement pour faute grave.
Enfin, le conseil de prud'hommes a dénaturé les faits en retenant que le poste de chef pilote avait été supprimé, alors qu'aucune suppression de ce poste n'est intervenue et que le litige porte au contraire sur le fait que cette fonction a été attribuée à un autre instructeur lors du retour de M. X... qui en était titulaire avant son congé de formation.
Il importe donc de rechercher si la faute grave reprochée à M. X... par la lettre de licenciement est ou non établie.
Le congé individuel de formation a pour effet de suspendre le contrat de travail du salarié. Par suite, celui-ci doit retrouver son emploi à la fin du congé de formation. Une modification du contrat de travail ne peut dès lors intervenir qu'avec son accord.
En l'espèce, il est établi par les pièces versées au dossier que le 1er octobre 2003, jour du retour de M. X..., la qualité de chef pilote qui avait été conférée à celui-ci a été attribuée à un autre instructeur, M. Y.... La note de service signée du président de l'aéro-club énonce qu'à dater de cette date « M. Thierry Y... est nommé chef pilote de l'aéro-club de suite à une décision du comité directeur ».
L'affirmation de l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES selon laquelle la qualité de chef pilote ne correspond à aucune réalité fonctionnelle et a seulement un caractère honorifique est dénuée de sérieux. Cette qualité apparaît au contraire dans l'organigramme de l'aéro-club aussi bien que dans le règlement intérieur de celui-ci qui prévoit sur ce point : « Le chef pilote est le responsable des vols. Il peut déléguer totalement ou partiellement ses pouvoirs à un autre instructeur ».
Dans ces conditions, l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES ne pouvait, sans l'accord de M. X..., retirer à celui-ci la qualité de chef pilote à son retour de son congé individuel de formation, en précisant au surplus dans le nouveau contrat de travail qui lui était proposé qu'il serait « placé sous les ordres hiérarchiques du chef pilote ».
Le refus de cette modification de son contrat de travail par M. X... avait dès lors un caractère légitime. Il s'ensuit que ce refus ne peut constituer une faute grave, pas plus qu'une cause réelle et sérieuse de licenciement. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse, les présents motifs se substituant cependant à ceux des premiers juges.
Au vu des pièces versées au débat, la Cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour fixer à 55 000 € le montant des dommages-intérêts revenant à M. X....
Les indemnités de rupture
M. X... revendique de façon justifiée l'application des dispositions du code de l'aviation civile pour la fixation de la durée du préavis et de l'indemnité de licenciement.
En effet, l'article L. 421- 1du code de l'aviation civile dispose :
« La qualité de navigant professionnel de l'aéronautique civile est attribuée aux personnes exerçant de façon habituelle et principale, soit pour leur propre compte, soit pour le compte d'autrui, dans un but lucratif ou contre rémunération le commandement et la conduite des aéronefs (section A) ».
Le même texte inclut dans les sections B et C le service à bord des moteurs et machines et des autres matériels et dans la section D le personnel navigant commercial du transport aérien.
Le chef pilote ou l'instructeur employé à temps complet dans un aéro-club dans le cadre d'un contrat de travail commande et conduit des aéronefs lors de ses missions d'instruction, contre rémunération. Il relève en conséquence de la section A des navigants professionnels de l'aéronautique civile. M. X... verse d'ailleurs aux débats la carte d'inscription au registre du personnel navigant professionnel de l'aéronautique civile qui lui a été délivrée le 26 avril 1990
L'article L. 421-2 du code de l'aviation civile énonce que le personnel navigant professionnel de l'aéronautique civile appartient à l'une des trois catégories suivantes : essais et réceptions, transport aérien, travail aérien. L'article R. 421-1 3o du même code définit comme suit le travail aérien : « Toute opération aérienne rémunérée qui utilise un aéronef à d'autres fins que le transport ou les essais et réceptions définis au 1o et 2o ; il comprend notamment l'instruction aérienne, les vols de démonstration ou de propagande, la photographie, le parachutage, la publicité et les opérations agricoles aériennes ».
Les vols accomplis par un instructeur entrent à l'évidence dans la catégorie des opérations aériennes rémunérées, toute ambiguïté étant si nécessaire levée par le texte lui-même, qui cite expressément l'instruction aérienne.
Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l'article R. 223-1 fixant à trois mois la durée du préavis et à un mois de salaire mensuel minimum garanti par année de service, dans la limite de 12 mois, le montant de l'indemnité de licenciement pour les personnels de la section A.
À cet égard, sauf à retirer aux mots le sens qu'ils comportent, l'expression « salaire mensuel minimum garanti » ne peut correspondre aux salaires effectivement perçus par le navigant mais renvoie nécessairement au salaire minimum légal ou conventionnel. Aucune précision n'étant fournie par les parties sur un salaire minimum conventionnel, il y a lieu de faire application du montant du SMIC alors en vigueur, soit 1 215, 11 €. L'indemnité de licenciement s'élève de ce fait à 14 581, 32 €.
Pour ce qui concerne l'indemnité de préavis, le salaire de référence ne peut être que celui mentionné par l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES lui-même dans le document destiné au FONGECIF lors du départ de M. X... en congé individuel de formation, soit la somme de 19 016 F, qui correspond à 2 898, 97 €. L'indemnité compensatrice de préavis calculée sur une durée de trois mois s'élève de ce fait à 8 696, 91 €, à laquelle s'ajoutera l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante.
La mise à pied conservatoire du 3 novembre au 27 novembre 2003 n'étant pas justifiée, M. X... a droit à la somme de 2 382, 52 €.
Il sera enfin fait droit, à hauteur de 2 000 €, à sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Confirme le jugement, par substitution de motifs, en ce qu'il a :
- déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse
-ordonné à l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRENEES de rembourser à l'ASSEDIC MIDI PYRENEES, dans la limite de six mois d'indemnités, les indemnités de chômage versées à M. X...
- alloué à M. X... la somme de 1 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le réforme pour le surplus.
Condamne l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRÉNÉES à payer à M. X... :
- la somme de 55 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-la somme de 8 696, 91 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis
-la somme de 869, 69 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis
-la somme de 14 581, 32 € à titre d'indemnité de licenciement
-la somme de 2 382, 52 € au titre du salaire pendant la période de mise à pied conservatoire.
Condamne l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRÉNÉES à payer à M. X... la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Laisse les dépens d'appel à la charge de l'AERO CLUB TOULOUSE MIDI PYRÉNÉES.
Le présent arrêt a été signé par M. P. de CHARETTE, président et par Mme D. FOLTYN-NIDECKER, greffier.
Le greffierLe président
Dominique FOLTYN-NIDECKERPatrice de CHARETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 2 - chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06/04698
Date de la décision : 14/03/2008
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Naviguants professionnels de l'aeronautique civil

Le chef pilote ou l'instructeur employé à temps complet dans un aéro-club dans le cadre d'un contrat de travail, dès lors qu'il commande et conduit des aéronefs lors de ses missions d'instruction contre rémunération, relève de la catégorie des navigants professionnels de l'aéronautique civile. Les dispositions du code de l'aviation civile lui sont donc applicables pour la fixation de la durée du préavis et de l'indemnité de licenciement.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 21 septembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2008-03-14;06.04698 ?
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