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17/04/2007 | FRANCE | N°368

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0028, 17 avril 2007, 368


SUQ/MB

DOSSIER N 06/01370

ARRÊT DU 17 AVRIL 2007

3ème CHAMBRE,

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

3ème Chambre,

N 07/368

Prononcé publiquement le MARDI 17 AVRIL 2007 par la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,

Sur appel d'un jugement du T.G.I. DE MONTAUBAN du 13 OCTOBRE 2006.

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats, du délibéré et au prononcé de l'arrêt,

Président : Monsieur SUQUET,

Conseillers: Monsieur BASTIER,

Madame X...,

GREFFIER :

Madame Y..., lors des débats et du prononcÃ

© de l'arrêt.

MINISTÈRE PUBLIC :

Monsieur TREMOUREUX, Avocat Général, aux débats et au prononcé de l'arrêt.

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
...

SUQ/MB

DOSSIER N 06/01370

ARRÊT DU 17 AVRIL 2007

3ème CHAMBRE,

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

3ème Chambre,

N 07/368

Prononcé publiquement le MARDI 17 AVRIL 2007 par la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,

Sur appel d'un jugement du T.G.I. DE MONTAUBAN du 13 OCTOBRE 2006.

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats, du délibéré et au prononcé de l'arrêt,

Président : Monsieur SUQUET,

Conseillers: Monsieur BASTIER,

Madame X...,

GREFFIER :

Madame Y..., lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

MINISTÈRE PUBLIC :

Monsieur TREMOUREUX, Avocat Général, aux débats et au prononcé de l'arrêt.

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

BONHOMME François

né le 05 Mai 1969 à MONTAUBAN (82)

de nationalité française,

demeurant ...

Prévenu, libre, appelant, comparant

Assisté de Maître BOSSELUT Rodolphe, avocat au barreau de PARIS

LE MINISTÈRE PUBLIC :

appelant,

Z... Jean-Michel

Demeurant ...

Partie civile, non appelant, non comparant,

Représenté par Maître BOURG, substituant Maître A... Jean-Yves, avocat au barreau de PARIS

RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

LE JUGEMENT :

Le Tribunal, par jugement en date du 13 Octobre 2006, a déclaré BONHOMME François coupable du chef de :

* INJURE PUBLIQUE ENVERS UN CORPS CONSTITUE, UN FONCTIONNAIRE OU UN CITOYEN CHARGE D'UN SERVICE PUBLIC, PAR PAROLE, IMAGE, ECRIT OU MOYEN DE COMMUNICATION PAR VOIE ELECTRONIQUE, le 15/11/2005, à Montauban, infraction prévue par les articles 33 AL.1, 30, 31, 23 AL.1, 29 AL.2, 42 de la Loi DU 29/07/1881 et réprimée par l'article 33 AL.1 de la Loi DU 29/07/1881

Et, en application de ces articles, l'a condamné à 250 € d'amende.

SUR L'ACTION CIVILE :

* a alloué à Z... Jean-Michel, 1 € à titre de dommages intérêts, 750 € au titre de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale

LES APPELS :

Appel a été interjeté par :

Monsieur BONHOMME François, le 17 Octobre 2006 contre Monsieur Z... Jean-Michel

M. le Procureur de la République, le 17 Octobre 2006 contre Monsieur BONHOMME François

Par arrêt en date du 03 Janvier 2007, la Chambre des Appels Correctionnels a renvoyé l'affaire à l'audience du 06 Mars 2007 à 14 heures, date à laquelle les parties devront comparaître sans nouvelle citation.

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Mars 2007, le Président a constaté l'identité du prévenu ;

Ont été entendus :

Monsieur SUQUET en son rapport ;

BONHOMME François en ses interrogatoire et moyens de défense ;

Les appelants ont sommairement indiqué à la Cour les motifs de leur appel ;

Maître BOURG, avocat de Jean-Michel Z..., en ses conclusions oralement développées ;

Monsieur TREMOUREUX, Avocat Général, en ses réquisitions ;

Maître BOSSELUT, avocat de B... François, en ses conclusions oralement développées ;

BONHOMME François a eu la parole en dernier ;

Le Président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 17 AVRIL 2007.

DÉCISION :

François BONHOMME a relevé appel le 17 octobre 2006 du jugement contradictoire rendu le 13 octobre 2006 par le Tribunal correctionnel de MONTAUBAN qui l'a déclaré coupable du chef d'injure publique envers un corps constitué, un fonctionnaire ou un citoyen chargé d'un service public, par parole, image, écrit ou moyen de communication par voie électronique et, en répression, l'a condamné à une peine de 250 € d'amende.

Statuant sur l'action civile, le Tribunal a condamné François BONHOMME à payer à Jean-Michel Z... la somme d'un euro à titre de dommages et intérêts et de 750 € sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale.

L'appel de François BONHOMME est général.

Le procureur de la République a relevé appel incident le 17 octobre 2006.

* * *

LES FAITS

Par acte d'huissier délivré le 25 janvier 2006, Jean-Michel Z... a cité directement François BONHOMME devant le Tribunal correctionnel de MONTAUBAN dans les termes suivants :

"Attendu que le 15 novembre 2005, le Conseil Général du Tarn et Garonne, présidé par Jean-Michel Z..., se réunissait aux fins d'examiner la décision modificative numéro no 2 (DM2).

Que la fin de séance était consacrée spécifiquement à l'examen des vœux, motions et questions écrites posées au Président.

Attendu qu'à cette occasion, François BONHOMME, conseiller général du canton de Caussade, déposa quatre questions écrites.

Que Jean-Michel Z..., conformément au règlement intérieur du Conseil Général, ne répondit qu'aux questions ayant trait aux affaires du département faisant l'objet d'une délibération, tout en renvoyant François BONHOMME consulter la réponse qu'il avait déjà formulée lors d'une précédente session sur une question semblable.

Que pourtant, François BONHOMME insista avec véhémence et en haussant le ton.

Que c'était ainsi, alors que Jean-Michel Z... était sur le point de lever la séance du Conseil Général, que François BONHOMME l'interpellait à haute et intelligible voix en le traitant de « délinquant » (cf attestations jointes).

Attendu que qualifier Jean-Michel Z..., en sa qualité de Président du Conseil Général du Tarn-et-Garonne, d'être un « délinquant » relève de l'invective.

Que partant l'utilisation de ce terme outrageant, qui ne se rapporte à aucun fait précis, est constitutive du délit d'injure publique envers une personne chargée d'un mandat public, en l'espèce Jean-Michel Z..., fait prévu et réprimé par les articles 29 alinéa 2 et 33 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881.

Attendu que cette attaque à l'encontre de Jean-Michel Z... lui cause bien évidemment préjudice, notamment en ce qu'elle porte le discrédit sur son action politique.

Qu'en réparation du préjudice moral souffert, Jean-Michel Z... sollicite la condamnation de François BONHOMME au paiement de la somme symbolique de 1 € à titre de dommages et intérêts.

Qu'en outre, Jean-Michel Z... sollicite également la publication du jugement à intervenir, par extrait, dans une limite de 3.000 € HT, par insertion, dans deux quotidiens ou hebdomadaires régionaux et dans deux quotidiens nationaux, au choix de la partie civile, et aux frais de François BONHOMME.

Qu'enfin, il serait parfaitement inéquitable de laisser à la charge de Jean-Michel Z... les frais irrépétibles que ce dernier a été contraint d'exposer afin de faire valoir ses droits.

Qu'il conviendra en conséquence de condamner François BONHOMME à lui verser la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale."

* * *

Dans le jugement de condamnation dont il a été relevé appel, le Tribunal correctionnel a écarté des débats l'enregistrement audio produit par François BONHOMME en raison de ce que :

- il s'agissait d'un enregistrement numérique autorisant des manipulations,

- il avait été réalisé à l'insu des participants,

- un témoin à l'audience avait affirmé qu'il avait vu François BONHOMME sortir un appareil d'enregistrement de sa poche empêchant qu'il soit considéré comme un moyen licite de preuve,

- les témoins entendus et plusieurs conseillers généraux dont les attestations sont produites aux débats s'accordent à dire que François BONHOMME a bien invectivé le président du Conseil Général dans les termes de la citation alors que la séance était levée,

- François BONHOMME lui-même admet qu'il s'était adressé au président mais en utilisant les propos qu'il reconnaît, après la clôture de la séance.

Le Tribunal a retenu que François BONHOMME avait bien tenu, à l'encontre de Jean-Michel Z..., les propos visés dans la citation lors d'une séance publique du Conseil Général et que le terme "délinquant" ne pouvait s'analyser autrement que comme une expression outrageante dont Jean-Michel Z... a pu s'estimer atteint.

* * *

À l'appui de son appel de François BONHOMME déposé des conclusions dans lesquelles il fait valoir que :

- les faits sont prescrits puisque aucun acte interruptif n'a été fait dans le délai de trois mois à la suite du prononcé contradictoire du jugement du 13 octobre 2006, le premier acte interruptif d'instance, à savoir la signification de l'arrêt de la Cour de Cassation du 3 janvier 2007, étant intervenu jeudi 19 janvier 2007 et l'arrêt du 3 janvier 2007 ne saurait valoir interruption à défaut de sa signification,

- l'enregistrement audio produit par François BONHOMME a une importance capitale en raison de sa précision, il est parfaitement licite au regard des règles du Code Général des Collectivités Territoriales, la preuve est libre pour établir une infraction et la jurisprudence marque une indifférence de principe au caractère illicite ou déloyal de la preuve,

- la réalité des propos n'est pas rapportée car, lors de l'échange verbal incriminé, François BONHOMME n'a jamais employé le terme de « délinquant » visé expressément à la citation mais a tenu les propos suivants : « 2 fois condamné ! 2 fois... (...) pour délinquance »,

- les propos de François BONHOMME ne s'analysent pas en une invective mais en l'imputation d'un fait précis et ne pourraient donc être poursuivis que sous le visa du délit de diffamation publique et, en aucun cas, sous celui de l'injure publique,

- à titre subsidiaire, le terme de « délinquant » ne peut être considéré comme une injure ou une invective ou une expression outrageante.

François BONHOMME demande en conséquence à la cour de :

- dire la prescription acquise et l'action publique éteinte et le renvoyer des fins de la poursuite,

- à titre subsidiaire, infirmer le jugement en toutes ses dispositions pénales et civiles,

- admettre comme preuve l'enregistrement audio et sa retranscription produits par François BONHOMME,

- dire et juger qu'il n'est pas rapporté la preuve du propos poursuivi,

- dire et juger que seule la qualification de diffamation publique envers une personne chargée d'un mandat public aurait pu fonder la poursuite,

- à titre infiniment subsidiaire, dire et juger que le propos poursuivi ne saurait constituer une injure au sens des dispositions de l'article 33 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 et prononcer sa relaxe.

* * *

Jean-Michel Z... soutient que :

- la prescription ne peut pas être acquise puisque le premier acte interruptif consiste dans la signification de la citation à comparaître à l'audience du 3 janvier 2007 de la cour d'appel de TOULOUSE délivrée à François BONHOMME le 18 décembre 2006,

- qualifier Jean-Michel Z... de délinquant est une expression outrageante qui ne se rapporte à aucun fait précis et qui est constitutif du délit d'injure publique envers une personne chargée d'un mandat public,

- la captation clandestine des débats effectuée par François BONHOMME ne doit être écartée.

Jean-Michel Z... demande en conséquence à la Cour de confirmer le jugement du Tribunal correctionnel de MONTAUBAN en date du 13 octobre 2006, de débouter François BONHOMME de toutes ses demandes, fins et conclusions et de le condamner au paiement de la somme de 5 .000 € en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale.

* * *

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que les appels, relevés dans les formes et délais requis par la loi, sont recevables ;

SUR L'ACTION PUBLIQUE

Sur la prescription

Attendu que, à la suite du jugement du Tribunal correctionnel prononcé le 13 octobre 2006, la prescription a été interrompue :

- le 17 octobre 2006 par l'acte d'appel,

- le 18 décembre 2006 par la délivrance de la citation à prévenu de François BONHOMME devant la Cour d'appel,

- le 3 janvier 2007 par l'arrêt de la Cour d'appel renvoyant l'affaire à l'audience du 6 mars 2007,

- le 19 janvier 2007 par la signification de cet arrêt à François BONHOMME ;

Attendu que la prescription n'est donc pas acquise ;

Attendu d'ailleurs que François BONHOMME a renoncé à cette exception à l'audience du 6 mars 2007 ;

Sur le fond

Attendu que Jean-Michel Z... a été condamné par arrêt définitif de la Cour d'appel de TOULOUSE en date du 8 juin 2005 du chef d'injure publique envers un citoyen chargé d'un mandat public pour avoir traité François BONHOMME de "crétin" lors d'une séance du Conseil Général du TARN ET GARONNE ;

Attendu que ce point n'est pas contesté, la décision en question ayant été produite par Jean-Michel Z... lui-même ;

Attendu que François BONHOMME en avait connaissance puisque c'est précisément sur sa constitution de partie civile que cette condamnation est intervenue;

Attendu qu'il n'est pas nécessaire de rechercher si l'enregistrement effectué par François BONHOMME doit être produit aux débats puisque, même en tenant pour acquis le déroulement des faits tels que relaté par Jean-Michel Z..., le terme de "délinquant" utilisé par François BONHOMME visait manifestement la condamnation intervenue moins de six mois auparavant ;

Attendu dès lors que le terme litigieux, qui se rapporte à un fait précis dont l'exactitude est avérée, n'est pas constitutif du délit d'injure ;

Attendu qu'il y a donc lieu de prononcer la relaxe de François BONHOMME et de débouter Jean-Michel Z... de ses demandes ;

* * *

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

EN LA FORME

Reçoit les appels,

AU FOND

Infirmant le jugement dont appel,

Relaxe François BONHOMME des fins de la poursuite,

Déboute Jean-Michel Z... de l'ensemble de ses demandes.

Lecture faite, le Président a signé ainsi que le Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0028
Numéro d'arrêt : 368
Date de la décision : 17/04/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montauban, 13 octobre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2007-04-17;368 ?
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