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06/06/2005 | FRANCE | N°296

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Chambre civile 1, 06 juin 2005, 296


06/06/2005 ARRÊT No NoRG: 04/04315 OC/EKM Décision déférée du 06 Juillet 2004 - Tribunal de Grande Instance de SAINT GAUDENS - Mme DUCHAC Alexandre X... représenté par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT Rolande Y... épouse X... représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT C/ COMMUNE D'ARLOS représentée par Me Bernard DE LAMY INFIRMATION Grosse délivrée le à REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D'APPEL DE TOULOUSE 1ère Chambre Section 1 *** ARRÊT DU SIX JUIN DEUX MILLE CINQ *** APPELANTS Monsieur Alexandre X... Chemin La Z... de A... 31440 ARLOS représenté

par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT, avoués à la Cour assisté de l...

06/06/2005 ARRÊT No NoRG: 04/04315 OC/EKM Décision déférée du 06 Juillet 2004 - Tribunal de Grande Instance de SAINT GAUDENS - Mme DUCHAC Alexandre X... représenté par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT Rolande Y... épouse X... représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT C/ COMMUNE D'ARLOS représentée par Me Bernard DE LAMY INFIRMATION Grosse délivrée le à REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D'APPEL DE TOULOUSE 1ère Chambre Section 1 *** ARRÊT DU SIX JUIN DEUX MILLE CINQ *** APPELANTS Monsieur Alexandre X... Chemin La Z... de A... 31440 ARLOS représenté par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT, avoués à la Cour assisté de la SCP CABINET DARRIBERE, avocats au barreau de TOULOUSE Madame Rolande Y... épouse X... X... La Z... De A... 31440 ARLOS représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT, avoués à la Cour assistée de la SCP CABINET DARRIBERE, avocats au barreau de TOULOUSE INTIMEE COMMUNE D'ARLOS HOTEL DE VILLE 31440 ARLOS représentée par Me Bernard DE LAMY, avoué à la Cour assistée de la SCP LASSUS NDOME MANGA MASSON, avocats au barreau de SAINT GAUDENS COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 12 Avril 2005 en audience publique, devant la Cour composée de : H. MAS, président O. COLENO, conseiller C. FOURNIEL, conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : E. KAIM-MARTIN ARRET : - contradictoire - prononcé par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par H. MAS, président, et par E. KAIM-MARTIN, greffier de chambre. FAITS ET PROCEDURE : Au motif qu'en voulant, en 1996, installer une cave à vin dans le sous- sol du garage de la maison d'habitation dont ils sont propriétaires à Arlos, ils ont découvert la présence sans titre d'une canalisation de distribution publique d'eau potable traversant leur terrain, les époux X... ont, suivant acte d'huissier du 13 novembre 1996, fait citer la Commune d'Arlos ( Haute- Garonne ) devant le tribunal de grande instance de Saint-Gaudens en réparation de cette

emprise irrégulière. Par le jugement déféré du 6 juillet 2004 rendu sur reprise d'instance après sursis à statuer dans l'attente du jugement par la juridiction administrative sur la question préjudicielle de la régularité de l'emprise et un arrêt du Conseil d'Etat du 6 mars 2002 jugeant l'emprise irrégulière, le tribunal a déclaré la demande d'indemnisation irrecevable comme prescrite, la canalisation litigieuse ayant été installée en 1968 et l'instance introduite en 1996 alors que les époux X... ne démontraient pas, par la seule méconnaissance alléguée de l'existence de la canalisation, s'être trouvés dans l'impossibilité d'agir au sens de l'article 2251 du code civil. Les époux X..., régulièrement appelants, poursuivent la réformation de cette décision et, au visa de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968, demandent à la Cour de juger que leur action n'est pas prescrite et de condamner la Commune à leur payer les sommes de 15.250 ç à titre de dommages et intérêts en réparation de l'emprise irrégulière et celle de 7.625 ç afin de remettre en état leur terrain endommagé pour prouver l'emprise. Ils soutiennent avoir pu être légitimement regardés comme ayant ignoré l'existence de leur créance jusqu'en 1996, lorsqu'il ont voulu creuser une cave, que l'établissement de cette servitude ouvre droit à indemnité en réparation du préjudice subi par la réduction permanente de leur droit de propriété sur le terrain grevé du fait de l'impossibilité où ils se trouvent de réaliser un quelconque projet nécessitant de creuser leur terrain et de la dépréciation de leur bien. Ils réfutent les moyens de défense de la Commune qu'ils jugent d'une particulière mauvaise foi. La Commune d'Arlos conclut à la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a constaté l'extinction de l'action des époux X... et, au bénéfice d'un appel incident, demandent à la Cour de lui allouer la somme de 3.000 ç à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des lourdes

procédures qu'elle a dû assumer. Elle soutient que l'installation des canalisations en 1968 avec l'accord de la direction départementale de l'équipement a été autorisée par les propriétaires de l'époque, que Monsieur X..., employé au service des eaux à Toulouse, n'ignorait pas leur présence, que les appelants ont construit un bungalow à un emplacement différent de celui résultant du permis de construire, que Monsieur B..., précédent propriétaire, a demandé son abonnement le 31 août 1968 et ne pouvait donc pas ignorer l'existence des travaux sur le réseau, que le plan du réseau public d'eau potable ne fait pas apparaître une canalisation traversant leur propriété et que celle découverte est vraisemblablement de nature privée. MOTIFS DE LA DÉCISION : Attendu qu'aux termes de l'article 1er de la loi no68-1250 du 31 décembre 1968, sont prescrites au profit de l'Etat, des départements et des Communes (...) sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis; que selon l'article 3 invoqué par les appelants, la prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir (...) ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance (...); que les appelants sont fondés à se prévaloir de l'application de cette disposition, l'article 2251 du code civil retenu par les premiers juges exceptant du principe du cours erga omnes de la prescription les personnes qui se trouvent dans quelque exception prévue par une loi; Attendu que c'est à celui qui se prévaut de la prescription qu'il incombe d'en prouver les éléments, et à celui qui invoque une exception de la démontrer; Attendu que les époux X..., demeurant à Toulouse, ont acquis des époux B... le terrain litigieux d'une contenance de 7 ares en nature de terre avec la construction en bois d'une superficie d'environ 24 m qui s'y trouve,

suivant acte notarié des 10 et 12 mars 1973 pour le prix de 10.000 Francs; qu'aux termes de cet acte, les époux B..., qui avaient acquis cette parcelle en 1964, déclaraient qu'ils n'y avaient personnellement créé ni laissé acquérir aucune servitude et qu'à leur connaissance elle n'était pas grevée de servitude; Attendu que selon les pièces versées aux débats et les explications des parties, c'est dans le courant des années 1967 et 1968 que le réseau public d'alimentation en eau potable a été refait à l'initiative de la Commune afin de résoudre une insuffisance du système préexistant qui créait des difficultés pendant la saison d'été; que c'est donc pendant la période où les époux B... ont été propriétaires de la parcelle que le réseau public a été refait; que la circonstance que les époux B... aient souscrit une demande d'abonnement au réseau d'eau potable le 31 août 1968, s'il tend à indiquer précisément qu'ils aient eu connaissance de la campagne de rénovation du réseau entrepris par la Commune, n'est pas de nature à établir qu'ils aient eu connaissance de l'enfouissement, sur leur terrain à près d'un mètre de profondeur, d'une canalisation d'eau dont la nature exacte n'est pas formellement déterminée, mais dont il est suffisamment avéré, au vu du procès-verbal de constat d'huissier du 21 mars 2003 qui est produit, qu'elle traverse de part en part la parcelle no217 large d'environ une quinzaine de mètres ; Attendu que selon les appelants qui n'en sont pas précisément contredits et y trouvent soutien dans le procès-verbal de constat d'huissier qu'ils produisent, elle n'assurerait pas l'alimentation de leur propre immeuble mais aurait pour objet de desservir une parcelle voisine à partir d'un réseau public qui, selon les plans produits par la Commune, suivrait le tracé du chemin communal; qu'il en résulte que la date d'installation de cette canalisation, qui serait ainsi dépendante d'une demande de raccordement des propriétaires de cette

parcelle voisine n'est pas précisément connue, bien qu'elle puisse être regardée comme probablement contemporaine; qu'aucun élément des débats ne permet ainsi de retenir que les époux B..., qui selon une attestation non critiquée ne venaient que rarement sur place, auraient eu nécessairement connaissance de ces travaux; Attendu que la Commune d'Arlos n'est pas fondée à mettre en doute et discuter, sans apporter aucun élément de preuve, l'existence-même de l'emprise qui, définitivement jugée par le juge administratif, est un fait constant; qu'elle est encore moins fondée, sans le moindre élément nouveau, à soutenir que les époux B... auraient consenti à l'installation de l'ouvrage alors que le caractère irrégulier de l'emprise est définitivement jugé à son encontre par la décision du Conseil d'Etat qui s'est prononcé sur l'allégation de ce consentement; Attendu que rien ne permet de faire admettre que les époux X... auraient pu avoir plus connaissance que leurs auteurs de la présence de cet ouvrage; que la circonstance invoquée et non contredite que Monsieur X... aurait été employé au service des eaux à Toulouse n'est pas de nature à faire envisager qu'il ait pu prendre connaissance de la présence de cette adduction, ce que tendrait à contredire la circonstance que le plan du réseau public obtenu du Conseil Général par la Commune n'en porte pas la trace; qu'il est constant que le dépôt de leur demande de permis de construire et l'autorisation accordée le 21 mars 1978 ne leur ont pas donné l'occasion de recueillir aucune indication relative à la présence de cette canalisation; Attendu en conséquence que les époux X... sont fondés à soutenir pouvoir être légitimement regardés comme ayant ignoré l'existence de l'emprise irrégulière qui ne se manifeste par aucune apparence, et donc de leur créance au sens de l'article 3 susvisé de la loi no68-1250 du 31 décembre 1968, et s'être ainsi trouvés dans l'exception prévue par la loi; et attendu qu'il n'est

pas démontré qu'à la date du 13 novembre 1996, la prescription quadriennale se serait accomplie, en l'état de la première réclamation des époux X... relativement à la présence de cette canalisation, datée du 4 mars 1996, dont l'existence est avérée par la réponse que la Commune y a apporté par son maire le15 mars 1996, et bien que cette lettre fasse apparaître que les appelants avaient préalablement procédé à des recherches auprès de divers services; que leur demande d'indemnisation est en conséquence recevable; Attendu, sur la réparation, que la Commune n'est pas fondée à alléguer une participation des époux à la constitution de leur préjudice au motif qu'ils auraient implanté leur immeuble sans se conformer au permis de construire, alors au surplus que le certificat de conformité a été délivré; Attendu qu'il ressort des pièces produites que la canalisation, partant du chemin rural, passe sous les fondations de la maison d'habitation pour en traverser l'emprise de part en part; qu'elle se trouve à une profondeur d'environ 0,95 mètre; que selon un plan produit, l'emprise centrale de la maison ne laisse, de chacun de ses côtés Nord-Est et Sud-Ouest, dans le sens général de traversée de la canalisation litigieuse, qu'une bande de terrain de 3 mètres de large, de sorte que les appelants ne démontrent pas être fondés à soutenir qu'ils seraient privés de la possibilité par exemple de creuser une piscine sur leur terrain; qu'ils ne fournissent à la Cour aucune sorte d'indication relative au projet de cave à vins qui a été, selon eux, l'occasion de découvrir la canalisation; qu'il n'est pas apparent que le risque qui serait induit par le passage de véhicules lourds sur le chemin communal, le long duquel court qu'il n'est pas apparent que le risque qui serait induit par le passage de véhicules lourds sur le chemin communal, le long duquel court le réseau public, serait modifié pour les époux X... par la présence de la canalisation litigieuse qui y est branchée; Attendu que sur ces

bases, le dommage occasionné par l'emprise irrégulière, dont le principe est certain, sera exactement réparé par une indemnité de 3.500 ç; Attendu que les époux X... justifient avoir dû procéder à des excavations pour rapporter la preuve de l'existence à tort contestée de la canalisation litigieuse ainsi que de son tracé, et en particulier casser le carrelage et sa chape de béton qui se trouvent dans la cour carrelée au Nord-Est de la villa pour y pratiquer une ouverture suffisante afin de mettre en évidence la présence de l'ouvrage litigieux; que ces travaux étaient rendus nécessaires à l'établissement de leur droit par la résistance de la Commune, ce qui justifie la demande; qu'en l'absence de toute justification du coût de remise en état qu'ils avancent, ce chef de demande sera fixé à la somme de 500 ç au vu des constatations qui ressortent du procès-verbal d'huissier; Attendu que l'appelante, qui succombe et sera tenue des dépens, n'est pas fondée en ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive et d'indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; Attendu qu'aucune considération tirée de l'équité ou de la situation économique des parties ne s'oppose à l'application, en faveur des époux X..., des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; PAR CES MOTIFS :

La Cour, Réforme la décision déférée en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, Déclare non prescrite la créance des époux X...; Condamne la Commune d'Arlos à payer aux époux X... la somme de 3.500 ç (trois mille cinq cents euros) à titre d'indemnité en réparation de l'emprise irrégulière et la somme de 500 ç (cinq cents euros) à titre de dommages et intérêts pour la remise en état de leur terrain. Condamne la Commune d'Arlos à payer aux époux X... la somme de 1.500 ç (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; Déboute les parties de leurs demandes autres ou

plus amples; Condamne la Commune d'Arlos aux entiers dépens de l'instance, en ce compris ceux exposés tant en première instance qu'en appel, et reconnaît pour ceux d'appel, à la SCP NIDECKER etamp; PRIEU-PHILIPPOT, avoué qui en a fait la demande, le droit de recouvrement direct prévu à l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Le présent arrêt a été signé par H. MAS, président et E. KAIM-MARTIN, greffier. LE GREFFIER : LE PRESIDENT : E. KAIM-MARTIN H. MAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 296
Date de la décision : 06/06/2005
Type d'affaire : Civile

Analyses

PRESCRIPTION CIVILE

Aux termes de l'article 1er de la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968, sont prescrites au profit de l'Etat, des départements et des Communes sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Selon l'article 3 invoqué par les appelants, la prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance. C'est à celui qui se prévaut de la prescription qu'il incombe d'en prouver les éléments, et à celui qui invoque une exception de la démontrer


Références :

Loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968, articles 1er et 3

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2005-06-06;296 ?
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