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05/07/2024 | FRANCE | N°23/00208

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile tgi, 05 juillet 2024, 23/00208


ARRÊT N°2024/266

CO



N° RG 23/00208 - N° Portalis DBWB-V-B7H-F367





S.A. SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT



C/



[S]



























COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS



ARRÊT DU 05 JUILLET 2024



Chambre civile TGI



Appel d'une décision rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE SAINT PIERRE (REUNION) en date du 15 DECEMBRE 2022 suivant déclaration d'appel en date du 09 FEVRI

ER 2023 RG n° 22/02170





APPELANTE :



S.A. SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Stéphane BIGOT, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION





INTIMÉ :



Monsieur [N] [X] [S]

[...

ARRÊT N°2024/266

CO

N° RG 23/00208 - N° Portalis DBWB-V-B7H-F367

S.A. SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT

C/

[S]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 05 JUILLET 2024

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE SAINT PIERRE (REUNION) en date du 15 DECEMBRE 2022 suivant déclaration d'appel en date du 09 FEVRIER 2023 RG n° 22/02170

APPELANTE :

S.A. SOCIETE REUNIONNAISE DE FINANCEMENT

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Stéphane BIGOT, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMÉ :

Monsieur [N] [X] [S]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Non comparant

DATE DE CLÔTURE : 28 septembre 2023

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 23 Février 2024 devant Monsieur OZOUX Cyril, président de chambre, assisté de Sarah HAFEJEE, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 24 mai 2024.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre,

Conseiller : Monsieur Vincent ALDEANO-GALIMARD, Président de chambre,

Conseiller : Madame Chantal COMBEAU, Présidente de chambre,

Qui en ont délibéré.

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 05 Juillet 2024, après prorogation.

* * *

LA COUR

EXPOSÉ DU LITIGE

1- Par acte sous seing privé en date du 14 mai 2020, la société réunionnaise de financement (ci-après la SOREFI) a consenti à M. [N] [X] [S] le financement de la somme de 24 500 € dans le cadre d'un contrat de location avec option d'achat d'une durée de 60 mois portant sur un véhicule de marque FORD FIESTA ST LIGNE immatriculé [Immatriculation 6], moyennant un loyer mensuel TTC, entretien inclus, de 406,54 €.

2- Les échéances du prêt n'étant plus payées régulièrement, la SOREFI a mis en demeure M. [N] [X] [S], par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 septembre 2021, de lui payer la somme de 1171, 15 € correspondant au montant des loyers impayés majorés des indemnités et intérêts de retard contractuels.

3- Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 octobre 2021, la SOREFI a ensuite prononcé la résiliation du contrat et mis en demeure M. [N] [X] [S] de restituer le véhicule et de lui verser la somme de 23 944, 88 € correspondant aux loyers impayés et à la valeur résiduelle hors taxes stipulée au contrat augmentée de la valeur actualisée des loyers à la date de la résiliation.

4- Par acte d'huissier du 19 juillet 2022, la SOREFI a fait citer M. [N] [X] [S] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Pierre aux fins de le voir condamner à lui verser la somme de 23 944, 88 € outre les intérêts de retard à compter du 28 octobre 2021 et une indemnité pour frais irrépétibles.

5- Par un jugement réputé contradictoire du 15 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Saint-Pierre a :

- Prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts de la SOREFI,

- Condamné M. [N] [X] [S] à payer à cette dernière la somme de 19 199.38€, avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 19 juillet 2022,

- Dit que la valeur vénale à dire d'expert du véhicule loué lors de sa restitution ou de son appréhension, viendra en déduction de la somme qui précède,

- Débouté la SOREFI du surplus de ses demandes,

- Débouté la SOREFI de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné M. [N] [X] [S] aux dépens de l'instance,

- Rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

6- Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 09 mai 2023, la SA SOREFI a interjeté appel de ce jugement.

7- Aux termes de ses dernières écritures transmises par RPVA le 9 mai 2023, la SOREFI demande à la cour :

- D'INFIRMER le jugement querellé sur les chefs de jugement critiqués, à savoir la déchéance du droit aux intérêts et les frais irrépétibles,

Statuant à nouveau sur ces deux chefs,

Vu les articles L.312-16 et L.312-17 du Code de la consommation,

- D'ECARTER la déchéance du droit aux intérêts contractuels, la SOREFI justifiant de la parfaite exécution de son obligation de vérification de la solvabilité de l'emprunteur,

En conséquence,

Vu les articles 1103 du Code civil, ainsi que L.312-29 et D.312-16 du Code de la consommation,

- De CONDAMNER M. [N] [X] [S] à payer à la SA SOREFI la somme globale de 23.944.88€ assortie des intérêts de retard à compter du 28 octobre 2021, date de la déchéance du terme,

Vu l'article 700 du Code de procédure civile,

- De CONDAMNER M. [N] [X] [S] au paiement de la somme de 2500 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Vu l'article 696 du Code de procédure civile,

- De CONDAMNER M. [N] [X] [S] aux entiers dépens d'appel.

8- Pour l'essentiel, la SOREFI fait valoir :

- qu'elle a vérifié la capacité de remboursement de l'emprunteur et l'absence d'inscription au fichier des incidents de paiement ;

- que la déchéance du droit aux intérêts contractuels n'est pas justifiée.

8- M. [N] [X] [S] n'a pas constitué avocat.

9- La SOREFI lui a fait signifier sa déclaration d'appel et ses dernières écritures par acte d'huissier du 7 juin 2023.

10- La procédure a été clôturée par une ordonnance du 28 septembre 2023.

11- L'audience de plaidoirie s'est tenue le 23 février 2024.

MOTIFS

Sur La régularité du contrat de location avec option d'achat :

12- Aux termes des dispositions de l'article L. 312-16 du code de la consommation, en sa rédaction en vigueur depuis le 01 er juillet 2016 applicable au présent litige, le prêteur doit vérifier, avant de conclure le contrat de crédit, la solvabilité de l'emprunteur.

13- A ce titre, il a l'obligation de recueillir auprès de l'emprunteur un nombre suffisant d'informations et de consulter le fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés (FICP) prévu à l'article L. 751-1 du même code.

14- La preuve de ces vérifications incombe au prêteur auquel revient la charge, en application des dispositions de l'article 1353 du code civil, d'établir qu'il a satisfait aux formalités d'ordre public du code de la consommation.

En ce qui concerne la consultation du FICP :

15- La SOREFI verse aux débats un justificatif (pièce n° 6) qui établit qu'elle a effectué une consultation du FICP le 14 mai 2020 pour M. [N] [X] [S] né le [Date naissance 1]/1991 à [Localité 7] dans le cadre d'un octroi de crédit pour un crédit de type consommation.

16- Elle produit le résultat de cette consultation dont il ressort qu'aucun dossier n'a été trouvé au nom de l'emprunteur.

17- C'est donc à tort que le premier juge a considéré que le prêteur ne rapportait pas la preuve de ce qu'il avait respecté son obligation de consultation du FICP.

En ce qui concerne les renseignements recueillis :

18- La SOREFI a obtenu de l'emprunteur son contrat de travail, ses derniers bulletins de salaire et ses derniers relevés de compte bancaires.

19- Alors que les échéances de loyers représentaient 40 % du revenu mensuel net de M. [N] [X] [S], la SOREFI ne justifie d'aucune vérification en ce qui concerne les conditions dans lesquelles celui-ci était logé et les modalités selon lesquelles il contribuait à l'entretien des deux enfants dont il déclarait pourtant avoir la charge.

20- C'est donc à bon droit que le premier juge a considéré que la SOREFI n'avait pas vérifié les charges de l'emprunteur manquant ainsi aux obligations de l'article L. 312-16 du code de la consommation.

Sur la demande en paiement de la SOREFI :

En ce qui concerne les intérêts conventionnels :

21- Le prêteur qui n'a pas respecté son obligation de vérification préalable de la solvabilité de l'emprunteur est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge (article L 341- 2 du code de la consommation en sa version applicable au litige).

22- La vérification des charges exposées pour l'entretien des enfants à charge et le logement représente une exigence minimale que le préteur doit impérativement accomplir.

23- Il est par conséquent justifié de prononcer une déchéance totale du droit aux intérêts à l'encontre de la SOREFI.

En ce qui concerne les sommes dues en principal par M. [N] [X] [S]:

24- Lorsque le prêteur est déchu en totalité du droit aux intérêts, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu.

25- Les sommes déjà perçues par lui au titre des intérêts sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû (article L. 341- 8 du code de la consommation en sa version en vigueur à la signature du contrat).

26- En l'espèce, il ressort du décompte de la SOREFI (pièce n° 23) qu'à la date de la résiliation du contrat, le 28 octobre 2021, M. [N] [X] [S] s'était acquitté de la somme de 5300, 62 €.

27- C'est donc à raison que le premier juge a considéré que la créance de la SOREFI se montait à la somme de 19 199, 38 € correspondant à la différence entre le montant des sommes effectivement mises à la disposition de l'emprunteur dans le cadre du crédit (24500 € ) et les règlements effectués par lui (5300, 62 €).

En ce qui concerne l'intérêt légal :

28- Même déchu du droit de percevoir les intérêts, l'établissement de crédit reste en droit de percevoir les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en vertu de l' article'1231- 6 du Code civil.

29- L'article L. 313-3 du Code monétaire et financier dispose quant à lui qu'en cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de I'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour ou la décision de justice est devenue exécutoire.

30- Pour que la déchéance du droit aux intérêts conventionnels soit effective, dissuasive et proportionnée, la juridiction a cependant la faculté de libérer d'office l'emprunteur d'une partie ou de la totalité des intérêts au taux légal.

31- Dans un contrat de location avec option d'achat, les intérêts représentent la différence entre le coût total en cas d'acquisition du bien loué au terme de la location et le prix TTC au comptant du bien loué.

32- Si le contrat était allé à son terme, la SOREFI aurait par conséquent perçu des intérêts pour un montant de 6140, 40 € (30 640, 40 - 24 500).

28- En l'espèce, compte tenu du niveau de l'intérêt légal depuis le 1 er semestre 2023 (2, 06% au premier semestre 2023 puis 4,22 % au second semestre 2023 et 5, 07 % au premier semestre 2024), l'application de l'intérêt légal à compter de la mise en demeure puis des dispositions de l'article L. 313-3 du Code monétaire et financier à compter du jugement ferait perdre toute effectivité à la déchéance du droit aux intérêts prononcée à l'encontre de la SOREFI.

29- C'est par conséquent à raison que le premier juge a écarté l'application d'un taux légal majoré.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

30 - M. [N] [X] [S] , partie succombante au sens des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

31- Il serait inéquitable de laisser la SOREFI supporter la charge de ses frais irrépétibles.

32- Il convient de condamner M. [N] [X] [S] à lui verser la somme de 1000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par décision rendue par défaut, en matière civile et en dernier ressort, mise à disposition au greffe, conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile, 

Confirme le jugement prononcé le 15 décembre 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Pierre sauf en ce qu'il rejette la demande de frais irrépétibles de la société réunionnaise de financement ;

Statuant de nouveau et y ajoutant,

Condamne M. [N] [X] [S] à payer à la société réunionnaise de financement (SOREFI) la somme globale de 1000 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel ;

Condamne M. [N] [X] [S] aux entiers dépens de l'appel.

Le présent arrêt a été signé par monsieur Cyril OZOUX, président de chambre, et par madame Sarah HAFEJEE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

SIGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre civile tgi
Numéro d'arrêt : 23/00208
Date de la décision : 05/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-05;23.00208 ?
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