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03/07/2024 | FRANCE | N°22/01064

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile tgi, 03 juillet 2024, 22/01064


ARRÊT N°2024/259

PF



N° RG 22/01064 - N° Portalis DBWB-V-B7G-FXDG





Ste Coopérative banque Pop. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION



C/



[G]

[H]

[G]

S.A.R.L. SOMID



























COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS



ARRÊT DU 03 JUILLET 2024



Chambre civile TGI





Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE ST

DENIS en date du 08 JUIN 2022 suivant déclaration d'appel en date du 15 JUILLET 2022 RG n° 19/01555





APPELANTE :



Ste Coopérative banque Pop. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION

[Adresse 7]

[Localité 4]



Représentant : Me Ami...

ARRÊT N°2024/259

PF

N° RG 22/01064 - N° Portalis DBWB-V-B7G-FXDG

Ste Coopérative banque Pop. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION

C/

[G]

[H]

[G]

S.A.R.L. SOMID

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 03 JUILLET 2024

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE ST DENIS en date du 08 JUIN 2022 suivant déclaration d'appel en date du 15 JUILLET 2022 RG n° 19/01555

APPELANTE :

Ste Coopérative banque Pop. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentant : Me Amina GARNAULT de la SELAS AMINA GARNAULT, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉS :

Monsieur [L] [N] [D] [G]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Monsieur [Z] [H]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Alain ANTOINE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [Y] [L] [G]

[Adresse 3]

[Localité 4]

S.A.R.L. SOMID

[Adresse 8]

[Localité 6]

DATE DE CLÔTURE : 9 novembre 2023

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Avril 2024 devant Madame FLAUSS Pauline, conseillère rapporteur, assistée de Sarah HAFEJEE, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2024.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère

Conseiller : M. Laurent FRAVETTE, Vice-président placé

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 03 Juillet 2024.

* * *

LA COUR :

Par actes d'huissier des 5 et 8 avril 2019, la caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de la Réunion (CRCAMR) a fait assigner M. [L] [G], M. [Z] [H], M. [Y] [G] et la société Somid, ès qualité de cautions des engagements de la SCCV BDM Capital, aux fins de les voir garantir le règlement de la somme de deux millions sept cent huit mille quatre cent soixante-seize euros et trois centimes (2.708.476,03 €) telle qu'arrêtée par décompte du 5 février 2019, outre frais irrépétibles et dépens.

Le jugement en date du 8 juin 2022, prononcé par le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, a statué en ces termes :

- dit que la CRCAMR a commis une faute engageant sa responsabilité en faisant signer aux défendeurs un engagement d'emprunt manifestement disproportionné ;

- déboute la CRCAMR de l'ensemble de ses demandes relatives au prêt litigieux ;

- rejette les demandes de paiement de sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du présent jugement ;

- condamne la CRCAMR aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Rigault, avocat ;

Pour se déterminer ainsi, le tribunal, après avoir écarté le manquement de la banque à son obligation de conseil et de vigilance a retenu le caractère disproportionné du cautionnement aux revenus et patrimoine des parties en application de l'article L. 332-1 du code de la consommation.

Par déclaration déposée par RPVA le 15 juillet 2022, la CRCAMR a formé appel du jugement.

Elle demande à la cour de:

' la juger recevable en son appel et l'en dire bien-fondée ;

' Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Et statuant de nouveau,

' condamner solidairement M. [L] [G], M. [Z] [H], M. [Y] [G] et la société Somid, à lui payer, en leur qualité de caution personnelle et solidaire de la SCCV BDM

Capital, la somme de deux Millions sept cent huit mille quatre cent soixante-seize euros et trois centimes (2.708.476,03€) outre les intérêts et accessoires jusqu'au parfait paiement avec anatocisme, et se décomposant comme suit :

Ouverture de Crédit en compte courant rattachée au compte n° 30000405619

- Solde débiteur au 05.02.2019 2.708.476,03 €

- Intérêts MEMOIRE

TOTAL (SAUF MEMOIRE) 2.708.476,03 €

' Ordonner l'application de l'article 1343-2 du code civil ;

' débouter M. [Z] [H] de toutes ses demandes, fins et conclusions tant principales que subsidiaires,

' condamner solidairement M. [L] [G], M. [Z] [H], M. [Y] [G] et la société Somid, à lui payer, en leur qualité de caution personnelle et solidaire de la SCCV BDM Capital, la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;

M. [H] sollicite de la cour de:

- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- débouter la CRCAMR de toutes ses demandes fins et conclusions ;

A titre subsidiaire, si par impossible la cour devait infirmer le jugement entrepris :

- juger que les clauses suivantes contenues dans la convention d'ouverture de crédit sont abusives

et réputées non écrites :

"Page 17 :

La CAUTION accepte sans réserve toutes prorogations de délai qui pourraient être éventuellement accordées à l'EMPRUNTEUR, lesquelles ne constitueront en aucun cas novation, l'engagement de CAUTION restant entier jusqu'à la libération définitive du débiteur, en principal, intérêts, frais, commissions et accessoires.

Page 18 :

La CAUTION déclare connaître la situation financière de L'EMPRUNTEUR. Elle s'engage à se tenir informée de l'évolution de sa situation et exempte le prêteur de l'informer de la date de réalisation du concours et de tout avis de prorogation ou de non-paiement. Le Prêteur ne sera pas plus tenu d'informer la caution des évènements qui pourraient affecter la situation financière ou juridique de l'EMPRUNTEUR ou d'une autre caution tels, notamment, le décès, la dissolution etc.

La CAUTION dispense la BANQUE de l'informer du remboursement ou du non-remboursement des sommes dues en vertu du crédit présentement cautionné et renonce à se prévaloir du défaut d'avis par le préteur en cas de non-paiement aux échéances convenues "

- juger que la demanderesse ne rapporte pas la preuve de sa créance à rencontre de la SCCV BMD

Capital ;

- juger que la demanderesse ne peut former une demande de condamnation à hauteur de 2.708.476,03 euros à l'encontre des cautions, cette somme excédant le montant de leurs engagements tels que souscrits en date du 8.08.2014 ;

- juger que la banque n'a pas satisfait à son obligation de vérification de sa situation financière et patrimoniale au moment de son engagement et que son cautionnement est disproportionné par rapport à sa situation financière et ses revenus ;

- juger que la banque a accepté le risque d'une défaillance financière de l'emprunteur ;

- juger que la banque ne rapporte pas la preuve qui lui incombe du respect de ses obligations de prudence, de vigilance, d'informations et de mise en garde tant vis-à-vis de l'emprunteur que des cautions ;

- juger qu'il résulte de ces manquements de la banque une perte de chance pour l'emprunteur de ne pas avoir contracté le prêt et pour les cautions de ne pas avoir souscrit les cautionnements litigieux ;

En conséquence :

- A titre principal, juger que l'acte de prêt et tous les actes de cautionnement sont nuls et de nul effet:

- A titre subsidiaire, les juger inopposables au concluant ;

- prononcer à l'encontre de la demanderesse la déchéance du droit au paiement des accessoires,

frais et intérêts et juger en conséquence que la banque ne pourra prétendre au paiement des

accessoires, frais et intérêts ;

- juger que les sommes réglées par l'emprunteur devront s'imputer sur le principal ;

- juger qu'il résulte des manquements de la banque un préjudice pour les cautions lequel sera réparé par la condamnation de la CRCAMR à lui payer la somme de 2.700.000 euros de dommages et intérêts au titre de la perte de chance subie ;

- condamner en tout état de cause la CRCAMR à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

MM. [G] et la SARL Somid, auxquels l'appel a été signifié le 13 septembre 2023 à étude et par PV de recherches infructueuses, n'ont pas constitué avocat; ils sont ainsi réputés solliciter confirmation du jugement par adoption de ses motifs.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les dernières conclusions de la CRCAMR du 6 novembre 2023 et celles de M. [H] du 26 décembre 2022, auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties;

Vu l'ordonnance de clôture du 9 novembre 2023;

Sur la demande en paiement

La banque se prévaut d'un acte notarié du 8 août 2014 d'ouverture de crédit en compte courant au bénéfice de la SCCV BDM Capital pour la somme de 2.150.000 € remboursables en une seule échéance avant le 7 août 2016 au taux de 3,207% l'an et l'affectation hypothécaire de deux parcelles constructibles sises à [Localité 6] (pièce 1 CRCAMR). Par le même acte, MM. [G] et M. [H] se sont portés caution solidaires au titre de l'engagement de la SCCV, pour une durée expirant le 7 août 2018, ainsi que la SARL Somid dans la limite de 2.795.000 euros. Par acte notarié du 14 novembre 2017 signé entre la CRCAMR et la SCCV BDM Capital, l'échéance de remboursement du crédit a été prorogée au 14 novembre 2017 (pièce 2).

La banque invoque en outre une augmentation de la ligne de crédit signée le même jour pour la somme de 600.000 euros supplémentaires.

La CRCAMR indique que l'échéance n'ayant été honorée ni au 14 novembre 2017 ni après les mises en demeure infructueuses adressées à l'emprunteuse et aux cautions, ces dernières lui sont solidairement redevables du paiement de la somme de 2.708.476,03 euros suivant décompte arrêté au 5 février 2019.

M. [H] s'oppose à la demande en paiement, soutenant:

. que la preuve de sa créance n'est pas certaine en l'absence d'extrait de compte et d'une procédure de saisie immobilière en cours;

. que la banque n'ayant pas vérifié les capacités de remboursement des cautions alors que l'engagement de ces dernières est manifestement disproportionné;

. qu'elles n'ont pas donné leur accord au cautionnement d'un montant de crédit augmenté;

. que la banque ne les a pas mises en garde sur la viabilité du projet et sur les capacités de remboursement de la débitrice alors qu'elle était en capacité- au vu des documents techniques lui étant remis- de déceler l'inexpérience de l'emprunteur et de ses associés; qu'elle a octroyé à la SCCV BDM Capital un crédit inadapté;

. que la CRCAMR n'a pas respecté ses obligations d'information annuelle des cautions;

. que l'engagement de la Somid est nul en l'absence de mention de la durée d'engagement et que les clauses du cautionnement portant renonciation au signalement des incidents de paiement et des prorogations de délai accordés au débiteur sont abusives et ainsi réputées non écrites.

Sur ce,

Vu l'article 1315 du code civil, devenu 1353, ensemble l'article 9 du code de procédure civile;

Il résulte de la lecture de l'acte notarié du 8 août 2014 que l'engagement cautionné consiste en l'autorisation de débit d'un compte courant, ouvert spécialement pour l'opération de construction projetée par la SCCV BDM Capital, dont les débits de règlement de dépenses sont assurés par la CRCAMR et dont le crédit est assuré par le reversement des sommes réceptionnées pour la vente des lots.

L'acte précise ainsi que le compte créé produit "tous les effets légaux et usuels du compte courant et transform[e] toutes les opérations en de simples articles de crédit et de débit, générateurs, lors de la clôture, d'un solde qui fera seul apparaitre une créance ou une dette exigible".

Comme le relève l'intimé, aucun extrait de compte produit ne permet de connaitre l'état du compte, les mouvements ayant conduit à l'existence d'une dette. La CRCAMR ne se réfère qu'à un décompte très succinct (pièce 8) qu'elle a établi, lequel énonce:

" Compte courant n° 30000405619:

Solde débiteur au 5/02/2019...............................2.708.476,03€

Intérêts.................................................................MEMOIRE

TOTAL (Sauf MEMOIRE) ..................................2.708.476,03€".

En particulier, les dates de consommation du crédit accordé et leur montant ne sont pas connues.

En outre, la cour relève que la date d'échéance du prêt en compte courant consenti constitue la date à laquelle la dette résultant du prêt est exigible, non la date à laquelle le compte est clôturé, date permettant d'établir les comptes entre les parties. Aucun document émanant de la banque elle-même n'établit la date de la clôture du compte à laquelle le montant de la dette acquiert un caractère définitif.

Par ailleurs, par le décompte qu'elle produit, la banque ne met pas la cour à même de vérifier le détail des sommes mises à la charge du débiteur principal et réclamées aux cautions, notamment au titre des intérêts.

Enfin, s'il résulte de la pièce 23 produite par la banque que la SCCV BDM Capital a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire ouverte le 18 mars 2022, aucune information n'est produite sur la déclaration par la banque de sa créance ou les suites de la procédure de liquidation, eu égard notamment à la garantie hypothécaire prise sur le bien de la SCCV.

En conséquence de ce qui précède, la banque n'établit pas le bénéfice de la créance principale dont elle se prévaut à l'égard des cautions.

Sa demande en paiement doit ainsi être rejetée et le jugement, confirmé.

Sur les frais irrépétibles et les dépens.

Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile;

La CRCAMR, qui succombe, supportera les dépens.

L'équité commande en outre de rejeter les demandes formées au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par décision rendue par défaut, en matière civile et en dernier ressort, mis à disposition au greffe, conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile, 

- Confirme le jugement entrepris;

Y ajoutant,

- Dit n'y avoir lieu à frais irrépétibles;

- Condamne la CMCAMR aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par monsieur Patrick CHEVRIER, président de chambre, et par madame Sarah HAFEJEE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

SIGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre civile tgi
Numéro d'arrêt : 22/01064
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;22.01064 ?
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