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17/03/2023 | FRANCE | N°21/01012

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile tgi, 17 mars 2023, 21/01012


ARRÊT N°23/

LC



N° RG 21/01012 - N° Portalis DBWB-V-B7F-FR6W













[Z]





C/



[N]

[M]

[X]



































































COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS



ARRÊT DU 17 MARS 2023



Chambre civile TGI


>Vu l'arrêt de la cour de Cassation en date du 14 avril 2021 ayant cassé et annulé l'arrêt rendu le 23 novembre 2018 par Cour d'appel de Saint-Denis-de-La-Réunion suite au jugement rendu par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT PIERRE (REUNION) en date du 24 mars 2017 rg n° 15/03300 suivant déclaration de saisine en date du 09 juin 2021



APPELANTE :



Madame [B] [Z]

[Adresse 6]

[Loca...

ARRÊT N°23/

LC

N° RG 21/01012 - N° Portalis DBWB-V-B7F-FR6W

[Z]

C/

[N]

[M]

[X]

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 17 MARS 2023

Chambre civile TGI

Vu l'arrêt de la cour de Cassation en date du 14 avril 2021 ayant cassé et annulé l'arrêt rendu le 23 novembre 2018 par Cour d'appel de Saint-Denis-de-La-Réunion suite au jugement rendu par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT PIERRE (REUNION) en date du 24 mars 2017 rg n° 15/03300 suivant déclaration de saisine en date du 09 juin 2021

APPELANTE :

Madame [B] [Z]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentant : Me Olivier HAMEROUX de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMES :

Monsieur [O] [N]

[Adresse 2]

[Localité 7] (REUNION)

Madame [S] [M]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentant : Me Françoise BOYER-ROZE, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Madame [G] [X]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Alain ANTOINE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

CLOTURE LE : 16 août 2022

DÉBATS : En application des dispositions des articles 778, 779 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Décembre 2022 devant la Cour composée de :

Président : M. Alain LACOUR, président

Conseiller : Madame Aurélie POLICE,

Conseiller : Monsieur Laurent CALBO, Conseiller

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

Greffier lors des débats et du prononce : Madame Marina BOYER, Greffière.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 17 Mars 2023.

* * * *

LA COUR

Mme [B] [Z], Mme [S] [M], Mme [H] [R] et M. [O] [N], infirmiers libéraux, ont signé le 8 juillet 2006 un contrat d'association avec masse commune relatif à l'exercice d'un cabinet de soins infirmiers à [Localité 7] (La Réunion).

Le 1er avril 2019, un nouveau contrat a été signé avec Mme [G] [X], Mme [R] ayant ultérieurement cédé ses parts à Mme [X] et M. [N] ayant cédé une partie de ses parts à Mme [X].

La répartition des parts et honoraires entre les infirmiers est devenue la suivante:

*1/3 pour M. [O] [N],

*1/3 pour Mme [G] [X],

*1/6 pour Mme [S] [M],

*1/6 pour Mme [B] [Z].

Par courrier du 2 octobre 2014, Mme [M], Mme [X] et M. [N] ont informé Mme [Z] de leur intention de cesser leur collaboration avec elle.

Faute de règlement amiable du litige et après dissolution de la société de fait sollicitée notamment par Mme [X], Mme [Z] a fait assigner Mme [M], Mme [X] et M. [N] devant le tribunal de grande instance de Saint-Pierre de la Réunion afin d'obtenir leur condamnation à lui verser les sommes de :

-125 958 euros au titre de la privation de gains résultant de la dissolution de la société de fait entre les parties,

- 65 000 euros au titre de la reddition des comptes,

- 54 584 euros au titre des honoraires impayés qui figurent au compte courant au 31 décembre 2015, sauf à parfaire,

- 415,05 euros au titre d'un remplacement effectué le 26 avril 2014,

- 30 000 euros en raison du préjudice moral subi,

- 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile

Mme [B] [Z] a relevé appel le 5 avril 2017 du jugement rendu le 24 mars 2017 par le tribunal de grande instance de Saint-Pierre de la Réunion ayant notamment :

- constaté que la dissolution de la société de fait [M]-[N]-[X]-[Z] n'a été effectuée ni à contretemps ni de mauvaise foi ;

- débouté Mme [Z] de sa demande formulée au titre de la privation de gains futurs résultant de la dissolution de la société de fait entre les parties ;

- constaté qu'aucun liquidateur n'a été nommé par les parties et qu'aucune des parties ne sollicite le tribunal pour désigner un liquidateur chargé du règlement des comptes de la société ;

- déclaré irrecevables les demandes formulées par Mme [Z] relatives à ses indemnités au titre de la reddition des comptes, de ses honoraires impayés et des honoraires dus au remplacement du 26 avril 2014 ;

- déclaré irrecevables les demandes formulées par Mme [X], Mme [M] et M. [N] relatives aux honoraires qui auraient été versés indûment à Mme [Z] depuis décembre 2014 ;

- débouté Mme [Z] de ses demandes en dommages et intérêts pour préjudice moral ;

- débouté Mme [M], Mme [X] et M. [N] de leur demande en dommages et intérêts ;

- condamné Mme [Z] aux dépens.

Par arrêt du 23 novembre 2018, la cour d'appel de céans a infirmé en toutes ses dispositions le jugement et statuant à nouveau a :

- dit que la société de fait d'infirmiers a été dissoute de mauvaise foi et à contretemps par M. [N], Mme [M] et Mme [X] ;

- condamné solidairement M. [N], Mme [M] et Mme [X] à verser à Mme [Z] la somme de 55 000 euros au titre de ses parts sociales ;

- condamné solidairement M. [N], Mme [M] et Mme [X] à verser à Mme [B] [Z] une somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice résultant de la dissolution de la société ;

- condamné Mme [X] à verser à Mme [Z] la somme de 415,05 euros au titre des honoraires dus pour le remplacement du 26 avril 2014 ;

- condamné M. [N], Mme [M] et Mme [X] à verser à Mme [Z] une somme totale de 15 000 euros au titre de son préjudice moral ;

- débouté Mme [Z] de ses demandes relatives aux honoraires ;

- condamné Mme [Z] à verser à M. [N], Mme [M] et Mme [X] la somme globale de 12 080 euros au titre des honoraires versés depuis novembre 2014 ;

- rejeté les demandes de M. [N], de Mme [M] et de Mme [X] au titre de leur préjudice ;

- condamné solidairement M. [N], Mme [M] et Mme [X] aux dépens de première instance et d'appel ;

- condamné solidairement M. [N], Mme [M] et Mme [X] à verser Mme [Z] une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Sur pourvoi de Mme [Z], la Cour de cassation a, par arrêt du 14 avril 2021 :

- cassé et annulé l'arrêt rendu le 23 novembre 2018 mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme [Z] relatives aux honoraires pour les années 2015 et 2016, et en ce qu'il a condamné celle-ci à verser à M. [N] et à Mmes [X] et [M] la somme de 12 080 euros au titre des honoraires versés depuis le mois de novembre 2014 ;

- remis sur ces points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de céans autrement composée.

La Cour de cassation reproche à la cour d'appel d'avoir statué ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des contrats d'association des 8 juillet 2006 et 1er avril 2009 que les parties étaient convenues de ce que leur part dans les résultats de la société serait déterminée à proportion de leur part dans les droits sociaux.

Mme [Z] a saisi la juridiction de renvoi par acte du 9 juin 2021.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 août 2022.

* * * *

Mme [Z] appelante demande, au terme de ses conclusions n°4 notifiées au greffe le 23 juin 2022 auxquelles il est expressément renvoyé pour le détail des moyens développés, de :

- déclarer Mme [X] qui n'a pas respecté le délai de l'article 1037-1 du code de procédure civile, réputée s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elle avait soumis à la cour d'appel dont l'arrêt a été partiellement cassé ;

- débouter Mme [X] de sa demande de confirmation de jugement entrepris en ces dispositions l'ayant déboutée de ses demandes de condamnation des associés à lui payer la somme de 54 584 euros au visa des articles 542 et 954 du code de procédure civile ;

- en conséquence, écarter tous les moyens et prétentions soulevées devant la cour de renvoi ;

- écarter des débats la pièce n°1 de Mme [X] et la pièce n°4 de Mme [M] intitulée « attestation Carpimko du 19 octobre 2017 » et bâtonner leurs écritures de reprise de cette attestation dans le corps des conclusions au visa des articles 226-13 et 226-15 du code pénal ;

- condamner solidairement Mme [X] et Mme [M] à payer à Mme [Z] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- débouter les consorts [N], [X] et [M] de toutes leurs demandes ;

- leur ordonner de restituer solidairement la somme de 12 080 euros réglée en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis du 23 novembre 2018 sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

- condamner solidairement les consorts [N], [X] et [M] à lui payer la somme de 57 578 euros au titre de sa part dans les résultats de la société des années 2015 et 2016 ;

- subsidiairement, les condamner à lui payer la même somme à titre de dommages et intérêts à raison des fautes par eux commises en réparation du préjudice subi ;

- les condamner solidairement à lui payer la somme de 4 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens qui comprendront ceux de l'article A 444-32 du code de commerce.

Mme [X], intimée, demande, au terme de ses conclusions notifiées au greffe le 29 octobre 2021 auxquelles il est expressément renvoyé pour le détail des moyens développés, de :

- à titre principal, confirmer le jugement du 24 mars 2017 en ces dispositions ayant débouté Mme [Z] de ses demandes de condamnation des associés à lui payer la somme de 54 584 euros ;

- débouter Mme [Z] du surplus de ses demandes ;

- la condamner à lui payer la somme de 5 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

- à titre subsidiaire, juger infondées les prétentions de Mme [Z] et l'en débouter ;

- la condamner à lui payer la somme de 5 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

- à titre infiniment subsidiaire, juger que M. [N] a perçu seul l'intégralité du montant des honoraires revendiqué par Mme [Z] au titre des années 2015 et 2016 et qu'aucune somme ne peut être réclamée de ce chef à Mme [X] ;

- la débouter de ses demandes dirigées à son encontre ;

- condamner le cas échéant M. [N] à garantir et relever indemne Mme [X] de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;

- condamner M. [N] à lui payer la somme de 5 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Mme [M], intimée, demande, au terme de ses conclusions n°3 notifiées au greffe le 15 juin 2022 auxquelles il est expressément renvoyé pour le détail des moyens développés, de :

- à titre principal, débouter Mme [Z] de ses demandes ;

- la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

- à titre subsidiaire, débouter Mme [Z] de ses demandes dirigées à son encontre ;

- condamner solidairement Mme [Z], Mme [X] et M. [N] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

- à titre infiniment subsidiaire, condamner solidairement M. [N] et Mme [X] à la garantir et relever indemne des condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;

- condamner solidairement M. [N] et Mme [X] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

M. [N] n'a pas constitué avocat.

Pour plus ample exposé des moyens des parties constituées, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.

* * * *

Par avis adressé par RPVA le 6 février 2023, la cour a sollicité les observations des parties sur la recevabilité de la demande en garantie formée par Mme [M] à l'encontre de M. [N] et Mme [X], présentée pour la première fois en cause d'appel sans qu'elle ne figure dans ses premières conclusions.

Les parties ont adressé leurs observations les 9 et 10 février 2023.

Sur ce :

Sur le périmètre du litige :

Aux termes de l'article 634 du code de procédure civile, « Les parties qui ne formulent pas de moyens nouveaux ou de nouvelles prétentions sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la juridiction dont la décision a été cassée. Il en est de même de celles qui ne comparaissent pas. ».

M. [N] n'a pas constitué avocat.

La signification de la déclaration de saisine n'a pas été délivrée à sa personne puisqu'elle a été remise à l'étude de l'huissier instrumentaire.

L'arrêt sera rendu par défaut.

N'ayant pas conclu devant la cour de renvoi, M. [N] est réputé s'en tenir aux moyens et prétentions développés avant la cassation.

Ainsi, aux termes de ses conclusions n°2 notifiées le 4 décembre 2017 (pièce 11 / Mme [Z]), M. [N], intimé, sollicite de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Z] de ses demandes et l'infirmer en ce qu'il a débouté les consorts [M], [X] et [N] de leurs demandes, et statuant à nouveau, de débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, la condamner à rembourser les honoraires qui lui ont été versés depuis décembre 2014, à savoir la somme de 12 080 euros, et à payer la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi, outre 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par effet de la cassation partielle, la cour de renvoi n'est saisie que de la demande de Mme [Z] relative au paiement par ses associés des honoraires pour les années 2015 et 2016. S'agissant des prétentions de M. [N], la cour n'est donc valablement saisie que de sa demande de débouté de l'appelante sur ce point et le cas échéant de sa demande de remboursement des honoraires versés depuis décembre 2014.

Vu l'article 1037-1 alinéas 4 et 6 du code de procédure ;

Mme [Z] fait valoir que Mme [X] a conclu au-delà du délai de deux mois suivant la notification des conclusions de l'auteur de la déclaration de saisine, cette dernière ne répondant pas sur ce point.

Mme [Z] a signifié, par actes d'huissier du 9 juillet 2021, sa déclaration de saisine et l'avis de fixation à bref délai, à M. [N] et à Mmes [X] et [M].

Elle a ensuite notifié le 30 juillet 2021 au greffe de la cour ses premières conclusions par RPVA.

Aucun intimé n'ayant constitué avocat, elle a signifié ses premières conclusions à M. [N] et à Mmes [X] et [M], par actes d'huissier du 5 août 2021, puis en a justifié au greffe de la cour par message RPVA du 25 août 2021, en plaçant en outre en copie les conseils de Mme [M] et de Mme [X], respectivement constituées les 16 et 24 août 2021.

Les parties adverses disposaient en conséquence d'un délai pour notifier leurs conclusions expirant le 5 octobre 2021.

Si Mme [M] a notifié ses écritures au greffe de la cour par RPVA le 4 octobre 2021, Mme [X] n'a accompli cette diligence que le 29 octobre 2021, en sorte que ses conclusions et pièces seront déclarées irrecevables.

Elle est donc réputée s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elle avait soumis à la cour d'appel avant cassation, lesquels sont identiques à ceux de M. [N] pour résulter des conclusions n°2 déposées au greffe le 4 décembre 2017.

Sur le rejet d'une pièce :

Mme [Z] fait valoir que la pièce n°4 produite par Mme [M], soit une attestation de la Carpimko concernant les périodes d'absence pour maladie de Mme [Z], doit être écartée des débats en ce qu'elle porte atteinte aux secrets médical et des correspondances.

Cependant, d'une part, l'attestation est dépourvue de tout élément à caractère médical.

D'autre part, ce document ne comporte aucune référence à l'adresse du cabinet d'infirmiers dans lequel Mme [Z] exerçait en sorte qu'il n'est pas établi qu'il aurait été intercepté à cette adresse par ses associés en fraude de ses droits.

La demande de rejet de pièce et celles subséquentes de bâtonnement des écritures et de paiement de dommages et intérêts seront rejetées.

Sur le paiement des honoraires :

Vu les articles 1844-1 et 1871 du code civil ;

Vu les articles 4 à 7 des contrats d'association avec masse commune des 8 juillet 2006 et 1er avril 2009 ;

Mme [Z] sollicite au titre de sa participation aux honoraires de la société de fait, la somme de 54 584,49 euros pour l'année 2015 et celle de 2 994 euros pour l'année 2016.

Elle fait valoir notamment qu'elle a été empêchée d'exercer, qu'elle a droit à sa part des honoraires selon la répartition convenue entre associés et que les montants réclamés résultent des pièces fiscales.

Mme [M] rétorque que l'appelante ne pouvait plus prétendre à sa participation aux honoraires à compter du 17 décembre 2014, soit trois mois à compter de son arrêt de travail.

M. [N] et Mme [X] (pièce 11 / Mme [Z]) estiment quant à eux que Mme [Z] a cessé de travailler pour le cabinet à partir de 1er novembre 2014, qu'elle n'est jamais revenue au cabinet, qu'elle a été remplacée, que ses associés n'avaient dès lors aucune obligation de lui reverser une part des honoraires, qu'il lui a été versé la totalité des honoraires au titre du mois d'octobre 2014 puis, conformément à l'usage sur le remplacement de l'associé absent, 20 % de sa part des honoraires fixée à 1/6e qu'elle aurait perçus si elle avait continué à exercer, et que l'écriture comptable de 54 584 euros ne permet pas de déterminer ce qui lui est véritablement dû.

En premier lieu, aux termes de l'arrêt de la cour de céans du 23 novembre 2018, il a définitivement été jugé que la société de fait a été dissoute le 2 novembre 2015. Mme [Z] a été définitivement indemnisée de ses préjudices résultant de cette dissolution, à cette date, de mauvaise foi et à contretemps.

La demande de versement de sa quote part des honoraires perçus par la société de fait est donc circonscrite à la période du 1er janvier au 1er novembre 2015, peu important les écritures comptables ou les données fiscales sur ce point.

En deuxième lieu, les articles 4 et 5 des contrats d'association signés successivement par les parties (pièces 2 et 3 / Mme [Z]) posent le principe d'une distribution aux associés des honoraires perçus par la société de fait, après masse commune, selon une répartition fixée à 1/6e pour Mme [Z].

Il résulte des écritures de M. [N] et de Mme [X] qu'après avoir versé à Mme [Z] en octobre 2014 les honoraires perçus par la société à proportion de 1/6e, ils ont procédé « selon l'usage » au versement pour la période suivante de sa quote part calculée à hauteur de 20 % du 1/6e compte tenu de son remplacement dans ses fonctions.

Mme [M] s'est associée aux écritures de M. [N] et Mme [X], avant de soutenir devant la cour de renvoi, que l'article 7 dudit contrat limitait à trois mois la perception des honoraires en cas d'empêchement de l'associé pour maladie.

Cependant, les associés ont manifestement écarté les dispositions de cet article en maintenant une répartition des honoraires selon la clé prévue par les contrats d'association, mais dans la limite de 20 % compte tenu de « l'usage » en matière de remplacement, la preuve des versements étant rapportée par les écritures du compte courant associé de Mme [Z] (pièce 5 / Mme [Z]).

De plus, il a été définitivement jugé que Mme [Z] a mandaté un remplaçant dès le mois de novembre 2014, qu'il a été éconduit par les autres associés le 11 novembre 2014 et que pour sa part, elle a été empêchée dans la reprise de ses fonctions début 2015 en raison du changement des serrures du cabinet fin décembre 2014 par les autres associés.

Dès lors, Mme [Z] a été empêchée d'exercer sur la période litigieuse en raison du comportement des associés.

Le débat soulevé par Mme [M] sur l'incapacité de travail de Mme [Z] pour maladie à compter du 17 septembre 2014 est donc inopérant.

Les associés lui doivent donc le reliquat des honoraires qui lui reviennent contractuellement jusqu'à la dissolution de la société.

En troisième lieu, l'exercice 2015 a constaté, concernant la quote part de Mme [Z], un résultat de 62 979 euros tel qu'il résulte de la liasse fiscale et du compte courant associé (pièces 4 et 5 / Mme [Z]).

Au prorata temporis, la part des honoraires due par la société à Mme [Z] s'élève donc à 52 483 euros.

Le compte courant associé de Mme [Z] porte mention de virement à son profit entre le 11 janvier et le 14 septembre 2015 à hauteur de 10 780 euros.

Les honoraires restant dus à Mme [Z] s'élèvent ainsi à 41 703 euros, somme que les autres associés seront condamnés solidairement à lui verser.

Il résulte en outre de ce qui précède que la demande de M. [N] et Mme [X], tendant au remboursement des honoraires versés par la société à Mme [Z] de novembre 2014 à août 2015, sera rejetée, cette dernière étant fondée à participer à la distribution des honoraires jusqu'à la dissolution de la société.

Enfin, il n'y a pas lieu d'ordonner aux consorts [N], [X] et [M] une restitution de la somme de 12 080 euros, celle-ci étant induite par l'arrêt de la Cour de cassation qui a annulé la disposition de l'arrêt de cour d'appel ayant condamné Mme [Z] au paiement de cette somme, et qui constitue dès lors le titre permettant à Mme [Z] d'en obtenir restitution.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par Mme [Z] :

Vu les articles 564 à 566 du code de procédure civile ;

Mme [Z] sollicite à titre subsidiaire la somme de 58 578 euros à titre de dommages et intérêts en suite des fautes commises par les associés et l'ayant empêchée de percevoir ses honoraires.

L'appelante n'ayant été satisfaite de sa demande de paiement des honoraires restant dus qu'à hauteur de 41 703 euros, sa demande indemnitaire subsidiaire porte sur le surplus.

Contrairement à ce que soutient Mme [M], cette demande n'est pas nouvelle dès lors qu'elle tend à la même fins que celle soumise au premier juge sur le paiement de ses honoraires, peu important le changement de fondement juridique.

Toutefois, si le comportement des associés est fautif en ce qu'ils ont fait obstacle à sa reprise d'activité, Mme [Z] a déjà été indemnisée des conséquences de la dissolution de la société et a été payée des honoraires qui lui revenaient antérieurement à cette date, en sorte qu'elle ne justifie d'aucun préjudice.

Elle sera déboutée de cette demande indemnitaire.

Sur l'action en garantie :

Vu les articles 564 à 566 et 910-4 du code de procédure civile ;

Mme [M] agit subsidiairement, pour la première fois devant la cour de renvoi, en garantie par M. [N] et Mme [X], des condamnations prononcées à son encontre, compte tenu que lesdits associés auraient perçus seuls les honoraires dues à Mme [Z].

Cependant, cette demande, qui repose sur le partage des responsabilités entre associés, n'a pas été formée devant le premier juge.

Elle n'est ni l'accessoire, ni la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises au premier juge, et ne tend pas aux mêmes fins.

De surcroît, cette prétention ne figure pas dans les premières conclusions déposées par Mme [M] au greffe de la cour d'appel en date du 5 septembre 2017.

Pour ces deux motifs, la demande en garantie sera déclarée irrecevable.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en audience de renvoi après cassation, par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort, par sa mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Vu l'arrêt de la cour d'appel de céans du 23 novembre 2018 et l'arrêt de la Cour de cassation du 14 avril 2021 ;

Déclare irrecevables les conclusions et pièces déposées par Mme [X] ;

Déboute Mme [Z] de ses demandes de rejet de pièce, de bâtonnement des écritures et de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte aux secrets médical et des correspondances ;

Condamne solidairement M. [N], Mme [X] et Mme [M] à payer à Mme [Z] la somme de 41 703 euros au titre des honoraires sur la période du 1er janvier au 1er novembre 2015 ;

Dit n'y avoir lieu à ordonner la restitution.

Déclare recevable la demande indemnitaire formée par Mme [Z] en réparation du reliquat d'honoraires non perçus ;

L'en déboute ;

Déclare irrecevable la demande en garantie formée par Mme [M] à l'encontre de M. [N] et Mme [X] ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne solidairement M. [N], Mme [X] et Mme [M] à payer à Mme [Z] la somme de 3 000 euros au titre des frais non répétibles d'instance ;

Rejette les autres demandes formées à ce titre ;

Condamne solidairement M. [N], Mme [X] et Mme [M] aux dépens de l'instance devant la cour de renvoi.

Le présent arrêt a été signé par M. Alain LACOUR, président, et par Mme Marina BOYER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La GREFFIERE signé Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre civile tgi
Numéro d'arrêt : 21/01012
Date de la décision : 17/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-17;21.01012 ?
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