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25/11/2022 | FRANCE | N°21/00975

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile tgi, 25 novembre 2022, 21/00975


ARRÊT N°22/

NC



R.G : N° RG 21/00975 - N° Portalis DBWB-V-B7F-FR4Q





[P]

[W]



C/



S.A. SOCIETE IMMOBILIERE DU DEPARTEMENT DE LA REUNION (S.I.D.R.)























COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS



ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2022



Chambre civile TGI





Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-DENIS en date du 31 MAI 2021 suivant déclaration d'appel en date du 04 JUI

N 2021 RG n° 11-21-250





APPELANTS :



Madame [L] [P]

[Adresse 4]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentant : Me Jean patrice SELLY de la SELARL SELLY-MOLIERE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

(béné...

ARRÊT N°22/

NC

R.G : N° RG 21/00975 - N° Portalis DBWB-V-B7F-FR4Q

[P]

[W]

C/

S.A. SOCIETE IMMOBILIERE DU DEPARTEMENT DE LA REUNION (S.I.D.R.)

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-DENIS en date du 31 MAI 2021 suivant déclaration d'appel en date du 04 JUIN 2021 RG n° 11-21-250

APPELANTS :

Madame [L] [P]

[Adresse 4]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentant : Me Jean patrice SELLY de la SELARL SELLY-MOLIERE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/4353 du 24/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

Monsieur [N] [T] [Y] [W]

[Adresse 4]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentant : Me Jean patrice SELLY de la SELARL SELLY-MOLIERE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/4352 du 24/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIMÉE :

S.A. SOCIETE IMMOBILIERE DU DEPARTEMENT DE LA REUNION (S.I.D.R.)

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Marie françoise LAW YEN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 24/03/2022

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 septembre 2022 devant Madame COURTOIS Nathalie, Présidente de chambre, qui en a fait un rapport, assistée de Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 25 novembre 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Nathalie COURTOIS, Présidente de chambre

Conseiller : Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre

Conseiller : Madame Nathalie BRUN, Conseillère

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 25 novembre 2022.

* * *

LA COUR

Exposé du litige :

Par contrat du 4 novembre 2016, la société immobilière du département de la Réunion (SIDR) a donné à bail à Mme [L] [P] un appartement T4 à usage d'habitation situé au [Adresse 4], pour un loyer mensuel de 456,97€ et 107,27€ de provision sur charges.

Le 23 juillet 2019, la SIDR a d'une part, fait dresser un procès-verbal de constat d'huissier aux fins de faire constater l'occupation des parties communes de la résidence par M.[N] [W], ce dernier entreposant divers matériaux et autres mobiliers au sein du parking de la résidence et d'autre part, fait intervenir les forces de l'ordre le même jour pour faire procéder à la libération des lieux occupés et la mise en fourrière des animaux.

Le 8 août 2019, la SIDR a fait délivrer une sommation interpellative à l'encontre de Mme [L] [P] et M.[N] [W] aux fins d'enlever sur le champ tous les effets, mobiliers et animaux laissés dans le parking du sous-sol.

Ce à quoi il lui a été répondu: 'tout a été enlevé la semaine dernière en présence des policiers et de la SIDR'.

Le 13 août 2019, la SIDR a déposé plainte contre M.[N] [W] suite à la découverte de murs, plafonds et sol du parking perforés.

Le 10 juillet 2020, la SIDR a fait dresser un procès-verbal de constat d'huissier aux fins de constater la construction d'un enclos ainsi que l'entreposage de divers matériaux par M.[N] [W], concubin de la locataire.

Le 3 août 2020, la SIDR a fait délivrer une sommation interpellative à l'encontre de Mme [L] [P] et M.[N] [W] aux fins d'enlever sur le champ tous les effets, mobiliers et animaux laissés dans le parking du sous-sol.

Ce à quoi il lui a été répondu par M.[N] [W] : 'Faites les réparations sur le portail et j'enlèverai mon chien. Par ailleurs, je me tiens à votre disposition pour un éventuel rendez-vous. Merci de me joindre téléphoniquement au [XXXXXXXX01]".

Un avenant au bail a été signé le 26 octobre 2020, la SIDR ayant été informée le 15 octobre 2020 de la souscription d'un pacte civil de solidarité entre Mme [L] [P] et M.[N] [W], ce dernier devenant locataire solidaire et responsable de l'exécution du contrat de location.

Le 2 décembre 2020, la SIDR a fait dresser un procès-verbal de constat d'huissier aux fins de faire constater que Mme [L] [P] et M.[N] [W] ont effectué un branchement électrique depuis la coursive jusqu'à leur domicile et ce sans aucune autorisation et que ces derniers squattent également le local à poubelle se trouvant dans le parking souterrain de l'immeuble.

Le 9 décembre 2020, la SIDR a fait délivrer une sommation interpellative à l'encontre de Mme [L] [P] et M.[N] [W] aux fins de les sommer sur le champ d'avoir à retirer leurs affaires personnelles du local et à restituer les clés de celui-ci à l'agence de la SIDR.

Ce à quoi il lui a été répondu : 'Nous n'avons pas d'endroit où mettre nos affaires, ce local sert de dépôt depuis plusieurs années. Merci d'aménager un local afin qu'on puisse mettre nos affaires. Par ailleurs, les clés de ce local appartiennent aux locataires ; de plus le portail n'est toujours pas réparé'.

Par courrier du 30 septembre 2020, la SIDR a saisi le procureur de la République du tribunal judiciaire de Saint-Denis aux fins de solliciter en urgence l'intervention des forces de l'ordre du fait de l'importance des troubles causés par le trafic de stupéfiants dans les escaliers et dans le sous-sol du parking de M.[N] [W].

Par acte d'huissier du 18 février 2021, la SIDR a fait assigner Mme [L] [P] et M.[N] [W] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, sur le fondement des articles 1719, 1728 et 1729 du code civil, et l'article 7b de la loi du 6 juillet 1989, aux fins de voir:

juger la SIDR recevable et bien fondée en son action,

juger que Mme [L] [P] et M.[N] [W] sont occupants sans droit ni titre du parking sous-terrain et du local poubelles du groupe d'habitations dénommé SIDR MONDON B, et en conséquence,

ordonner l'évacuation aux frais et charges exclusifs de M.[N] [W] et Mme [L] [P] de tous les biens et affaires entreposés sans autorisation dans le parking sous-terrain et le local à poubelles, en particulier l'évacuation du chien attaché à un poteau, dans un délai de 48 heures à compter de la signification du jugement à intervenir et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin en était,

juger que passé ce délai de 48 heures imparti, la SIDR pourra faire procéder à l'ouverture du local à poubelles et à faire procéder à l'enlèvement de tous les biens, matériels et autres entreposés dans ce local et sur les places du parking souterrain, que ceux-ci pourront être mis à la décharge publique, ce avec le concours d'un huissier de justice et solliciter la fourrière CINOR sise au [Adresse 2], aux fins d'évacuer le chien et procéder à son placement à la fourrière aux frais exclusifs de M.[N] [W] et Mme [L] [P], ce également avec le concours de la force publique, si besoin était,

condamner solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] à lui payer une somme de 4492,40€ au titre de la remise en état du local à poubelles,

juger que l'occupation illicite des parties communes et les troubles de voisinage causés par Mme [L] [P] et M.[N] [W] constituent des fautes graves qui doivent être sanctionnées,

prononcer par conséquent la résiliation judiciaire du bail conclu le 28 octobre 2016 aux torts de Mme [L] [P] et M.[N] [W],

ordonner leur expulsion du logement loué et ce, tant celle de leur personne que de leurs biens et de tous occupants de leur chef, avec l'aide et l'assistance de la force publique si besoin est, ce sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter du jugement à intervenir,

les condamner solidairement à payer une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de 582€, révisable dans les mêmes conditions que le loyer et les charges prévues au contrat de bail, ce jusqu'à la libération effective des lieux et la restitution des clés,

les condamner solidairement à lui payer la somme de 817,13€ au titre des loyers et charges impayées arrêtés au 15 février 2021,

les débouter de toutes éventuelles demandes de délais et rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,

dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire du jugement à intervenir,

les condamner solidairement à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris le coût des procès-verbaux de constat, le coût des sommations interpellatives, le commandement de payer les loyers (total: 1675,82€) et les frais d'expulsion s'il y a lieu.

Par jugement du 31 mai 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a :

dit que l'action diligentée par la société immobilière du département de la Réunion est recevable,

prononcé la résiliation judiciaire du bail conclu le 28 octobre 2016 et modifié par avenant du 26 octobre 2020 entre d'une part la société immobilière du département de la Réunion et d'autre part, Mme [L] [P] et M.[N] [W] concernant l'appartement à usage d'habitation situé au [Adresse 4] aux torts exclusifs de Mme [L] [P] et M.[N] [W] et ce, à compter du 31 mai 2021,

ordonné à Mme [L] [P] et M.[N] [W] de libérer les lieux, le logement et les parties communes, de leur personne, de leurs biens, ainsi que de tous occupants ou biens introduits dans le logement et dans les parties communes de leur chef, dans un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision,

autorisé la société immobilière du département de la Réunion à faire procéder à leur expulsion de leur personne et de leurs biens ainsi que celle de tous occupants de leur chef de leur personne et de leurs biens, à défaut de libération volontaire, dans les deux mois suivant un commandement de quitter les lieux demeurés infructueux au besoin avec l'assistance de la force publique,

fixé le montant de l'indemnité d'occupation due par Mme [L] [P] et M.[N] [W] à compter du 31 mai 2021 à la somme de 581,28€ par mois, faute de libération des lieux,

condamné Mme [L] [P] et M.[N] [W] à payer à la société immobilière du département de la Réunion à compter du 31 mai 2021, faute de libération des lieux, une indemnité d'occupation mensuelle fixée à la somme de 581,28€ par mois et jusqu'à parfaite libération du logement matérialisée par la remise des clés à la société immobilière du département de la Réunion,

rejeté la demande d'astreinte de la société immobilière du département de la Réunion,

rejeté la demande au titre des réparations locatives formulées par la société immobilière du département de la Réunion,

rejeté toutes autres demandes contraires ou plus amples des parties,

condamné solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] aux entiers dépens, ce compris les frais de procès-verbal de constat du 10 juillet 2020 et du 2 décembre 2020 et de la sommation interpellatrice du 3 août 2020 et du 9 décembre 2020,

condamné solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] à payer à la société immobilière du département de la Réunion la somme de 1200€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

constaté l'exécution provisoire de plein droit de la présente décision.

Le 4 juin 2021, Mme [L] [P] et M.[N] [W] ont interjeté appel de la décision précitée.

Par ordonnance de référé du 5 octobre 2021, le conseiller délégué par le premier président de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion a :

rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire formée par Mme [L] [P] et M.[N] [W],

débouté Mme [L] [P] et M.[N] [W] de leur demande afférente à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

condamné Mme [L] [P] et M.[N] [W] à payer à la société immobilière du département de la Réunion la somme de 750€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

laissé à la charge des demandeurs les dépens de la procédure de référé.

Par conclusions n°2 transmises par RPVA du 24 janvier 2022, Mme [L] [P] et M.[N] [W] sollicitent de voir:

déclarer l'appel interjeté par Mme [L] [P] et M.[N] [W] recevable et bien fondé et en conséquence,

infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Denis du 31 mai 2021,

statuant à nouveau, débouter la société immobilière du département de la Réunion de l'intégralité de ses demandes plus amples et contraires,

condamner la société immobilière du département de la Réunion à verser à la SELARL SELLY-MOLIERE AVOCATS ASSOCIES la somme de 2000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

condamner la société immobilière du département de la Réunion aux entiers dépens.

Par conclusions contenant appel incident transmises par RPVA du 28 février 2022, la société immobilière du département de la Réunion sollicite, sur le fondement des articles 1719, 1728 et 1729 du code civil, l'article 7b de la loi du 6 juillet 1989 et les articles 561 et 562 du code de procédure civile, de voir:

juger que l'acte d'appel en date du 4 juin 2021 ne produit aucun effet dévolutif et que la cour n'est saisie d'aucune demande et d'aucun chef du jugement querellé,

juger par conséquent n'y avoir lieu à statuer sur l'appel interjeté par Mme [L] [P] et M.[N] [W],

à titre subsidiaire, si la Cour se considérait régulièrement saisie par l'acte d'appel du 4 juin 2021, juger l'appel interjeté par Mme [L] [P] et M.[N] [W] infondé et les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Denis du 31 mai 2021 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la SIDR de ses demandes en paiement de la dette locative, des travaux de remise en état du local à poubelles, du coût du commandement de payer, de sa demande en expulsion sous astreinte, de sa demande de libération des parties communes sous astreinte et dans un délai de 48h à compter de l'arrêt à intervenir, de sa demande en autorisation de faire procéder à l'évacuation du local à poubelles et les places de parking passé ce délai de 48h,

juger l'appel incident de la SIDR recevable et bien fondé,

statuant à nouveau, ordonner l'évacuation aux frais et charges exclusifs de Mme [L] [P] et M.[N] [W] tenus solidairement de tous les biens et affaires entreposés sans autorisation dans le parking souterrain et le local à poubelles dans un délai de 48 heures à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin en était,

juger que passé ce délai de 48 heures imparti, la SIDR pourra faire procéder à l'ouverture du local à poubelles et à faire procéder à l'enlèvement de tous les biens, matériels et autres entreposés dans ce local et sur les places d'un parking souterrain, que ceux-ci pourront être mis à la décharge publique, ce avec le concours d'un huissier de justice aux frais exclusifs de Mme [L] [P] et M.[N] [W] tenus solidairement, ce également avec le concours de la force publique si besoin en était,

condamner solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] à payer à la SIDR la somme de 4492,40€ au titre de la remise en état du local à poubelles, ordonner l'expulsion de Mme [L] [P] et de M.[N] [W] du logement loué et ce, tant celle de leur personne que de leurs biens et de tous occupants de leur chef avec l'aide et l'assistance de la force publique si besoin est, ce sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir,

condamner solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] à payer à la SIDR la somme de 3553,32€ au titre des loyers et charges impayées arrêtés au 15 novembre 2021-somme à parfaire au jour de la restitution des lieux loués matérialisée par la remise des clefs au bailleur,

en tout état de cause, débouter Mme [L] [P] et M.[N] [W] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

condamner solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] à payer à la SIDR la somme de 2500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris le coût du commandement de payer des loyers du 8 octobre 2020 (172,25€) et des constats et sommations par voie d'huissier tels qu'accordés par le premier juge.

Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.

Sur ce':

Sur la recevabilité de la déclaration d'appel

Selon l'article 562 du code de procédure civile, ' L'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible'.

Selon l'article 901 du code de procédure civile, 'La déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le troisième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité :

1° La constitution de l'avocat de l'appelant ;

2° L'indication de la décision attaquée ;

3° L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;

4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Elle est signée par l'avocat constitué. Elle est accompagnée d'une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d'inscription au rôle'.

Il résulte de ces textes que l'appel oblige la Cour à statuer en fait et en droit sur les seuls chefs du jugement critiqués et énoncés comme tels dans l'acte d'appel. La Cour a donc plénitude de juridiction et peut examiner les faits et moyens postérieurs au jugement s'ils ne modifient pas la demande primitive.

Depuis le décret 2017-892 du 6 mai 2017, l'appelant est obligé de préciser dans son acte d'appel les chefs de jugement critiqués (articles 562 et 901 4° du code de procédure civile) et la Cour ne statuera que sur eux. Il en résulte un rétrécissement de l'effet dévolutif et une procédure d'appel encore plus liée au seul jugement de première instance.

Par un arrêt du 2 juillet 2020 n° 19-16954, la Haute Cour a dit : « ' seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement. Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, quand bien même la nullité de la déclaration d'appel n'aurait pas été sollicitée par l'intimé.» Elle rappelle également que la déclaration d'appel irrégulière peut être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel, dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, conformément à l'article 910-4 alinéa 1 du code de procédure civile.

L'obligation prévue par l'article 901 4° du code de procédure civile de mentionner, dans la déclaration d'appel, les chefs de jugement critiqués, dépourvue d'ambiguïté, encadre les conditions d'exercice du droit d'appel dans le but légitime de garantir la bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique et l'efficacité de la procédure d'appel.

En l'absence d'énonciation expresse, dans la déclaration d'appel, des chefs de jugement critiqués, la cour d'appel n'est saisie d'aucun litige (Cour de cassation, arrêt du 25 mars 2021 n°20-12.037).

En l'espèce, la société immobilière du département de la Réunion conteste la recevabilité de la déclaration d'appel de Mme [L] [P] et M.[N] [W] en relevant l'absence d'énonciation précise et expresse des chefs de jugement critiqués.

En réponse, les appelants soutiennent que l'obligation de préciser les chefs de jugement critiqués ne s'impose pas lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement; que dans leurs premières conclusions, ils ont sollicité expressément l'infirmation de la décision de première instance; qu'aucune nullité ne peut être encourue faute de démontrer l'existence d'un grief.

Il convient de constater que la déclaration d'appel figurant au dossier est libellée comme suit: 'il est demandé à la cour d'appel de Saint Denis d'infirmer le jugement rendu le 31 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Saint Denis RG11-21250 en ce qu'il a' sans autre précision.

Ainsi donc et contrairement à ce que soutient les appelants, le simple fait de demander l'infirmation du jugement sans autre précision n'opère pas dévolution, seule la demande d'annulation le permet.

Par ailleurs, les appelants font une confusion entre l'infirmation et l'annulation, deux concepts juridiques totalement différents.

En outre, la régularisation si elle est possible ne peut se faire que par une nouvelle déclaration d'appel et non par de simples conclusions.

Enfin, la précision des chefs de jugement critiqués est une condition substantielle qui n'exige pas la preuve d'un grief.

En conséquence, il y a lieu de dire que la cour d'appel n'est saisie d'aucun chef du dispositif du jugement déféré et que l'acte d'appel est dépourvu d'effet dévolutif.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de condamner solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] à payer à la SIDR la somme de 2500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens

Il convient de condamner solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Dit que la cour d'appel n'est saisie d'aucun chef du dispositif du jugement du tribunal judiciaire du 31 mai 2021 et que l'acte d'appel est dépourvu d'effet dévolutif ;

Condamne solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] à payer à la SIDR la somme de 2500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne solidairement Mme [L] [P] et M.[N] [W] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Madame Nathalie COURTOIS, Présidente de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE SIGNE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre civile tgi
Numéro d'arrêt : 21/00975
Date de la décision : 25/11/2022
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-25;21.00975 ?
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