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30/09/2022 | FRANCE | N°22/014221

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, 08, 30 septembre 2022, 22/014221


N No RG 22/01422 - No Portalis DBWB-V-B7G-FYL5
du 30/09/2022
------------------------

COUR D'APPEL
DE SAINT-DENIS

O R D O N N A N C E

MINUTE No

en date du 30 septembre 2022 à 15h00

APPELANT :

M. [N] X SE DISANT [I]
ZONE D'ATTENTE
[4]
né le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 2]
de nationalité sri-lankaise
Présent et assisté de Me Louis WEINLING GAZE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMES :

MONSIEUR LE COMMISSAIRE DE LA POLICE DE L'AIR ET DES FRONTIERES
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Rep

résenté par de Maître Nicolas RANNOU, avocat au barreau de Paris

Madame La procureure générale
Près la cour la cour d'appel de SAINT-...

N No RG 22/01422 - No Portalis DBWB-V-B7G-FYL5
du 30/09/2022
------------------------

COUR D'APPEL
DE SAINT-DENIS

O R D O N N A N C E

MINUTE No

en date du 30 septembre 2022 à 15h00

APPELANT :

M. [N] X SE DISANT [I]
ZONE D'ATTENTE
[4]
né le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 2]
de nationalité sri-lankaise
Présent et assisté de Me Louis WEINLING GAZE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMES :

MONSIEUR LE COMMISSAIRE DE LA POLICE DE L'AIR ET DES FRONTIERES
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Représenté par de Maître Nicolas RANNOU, avocat au barreau de Paris

Madame La procureure générale
Près la cour la cour d'appel de SAINT-DENIS DE LA REUNION
Entendue en ses observations

En présence de :

Mme [C] [B], interprète en langue tamoule, serment prévu par la loi préalablement prêté,

CONSEILLER DELEGUE : Patrick CHEVRIER, président de chambre, désigné par ordonnance no 2022/229 du 29 septembre 2022 pour remplacer le Premier Président empêché.

GREFFIERE :Delphine GRONDIN

DEBATS : à l'audience publique du 30 septembre 2022 à 09h00

ORDONNANCE PRONONCE PUBLIQUEMENT le : 30 septembre 2022 à 15h00

*
* *

Faits et procédure :

Vu les articles L 341-3, R 341-1, R 342-2, R 342-4 à R 342-9, R 342-18 du CESEDA ;

Vu l'appel formé par l'intéressé à l'encontre de l'ordonnance de prolongation du placement en zone d'attente, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Saint-Denis en date du 28 septembre 2022,

Vu les débats en audience publique tenus le 30 septembre 2022 dans l'enceinte de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion,

Vu la comparution de l'intéressé qui a pu s'exprimer et répondre aux questions du délégué du premier président de la cour, ayant été préalablement informé qu'il était en droit de ne pas faire de déclarations, assisté d'un interprète en tamoul, serment préalablement prêté conformément à la loi,

Vu les exceptions in limine litis soutenues par l'avocat de l'appelant ;

Entendues les observations du conseil de la Police de l'Air et des Frontières ;

Entendue la plaidoirie de l' avocat de l'appelant ;

Entendues les observations de Madame la procureure générale,

A la fin des débats, en application des articles R 342-18 du CESEDA, 640 et 642 du code de procédure civile, le président, délégué du premier président de la cour d'appel a informé les parties que la décision serait rendue le 30 septembre 2022 à 15 h 00.

EXPOSE

Le 17 septembre 2022, un bateau de pêche a été intercepté au large du [Localité 3] (La Réunion), avec à son bord 46 ressortissants sri-lankais, dont cinq mineurs.

Monsieur [I] [N] était placé en zone d'attente à l'hôtel SELECT puis, à compter du 26 septembre 2022, à l'aéroport [4].

Par ordonnance du 21 septembre 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Saint-Denis a :
- Rejeté les nullités et exceptions de procédure soulevées par son Conseil ;
- Ordonné la prolongation du maintien de l'intéressé en zone d'attente.

Par ordonnance du 28 septembre 2022, le juge des libertés et de la détention a autorisé la seconde prolongation du maintien en zone d'attente du concluant à compter du 29 septembre 2022 à 8 heures 10 et dit qu'elle prendrait fin le 7 octobre 2022 à 8 heures 10.

Monsieur [I] [N] a interjeté appel de la décision par déclaration déposée au greffe de la cour par son avocat le 29 septembre 2022 à 11 heures 59.

Aux termes de ses conclusions d'appel, le requérant demande de :
A titre principal,
- RÉFORMER en toutes ses dispositions l'ordonnance du 28 septembre 2022 rendue par le JLD près le Tribunal judiciaire de SAINT DENIS ;
EN CONSEQUENCE,
- FAIRE droit aux moyens de nullité de procédure invoqués ;
- REJETER toutes conclusions contraires comme étant infondées ;
- ORDONNER la mainlevée de la mesure de maintien en zone d'attente et la remise en liberté du concluant ;
A titre subsidiaire,
- INFIRMER l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a dit que la mesure prendra fin au plus tard le 7 octobre 2022 à 08 Heures 57 ;
Et, statuant à nouveau,
JUGER que la mesure prendra fin au plus tard le 6 octobre 2022 à vingt-quatre heures.

Dans ses conclusions d'appel, l'appelant fait valoir :
- La nullité tirée des conditions d'hébergement au sein de la zone d'attente de l'hôtel SELECT entre le 17 septembre et le 26 septembre 2022 ;
- La nullité tirée des conditions d'hébergement au sein de la zone d'attente de l'aéroport [4] ;
- L'absence d'effectivité de son droit à être assisté d'un interprète.
Au fond, il soutient que :
- Le JLD a commis une erreur dans la computation des délais, le délai de quatre jours prévu par l'article L. 342-1 du CESEDA expirant le mardi 20 septembre 2022 à vingt-quatre heures et non le mercredi 21 septembre 2022 à 00 h 00, soit le cinquième jour du maintien en zone d'attente.
- Il ajoute que ce premier délai de huit jours expirant le 28 septembre 2022 à vingt-quatre heures, la nouvelle période de prolongation exceptionnelle de huit jours doit débuter le 29 septembre 2022 à 00 heures 00.
- S'agissant de la date de fin de la mesure, celle-ci doit s'achever le 6 octobre 2022 à 24 heures 00 et non le 7 octobre 2022 à 8h57 comme l'a retenu le JLD.

Le représentant de l'administration (la PAF) réplique que l'irrégularité alléguée à propos des conditions d'intervention de l'interprète est inopérante et irrecevable s'agissant de la contestation relative à l'hôtel SELECT. Il ajoute qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoit l'obligation d'inscrire au registre de l'établissement les horaires de promenade des personnes retenues tandis qu'elles ont pu circuler librement dans les zones d'attente et bénéficier ainsi de tous leurs droits.

La procureure générale, en son avis, demande le rejet des exceptions de nullité et la confirmation de l'ordonnance entreprise.

SUR CE

Sur la recevabilité de l'appel :

Vu les articles L 342-12 et R 342-10, R 342-11, R 342-18 du CESEDA ;

La déclaration d'appel, motivé, a été déposée au greffe de la cour dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance entreprise.

L'appel est donc recevable.

Sur les exceptions de nullités :

1/ Sur les conditions d'hébergement au sein de la zone d'attente de l'hôtel SELECT entre le 17 septembre et le 26 septembre 2022 :

Aux termes de l'article L. 342-8 du CESEDA, à peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à l'audience relative à la première prolongation du maintien en zone d'attente ne peut être soulevée lors de l'audience relative à la seconde
prolongation.

Ainsi, le moyen de nullité tiré des conditions d'hébergement au sein de la zone d'attente de l'hôtel SELECT entre le 17 septembre et le 21 septembre 2022, est irrecevable en ce qu'il invoque un moyen qui devait être soulevé lors de la première instance en prolongation du maintien en zone d'attente le 21 septembre 2022 ;

Si un fait nouveau était démontré pour la période postérieure au 21 septembre 2022, l'exception en question pourrait être reçue.

Toutefois, l'appelant ne démontre pas que les conditions de sa retenue en zone d'attente entre le 21 septembre 2022 et le 26 septembre 2022 ont été modifiées au point qu'il aurait subi une atteinte nouvelle à ses droits.

En conséquence, en l'absence d'éléments nouveaux justifiés après le 21 septembre 2022, l'exception de nullité doit être aussi rejetée.

2/ Sur les conditions d'hébergement au sein de la zone d'attente de l'aéroport [4] :

Le Conseil du requérant fait valoir que, selon les éléments recueillis lors de la visite de la zone d'attente par le Député [H] [G] [W] le dimanche 25 septembre 2022, il aurait été constaté "un premier espace de 9m2 sans aération où il fait chaud, une salle d'eau inondée suite à une remontée d'eau, une chaleur étouffante, l'absence de système de ventilation dans les chambres et la pièce commune, des problèmes d'humidité importants." Il plaide aussi que les personnes ne bénéficient pas de promenades à l'air libre depuis leur arrivée. Le registre n'en fait d'ailleurs aucune mention à compter du 26 septembre 2022 à 16h30. Il affirme que les conditions d'hébergement doivent être de type hôtelier et qu'il ressort très clairement du règlement intérieur que les maintenus ont le droit de circuler au sein de la zone d'attente. Le requérant conteste l'appréciation du premier juge qui a considéré que la présence à l'audience du tribunal administratif était suffisante pour considérer que les droits de l'appelant auraient été respectés.

Le représentant de l'administration soutient qu'aucun texte ne prescrit l'obligation pour l'administration de noter sur le registre de l'établissement les horaires de sortie ou de promenade des personnes retenues.

Le Ministère public expose que l'affirmation péremptoire selon laquelle les étrangers en zone d'attente ne pourraient pas bénéficier de sortie aérée, à la supposer réelle, n'est pas de nature à établir que leur maintien dans cette zone se déroule dans des conditions indignes au sens des dispositions de l‘article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme.

Ceci étant exposé,

Aux termes de l'article L 341-1 du CESEDA, l'étranger qui arrive en France par la voie ferroviaire, maritime ou aérienne et qui n'est pas autorisé à entrer sur le territoire français peut être placé dans une zone d'attente située dans une gare ferroviaire ouverte au trafic international figurant sur une liste définie par voie réglementaire, dans un port ou à proximité du lieu de débarquement ou dans un aéroport, pendant le temps strictement nécessaire à son départ.
Peut également être placé en zone d'attente l'étranger qui se trouve en transit dans une gare, un port ou un aéroport si l'entreprise de transport qui devait l'acheminer dans le pays de destination ultérieure refuse de l'embarquer ou si les autorités du pays de destination lui ont refusé l'entrée et l'ont renvoyé en France.
Il en est de même lorsqu'il est manifeste qu'un étranger appartient à un groupe d'au moins dix étrangers venant d'arriver en France en dehors d'un point de passage frontalier, en un même lieu ou sur un ensemble de lieux distants d'au plus dix kilomètres.

Selon les dispositions des articles L 341-6 du CESEDA, la zone d'attente est délimitée par l'autorité administrative compétente. Elle peut inclure, sur l'emprise, ou à proximité, de la gare, du port ou de l'aéroport ou à proximité du lieu de débarquement, un ou plusieurs lieux d'hébergement assurant aux étrangers concernés des prestations de type hôtelier.
Dans ces lieux d'hébergement, un espace permettant aux avocats de s'entretenir confidentiellement avec les étrangers est prévu. A cette fin, sauf en cas de force majeure, il est accessible en toutes circonstances sur demande de l'avocat.

L'article L 343-1 du même code prévoit que l'étranger placé en zone d'attente est informé, dans les meilleurs délais, qu'il peut demander l'assistance d'un interprète et d'un médecin, communiquer avec un conseil ou toute personne de son choix et quitter à tout moment la zone d'attente pour toute destination située hors de France. Il est également informé des droits qu'il est susceptible d'exercer en matière de demande d'asile. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend. Mention en est faite sur le registre mentionné au second alinéa de l'article L. 341-2, qui est émargé par l'intéressé.
En cas de placement simultané en zone d'attente d'un nombre important d'étrangers, la notification des droits mentionnés au premier alinéa s'effectue dans les meilleurs délais, compte tenu du nombre d'agents de l'autorité administrative et d'interprètes disponibles. De même, dans ces mêmes circonstances particulières, les droits notifiés s'exercent dans les meilleurs délais.

L'ensemble de ces dispositions ne prévoit pas l'obligation pour l'administration d'assurer un espace de promenade à l'étranger placé en zone d'attente, les prestations de type hôteliers devant s'interpréter comme les mesures relatives au gîte, au couvert et à la communication avec l'extérieur.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 février 1992 (No 92-307 DC, JO 12 mars 1992) a admis que le maintien en zone d'attente n'entravait que « sensiblement » la liberté individuelle de l'intéressé car l'étranger est toujours libre de repartir de son plein gré.

Enfin, les recommandations minimales du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) pour le respect de la dignité et des droits fondamentaux des personnes privées de liberté, publiées le 4 juin 2020 au Journal officiel (NOR : CPLX2009511X) vise bien le principe général d'intégration du respect de la dignité et des droits fondamentaux dans l'aménagement et l'organisation des lieux de privation de liberté (1-) et notamment celui de satisfaire les besoins élémentaires des personnes privées de liberté et respecter leur dignité dans les actes de la vie quotidienne, tels que les besoins élémentaires, l'hébergement, l'hygiène, la restauration et l'accès à l'extérieur (1-4-4-5).

Selon le CGLPL, la privation de liberté met toujours en péril la dignité des personnes dont elle brise l'ordinaire quotidien. Elle les éloigne de leurs proches, les soustrait à leur environnement et leurs activités habituelles. Elle entraîne des contraintes susceptibles à tout instant de retarder une prise en charge nécessaire ou la prise en compte d'un besoin particulier. Toute mesure d'enfermement entraîne la dépendance – au moins partielle – des personnes concernées au personnel du lieu dans lequel elles sont hébergées. Dès lors, l'autorité publique qui la met en oeuvre doit garantir le respect de leur dignité et de leurs droits fondamentaux à tout moment et en tout lieu, dans l'accomplissement des gestes les plus banals et pour la satisfaction des besoins les plus élémentaires. Elle assume à cette fin la responsabilité de définir, organiser et mettre en oeuvre les moyens d'y parvenir.

S'agissant de l'accès à l'extérieur, toute personne privée de liberté doit avoir un accès quotidien à l'air libre, pour s'aérer, marcher, se détendre, profiter d'un environnement naturel ou pratiquer une activité physique. Les espaces extérieurs doivent permettre de voir le ciel, offrir un abri contre les intempéries, des aménagements permettant de s'asseoir ainsi que des installations sanitaires. Ils doivent également disposer d'un espace et d'aménagements permettant l'exercice physique. (4-5 No 93)
L'accès à un espace extérieur doit s'exercer dans des conditions permettant les rencontres et les échanges entre les personnes qui vont s'y trouver, dans le respect de la sécurité de chacun (4-5 No 94).

Or, en l'espèce, s'il est possible que le droit d'accès à l'extérieur soit restreint dans la zone d'attente de l'aéroport [4], ce fait n'est pas établi dans la présente instance.

Au surplus, le grief tiré de l'absence de moyens d'organisation de promenade des étrangers placés en zone d'attente, s'il était accueilli par le juge judiciaire, aurait pour effet de se prononcer sur la décision de l'autorité administrative de création de la zone d'attente en cause et de son emprise puisqu'elle en revient à contester le règlement intérieur notifié à l'étranger placé en zone d'attente.

A cet égard, l'article 11 du règlement intérieur de la zone d'attente en cause, notifiée à l'appelant à son arrivée, mentionne clairement que la zone d'attente est dépourvue d'espace promenade et précise que, durant leur séjour, les étrangers pourront éventuellement se voir proposer de manière individuelle des sorites à l'air libre, et ce, en fonction des impératifs du service.

En tout état de cause, il ne résulte pas des observations relatées lors de la visite de la presse accompagnant un député que les conditions de maintien des étrangers dans la zone d'attente aéroportuaire puissent être qualifiées d'indignes au point d'entraîner la nullité de la mesure administrative, et ce d'autant moins qu'aucune pièce corroborant cette allégation n'est versée aux débats.

Enfin, l'appelant n'établit pas qu'il aurait sollicité les services de la police de l ‘air et des frontières pour bénéficier d'une sortie individuelle à l'air libre qui lui aurait été refusée.

En conséquence, il convient d'écarter l'exception de nullité tirée des conditions d'hébergement au sein de la zone d'attente de l'aéroport [4].

3/ Sur l'absence d'effectivité du droit de l'étranger à être assisté d'un interprète :

L'appelant soutient qu'il n'a pas pu bénéficier effectivement du droit à un interprète, tout au long de la procédure. Il se plaint de la qualité médiocre de l'interprétariat, ne lui permettant pas d'exercer ses droits effectivement, notamment par les recours répétés et indus par l'administration à un interprète par téléphone qui ne remplissait
pas les conditions légales pour une telle intervention. Il souligne que les problèmes d'interprétariat avaient été au coeur du débat relatif au désistement de l'appelant.

L'administration réplique que cette exception est irrecevable en vertu des dispositions de l'article L. 342-8 du CESEDA puisqu'elle concerne la procédure antérieure à la présente instance.

La procureure générale conclut aux mêmes fins.

Sur ce,

Les griefs sont formés à propos de l'instance en première prolongation du maintien en zone d'attente.

Le fait que l'appelant n'ait pas persisté dans son premier appel de la première ordonnance du JLD n'est pas opérant alors qu'il était déjà assisté par un avocat et que les motifs de son désistement ne peuvent être appréciés dans le cadre de la présente instance.

En conséquence, l'exception de nullité relative aux droits à un interprète au cours de la procédure antérieure doit être écartée comme irrecevable.

Au fond,

Sur la computation des délais :

Selon l'appelant, le JLD a commis une erreur dans la computation des délais en jugeant que le délai de quatre jours prévu par l'article L. 342-1 du CESEDA expirait le mercredi 21 septembre 2022 à 00 h 00 au lieu du mardi 20 septembre à minuit.

Selon l'administration, il doit être fait application des articles 640 à 642 du code de procédure civile pour calculer les délais de la procédure. Compte tenu de ces prescriptions, le JLD ne pouvait pas préciser l'heure exacte de sa décision dès lors qu'elle a été rendue dans les délais légaux et que chaque délai exprimé en jour s'achève à minuit de cette date.

Le Ministère public conclut à la confirmation de l'ordonnance sauf à relever qu'il n'est pas établi que le JLD soit tenu de fixer l'heure ou la date de la fin de la mesure dont il autorise la prolongation.

Sur ce,

Aux termes de l'article L 342-1 du CESEDA, le maintien en zone d'attente au-delà de quatre jours à compter de la décision de placement initiale peut être autorisé, par le juge des libertés et de la détention statuant sur l'exercice effectif des droits reconnus à l'étranger, pour une durée qui ne peut être supérieure à huit jours.

Le premier alinéa de l'article R 342-8 du même code préscrit que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention est rendue dans les vingt-quatre heures de sa saisine ou,
lorsque les nécessités de l'instruction l'imposent, dans les quarante-huit heures de celle-ci. Elle est notifiée sur place aux parties présentes à l'audience qui en accusent réception.

L'article 642 du code de procédure civile prescrit que tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures.

En l'espèce, la décision de placement initiale a été prise le samedi 17 septembre 2022 à 8 heures 10.

Ainsi, le délai de quatre jours après l'acte du samedi 17 septembre 2022, expirait en réalité le mercredi 21 septembre à 24 heures 00.

Si la présente contestation vise à remettre en cause la première saisine en soutenant que la fin du délai de quatre jours expirait le mardi 20 septembre 2022 à 24 heures 00, il convient de relever qu'aucune exception de nullité n'a été soulevée à ce titre dans le cadre de l'instance en première prolongation, ayant abouti à l'ordonnance du 21 septembre 2022 alors que la requête de la Police de l'air et des frontières visait bien une fin de mesure le 29 septembre 2022.

Par suite, la prolongation de huit jours du maintien en zone d'attente de l'appelant a commencé le mercredi 21 septembre 2022.

Le nouveau délai de huit jours avant la décision de seconde prolongation du placement en zone d'attente pouvait donc bien être calculé à partir du 21 septembre 2022 à 00 heures 00 et donc s'achever le 29 septembre 2022 à 24 heures 00.

En statuant le 28 septembre 2022 à 14 heures 00 et en notifiant la décision à 14 heures 04 à l'intéressé, le JLD n'a commis aucune erreur causant un grief à l'appelant, et rendu sa décision dans le délai de l'article L 342-1 du CESEDA.

La précision de l'heure de la notification de la mesure est seulement nécessaire afin de faire courir les délais de l'appel et n'emporte aucune conséquence sur le calcul des délais relatifs au maintien en zone d'attente, répondant aux modalités des articles 640 à 642 du code de procédure civile.

Toutefois, le JLD n'était pas tenu de préciser l'heure à laquelle la prolongation prenait effet, pas plus qu'il n'est tenu de définir l'heure de la fin de la mesure.

Il conviendra donc de réformer l'ordonnance entreprise de ce chef en jugeant que la prolongation est autorisée pour une durée de huit jours.

Sur la prolongation exceptionnelle du maintien en zone de rétention :

L'article L 342-4 du CESEDA dispose qu'à titre exceptionnel ou en cas de volonté délibérée de l'étranger de faire échec à son départ, le maintien en zone d'attente au-delà de douze jours peut être renouvelé, dans les conditions prévues au présent chapitre, par le juge des libertés et de la détention, pour une durée qu'il détermine et qui ne peut être supérieure à huit jours.
Toutefois, lorsque l'étranger dont l'entrée sur le territoire français a été refusée dépose une demande d'asile dans les six derniers jours de cette nouvelle période de maintien en zone d'attente, celle-ci est prorogée d'office de six jours à compter du jour de la demande. Cette décision est mentionnée sur le registre prévu au second alinéa de l'article L. 341-2 et portée à la connaissance du procureur de la République dans les
conditions prévues au même article. Le juge des libertés et de la détention est informé immédiatement de cette prorogation. Il peut y mettre un terme.

En l'espèce, l'appelant ne soulève aucun moyen de fond susceptible de constituer un grief à l'encontre de la décision attaquée au regard des dispositions susvisées.

L'ordonnance querellée sera donc confirmée au fond par adoption de motifs.

Les dépens de l'instance resteront à la charge de l'Etat,

PAR CES MOTIFS,

Nous, Patrick CHEVRIER, président de chambre, délégué du premier président de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion,

DÉCLARONS l'appel recevable ;

DÉBOUTONS l'appelant de ses exceptions de nullité ;

CONFIRMONS l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne la fin de la période exceptionnelle de maintien en zone d'attente ;

Statuant à nouveau de ce chef,

DISONS que la seconde période de prolongation du maintien en zone d'attente est autorisée pour huit jours à compter du 29 septembre à 24 heures 00 ;

LAISSONS les dépens de l'instance à la charge de l'Etat.

Le greffier Le président

Delphine GRONDIN Patrick CHEVRIER

Décision notifiée le 30/09/2022 à :
- L'intéressé(e)
- Avocat
- Monsieur le Préfet de la Réunion
- Monsieur le Commissaire de la Direction Départementale de la PAF
- Monsieur le procureur général
- Greffe du Juge des libertés et de la détention de
SAINT-DENIS DE LA REUNION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : 08
Numéro d'arrêt : 22/014221
Date de la décision : 30/09/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2022-09-30;22.014221 ?
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