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30/09/2022 | FRANCE | N°20/00071

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile tgi, 30 septembre 2022, 20/00071


ARRÊT N°22/466

MI





N° RG 20/00071 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FJ6V













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RG 1èRE INSTANCE : 18/00881











COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS



ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2022



Chambre civile TGI





Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GR

ANDE INSTANCE DE SAINT DENIS en date du 26 novembre 2019 RG n°: 18/00881 suivant déclaration d'appel en date du 15 janvier 2020



APPELANT :



Monsieur [A] [V] [C]

AUTO ECOLE [A] [C], [Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Yannick MARDENALOM, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-...

ARRÊT N°22/466

MI

N° RG 20/00071 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FJ6V

[C]

C/

[Z]-[H]-[W] DIT [Z] [H] [W]

[Z]-[H]-[W]

[Z]-[H]-[W] DIT [Z] [H] [W]

RG 1èRE INSTANCE : 18/00881

COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT DENIS en date du 26 novembre 2019 RG n°: 18/00881 suivant déclaration d'appel en date du 15 janvier 2020

APPELANT :

Monsieur [A] [V] [C]

AUTO ECOLE [A] [C], [Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Yannick MARDENALOM, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMES :

Madame [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W] DIT [Z] [H] [W]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS,avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Monsieur [F] [Z]-[H]-[W] DIT [Z] [H] [W]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

CLÔTURE LE : 10 mars 2022

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Mai 2022 devant la Cour composée de :

Président :Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller :Madame Pauline FLAUSS, Conseillère

Conseiller :Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 26 août 2022 puis prorogé au 30 Septembre 2022.

Greffier lors des débats : Mme Nathalie TORSIELLO, Greffière.

Greffier lors de la mise a disposition : Mme Alexandra BOCQUILLON, ff

ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 30 Septembre 2022.

* * * * *

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [A] [V] [C] qui exerce une activité de centre de formation des conducteurs automobiles, a conclu le 4 septembre 2002, un contrat dénommé « bail professionnel » avec Madame [T] [Z]-[H]-[W] sur une parcelle cadastrée EX [Cadastre 2] sise [Adresse 3] pour une durée de 6 ans était expressément reconductible tacitement et un loyer annuel de 6097,96 €.

A la suite d'un accord entre les parties, un nouveau bail a été conclu le 4 septembre 2008 à effet au 1er octobre 2008, pour une durée de 3 ans renouvelable par tacite reconduction pour un loyer mensuel de 4 000 €.

Un avenant a été signé le 5 janvier 2009 à effet rétroactif au 1er décembre 2008 portant sur l'ajout d'une parcelle au terrain initial et pour un loyer mensuel de 6000 €.

Par courrier en date du 7 avril 2011, la bailleresse a notifié sa volonté de mettre fin au bail à compter du 1er octobre 2011 et a sollicité la remise en état du terrain.

Par acte d'huissier en date du 1er décembre 2011, la bailleresse a signifié la non-reconduction du bail.

Monsieur [C] étant demeuré dans les lieux, Madame [Z]-[H]-[W] a saisi le tribunal de grande instance de Saint-Denis aux fins d'obtenir la condamnation de Monsieur [C] à quitter les lieux ou à défaut la résiliation du bail à ses torts exclusifs.

Par jugement en date du 20 août 2013, le tribunal de grande instance de Saint-Denis a requalifié le contrat conclu entre les parties en bail commercial, déclaré nul le congé délivré et rejeté la demande de résiliation judiciaire.

A la suite de l'appel interjeté par la bailleresse, la cour d'appel de Saint-Denis, par un arrêt en date du 4 septembre 2015, a partiellement infirmé le jugement de premier instance s'agissant de la qualification juridique du contrat de bail conclu entre les parties et a considéré qu'il s'agissait d'un bail professionnel et non un bail commercial.

Elle a confirmé le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation judiciaire du bail. A la suite d'un pourvoi de Monsieur [C], cet arrêt a été confirmé par la Cour de cassation le 31 mai 2018

Le 22 février 2017, les défendeurs, héritiers de Madame [T] [Z]-[H]-[W] ont donné congé à Monsieur [A] [C].

Contestant ce congé, Monsieur [A] [C] a, par actes d'huissier des 28 novembre 2017, fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de Saint-Denis les héritiers de Madame [Z]-[H]-[W].

Par arrêt en date du 31 mai 2018, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre l'arrêt du 04 septembre 2015.

Par jugement du 26 novembre 2019, le Tribunal de grande instance de Saint-Denis a statué en ces termes :

-Constaté que la demande de sursis à statuer est devenue sans objet

-Rejeté la demande de nullité du congé donné le 22 février 2017 présentée par Monsieur [A] [V] [C],

-Débouté Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], en qualité de tutrice de Mr [Z]-[H]-[W] [Y] et M. [F] [Z]-[H]-[W] de leur demande reconventionnelle principale de validation du congé donné le 22 février 2007,

-Prononcé la résiliation judiciaire du bail conclu entre Monsieur [A] [V] [C] et les consorts [Z]-[H]-[W] aux torts de Monsieur [A] [V] [C] et ce à compter de la date du présent jugement,

-Ordonné l'expulsion de Monsieur [A] [V] [C] et de tous occupants de son chef ainsi que de ses biens et ce avec l'assistance de la force publique s'il y a lieu,

-Condamné Monsieur [A] [V] [C] au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 7 000 € à compter de la date du présent jugement jusqu'à la libération effective des lieux par remise des clés,

-Condamné Monsieur [A] [V] [C] à payer à Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], en qualité de tutrice de Mr [Z]-[H]-[W] [Y] et M. [F] [Z]-[H]-[W] la somme de 123 000 € au titre des arriérés de loyer,

-Condamné Monsieur [A] [V] [C] à remettre en état le terrain objet de la location vierge de toute construction et de stockage et ce sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter d'un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement,

-Débouté Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], en qualité de tutrice de Mr [Z]-[H]-[W] [Y] et M. [F] [Z]-[H]-[W] de leur demande de dommages et intérêts pour frais de remise en état du terrain et perte d'exploitation,

-Condamné Monsieur [A] [V] [C] à payer à Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], en qualité de tutrice de Mr [Z]-[H]-[W] [Y] et M. [F] [Z]-[H]-[W] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

-Condamné Monsieur [A] [V] [C] aux entiers dépens.

Par déclaration du 15 janvier 2020, Monsieur [C] a interjeté appel du jugement précité.

L'affaire a été renvoyée à la mise en état suivant ordonnance en date du 17 mars 2020.

Monsieur [C] a déposé ses premières conclusions le 20 août 2020.

Les Consorts [Z]-[H]-[W] ont déposé leurs conclusions d'intimés le 17 novembre 2020.

Une ordonnance sur incident a été rendue le 26 octobre 2021.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 mars 2022.

PRETENTIONS ET MOYENS

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 10 février 2022, Monsieur [C] demande à la Cour de :

-Infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris

-Dire et juger nul et de nul effet le congé signifié à [A] [C] le 22 février 2017 en tant que donné pour une date erronée et, en toute hypothèses à une personne non concernée juridiquement par le bail à cette date;

-Dire et juger irrecevable toute demande en paiement ou résiliation du bail au contradictoire de [A] [C], qui a perdu la qualité de locataire au profit de la personne morale SARL [C];

-Dire et juger irrecevable toute demande en paiement ou résiliation du bail émanant des intimés, en l'absence d'élément sur leur qualité à agir;

-Condamner solidairement les intimés à payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile majorée des entiers dépens.

Monsieur [C] invoque la nullité du congé en raison de la date erronée d'expiration du bail mentionnée sur le congé à savoir le 22 février 2017. Il relève qu'aucun congé n'a été donné pour la date d'expiration réelle du contrat à savoir le 1er octobre 2020.

Il soutient que le congé est nul pour avoir été délivré à Monsieur [C] et non au véritable locataire.

Il fait valoir qu'une autre personne juridique est titulaire du bail, que le bailleur n'ignorait pas cette substitution tel que cela résulte des courriers échangés et des encaissements des chèques et que l'absence de bail écrit n'est assortie d'aucune sanction.

Il sollicite de la cour de prononcer l'irrecevabilité de toute demande de résiliation ou de demande financière dès lors qu'il n'est plus concerné par le bail.

* * * * *

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 1er mars 2022, les Consorts [Z]-[H]-[W] demandent à la Cour de :

A titre principal,

Constater que les conclusions d'appelant en date « du ' » ne contiennent ni demande d'annulation ni de réformation et, en conséquence ;

Confirmer le jugement du 26 novembre 2019 ;

Débouter Monsieur [V] [A] [C] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire,

Confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Saint-Denis en ce qu'il a :

- « Constaté que la demande de sursis à statuer est devenue sans objet,

-Rejeté la demande de nullité du congé donné le 22 février 2017 présentée par Monsieur [A] [V] [C],

-Débouté Madame [Z] [N] [G] [Z]-[H]-[W], Madame [Z] [N] [G] [Z]-KWONF-[W] en qualité de tutrice de Monsieur [Y] [Z]-[H]-[W] et Monsieur [F] [Z]-[H]-[W] de leur demande reconventionnelle principale de validation du congé donné le 22 février 2007,

-Prononcé la résiliation judiciaire du bail conclu entre Monsieur [A] [V] [C] et les consorts [Z]- [H]-[W] aux torts de Monsieur [A] [V] [C] et ce à compter de la date du présent jugement,

-Ordonné l'expulsion de Monsieur [A] [V] [C] et de tous occupants de son chef ainsi que de ses biens et ce avec l'assistance de la force publique s'il y a lieu,

-Condamné Monsieur [A] [V] [C] au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 7.000€ à compter de la date du présent jugement jusqu'à la libération effective des lieux par remise des clés,

-Condamné Monsieur [A] [V] [C] à payer à Madame [Z] [N] [G] [Z]- [H]-[W] en qualité de tutrice de Monsieur [Y] [Z]- [H]-[W] et Monsieur [F] [Z]- [H]-[W] la somme de 123.000€ au titre des arriérés de loyer,

- Condamné Monsieur [A] [V] [C] à remettre en état le terrain objet de la location vierge de toute construction et de stockage et ce, sous astreinte de 200€ par jour de retard à compter d'un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement,

- Condamné Monsieur [A] [V] [C] à payer à Madame [Z] [N] [G] [Z]- [H]-[W] en qualité de tutrice de Monsieur [Y] [Z]- [H]-[W] et Monsieur [F] [Z]-[H]-[W] la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ordonné l'exécution provisoire. »

Infirmer le jugement en ce qu'il a :

Débouté Madame [Z] [N] [G] [Z]-[H]-[W] en qualité de tutrice de Monsieur [Y] [Z]-KWONF-[W] et Monsieur [F] [Z]- [H]-[W] de leur demande de dommages et intérêts pour frais de remise en état du terrain et perte d'exploitation,

Et, statuant à nouveau :

Condamner Monsieur [C] à la somme de 100 000 euros à parfaire et à valoir sur les coûts indirects de la remise en état du terrain, et notamment la perte d'exploitation du site le temps de sa réhabilitation ;

En tout état de cause,

Condamner Monsieur [V] [A] [C] à payer aux consorts [Z]-[H]-[W] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner Monsieur [V] [A] [C] aux entiers dépens.

Les consorts [Z]-[H]-[W] rappellent qu'en application des articles 542 et 954 du code de procédure civile, lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement 

Ils soutiennent qu'en sollicitant dans ses conclusions du 20 août 2020 la réformation du jugement, l'appelant n'a demandé ni l'infirmation, ni l'annulation du jugement du 26 novembre 2019 dès lors que la réformation du jugement aboutit, selon le cas, à la confirmation ou à l'infirmation du jugement.

Ils soutiennent que le congé a été délivré à juste titre à Monsieur [C] conformément au bail, en l'absence de toute acceptation tacite de substitution du locataire Sarl [C] qui occupe sans droit ni titre le local donné en location à Monsieur [C].

Ils font valoir que l'article 57 A de la loi de 1986 exige que le bail professionnel soit écrit ; qu'il ne saurait y avoir acceptation tacite d'un nouveau locataire alors qu'un contentieux fourni oppose les parties depuis plus de dix ans et font observer que le paiement de loyers ne constitue qu'une présomption d'acceptation.

Ils sollicitent la confirmation des chefs du jugement validant le congé dès lors que selon une jurisprudence constante de la Cour de la cassation le congé délivré pour une date prématurée n'est pas nul, simplement reporté à une date pour laquelle il peut intervenir légalement.

Ils sollicitent la résiliation du bail aux torts de Monsieur [C] en raison des impayés des loyers et lui reprochent de ne pas avoir usé de la chose louée en bon père de famille au tenant les constructions non autorisées sur le terrain et dénaturant le site et la pollution du site à la suite de l'installation d'une citerne d'essence semi enterrée et du stockable de batteries de camions et d'autocars à même le sol.

Les bailleurs demandent la remise en état du terrain sous astreinte et la condamnation de Monsieur [C] à la dépollution site.

Les consorts [Z]-[H]-[W] demandent réparation du préjudice subi à la suite de la dégradation du terrain, à la période de vacances de location de plusieurs mois pour la dépollution et la réhabilitation du site et au titre de la perte d'image du site.

* * * * *

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la saisine de la cour par les demandes de Monsieur [C] :

Selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions qui déterminent l'objet du litige qui est ce sur quoi le juge est tenu de se prononcer.

En l'espèce, il sera fait observer que :

- la déclaration d'appel mentionne expressément les chefs de jugement critiqués ;

- le dispositif de ses premières conclusions d'appelant notifiées par RPVA le 20 août 2020 , énonce les prétentions dont il saisit la cour à savoir la réformation du jugement entrepris, de dire et juger nul et de nul effet le congé signifié à [A] [C] le 22 Février 2017 ; de dire et juger irrecevable toute demande en paiement ou résiliation du bail au contradictoire de [A] [C], dont il n'est pas établi la qualité de locataire ; de dire et juger irrecevable toute demande en paiement ou résiliation du bail émanant des intimés, en l'absence d'élément sur leur qualité à agir ;

Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 10 mars 2021 et le 10 février 2022, l'appelant sollicite l'infirmation du jugement entrepris.

Monsieur [C] ayant ainsi satisfait aux exigences de l'article 954 du code de procédure civile, la cour est tenue de statuer sur les chefs de ses demandes.

Sur la nullité du congé :

Aux termes de l'article 57 A de la loi 23 décembre 1986 « Le contrat de location d'un local affecté à un usage exclusivement professionnel est conclu pour une durée au moins égale à six ans. Il est établi par écrit.

Au terme fixé par le contrat et sous réserve des dispositions du troisième alinéa du présent article, le contrat est reconduit tacitement pour la même durée.

Chaque partie peut notifier à l'autre son intention de ne pas renouveler le contrat à l'expiration de celui-ci en respectant un délai de préavis de six mois.

Le locataire peut, à tout moment, notifier au bailleur son intention de quitter les locaux en respectant un délai de préavis de six mois.

Les notifications mentionnées au présent article sont effectuées par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par acte d'huissier.

Les parties peuvent déroger au présent article dans les conditions fixées au 7° du I de l'article L. 145-2 du code de commerce. ».

Les conditions de validité du congé tiennent à son auteur, à ses mentions et à ses modalités de notification. Leur violation est sanctionnée par la nullité. Le contrat est alors reconduit par tacite reconduction.

Enfin, le destinataire du congé doit justifier du grief que cette irrégularité lui aurait causé.

En l'espèce, il convient de relever que les baux du 04/09/2002, 04/09/2008, et l'avenant du 05/01/2009 ont été conclus entre Madame feue [Z]-[H]-[W] et Monsieur [C].

Monsieur [C] n'invoque pas une cession ou une sous-location à son profit du bail mais soutient que la SARL [C] lui a été substituée avec l'accord du bailleur.

La substitution d'un locataire s'analyse en une novation qui obéit aux règles édictées par les articles 1271 et suivants du code civil dans sa version applicable au litige.

L'article 1273 du code civil dispose que la novation ne se présume point. La volonté de nover n'est soumise à aucun formalisme particulier mais elle doit être non équivoque et résulter clairement des faits et des actes intervenus entre les parties.

Pour qu'il y ait novation par changement de débiteur, il faut un accord de volonté entre le créancier et le nouveau débiteur créant une obligation nouvelle et une décharge par le créancier du débiteur primitif, éteignant l'obligation ancienne, laquelle peut être tacite à condition d'être certaine.

En l'absence d'un écrit, il convient de se référer aux éléments produits par l'appelant à l'appui de ses allégations à savoir

- des courriers échangés entre le bailleur et la Sarl [C] en date du 21/08/2008 rejetant la demande de baisse du loyer ; en date du 21/05/2011 et du 06/06/2011 concernant les aménagements réalisés sur le terrain ;

- deux courriers échangés entre l'agence immobilière en charge de la gestion du bien et la Sarl [C] relatifs aux aménagements réalises ;

- les chèques qui ont été remis au bailleur et portés à l'encaissement au nom de [C] [Adresse 4].

Les courriers échangés entre les bailleurs, l'agence immobilière et la Sarl [C] ne sont pas significatifs, puisqu'ils ne font pas état d'un changement de débiteur ; les chèques sont au nom de [C] et ne mentionnent pas la personne morale SARL [C].

La seule connaissance par les consorts [Z]-[H]-[W] de l'existence d'une SARL [C] n'implique pas qu'ils aient dû nécessairement en déduire qu'il y avait eu substitution de locataire ;

Or en l'absence d'une volonté claire et non ambiguë du bailleur de voir substituer la SARL [C] à Monsieur [A] [C] dans ses actes et dans ses obligations, la novation ne peut être admise.

Par conséquence, le moyen de nullité du congé tiré de l'erreur de son destinataire doit être écarté.

Conformément aux dispositions de l'article 15, I, b, al. 13 de la loi du 06 juillet 1989, le congé doit être soit notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit signifié par acte d'huissier. Le délai de préavis est de six mois.

Monsieur [C] invoque la nullité du congé en raison de sa date erronée d'expiration du bail mentionnée sur le congé à savoir le 22 février 2017 au lieu du 1er octobre 2020.

Le délai de préavis ayant été respecté, il importe peu que le bailleur se soit trompé sur la date réelle d'expiration du bail. Le bail prendra fin au terme légal

C'est à bon droit que les premiers juges ont jugé qu'un congé prématuré n'est pas nul et que ses effets avaient été simplement reportés à la date pour laquelle il aurait dû être donné et débouté les consorts [Z]-[H]-[W] de leur demande aux fins de voir constater que le congé avait valablement mis fin au bail.

Le jugement déféré sera confirmé.

Sur l'irrecevabilité de la demande de résiliation judiciaire :

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. ».

En l'absence de substitution de la Sarl [C] à Monsieur [C] dans ses droits et obligations découlant du contrat, il convient de déclarer les consorts, bailleurs recevables dans leur demande de résiliation du bail à l'encontre de Monsieur [C].

Dès lors, la fin de non-recevoir tirée du défaut de leur qualité à agir doit être écartée.

Sur la résiliation du bail professionnel

L'article 1334 du code civil dans sa version applicable au litige dispose que « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi. ».

S'agissant de l'abus de jouissance :

Selon l'article 1728 du code précité « Le preneur est tenu de deux obligations principales :

1° D'user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention ;

2° De payer le prix du bail aux termes convenus. ».

Au sens de l'art. 1728, l'abus de jouissance existe lorsque la chose louée subit des détériorations, non par l'usage normal qu'elle comporte en vertu du bail, mais par le fait volontaire du preneur, indépendamment de l'intention ayant déterminé celui-ci

En l'espèce, il est reproché à Monsieur [C] la réalisation d'aménagements et de travaux constatés par acte d'huissier dressé le 1er mars 2012 consistant en des constructions modulaires, un panneau publicitaire, une citerne avec un système de distribution de carburant et deux pistes recouvertes d'enrobé).

Il sera rappelé que Monsieur [C] a loué un terrain nu pour l'exercice d'une activité de formation à la conduite, que les aménagements et travaux s'inscrivent dans l'activité professionnelle du locataire et qu'aucune clause contractuelle n'interdit la réalisation de travaux ou d'aménagements sur le terrain ou ne les subordonne à une autorisation expresse ou écrite du bailleur.

Les courriers échangés entre le preneur, l'agence immobilière et les bailleurs courant mai et juin 2011 démontrent que ces derniers étaient informés des aménagements réalisés concernant les bureaux et la piste.

Les consorts [Z]-[H]-[W] reprochent à Monsieur [C] d'avoir pollué le terrain donné en location.

L'huissier mandaté par leurs soins relate les propos du bailleur selon lesquels le preneur stockerait des batteries qu'il irait jusqu'à enterrer sur le terrain selon les voisins.

L'huissier de justice a constaté sur une partie du terrain appartenant aux bailleurs et qu'ils n'ont pas loué à Monsieur [C], la présence deux batteries de taille importante, de type de celles utilisées pour des véhicules type camions ou bus.

En l'état, il n'est pas rapporté la preuve d'une pollution du terrain donné en location.

De la même façon, il n'est pas justifié de détériorations occasionnées au terrain.

C'est à bon droit que les premiers juges ont considéré qu'il n'était pas rapportée la preuve d'un abus de jouissance justifiant de prononcer la résiliation du bail aux torts de Monsieur [C].

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

S'agissant des arriérés de loyers :

L'ensemble des éléments portés à la connaissance la cour indiquent que Monsieur [C] a manqué à son obligation de paiement du loyer mis à sa charge et multiplié les incidents de paiement.

Il y a lieu de considérer que ces manquements répétés sont suffisamment graves en ce qu'ils correspondent à l'obligation principale lui incombant.

En conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont prononcé la résiliation judiciaire du bail professionnel aux torts exclusifs de Monsieur [C].

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Devenant occupant sans droit ni titre suite à la résiliation du bail, il convient d'ordonner l'expulsion de Monsieur [C] ainsi que l'expulsion de tous occupants de son chef.

La décision entreprise qui a ordonné l'expulsion de Monsieur [C] ainsi que l'expulsion de tous occupants de son chef sera confirmée de ce chef.

Sur la dette locative :

Monsieur [C] est resté taisant sur ce point.

Les consorts [Z]-[H]-[W] produisent :

-le décompte des sommes dues au titre des arriérés de loyers de l'année 2013 et au mois d'août 2017,

-l'ordonnance du 19 avril 2018 du président du tribunal de grande instance de Saint Denis statuant en référé dans laquelle il est mentionné que Monsieur [C] ne conteste pas être redevable d'un impayé de loyer et produit lui-même aux débats un état des loyers faisant état d'un solde dû à la date du 15 décembre 2017 de 123 000 euros et le condamnant à la somme de 123 000 euros.

Il est ainsi justifié d'une créance certaine liquide et exigible.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré Monsieur [C] redevable d'une dette locative d'un montant de 123 000 euros.

Sur l'indemnité d'occupation :

Monsieur [C] étant devenu occupant sans droit ni titre est débiteur d'une indemnité d'occupation.

L'indemnité d'occupation a un caractère mixte indemnitaire et compensatoire dans la mesure où elle est destinée, à la fois, à rémunérer le propriétaire de la perte de jouissance du local et à l'indemniser du trouble subi du fait de l'occupation illicite de son bien.

La décision entreprise qui a fixé l'indemnité d'occupation égale à la somme de 7000 euros jusqu'à la libération effective des lieux sera confirmée de ce chef.

Sur le rétablissement des lieux dans leur état initial,

Les consorts [Z]-[H]-[W] rapportent la preuve que le terrain donné en location a fait l'objet d'un certain nombre d'aménagements.

Tenant les dispositions de l'article 1732 du code civil dans sa version applicable au litige imputant au locataire les dégradations et les pertes pouvant être invoquées pendant le cours du bail, le bailleur est bien fondé à solliciter que la restitution se fasse après remise du bien dans l'état initial de la location.

C'est à bon droit que les premiers juges ont condamné Monsieur [C] à la remise en état des terrains vierges de constructions et de stockage dans un délai de deux mois à compter du jugement sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Sur les frais de dépollution :

Le preneur, dernier exploitant d'une activité présentant un risque pour l'environnement, a l'obligation légale de dépollution du site loué en fin de bail.

En l'espèce, les consorts [Z]-[H]-[W] ne justifient pas de ce que Monsieur [C] exerce une activité présentant un risque pour l'environnement et ne rapporte pas la preuve d'une pollution du site.

Dès lors, les consorts [Z]-[H]-[W] seront déboutés de leur demande de condamnation de Monsieur [C] à la prise en charge des frais de dépollution.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de condamnation de Monsieur [C] aux pertes d'exploitation du site le temps de sa réhabilitation sur le fondement de l'article 1732 du code civil:

Aux termes de l'article 1732 du code civil, le preneur répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute. »

Les consorts [Z]-[H]-[W] qui n'ont pas rapporté la preuve de la pollution du terrain demandent la réparation du préjudice consécutif aux pertes d'exploitation du site le temps de sa réhabilitation.

Le dommage dont ils demandent réparation est purement hypothétique.

En conséquence, les consorts [Z]-[H]-[W] seront déboutés de leur demande.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté les bailleurs de leur demande.

Sur les autres demandes :

Succombant Monsieur [C] sera débouté de sa demande de condamnation des consorts [Z]-[H]-[W] aux frais irrépétibles.

Monsieur [C] sera condamné à payer au titre des frais irrépétibles respectivement la somme de 1000 euros à Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], à Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], en qualité de tutrice de Mr [Z]-[H]-[W] [Y] et à M. [F] [Z]-[H]-[W].

Monsieur [C] sera condamné aux dépens d'appel.

* * * * *

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort

ECARTE la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir des consorts [Z]-[H]-[W] dans leur demande de résiliation du bail professionnel ;

CONFIRME le jugement déféré

Y AJOUTANT

REJETTE la demande de nullité du congé pour ne pas avoir été délivré au bon destinataire ;

DEBOUTE Monsieur [C] de sa demande de condamnation de Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], en qualité de tutrice de Mr [Z]-[H]-[W] [Y] et M. [F] [Z]-[H]-[W] au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE Monsieur [C] à payer au titre des frais irrépétibles respectivement la somme de 1000 euros à Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], à Mme [Z] [N] [D] [Z]-[H]-[W], en qualité de tutrice de Mr [Z]-[H]-[W] [Y] et à M. [F] [Z]-[H]-[W].

CONDAMNE Monsieur [C] aux entiers dépens ;

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Alexandra BOCQUILLON, faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈREsignéLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre civile tgi
Numéro d'arrêt : 20/00071
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;20.00071 ?
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