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09/09/2022 | FRANCE | N°20/01461

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile tgi, 09 septembre 2022, 20/01461


ARRÊT N°





R.G : N° RG 20/01461 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FNE5





FONTAINE



C/



S.A.S. DEM SUD



























COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS



ARRÊT DU 09 SEPTEMBRE 2022



Chambre civile TGI



Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-PIERRE en date du 03 JUILLET 2020 suivant déclaration d'appel en date du 20 AOUT 2020 RG n° 19/01359


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APPELANT :



Monsieur [F] [S] [J]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Amel KHLIFI ETHEVE de la SELARL AMEL KHLIFI-ETHEVE ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION



INTIMÉE :



S.A.S. DEM SUD

[Adresse 2]

[Adress...

ARRÊT N°

R.G : N° RG 20/01461 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FNE5

FONTAINE

C/

S.A.S. DEM SUD

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 09 SEPTEMBRE 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-PIERRE en date du 03 JUILLET 2020 suivant déclaration d'appel en date du 20 AOUT 2020 RG n° 19/01359

APPELANT :

Monsieur [F] [S] [J]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Amel KHLIFI ETHEVE de la SELARL AMEL KHLIFI-ETHEVE ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

S.A.S. DEM SUD

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Thierry CODET de la SELARL CODET-CHOPIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 23 septembre 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Mars 2022 devant Madame ISSAD Magali, Conseillère, qui en a fait un rapport, assistée de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 8 juillet 2002.Le délibéré a été prorogé au 09 Septembre 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère

Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 09 Septembre 2022.

* * *

LA COUR :

Exposé du litige':

Par acte sous-seing privé du 22 mai 2012, Monsieur [J] s'est portée caution personnelle solidaire et indivisible des engagements de la SARL EGEB, dont il était gérant, envers la SAS DEM SUD, dont elle était débitrice à hauteur de 150 207, 98 € à la date du 13 décembre 2012 et ce, pour une durée de sept mois.

La SARL EGEB a été placée en redressement judiciaire le 11 décembre 2012 puis en liquidation judiciaire le 1er octobre 2013 avant de faire l'objet d'un jugement de clôture pour insuffisance d'actif le 23 mai 2017.

Le 21 mars 2013, la société DEM SUD a déclaré sa créance d'un montant de 150 207, 98 € entre les mains du représentant des créanciers.

Le 20 octobre 2015, Monsieur [J] a signé une reconnaissance de dette portant sur une somme de 150 207, 98 E à l'égard de la société DEM SUD à la condition qu'a l'issue de la procédure collective, la créance de la SAS DEM SUD soit irrécouvrable.

Le 16 décembre 2015, un certificat d'irrecouvrabilité de la créance a été dressé par le mandataire judiciaire.

Le 08 mars 2017, le juge d'instance de Saint Pierre a déclaré Monsieur [J] irrecevable à la procédure de traitement des situations de surendettement des particuliers.

Par acte en date du 02 mai 2019, la SAS DEM SUD a fait assigner Monsieur [J] en paiement de sommes au titre d'une reconnaissance de dette du 20 octobre 2015 ainsi qu'à 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 3 000 € pour ses frais irrépétibles, avec exécution provisoire.

Par jugement en date du 03 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Saint Pierre a':

Dit que l'acte signé par Monsieur [J] [F] le 20 octobre 2015 est une reconnaissance de dette sous condition suspensive, laquelle s'est accomplie dès la constatation de la défaillance de la SARL EGEB ;

Condamné Monsieur [J] [F] à payer à la SAS DEM SUD la somme de 150 207, 98 euros';

Condamné Monsieur [J] [F] à payer à la SAS DEM SUD une somme de 3 000, 00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejeté la demande dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Rejeté toutes les autres demandes ;

Condamné Monsieur [J] [F] aux dépens ;

Ordonné l'exécution provisoire et l'a cantonnée à la somme de 50 000, 00 €.

Par déclaration au greffe notifiée par RPVA le 20 août 2020, Monsieur [J] a relevé appel du jugement.

Les premières conclusions de l'appelant ont été notifiées par RPVA le 19 novembre 2020.

Les premières conclusions de l'intimée ont été notifiées par RPVA le 16 février 2021

Par ordonnance du 30 mars 2021, le premier président a rejeté la demande de Monsieur [J] aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire allouée au jugement rendu le 03 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Saint Pierre.

Par ordonnance d'incident en date du 1er juin 2021, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de Monsieur [J] de médiation et d'intimer aux parties de se présenter à une réunion d'information sur la médiation dont il avait été saisi par conclusions d'incident notifiées par RPVA le 19 novembre 2020.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 septembre 2021.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 16 mars 2021, Monsieur [J] demande à la cour au visa des articles 131-1 et suivants du code de procédure civile de :

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

A titre principal

- Ordonner une mesure de médiation judiciaire confiée au CMB (Centre de Médiation des Barreaux) ;

- Dire que l'affaire sera radiée aux rangs du rôle jusqu'à ce que la partie la plus diligente la fasse rappeler après les réunions de médiation

A titre subsidiaire

- Infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Saint-Pierre le 3 juillet 2020 en ce qu'il a :

- « Dit que l'acte signé par Monsieur [J] [F] le 20/10/2015 est une reconnaissance de dette sous condition suspensive, laquelle s'est accomplie dès la constatation de la défaillance de la SARL EGEB,

-Condamné Monsieur [J] [F] à payer à la SAS DEM SUD la somme de 150 207.98€,

-Condamné Monsieur [J] [F] à payer à la SAS DEM SUD une somme de 3 000.00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné Monsieur [J] [F] aux dépens,

-Ordonné l'exécution provisoire et la cantonne à la somme de 50 000.00 € »

En conséquence,

- Constatant l'absence d'engagement, par la société DEM SUD, du cautionnement acté par Monsieur [J] le 22 mai 2012 et en conséquence l'absence de dette personnelle de Monsieur [J] et de contrepartie sur la créance de 150.207,98 € dont il est demandé paiement,

-Constatant l'absence de caractère personnel de la dette objet de la reconnaissance de dette et le caractère équivoque et imprécis de l'acte de reconnaissance de dette du 20 octobre 2015

-Constatant l'erreur de Monsieur [J] en ce qu'il a crû être débiteur personnel de la société DEM SUD lors de la signature de la reconnaissance de dettes du 20 octobre 2015 et -Constatant l'absence de contrepartie et dès lors l'absence de cause sur ladite reconnaissance de dette compte tenu de la liquidation judiciaire de la société EGEB

-Dire que la reconnaissance de dettes de Monsieur [J] en date du 20 octobre 2015 est nulle et de nul effet

A titre très subsidiaire

-Constatant l'existence d'une dépendance économique de Monsieur [J] à l'égard de la société DEM SUD lors de la souscription de l'engagement de caution du 22 mai 2012, ainsi que d'une disproportion dudit engagement avec les facultés financières de la caution

-Dire que l'engagement de caution du 22 mai 2012 est nul et de nul effet compte tenu de la violence économique et du caractère disproportionné de l'engagement

En tout état de cause

- Débouter et Rejeter la demande de dommages et intérêts de la société DEM SUD pour résistance abusive

- Débouter la société DEM SUD de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de Monsieur [J] [F] [S]

- Débouter purement et simplement la société DEM SUD de l'ensemble de ses demandes

- Condamner la société DEM SUD à payer à Monsieur [F] [S] [J] la somme de 4000€ en application de l'article 700 du Code de procédure civile

-Condamner la société DEM SUD aux entiers dépens.

Monsieur [J] fait valoir que la reconnaissance de dette suppose :

1)l'existence d'une dette préalable de la personne qui s'engage,

2) une reconnaissance de la part du débiteur lui-même ou d'un mandataire.

Il conclut à la nullité de la reconnaissance de dette en l'absence de dette personnelle dans la mesure où':

-la dette d'origine est celle de la société EGB en liquidation judiciaire dont il s'est porté caution du paiement en 2012 et que la société DEM SUD n'a pas actionné la caution dans les délais prévus';

-la dette n'a aucun caractère personnel, Monsieur [J] n'ayant aucun intérêt personnel à la reconnaissance de dette de 2015.

Il fait observer qu'une reconnaissance de dette suppose une dette personnelle de celui qui s'engage et un engagement sans équivoque or dans le cas présent seule la société EGEB était débitrice à l'égard de DEM SUD, et qu'il s'était pour sa part engagé à garantir une dette par une garantie et non à payer la dette de la société dont il était gérant.

Il soutient que cette reconnaissance de dette a été signée par erreur alors qu'il se croyait débiteur de la société DEM SUD alors que cette dernière n'avait pas actionné la caution qu'il lui avait consentie en 2012.

Il fait valoir que cette reconnaissance de dette signée ne peut avoir d'effet dès lors qu'elle est sans cause. Il ne pouvait apporter un nouvel engagement pour les dettes d'une société en liquidation judiciaire et dont il ne pouvait espérer aucun avantage ni contrepartie d'un tel engagement.

Il invoque la nullité de l'engagement de caution pour vice du consentement dès lors qu'il lui avait été imposé par une société en position dominante sur le marché du matériel électrique et auquel il ne pouvait se soustraire s'il voulait poursuivre son activité dans le secteur du bâtiment.

Il relève que dans la reconnaissance de dette, il n'a fait que reconnaître avoir donné sa caution en 2012 et réitéré son engagement sans pour autant avoir contracté une quelconque dette dès lors que la caution était arrivée à son terme sans avoir été engagée par la société DEM SUD.

Il souligne que l'acte de 2015 ne saurait être qualifié de reconnaissance de dette mais de stipulation pour autrui au terme de laquelle il se serait engagé à payer la dette d'autrui.

Il fait observer que la reconnaissance de dette fait référence au cautionnement donné en 2012 dont le caractère disproportionné de l'engagement de caution entache sa validité, privant ainsi de tout effet la reconnaissance de dettes souscrite en 2015.

Enfin, il souligne qu'il n'a fait qu'exercer ses droits à médiation et à appel et qu'il ne saurait dès lors lui être reproché une résistance abusive.

Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 16 février 2021, la société SAS DEM SUD demande à la cour au visa des articles 131-1 du Code de procédure civile, 1134 al 1 et 1326 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016 -131 du 10 février 2016 (articles 1103 et 1376 en vigueur) de:

-Confirmer le jugement rendu le 3 juillet 2020 par le Tribunal Judiciaire de Saint-Pierre en ce qu'il a':

-Dit que l'acte signe par Monsieur [J] [F] le 20 octobre 2015 est une reconnaissance de dette sous condition suspensive, laquelle s'est accomplie dès la constatation de la défaillance de la SARL EGEB ;

-Condamné Monsieur [J] [F] à payer à la SAS DEM SUD la somme de 150207,98 €;

-Condamné Monsieur [J] [F] à payer à la SAS DEM SUD une somme de 3 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

-Rejeté toutes les autres demandes ;

-Condamné Monsieur [J] [F] aux dépens ;

- Infirmé le jugement rendu le 3 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Saint-Pierre en ce qu'il a Rejeté la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Et statuant à nouveau,

-Condamner Monsieur [J] [F] à payer à la SAS DEM SUD la somme de 2000,00 € pour résistance abusive';

- Débouter Monsieur [F] [J] de sa demande tendant à voir ordonner une mesure de médiation judiciaire';

- Débouter Monsieur [F] [J] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions';

- Condamner Monsieur [F] [J] au paiement de la somme de 5.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.

La société DEM SUD rappelle que Monsieur [J] a contracté personnellement une dette auprès de DEM SUD en s'engageant à s'acquitter de la somme de 150 207,98 euros, que cet engagement répond aux prescriptions de forme posées par les dispositions de l'article 1326 du code civil.

La société DEM SUD qui conteste toute erreur ou absence de cause , rappelle que la reconnaissance de dette a été librement consentie par un homme avisé lui-même chef d'une autre entreprise, que s'agissant d'un engagement unilatéral la contrepartie à son engagement n'est pas requise, que son engagement n'a pas été extorqué à la suite d'un abus de dépendance économique dans la mesure où la société EGB n'était pas liée à DEM SUD par une convention d'exclusivité et que l'engagement contracté par Monsieur [J] ne constituait qu'une garantie de paiement après des incidents de paiement.

La société DEM SUD relève que Monsieur [J] ne rapporte pas la preuve que l'engagement contracté était disproportionné.

Elle fait enfin observer que la reconnaissance de dette ne saurait être qualifiée de stipulation pour autrui en l'absence d'engagement tripartite faisant naître un droit de créance au profit d'un tiers le bénéficiaire et nécessitant l'accord du stipulant à savoir du mandataire judiciaire de la société EGB.

La société DEM SUD souligne la mauvaise foi de Monsieur [J] qui a tenté de se soustraire à ses engagements allant jusqu'à solliciter une mesure de médiation.

***

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l'exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

Sur la médiation':

Tenant les dispositions de l'article 131-1 du code de procédure civile et en l'absence d'une volonté commune des parties de s'orienter vers une mesure de médiation, il convient de débouter Monsieur [J] de sa demande.

Sur la régularité de reconnaissance de dette et engagement de règlement signé le 20 octobre 2015':

La reconnaissance de dette est l'acte sous signature privée par lequel une partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent.

Elle est soumise à une double formalité, à savoir la signature du débiteur et la mention de la somme en lettres et en chiffres.

La formalité requise par l'article 1326 du code civil ancien, consiste en la signature de celui qui souscrit l'engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres.

Pour jouer son rôle probatoire, la mention doit évidemment émaner du débiteur.

Il résulte d'un acte sous seing privé en date du 20 octobre 2015, intitulé «'Reconnaissance de dette et engagement de règlement'» que Monsieur [F] [S] [J].

«'Reconnaît par la présente que la Société EGEB, actuellement en liquidation judiciaire, doit à :

La société DISTRIBUTION ELECTRIQUE DES MASCAREIGNES SUD (DEM SUD) Société par actions simplifiée au capital de 40.000 €, inscrite au RCS de Saint Pierre sous le numéro B 448 015 057, dont le siège social est sis [Adresse 3],

La somme globale de 150 207,98 €, au titre de diverses factures demeurées impayées à la date de la liquidation judiciaire.

Ces créances ont été valablement déclarées.

Je m'étais déjà engagé, par un cautionnement, à garantir personnellement le paiement de ces sommes si ma société était défaillante.

Je réitère par la présente mon engagement, si à l'issue de la procédure de liquidation, la Société DEM SUD n'était pas réglée.

Fait à Saint Pierre le 20 octobre 2015.

Bon pour reconnaissance de dette de la somme de cent cinquante mille deux cent sept euros et quatre-vingt-dix huit centimes (150 207, 98 euros) et engagement personnel de paiement de ladite somme à l'issue de la procédure de liquidation judiciaire »

En l'espèce, la reconnaissance de dette répond aux exigences formelles posées par l'article 1326 du code civil et Monsieur [J] ne conteste pas être le signataire du dit acte et l'auteur de la mention manuscrite.

Sur la nullité de la reconnaissance de dette tenant à l'absence de cause:

En application des dispositions de l'article 1131 du code civil dans sa version applicable au litige, «'l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.'».

Il appartient à Monsieur [J] souscripteur de la reconnaissance de dette, qui se prévaut de l'absence de cause d'apporter la preuve de son inexistence,

L'existence de la cause d'une obligation doit s'apprécier à la date où elle est souscrite

Monsieur [J] conclut à l'inexistence de toute dette personnelle à l'égard de la société DEM SUD';

Il convient en l'espèce de constater à la lecture de la reconnaissance de dette que dans une première partie, Monsieur [J] en sa qualité de gérant, confirme l'état exact et le montant de l'endettement'de sa société EGEB auprès de DEM SUD et que dans une seconde partie, il s'engage personnellement à régler la dette.

Cet engagement est causé en ce qu'il procède de la volonté de Monsieur [J] de réitérer son engagement de cautionnement antérieur et ainsi de prendre en charge le règlement des sommes qui seraient dues à la société DEM SUD.

Monsieur [J] invoque l'absence de contrepartie et d'intérêt à son engagement qui serait sanctionnée par le défaut de cause.

Il convient de rappeler que la reconnaissance de dette est un acte unilatéral. Au sein des contrats unilatéraux, aucune contrepartie à l'engagement de celui qui s'oblige n'est immédiatement présente.

La contrepartie, et l'intérêt de celui qui s'oblige, sont à rechercher à l'extérieur de l'engagement et ils peuvent lui être antérieure.

En l'espèce, la contrepartie de l'engagement contracté par Monsieur [J] est antérieure à l'acte du 20 octobre 2015, elle réside dans les rapports existant le débiteur principal la société EGEB dont il était le gérant et la société DEM SUD son créancier et dans l'avantage économique que lui a consenti le créancier en poursuivant la fourniture du matériel malgré les incidents de paiement.

L'intérêt de l'engagement contracté par Monsieur [J] réside dans les rapports existant le débiteur principal la société EGEB dont il était le gérant et la société DEM SUD son créancier et dans l'avantage économique que lui a consenti le créancier en poursuivant la fourniture du matériel malgré les incidents de paiement.

Sur la nullité de la reconnaissance de dette pour vice du consentement:

Sur l'erreur':

Monsieur [J] invoque une « erreur sur la cause » de nature à entacher la validité du consentement donné à une reconnaissance de dette fondée sur la croyance erronée qu'il était responsable des dettes contractées par son entreprise.

La preuve de l'erreur incombe à celui qui s'en prévaut.

Pour être prise en considération, l'erreur doit cependant avoir été déterminante et avoir porté sur des éléments essentiels de la reconnaissance de dettes et engagement au règlement.

Il y a lieu de constater que la volonté de Monsieur [J] de régler, lui-même, les dettes de sa société envers DEM SUD est exprimé clairement et sans équivoque'« Bon pour reconnaissance de la dette de la somme de cent cinquante mille deux sept euros et quatre-vingt-dix-huit centimes'» (150 207,98€) et engagement personnel de paiement de ladite somme à l'issue de la procédure de liquidation judiciaire.'».

Les termes mêmes de la reconnaissance de dette et de l'engagement de règlement qu'il a rédigé démontrent que Monsieur [J] en sa qualité de gérant de sociétés et de personne avertie n'a pu se méprendre sur la portée de son engagement, à savoir, qu'il acceptait personnellement de régler des dettes sociales

Ce moyen de nullité sera écarté.

Sur la violence :

Aux termes de l'article 1111 du code civil, dans sa version applicable au litige applicable, la violence exercée contre celui qui a contracté l'obligation est une cause de nullité, encore qu'elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été faite.

L'article 1112 du code précité précise qu'il y a violence lorsqu'elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu'elle peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent.

La preuve de cette violence peut être rapportée par tout moyen légalement admissible

Monsieur [J] invoque abus de dépendance économique comme un cas de violence entachant la validité du consentement.

Il y a violence lorsqu'une partie, abusant de l'état de dépendance dans lequel se trouve son cocontractant, obtient de lui un engagement qu'il n'aurait pas souscrit en l'absence d'une telle contrainte et en tire un avantage manifestement excessif.

L'abus suppose un profit illégitime et l'intention de nuire au cocontractant ou du moins l'indifférence à ses intérêts.

La situation de dépendance économique est la situation d'une entreprise (fournisseur ou client) qui ne dispose pas de la possibilité de substituer à son ou ses fournisseurs (ou clients) un ou plusieurs autres fournisseurs (ou clients) répondant à sa demande d'approvisionnement dans des conditions techniques et économiques comparables.

En l'espèce, il y a lieu de constater que Monsieur [J] ne rapporte pas la preuve de sa dépendance, et de l'impossibilité de trouver d'autres fournisseurs dans des conditions économiques et également technique comparables.

Il sera fait observer que l'engagement contracté par Monsieur [J] ne constituait qu'une garantie de paiement après les incidents de paiement subis par la société DEM SUD.

Monsieur [J] ne justifiant ni d'un état de dépendance, ni d'un abus de la société DEM SUD sera débouté de sa demande nullité pour vice du consentement.

Sur la nullité tenant au caractère disproportionné de l'engagement de cautionnement de Monsieur [J] contracté en 2012 par rapport à ses biens et à ses revenus qui entacherait la validité de «'la reconnaissance de dette et engagement de règlement'» signé le 25 octobre 2015':

Il sera fait observer que l'engagement de caution contracté en 2012 est sans objet dès lors qu'il n'a pas été mis en 'uvre par la société DEM SUD dans les délais requis et que Monsieur [J] « ne rapporte pas la preuve du caractère disproportionné de l'engagement de cautionnement de Monsieur [J] contracté en 2012 par rapport à ses biens et à ses revenus.

Sur la créance de la société DEM SUD':

La société DEM SUD produit au soutien de sa demande de condamnation en paiement, les déclarations de créances entre les mains du représentant des créanciers de la société EGEB, la reconnaissance de dettes et l'engagement de paiement signé le 15 octobre 2015 par Monsieur [J] ainsi que le certificat de non recouvrabilité des créances.

En application des dispositions de la reconnaissance de dettes et engagement de paiement, Monsieur [J] sera condamné à payer à la société DEM SUD la somme de 150 207,98 €.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive.

La société DEM SUD réclame l'allocation de dommages et intérêts pour résistance abusive sans alléguer et encore moins démontrer l'existence d'un préjudice en lien de causalité avec l'abus de droit qu'il impute à l'appelant.

En conséquence, la société DEM SUD sera déboutée de sa demande.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes':

La décision déférée sera confirmée y compris dans ses dispositions sur la charge des frais irrépétibles de première instance et des dépens ;

Succombant, Monsieur [J] sera débouté de sa demande de condamnation de la société DEM SUD au titre des frais irrépétibles.

Monsieur [J] sera condamné aux dépens d'appel et aux frais irrépétibles exposés par la société DEM SUD en cause d'appel dans la limite de 1500€.

'PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré';

Y AJOUTANT';

DÉBOUTE Monsieur [J] de sa demande de médiation'judiciaire;

DÉBOUTE Monsieur [J] de sa demande de condamnation de la société DEM SUD aux frais irrépétibles';

CONDAMNE Monsieur [J] aux dépens d'appel';

CONDAMNE Monsieur [J] à payer à la société DEM SUD la somme de 1500€ au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel;

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre civile tgi
Numéro d'arrêt : 20/01461
Date de la décision : 09/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-09;20.01461 ?
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