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17/06/2022 | FRANCE | N°20/01618

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile tgi, 17 juin 2022, 20/01618


ARRÊT N°

NC



R.G : N° RG 20/01618 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FNOL





[G]



C/



Caisse CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION



























COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS



ARRÊT DU 17 JUIN 2022



Chambre civile TGI



Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS (REUNION) en date du 28 AVRIL 2020 suivant déclaration d'appel en da

te du 17 SEPTEMBRE 2020 RG n° 18/01047





APPELANT :



Monsieur [J] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Cynthia LAGOURGUE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION



INTIMÉE :



Caisse CAISSE REGIONALE DE CRED...

ARRÊT N°

NC

R.G : N° RG 20/01618 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FNOL

[G]

C/

Caisse CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA R EUNION

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 17 JUIN 2022

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS (REUNION) en date du 28 AVRIL 2020 suivant déclaration d'appel en date du 17 SEPTEMBRE 2020 RG n° 18/01047

APPELANT :

Monsieur [J] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Cynthia LAGOURGUE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

Caisse CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION

[Adresse 6]

[Localité 4] (REUNION)

Représentant : Me Amina GARNAULT, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION - Représentant : M. [S] [I] (Directeur Général)

DATE DE CLÔTURE : 9 décembre 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Avril 2022 devant Madame COURTOIS Nathalie, Présidente de chambre, qui en a fait un rapport, assistée de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 17 Juin 2022.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Nathalie COURTOIS, Présidente de chambre

Conseiller : Monsieur Martin DELAGE, Président de chambre

Conseiller : Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 17 Juin 2022.

* * *

LA COUR :

Exposé du litige:

Par acte sous-seing privé du 26 juin 2009, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion (ci-après désigné CRCAMR) a consenti à M.[J] [G] un prêt immobilier n°90020479053 pour un montant de 206 600 euros ayant pour objet l'acquisition d'un logement neuf à usage de résidence principale, pour une durée de 240 mois avec échéances mensuelles d'un montant de 1426,15 euros et au taux conventionnel annuel de 5,050%.

Par un second acte sous-seing privé du 21 décembre 2011, la CRCAMR a consenti à M.[J] [G] un prêt immobilier n°90025793623 pour un montant de 280530 euros ayant pour objet l'acquisition d'un logement neuf à usage locatif, pour une durée de 240 mois avec des échéances mensuelles d'un montant de 1655,94 euros et au taux conventionnel annuel de 3,7%.

Suite à des impayés, la CRCAMR a délivré le 10 novembre 2017 une mise en demeure à M.[J] [G] d'avoir à payer au titre du prêt n°90020479053 la somme de 178354,31 euros et au titre du prêt n°90025793623 la somme de 233852,96 euros.

Par acte d'huissier du 5 janvier 2018, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion a fait assigner M.[J] [G], sur le fondement des articles 1103, 1343-2 et 1344-1 du code civil et article 700 du code de procédure civile, aux fins de voir:

'condamner M.[J] [G] à lui régler, suivant décompte produit aux débats et arrêté au 10 novembre 2017, la somme de 412207,27 euros outre les intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement et décomposée comme suit:

au titre du prêt immobilier n°90020479053

* 7676,84 euros au titre du capital échu impayé,

* 6351,88 euros au titre des intérêts nominaux échus au taux de 5,05%,

* 439,02 euros au titre des intérêts de retard au 10.11.17 au taux de 5,05%,

* 152218,53 euros au titre du capital échu,

* 11668,04 euros au titre de l'indemnité prévue au contrat (7% des sommes dues),

* mémoire au titre des intérêts de retard jusqu'au paiement,

* sous-total : 178 354,31 euros

au titre du prêt immobilier n°90025793623

* 14603,62 euros au titre du capital échu impayé,

* 3704,16 euros au titre des intérêts nominaux échus au taux de 3,07%

* 384,10 euros au titre des intérêts de retard au 10 novembre 2017 au taux de 3,07%

* 199862,29 euros au titre du capital déchu du terme,

* 15298,79 euros au titre de l'indemnité prévue au contrat (7% des sommes dues)

* mémoire au titre des intérêts de retard

* Sous-total: 233852,96 euros

'le condamner à lui régler la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Par jugement du 28 avril 2020, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a:

'condamné M.[J] [G] à régler à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion suivant décompte produit aux débats et arrêté au 10 novembre 2017, la somme de 412207,27 euros outre les intérêts de retard jusqu'à parfait paiement et décomposée comme suit:

au titre du prêt n°90020479053

* capital échu impayé: 7676,84 euros,

* intérêts nominaux échus au taux de 5,05%: 6351,88 euros,

* intérêt de retard au 10.11.2017 au taux de 5,05%: 439,02 euros,

* capital déchu du terme: 152218,53 euros,

* indemnité prévue au contrat (7% des sommes dues): 11668,04euros,

* intérêts de retard jusqu'au paiement : mémoire,

sous-total: 178354,31 euros

au titre du prêt immobilier n°90025793623

* capital échu impayé : 14603,62 euros,

* intérêts nominaux échus au taux de 3,07%: 3 704,16 euros,

* intérêts de retard au 10 novembre 2017 au taux de 3,07% : 384,10 euros,

* capital déchu du terme: 199862,29 euros,

* indemnité prévue au contrat (7% des sommes dues): 15298,79 euros

* intérêts de retard : mémoire

sous-total: 233852,96 euros

'débouté du surplus des demandes,

'dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire,

'dit n'y avoir lieu de l'article 700 du code de procédure civile,

'condamné M.[J] [G] aux dépens.

Le 17 septembre 2020, appel de la décision du 28 avril 2020 a été interjeté par M.[J] [G].

Par conclusions récapitulatives N°2 notifiées le 9 décembre 2021 par RPVA, M.[J] [G] demande, sur le fondement du décret du 11 mars 2015 et de l'ancien article 1147 du code civil, de voir:

'infirmer le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions,

'statuant à nouveau, constater que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion a manqué à son devoir de conseil et de mise en garde à l'égard de M.[J] [G],

'en conséquence, la condamner à lui payer la somme de 421207,27 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi correspondant au montant réclamé,

'la condamner à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

'la condamner aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions N°2 notifiées le 23 septembre 2021 par RPVA, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion demande, sur le fondement des articles 1103, 1343-2 et 1344-1 du code civil et l'article 700 du code de procédure civile, de voir:

'la recevoir en son appel, l'en dire bien fondée,

'dire te juger que M.[J] [G] est un emprunteur averti eu égard à sa connaissance avérée du monde des affaires,

'dire et juger que l'emprunteur ne démontre pas l'existence d'un risque effectif d'endettement lié à la conclusion des prêts n°90020479053 et n°90025793623,

'dire et juger que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion n'a commis aucun manquement à son obligation de conseil et de mise en garde à l'égard de l'emprunteur,

'débouter M.[J] [G] de ses conclusions en toutes fins, moyens et prétentions qu'elles comportent,

'en conséquence, confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 28 avril 2020 rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Denis,

'condamner M.[J] [G] à lui régler la somme de 3500 euros au titre de l'700 outre les entiers dépens,

'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.

SUR CE':

I.Sur le fond

A.Sur le manquement de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion à son devoir de conseil et de mise en garde à l'égard de M.[J] [G]

Selon la Haute Cour, un emprunteur est considéré comme averti dès lors qu'il est apte à comprendre les informations qui lui est fournies et capable d'apprécier la nature et la portée de ses engagements, ainsi que de mesurer les risques encourus (Cour de cassation, 1ère ch.civ du 29 mars 2017 n°16-13050).

En l'espèce, il résulte des pièces et écritures de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion que ce dernier :

- a souscrit un premier prêt en 2009 avant les deux autres, objets du litige, que les deux prêts litigieux sont des prêts à taux fixe pour lesquels M.[J] [G] a reçu communication du tableau d'amortissement mentionnant le montant et la durée des échéances,

- a la charge de l'exploitation de l'établissement "snack du centre" situé au [Adresse 2] et de l'établissement "King center" situé [Adresse 5] (extrait K-bis du 4 novembre 2011)

- est le gérant de la société civile immobilière [G] inscrite au RCS de Saint-Denis sous le numéro 534695051 ( site société.com du 21 septembre 2021)

- est le mandataire liquidateur de la société "LA SALINOISE", société à responsabilité limitée inscrite au RCS Saint-Pierre sous le numéro 490968435 (BODAC du 27 avril 2016, site société.com de septembre 2021, site dirigeant.société.com du 20 septembre 2021)

M.[J] [G] conteste cette description de son activité commerciale sans pour autant communiquer des pièces susceptibles de remettre en cause utilement celles produites par l'intimée. Les pièces 8 et 9 sont inopérantes, la première démontrant uniquement que le bien immobilier situé [Adresse 1] est en indivision entre son père et une autre personne et la seconde que la SCI IMMOBILIERE [G], représentée par M.[J] [G], paie des taxes foncières pour un autre bien immobilier. Par ailleurs, le fait qu'il soit logé gratuitement par ses parents constitue un gain financier supplémentaire à prendre en considération dans ses capacités contributives.

En outre, il n'est pas contesté par M.[J] [G] que celui-ci a souscrit en partie ces prêts pour relouer les biens immobiliers ainsi achetés. Son avis d'impôt sur le revenu 2011 fait mention d'un investissement locatif "Scellier" en 2010 en métropole, d'un investissement locatif "Scellier" en 2009 en métropole et dans les DOM outre des dons aux oeuvres de 3155 euros. L'objet de financement du prêt n°90020479053 est "LOG ACHAT NEUF LOCAT" et celui du prêt n°90025793623 est "LOG ACHAT NEUF LOCAT".

Enfin, il résulte de la pièce 9 que M.[J] [G] a acquis auprès de son père, [U] [G], une épicerie-débit de boissons-bazar situé au [Adresse 1]. L'acte de cession du 6 décembre 2010 fait apparaître que le chiffre d'affaires était de 351 083 euros pour l'exercice 2008 avec un résultat net de 20462 euros, de 360 158 euros pour l'exercice 2009 avec un résultat net de 49061 euros et non connu pour l'exercice 2010.

Il résulte de ses propres écritures que M.[J] [G] était propriétaire d'un bien immobilier à [Localité 7] qu'il a revendu en 2018 pour régler la somme de 95786,91 euros au titre d'un autre prêt immobilier.

Le compte de résultat simplifié (pièce 11) fait apparaître un résultat d'exploitation positif tant en 2009 (76307 euros) qu'en 2010 (84448 euros), ce qui signifie que le chiffre d'affaires était suffisant pour couvrir ses charges d'exploitation.

Comme le relèvent à juste titre les premiers juges, le bénéfice net de son activité commerciale s'élevait à 76307 euros en 2009 lors de la souscription du prêt immobilier n°90020479053 et son revenu fiscal de référence était de 79579 euros en 2011 et lors de la souscription du prêt n°90025793623, son bénéfice net s'établissait à 84448 euros en 2010, ses salaires étant fixés à la somme annuelle de 39130 euros outre des revenus locatifs de 7200 euros et l'absence d'incident selon la consultation du fichier central des chèques le 29 novembre 2011.

En conclusion de ce qui précède, M.[J] [G] ne peut soutenir qu'il n'était pas un emprunteur averti. La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion n'a commis aucune faute s'agissant de son devoir de conseil et de mise en garde à l'égard de M.[J] [G]. La dégradation de sa situation financière est postérieure à la souscription des prêts litigieux. Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

B.Sur la demande de délais de paiement

Selon l'article 1343-5 du code civil, "Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Toute stipulation contraire est réputée non écrite.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment".

En l'espèce, M.[J] [G] ne justifie pas de ses capacités réelles contributives et donc de ses capacités à rembourser les sommes empruntées, les premiers juges ayant fait remarquer que du propre aveu de M.[J] [G] l'étalement de la dette était sans effet compte tenu de ses difficultés financières et du montant de sa dette.

II.Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité et la situation respective des parties justifiant l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il convient de condamner M.[J] [G] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion la somme de 1500€.

III.Sur les dépens

En application de l'article 696 du Code de procédure civile, M.[J] [G], partie perdante, sera condamné aux dépens.

IV.Sur l'exécution provisoire

Selon l'article 515 du code de procédure civile, "Lorsqu'il est prévu par la loi que l'exécution provisoire est facultative, elle peut être ordonnée, d'office ou à la demande d'une partie, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire.

Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la décision".

En l'espèce, il convient de l'ordonner compte tenu de l'ancienneté des prêts.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

Confirme le jugement du 28 avril 2020 du tribunal judiciaire de Saint-Denis en toutes ses dispositions;

Condamne M.[J] [G] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Réunion la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M.[J] [G] aux dépens;

Ordonne l'exécution provisoire du présent arrêt.

Le présent arrêt a été signé par Madame Nathalie COURTOIS, Présidente de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre civile tgi
Numéro d'arrêt : 20/01618
Date de la décision : 17/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-17;20.01618 ?
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