La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/2022 | FRANCE | N°20/00140

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre sociale, 16 juin 2022, 20/00140


AFFAIRE : N° RG 20/00140 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FKDJ

 Code Aff. :





ARRÊT N° AL





ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS en date du 06 Décembre 2019, rg n° F17/00345







COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

DE LA RÉUNION



CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 16 JUIN 2022





APPELANT :



Monsieur [O] [U]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Sandrine Antonelli de la Selarl Antonelli, avocat au ba

rreau de Saint Denis de la Réunion



INTIMÉES :



S.A.S. British American Tobacco [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Florent Malet, avocat au barreau de Saint Denis de ...

AFFAIRE : N° RG 20/00140 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FKDJ

 Code Aff. :

ARRÊT N° AL

ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS en date du 06 Décembre 2019, rg n° F17/00345

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

DE LA RÉUNION

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 16 JUIN 2022

APPELANT :

Monsieur [O] [U]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Sandrine Antonelli de la Selarl Antonelli, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion

INTIMÉES :

S.A.S. British American Tobacco [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Florent Malet, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion

S.A.S. Outremer Interim Réunion

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Jean Pierre Gauthier de la SCP SCP Canale-Gauthier-Antelme-Bentolila avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion

Clôture : 6 septembre 2021

DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Avril 2022 en audience publique, devant Alain Lacour, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique Lebrun, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 16 juin 2022 ;

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président :Alain Lacour

Conseiller:Laurent Calbo

Conseiller :Aurélie Police

Qui en ont délibéré

ARRÊT : mis à disposition des parties le 16 juin 2022

Greffier lors des débats : Mme Monique Lebrun

Greffier lors du prononcé par mise à disposition : Mme Delphine Grondin

* *

*

LA COUR :

Exposé du litige :

M. [U] a travaillé en qualité d'intérimaire du 6 janvier 2016 au 1er juin 2017 pour le compte de la société British American Tobacco (la société BAT), dans le cadre de contrats de mission souscrits avec la SAS Outremer intérim Réunion (la société OIR).

Saisi par M. [U], qui sollicitait notamment la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée et l'indemnisation des différents chefs de préjudice dont il se plaignait, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 6 décembre 2019, a déclaré irrecevables la demande en requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée ainsi que celles indemnitaires en découlant, et a débouté M. [U] de ses autres demandes et les sociétés BAT et OIR de leurs demandes reconventionnelles.

Appel de cette décision a été interjeté par M. [U] le 22 janvier 2020.

Vu les conclusions notifiées par M. [U] le 3 septembre 2021 ;

Vu les conclusions notifiées par la société OIR le 11 mars 2021 ;

Vu les conclusions notifiées par la société BAT le 20 juillet 2000 ;

Pour plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées et aux développements infra.

Sur ce :

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir :

Vu les articles 31, 122 et 954 du code de procédure civile ;

Attendu que la société OIR conclut à l'irrecevabilité de la demande de requalification présentée par M. [U] et de celles indemnitaires subséquentes, pour défaut d'intérêt à agir, en excipant de ce qu'il bénéficiait déjà d'un contrat de travail à durée indéterminée avec la société Elis Provence, suspendu en raison du congé sabbatique qu'il avait pris ; qu'il n'a donc aucun intérêt légitime à se voir reconnaître un autre contrat à durée indéterminée ; qu'il ne justifie d'aucun préjudice puisqu'il n'a pas perdu sa « situation de travail » ;

Mais attendu que la circonstance qu'alors qu'il travaillait pour la société OIR et la société BAT, M. [U] bénéficiait d'un congé sabbatique ayant suspendu le contrat de travail qui le liait à la société Elis Provence est indifférente puisqu'il lui était loisible de travailler pendant ce congé, quelle que soit la forme du contrat de travail alors souscrit ; qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne vient en effet restreindre la liberté qu'avait M. [U] de travailler, sous la forme qu'il avait choisie, pendant ce congé sabbatique ;

Et attendu que M. [U] a intérêt à avoir requalifier la relation de travail qui l'unissait aux sociétés OIR et BAT ; que ses demandes sont par conséquent recevables et que le jugement sera infirmé ;

Sur la requalification des contrats d'intérim en contrat à durée indéterminée :

Vu l'article L. 1251-5 du code du travail ;

Attendu que M. [U] conclut à la requalification de ses contrats de mission d'intérim en contrat à durée indéterminée, en faisant notamment valoir qu'ils étaient destinés à pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice et que les motifs invoqués par elle étaient fictifs ;

Attendu que la société BAT s'y oppose en objectant que M. [U] a été recruté pour remplacer des salariés et pour faire face à un accroissement temporaire d'activité ; qu'il a été mis à sa disposition une première fois pour une mission ponctuelle liée au nettoyage de ses véhicules, ce qui correspond selon elle à un accroissement temporaire d'activité, puis lorsqu'elle a décidé d'ouvrir à l'essai une onzième « route » commerciale, destinée à permettre une collecte plus fréquente des recettes en espèces, rendue nécessaire par l'interdiction des paiements sous cette forme pour des montants supérieurs à 1 000 euros, et d'y affecter ses différents chauffeurs dans le cadre d'un roulement, ce qui a temporairement mis à mal l'organisation de l'entreprise et l'a conduite à recourir à un intérimaire ;

Mais attendu que ni le nettoyage des véhicules de la société, ni la réorganisation des « routes » commerciales de collecte des recettes ne correspondaient à une augmentation temporaire d'activité, le premier pour faire partie de son activité normale et la seconde pour être la conséquence d'un changement pérenne de législation, dont la société BAT était pleinement informée ainsi qu'il ressort de sa pièce n° 6 constituée d'une note dont le thème est « Ban of cash transaction above €1000 + RCS8 upgrade », qui se conclut comme suit : « Our recommendation is therefore to recruit a part timer », qui peut se traduire ainsi : « Notre recommandation est donc de recruter un salarié à temps partiel », étant relevé qu'un travailleur à temps partiel ne se confond pas avec un travailleur intérimaire ;

Attendu qu'il est ainsi établi que le motif tenant à un accroissement temporaire d'activité, invoqué sur le contrat n° 2060, était erroné ;

Et attendu que :

- le contrat de mise à disposition n° 2103 a pour motif le remplacement de M. [Y] du 14 au 29 janvier 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent, pour arrêt maladie, qu'à compter du 25 janvier, jusqu'au 5 février 2016 ;

- le contrat de mission n° 2186 a pour motif le remplacement de M. [E] [M] du 1er au 29 février 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été en congés payés que du 4 au 9 février 2016 ;

- le contrat de mission n° 2281 a pour motif le remplacement de M. [J] du 1er au 31 mars 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent pour arrêt maladie que le 25 mars 2016 ;

- le contrat de mission n° 2394 a pour motif le remplacement de M. [J] du 1er au 29 avril 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent que du 20 au 28 avril 2016 ;

- le contrat de mission n° 2518 a pour motif le remplacement de M. [S] du 2 au 31 mai 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent que du 9 au 27 mai 2016 ;

- le contrat de mission n° 2714 a pour motif le remplacement de M. [E] [M] du 1er au 30 juin 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent que du 1er au 17 juin 2016 ;

- le contrat de mission n° 3110 a pour motif le remplacement de M. [Y] du 1er au 31 août 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent que du 1er au 5 août 2016 pour arrêt maladie et du 24 au 26 août 2016 pour congés payés ;

- le contrat de mission n° 3438 a pour motif le remplacement de M. [E] [M] du 1er au 30 novembre 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a pas été absent au cours du mois de novembre 2016 ;

- le contrat de mission n° 3438-1 a pour motif le remplacement de M. [E] [M] du 1er au 31 décembre 2016, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a pas été absent cours du mois de décembre 2016 ;

- le contrat de mission n° 3679-1 a pour motif le remplacement de M. [J] du 2 au 31 janvier 2017, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent que du 3 au 5 janvier 2017 ;

- le contrat de mission n° 3939 a pour motif le remplacement de M. [E] [M] du 1er au 31 mars 2017, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent que le 24 mars 2017 ;

- le contrat de mission n° 4249 a pour motif le remplacement de M. [S] du 1er au 19 mai 2017, alors que la pièce n° 2 de la société BAT démontre que ce salarié n'a été absent que du 9 au 18 mai 2017 ;

Attendu qu'il ressort de ce qui précède que les motifs invoqués pour ces contrats étaient erronés ; qu'il convient par conséquent de requalifier les contrats de mission de M. [U] en un contrat de travail à durée indéterminée de droit commun, et ce à compter du 6 janvier 2016 ;

Attendu que pour s'y opposer, la société OIR objecte que l'article L. 1251-40 du code du travail dispose que la méconnaissance de l'obligation de transmission du contrat de mission au salarié dans le délai fixé par l'article L. 1251-17 ne peut à elle seule entraîner la requalification en un contrat à durée indéterminée mais ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité à la charge de l'employeur, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ; qu'elle ajoute que M. [U] ne justifie en outre d'aucun préjudice résultant de ce défaut de transmission ou d'une transmission tardive ;

Mais attendu, d'abord, que la disposition de l'article 1251-40 du code du travail dont se prévaut la société OIR, issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, est inapplicable au cas d'espèce en vertu de l'article 40 de cette ordonnance ;

Et attendu, ensuite, que l'article 1251-40, dans sa rédaction applicable, dispose que lorsqu'une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits correspondants à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission ; que l'article L. 1251-5 prévoit que le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice ;

Attendu que le non-respect par l'entreprise de travail temporaire de l'une des prescriptions des dispositions de l'article L. 1251-40 du code du travail, lesquelles ont pour objet de garantir qu'ont été observées les conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d''uvre est interdite, implique la requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée ; 

Or, attendu que, pour les motifs exposés supra, les contrats de mission litigieux ont eu pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de la société BAT puisqu'aucun accroissement temporaire d'activité n'est caractérisé ;

Attendu que si l'article L. 1251-6 du code du travail dispose qu'il peut être fait appel à un salarié temporaire en cas d'absence ou d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, force est de constater que les absences alléguées par la société OIR ne correspondaient pas à la réalité ;

Attendu encore que si la société OIR répond à M. [U], qui fait valoir qu'aucun contrat ne lui a été remis pour le mois de mai 2016, qu'il apparaît sur sa pièce n° 1, constituée d'un listing, aucun exemplaire de ce contrat n'est néanmoins produit aux débats par la société, en sorte qu'il doit être considéré qu'il n'existe pas ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que les contrats de mission conclus par la société OIR avec M. [U] ont eu pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de la société BAT, qu'ils ne visaient pas à remplacer des salariés absents et qu'aucun contrat écrit n'a été remis au salarié pour le mois de mai 2016, circonstances contrevenant toutes aux dispositions de l'article L 1251-40 susvisé ;

Attendu en conséquence qu'il convient de dire que les contrats de mission de M. [U] sont requalifiés en contrat à durée indéterminée tant à l'égard de la société OIR que de la société BAT ;

Attendu que le que le jugement sera par conséquent infirmé ;

Sur l'indemnité de requalification :

Vu l'article L. 1251-41 du code du travail ;

Attendu que M. [U] soutient qu'il percevait un salaire brut mensuel de 3 100 euros alors que la société BAT fait valoir qu'il n'était que de 3 069, 41 euros par mois ;

Attendu que l'examen des bulletins de salaire versés aux débats (pièce n° 7 de M. [U]) fait apparaître que pour les trois derniers mois complets au cours desquels il a travaillé pour la société BAT, M. [U] a perçu un salaire brut moyen de 2 932, 87 euros ; que la société BAT reconnaissant qu'il a perçu 3 069, 41 euros bruts par mois, cette somme sera retenue ;

Attendu qu'il sera fait une juste réparation de ce préjudice par la condamnation de la société BAT à payer à M. [U] la somme de 6 000 euros à titre indemnitaire ; qu'aux termes mêmes de l'article L. 1251-41 susvisé, cette indemnité doit être mise à la charge exclusive de l'entreprise utilisatrice ; que M. [U] sera donc débouté de sa demande de condamnation solidaire des sociétés OIR et BAT ;

Sur le licenciement :

Attendu que la rupture du contrat de travail par la société BAT s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Sur l'indemnité légale de licenciement :

Vu les articles L. 1234-9 et R. 1234-2, dans leur rédaction applicable, du code du travail ;

Attendu que M. [U] avait un an et cinq mois d'ancienneté lors de la rupture de la relation de travail ; qu'il peut par conséquent réclamer une indemnité de 869, 66 euros [(3 069,41/5) + (3 069,41/5 x 5/12)] ;

Sur les dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :

Vu l'article L. 1235-5, dans sa rédaction applicable, du code du travail ;

Attendu que M. [U] avait une ancienneté d'un an et cinq mois lors de la rupture de la relation de travail et qu'il percevait un salaire brut mensuel de 3 069, 41 euros ; qu'il sera fait une juste réparation du préjudice ainsi subi par lui par l'allocation la somme de 9 000 euros à titre indemnitaire ;

Sur l'indemnité pour rupture anticipée du contrat de travail :

Vu l'article L. 1243-4 du code du travail ;

Attendu que M. [U] réclame la somme de 3 100 euros de ce chef en faisant valoir que la société BAT a mis fin de façon anticipée à sa mission ;

Mais attendu que les contrats de mission de M. [U] ont été requalifiés, ainsi que vu précédemment, en contrat à durée indéterminée ; que M. [U] ne peut par conséquent pas prétendre à cette indemnité ;

Sur le non-respect de la procédure de licenciement :

Vu les articles L. 1235-2 et L. 1235-3, dans leur rédaction applicable, du code du travail ;

Attendu que M. [U], qui a été indemnisé pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, ne peut qu'être débouté de cette demande ;

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents :

Attendu que M. [U] avait un an et cinq mois d'ancienneté lors de la rupture de la relation de travail et qu'il percevait un salaire mensuel brut de 3 069, 30 euros ; qu'il peut par conséquent prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis de 3 069,30 euros, outre 306,93 euros au titre des congés payés afférents ;

Sur les heures supplémentaires :

Vu les articles L. 1251-21 et L. 3171-4 du code du travail ;

Attendu qu'en application du premier des textes susvisés, seule la société BAT est responsable des conditions d'exécution du travail et, notamment, du respect des règles encadrant la durée du travail ; que la demande dirigée de ce chef par M. [U] contre la société OIR sera donc rejetée ;

Attendu que M. [U] verse aux débats ses pièces :

- n° 9 : constituée d'un calendrier des mois de janvier à juin 2017 faisant apparaître pour chaque jour le nombre d'heures travaillées ;

- n° 10, constituée des journaux de visite mentionnant notamment son nom et listant les clients visités chaque jour ;

- n° 11, constituée de courriels que M. [U] a envoyés à Mme [H] ;

Attendu que ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à la société BAT de les contester en versant aux débats des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par M. [U], ce qu'elle ne fait pas ;

Attendu qu'il sera par conséquent considéré que M. [U] a effectué les heures de travail apparaissant sur le tableau figurant sur sa pièce n° 9 ; que la société BAT sera donc condamnée à lui payer la somme de 1 786,08 euros au titre des heures supplémentaires ;

Sur le préjudice distinct :

Vu les articles L. 1222-1 du code du travail, 9 et 954 du code de procédure civile ;

Attendu que M. [U] réclame la somme de 9 300 euros de ce chef en invoquant ses pièces n° 6, 12 à 14 constituées, respectivement, d'un courriel lui notifiant la fin de sa mission au 1er juin 2017, d'une copie de son livret de famille, d'un relevé de la caisse d'allocations familiales et de diverses factures ;

Attendu que ces pièces ne font pas la preuve d'une rupture brutale et vexatoire de la relation de travail, étant relevé que la rupture anticipée de celle-ci a déjà fait l'objet d'une indemnisation, ainsi que vu précédemment, ni, partant, d'un préjudice indemnisable ; que M. [U] sera débouté de cette demande ;

Sur la condamnation de la société OIR solidairement avec la société BAT :

Attendu que M. [U] demande que les deux sociétés soient condamnées solidairement à lui payer les indemnités qu'il réclame ;

Attendu, en premier lieu, que, pour les motifs exposés supra, l'indemnité de requalification et les heures supplémentaires sont à la charge exclusive de la société BAT ;

Attendu, en second lieu, que pour les motifs précédemment exposés, et par application de l'article L. 1251-40 du code du travail, M. [U] est bien fondé à agir contre la société OIR dès lors que les conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d''uvre est interdite n'ont pas été respectées ;

Attendu en conséquence qu'il convient de condamner la société OIR in solidum avec la société BAT au paiement, au profit de M. [U], de l'indemnité légale de licenciement, de l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité compensatrice de préavis sur congés payés ;

Sur la remise de documents :

Attendu qu'il convient de condamner la société OIR à remettre à M. [U] un certificat de travail, une attestation destinée à Pôle emploi et un solde de tout compte conformes au présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une astreinte ;

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement,

Confirme le jugement rendu le 6 décembre 2019 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion en ce qu'il a débouté M. [U] de ses demandes d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, pour rupture anticipée de la relation de travail et pour préjudice distinct ;

L'infirme pour le surplus de ses dispositions ;

Déclare recevables les demandes de M. [U] ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Requalifie les contrats de mission d'intérim conclus entre M. [U] et les sociétés British American Tobacco et Outremer intérim Réunion en contrat à durée indéterminée, à compter du 6 janvier 2016, jusqu'au 1er juin 2017 ;

Condamne la société British American Tobacco à payer à M. [U] :

- 6 000 euros à titre d'indemnité de requalification ;

- 1 786,08 euros au titre des heures supplémentaires ;

Condamne in solidum la société British American Tobacco et la société Outremer intérim Réunion à payer à M. [U] les sommes suivantes :

- 869,66 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- 9 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- 3 069,30 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 306,93 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

Ordonne à la société Outremer intérim Réunion de remettre à M. [U] une attestation destinée à Pôle emploi, un certificat de travail et un solde de tout compte conformes au présent arrêt ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société British American Tobacco à payer à M. [U] la somme de 3 000 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;

Condamne la société Outremer intérim Réunion à payer à M. [U] la somme de 3 000 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société British American Tobacco et la société Outremer intérim Réunion aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00140
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;20.00140 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award