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28/04/2022 | FRANCE | N°20/00083

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre sociale, 28 avril 2022, 20/00083


AFFAIRE : N° RG N° RG 20/00083 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FJ7F

 Code Aff. :



ARRÊT N° A.P.





ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS (REUNION) en date du 12 Décembre 2019, rg n° F 18/00422









COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

DE LA RÉUNION



CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 28 AVRIL 2022





APPELANTE :



La S.A.R.L. SODEO à l'enseigne 'ATELIER DU STORE'

[Adresse 1]

[Localité 4] (REUNION)

Représen

tant : Me Olivier HAMEROUX de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION







INTIMÉ :



Monsieur [T] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Sandrine ANTONELLI de...

AFFAIRE : N° RG N° RG 20/00083 - N° Portalis DBWB-V-B7E-FJ7F

 Code Aff. :

ARRÊT N° A.P.

ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS (REUNION) en date du 12 Décembre 2019, rg n° F 18/00422

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

DE LA RÉUNION

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 28 AVRIL 2022

APPELANTE :

La S.A.R.L. SODEO à l'enseigne 'ATELIER DU STORE'

[Adresse 1]

[Localité 4] (REUNION)

Représentant : Me Olivier HAMEROUX de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉ :

Monsieur [T] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Sandrine ANTONELLI de la SELARL ANTONELLI, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Clôture : 04.10.2021

DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 février 2022 devant la cour composée de :

Président :M. Alain LACOUR

Conseiller :M. Laurent CALBO

Conseiller :Madame Aurélie POLICE,

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 28 avril 2022.

ARRÊT : mis à disposition des parties le 28 AVRIL 2022

greffier lors des débats : Mme Nadia HANAFI

* *

*

LA COUR :

Exposé du litige :

M. [T] [Z] a été embauché par la SARL Sodeo, exerçant sous l'enseigne L'Atelier du Store, en qualité de poseur de store, par contrat à durée indéterminée du 18 octobre 1993.

Suite à l'avis d'inaptitude sans possibilité de reclassement rendu par la médecine du travail le 6 février 2017, M. [Z] a été licencié le 24 février 2017.

Invoquant un licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle, M. [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion afin d'obtenir l'indemnité spéciale de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférente ainsi que la remise, sous astreinte, de l'attestation Pôle emploi et le bulletin de salaire de février 2017 rectifiés.

Par jugement contradictoire du 12 décembre 2019, le conseil de prud'hommes a dit que le licenciement de M. [Z] était intervenu pour inaptitude physique professionnelle et a condamné la SARL Sodeo au paiement des sommes suivantes :

- 18 590 euros nets à titre d'indemnité spéciale de licenciement ;

- 2 743 bruts a titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 274 euros brut à titre de congés payés sur préavis ;

- 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

et a ordonné la rectification de l'attestation du Pôle emploi et du bulletin de paie de février 2017, ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé un delai de huit jours à compter de la notification de la présente décision.

Appel de cette décision a été interjeté par la SARL Sodeo par acte du 15 janvier 2020 ;

Vu les dernières conclusions notifiées par M. [Z] le 7 juin 2021 ;

Vu les dernières conclusions notifiées par la SARL Sodeo le 19 août 2021 ;

La clôture a été prononcée par ordonnance du 4 octobre 2021.

Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.

Sur ce :

Sur le licenciement pour inaptitude

Vu les articles L. 461-1 du code de la sécurité sociale et L. 1226-9, L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail;

La SARL Sodeo soutient qu'au moment du licenciement, il n'était pas établi que l'inaptitude de M. [Z] aurait eu pour origine, même partiellement, une maladie professionnelle, notamment eu égard à la réponse apportée par le médecin du travail, et qu'elle n'avait pas connaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude. Elle fait valoir que la procédure de mise en inaptitude est indépendante par rapport à la procédure de reconnaissance d'une maladie professionnelle. Elle ajoute que la caisse d'assurance maladie a, par la suite, confirmé l'absence de lien de causalité entre l'inaptitude et la maladie professionnelle.

M. [Z] considère quant à lui que l'origine professionnelle de sa maladie doit être présumée, étant prévue dans le tableau des maladies professionnelles, annexé au code du travail, et que l'employeur avait nécessairement connaissance du caractère professionnel de son inaptitude.

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement, cette application n'étant pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie du caractère professionnel d'un accident.

Il est constant que M. [Z] a bénéficié d'arrêts de travail successifs avant de se voir délivrer, en date du 25 octobre 2016, un arrêt de travail consécutif à une lombosciatalgie en lien, selon le praticien, à une maladie professionnelle constatée le 25 mars 2015. Le même jour, M. [Z] a effectué sa déclaration de maladie professionnelle, faisant mention de la nature professionnelle de sa maladie.

Dans le cadre de la procédure de reconnaissance de sa pathologie en maladie professionnelle, une enquête administrative a été dilignentée au cours de laquelle le représentant de la SARL Sodeo a été auditionné en date du 10 février 2017. Il ressort du compte-rendu des auditions que l'employeur a confirmé 'l'intégralité des informations présentées ci-dessus par M. [Z], aussi bien celles relatives à la description de son environnement de travail, que celles inhérentes aux tâches comportant une manutention manuelle de charges lourdes'. Il apparaît également qu'il a été donné connaissance, à cette occasion, à l'employeur, de la liste limitative des travaux du tableau n°98 des maladies professionnelles, et que ce dernier a déclaré alors que 'les travaux réalisés par M. [Z] dans le cadre de l'exercice de sa fonction de poseurs de stores, peuvent s'apparenter 'au chargement et déchargement en cours de fabrication et la préparation des produits industriels'.' L'inspecteur du travail conclut que la condition administrative de la colonne de droite du tableau n°98 des maladies professionnelles est remplie et que le représentant de l'employeur ne formule aucune réserve sur ce dossier.

Il est donc établi que l'employeur a eu connaissance tant de la demande de prise en charge de maladie professionnelle déposée par M. [Z] que de la nature de la maladie affectant le salarié. Lors de son audition par l'inspecteur du travail, l'employeur a reconnu que le salarié devait porter des charges lourdes dans le cadre de sa mission, qu'un tel emploi peut occasionner une pathologie telle que recensée dans le tableau des maladies professionnelles, correspondant à celle dont souffre M. [Z].

L'avis du docteur [D] [W], médecin du travail, formulé aux termes du mail du 8 février 2017, dans lequel il indique que 'l'inaptitude ne peut être à l'heure d'aujourd'hui reconnue professionnelle car il n'y a pas actuellement d'accident du travail ou de maladie professionnelle reconnue pouvant être, même partiellement en lien avec l'inaptitude.' est indifférent. En effet, si le médecin du travail porte mention sur le formulaire adressé à la caisse primaire d'assurance maladie, pour bénéficier de l'indemnité temporaire d'inaptitude, du lien susceptible d'être établi entre l'inaptitude et l'accident du travail ou la maladie professionnelle, en application du décret n°2010-244 du 9 mars 2010, il ne décide en revanche pas du caractère professionnel ou non de la maladie.

La position prise par ce médecin ne saurait dès lors lier l'employeur qui avait par ailleurs reconnu que la maladie dont souffre M. [Z] correspondait aux caractéristiques de la maladie listée dans le tableau des maladies professionnelles.

De même, la décision de la CPAM du 6 juillet 2017, retenant un taux d'incapacité permanente de 10 % dont 0 % pour le taux professionnel à compter du 16 janvier 2017, est indifférente à la résolution du présent litige dès lors d'une part qu'il appartient à la cour d'apprécier elle-même l'origine professionnelle de l'inaptitude mais d'autre part que cette évaluation du taux d'incapacité ne fournit aucune information quant à l'origine professionnelle de la maladie dès lors qu'elle concerne la seule évaluation des séquelles consolidées en suite de la reconnaissance du caractère professionnel de l'affection.

Ainsi, la SARL Sodeo, informée de la synthèse de l'enquête administrative, notamment quant au classement de la maladie du salarié dans le tableau des maladies professionnelles, a eu connaissance de la possible origine professionnelle de l'inaptitude de M. [Z], au moment du licenciement.

En conséquence, il y a lieu de confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a reconnu que le licenciement était intervenu pour inaptitude physique professionnelle.

Sur l'indemnité spéciale de licenciement

Vu les articles L. 1226-14, L. 1234-9 et R. 1234-2 du code du travail ;

Il ressort du bulletin de paie de M. [Z] du mois de février 2017 et de l'attestation pôle emploi que l'indemnité légale de licenciement allouée au salarié s'est élevée à la somme de 18 590,22 euros. Les parties ne contestent pas le montant de cette indemnité.

Dès lors que la rupture du contrat de travail est intervenue en raison de l'inaptitude d'origine professionnelle du salarié et de l'impossibilité de reclassement dans l'emploi, M. [Z] peut prétendre à l'indemnité spéciale de licenciement qui est égale au double de l'indemnité légale de licenciement.

La juridiction de premier ressort a donc accordé à bon droit la somme de 18 590 euros à M. [Z] au titre du complément d'indemnité qui aurait dû être allouée au salarié.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

Vu l'article L. 1234-1 du code du travail ;

La rupture du contrat de travail, étant intervenue dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 du code du travail, ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 du même code.

Il est constant que M. [Z] n'a pu effectuer son préavis du fait de son inaptitude. M. [Z] est fondé à percevoir une indemnité égale à l'indemnité compensatrice de préavis qui doit correspondre à deux mois de salaire au vu de l'ancienneté du salarié, largement supérieure à deux années.

Le jugement sera infirmé de ce chef et la SARL Sodeo sera condamnée à payer à M. [Z] la somme de 5 486 euros au titre de l'indemnité compensatrice.

En revanche, si l'indemnité compensatrice versée en cas d'inaptitude professionnelle est calculée conformément à l'indemnité de préavis, elle a un statut différent et ne génère pas de droit à congés payés compte tenu de l'incapacité physique du salarié à travailler.

Le jugement sera également infirmé de ce chef et M. [Z] sera débouté de sa demande au titre des congés payés sur préavis.

Sur la rectification de l'attestation Pôle emploi et du bulletin de salaire

La rectification de l'attestation Pôle emploi et du bulletin de paie de février 2017 devra de nouveau être ordonnée, mais uniquement, en ce qui concerne le bulletin de paie, pour faire figurer les sommes de 37 180,22 euros au titre de l'indemnité spéciale de licenciement et de 5 486 euros au titre de l'indemnité compensatrice.

Il n'y a en revanche pas lieu à astreinte.

Le jugement sera donc confirmé de ces chefs, sauf en ce qu'il ordonne une astreinte.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement,

Confirme le jugement rendu le 12 décembre 2019 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion en ce qu'il a dit que M. [Z] a été licencié pour inaptitude physique professionnelle, en ce qu'il a condamné la SARL Sodeo, exerçant sous l'enseigne L'Atelier du Store, à payer à M. [Z] la somme de 18 590 euros nets à titre d'indemnité légale de licenciement et en ce qu'il a ordonné la rectification de l'attestation Pôle emploi et du bulletin de paie de février 2017 sauf pour l'astreinte ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne la SARL Sodeo, exerçant sous l'enseigne L'Atelier du Store, à payer à M. [Z] la somme de 5 486 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

Déboute M. [Z] au titre de sa demande de congés payés sur préavis ;

Déboute M. [Z] de sa demande d'astreinte ;

Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions ;

Y ajoutant,

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL Sodeo, exerçant sous l'enseigne L'Atelier du Store, à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Condamne la SARL Sodeo, exerçant sous l'enseigne L'Atelier du Store, aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Hanafi, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00083
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;20.00083 ?
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