La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/02/2008 | FRANCE | N°07/00369

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, Chambre commerciale, 18 février 2008, 07/00369


Arrêt No

R.G : 07/00369

X...

C/

Y...

MINISTERE PUBLIC

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 18 FEVRIER 2008

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE ST DENIS en date du 12 NOVEMBRE 2003 suivant déclaration d'appel en date du 19 DECEMBRE 2003

rg no 03/614

APPELANT :

Monsieur Guito X...

...

97441 SAINTE-SUZANNE

Représentant : Me Julien Z... (avocat au barreau de SAINT-DENIS)

INTIMES :

Maître Christophe Y...

...

9749

0 SAINTE-CLOTILDE

Représentant : Me Pierre A... (avocat au barreau de SAINT-DENIS)

EN PRESENCE DU MINISTERE PUBLIC représenté par Monsieur le Procureur Général

Cour...

Arrêt No

R.G : 07/00369

X...

C/

Y...

MINISTERE PUBLIC

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 18 FEVRIER 2008

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE ST DENIS en date du 12 NOVEMBRE 2003 suivant déclaration d'appel en date du 19 DECEMBRE 2003

rg no 03/614

APPELANT :

Monsieur Guito X...

...

97441 SAINTE-SUZANNE

Représentant : Me Julien Z... (avocat au barreau de SAINT-DENIS)

INTIMES :

Maître Christophe Y...

...

97490 SAINTE-CLOTILDE

Représentant : Me Pierre A... (avocat au barreau de SAINT-DENIS)

EN PRESENCE DU MINISTERE PUBLIC représenté par Monsieur le Procureur Général

Cour d'Appel

...

97400 ST DENIS

CLOTURE LE : 19 novembre 2007

DÉBATS : en application des dispositions de l'article 779 alinéa 3 du nouveau code de procédure civile, le conseiller de la mise en état à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre commerciale entre le 1er décembre et le 8 décembre 2007.

Par bulletin du 12 décembre 2007 , le président a avisé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre commerciale de la cour composée de :

Président : Monsieur François CREZE,

Conseiller : Monsieur Yves BLOT,

Conseiller : Monsieur Jean Pierre SZYSZ

qui en ont délibéré

et que l'arrêt serait rendu le 04 Février 2008, prorogé à ce jour par mise à disposition au greffe.

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 18 Février 2008.

Greffier : Mme Annick PICOT, Adjoint Administratif faisant fonction de greffier.

Origine du litige

L'Entreprise Dyonisienne de Bâtiment (E D B) s'est constituée le 22 novembre 1999 sous forme de société à responsabilité limitée autour d'un capital de 50 000 F entièrement détenu par M. B.... Cette société avait pour objet social la réalisation de gros oeuvre, travaux de charpente et couverture et l'activité n'a effectivement commencé qu'à compter de mars 2000 au profit d'une clientèle de particuliers.

La SARL E D B a rencontré des difficultés dès la première année d'activité et s'expliquant selon le mandataire judiciaire par une comptabilité mal tenue et une entreprise à structure sociale sous dimensionnée n'ayant pour vocation que de donner une forme sociale à une activité exercée antérieurement sous forme individuelle.

Selon jugement en date du 21 mars 2001, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion prononçait la liquidation judiciaire de cette entreprise.

Par acte du 02 août 2002, Me Christophe Y... , mandataire liquidateur, faisait assigner M. Guito B... aux fins de solliciter sa condamnation , sur le fondement de l'article L. 624 – 3 du code de commerce, à combler à hauteur de 70 000 € l'insuffisance d'actif de la société au regard des fautes de gestion relevée par lui.

À la suite du rapport du juge commissaire du 02 septembre 2002, le tribunal se saisissait d'office aux fins d'examiner l'éventualité de prononcer à l'encontre du dirigeant l'une des sanctions prévues par les articles L. 625 – 2 et L. 625 – 8 du code de commerce, soit la faillite personnelle, soit l'interdiction de gérer ou administrer une entreprise commerciale.

État de la procédure

Par jugement du 12 novembre 2003, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion condamnait M. Guito X... à supporter l'insuffisance d'actif de la société SARL EDB à hauteur de 50 000 € , prononçait sa faillite personnelle pour une durée de 10 ans, avec interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute personne morale ayant une activité économique , outre les interdictions et déchéances applicables aux personnes déclarées en état de faillite.

M. Guito B... interjetait appel de cette décision le 19 décembre 2003. Par conclusions du 15 octobre 2007, il demande à la cour d'infirmer la décision entreprise et de dire qu'il n'y a pas lieu au prononcé d'une sanction personnelle à son encontre. À titre subsidiaire , il sollicite que la sanction soit ramenée à de plus justes proportions.

Me Y... n'a pas répliqué à ces conclusions, s'en tenant à l'argumentation développée devant les premiers juges.

Le ministère public auquel l'affaire a été régulièrement communiquée n'a pas pris de conclusions orales ou écrites.

Sur quoi, la cour

À l'appui de son appel, M. B... relève en premier lieu que la SARL n'a commencé son activité qu'à compter de mars 2000 pour être déclaré en état de cessation de paiements dès mars 2001 , et qu'elle n'a donc pas eu un an d'exercice complet, de graves difficultés survenant principalement en raison du fait de la faillite de son principal client, la société Practicase, qui a laissé une dette impayée de 300 000 F. Il soutient que durant ces quelques mois d'exercice, le journal des dépenses et des recettes , ainsi que les factures d'achat à conserver , auraient permis l'établissement des documents de synthèse dans le cas où la société continuait son activité. Sur le défaut de suivi juridique et notamment l'absence d'assemblée générale, il soutient que la société n'a pas duré suffisamment longtemps pour que se tiennent les assemblées générales obligatoires, arrêter les comptes annuels et clôturer un exercice. Sur les flux financiers, il explique que c'est en raison de l'interdiction de chéquier de la société EDB qu'il s'est trouvé contraint d'utiliser son compte personnel. Il ajoute que les sommes retirées du compte EDB vers son compte personnel l'ont été exclusivement dans l'intérêt de l'entreprise et qu'il ne s'est nullement enrichi, prenant en charge personnellement toutes les dépenses de la société EDB.

S'agissant des sanctions personnelles prononcées à son encontre, il soutient que les pièces versées aux débats excluent l'existence d'un quelconque enrichissement personnel au détriment de la société et de ses créanciers. Par ailleurs, il précise qu'il supporte déjà à titre personnel une grande partie du passif résultant des créanciers chirographaires notamment.

Il estime en conséquence il n'y a pas lieu de prononcer une faillite personnelle ou une interdiction de gérer à son encontre.

Sur l'action en comblement de passif

Au terme de l'article L. 624 – 03 , du code de commerce, lorsque le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que les dettes de la personne morale seront supportées, en tout ou en partie, avec ou sans solidarité, par tous les dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non, ou par certains d'entre eux.

En l'espèce, la carence comptable de M. B... est établie par l'absence de production des livres comptables obligatoires alors que l'exploitant n'est pas davantage en mesure de produire les pièces justificatives de nature à établir le détail et la réalité des recettes et des dépenses enregistrées globalement. Ainsi, il n'est versé au dossier d'appel aucun cahier de recettes et de dépenses ou brouillard d'écritures susceptible de permettre la reconstitution de la comptabilité.

Ainsi le défaut de tenue d'une comptabilité complète ou régulière s'analyse en une négligence constitutive d'une faute de gestion au sens de l'article 180 de la loi 85 – 98 du 25 janvier 1985.

Cette carence comptable suscite des interrogations sur les flux financiers de la société et a incontestablement contribué à l'aggravation du passif en ce que la poursuite de l'activité sans suivi comptable n'a pas permis à la direction de prendre les décisions s'imposant au quotidien, ni de prendre dans les délais nécessaires les mesures de restructuration de l'exploitation ou d'anticiper la cessation de fait de l'activité.

Il y a lieu en conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné M. Guito B... à supporter l'insuffisance d' actif de la SARL EDB , tout en ramenant cette condamnation à 40 000 € pour tenir compte du protocole d'accord en date du 16 août 2006 intervenu entre Me Christophe Y... d'une part et M. Gouindinpony C... d'autre part, ramenant cette contribution à 40 000 €.

Sur la faillite personnelle

Si les documents, extraits de compte, factures et quittances versées aux débats ne paraissent pas susceptibles de permettre une reconstitution comptable des flux financiers et de l'utilisation des fonds de la SARL EDB par M. Guito B... , il n'est pas démontré que celui-ci se soit enrichi ou qu'il ait détourné des fonds sociaux à son usage personnel, en dépit de l'utilisation d'un compte personnel pour pallier l'interdiction bancaire frappant la SARL.

Il y a lieu par ailleurs de constater que ni le ministère public, ni le mandataire judiciaire n'ont sollicité que soit prononcée la faillite personnelle à l'encontre de l'intéressé, alors même que le rapport de clôture pour insuffisance d'actif du 27 juin 2007 ne fait état que d'une comptabilité mal tenue et d'une structure sociale surdimensionnée, sans référence aucune à d'éventuel détournements justifiant la faillite personnelle. Par ailleurs, le protocole d'accord signé en août 2006 entre Me Christophe Y... et M. B... et par lequel ce dernier accepte de contribuer au passif de la liquidation de la société à hauteur de 40 000 € a pour contrepartie un désistement du mandataire judiciaire de sa demande en comblement du passif ainsi que de sa demande de redressement judiciaire. Or, cet accord paraît peu compatible avec les sanctions personnelles prononcées par ailleurs par les premiers juges.

Il y a lieu en conséquence d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a prononcé la faillite personnelle pour une durée de 10 ans de M. Guito B..., avec les interdictions et déchéances corrélatives.

Par ces motifs

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort.

Déclare l'appel recevable.

Confirme la décision entreprise en ce qu'elle a condamné M. Guito B... à supporter l'insuffisance de l'actif de la SARL EDB, le montant initial étant ramené à hauteur de 40 000 € .

Infirme la décision entreprise en ce qu'elle a prononcé la faillite personnelle de M. Guito B... pour une durée de 10 ans assortis des interdictions et déchéances corrélatives.

Dit en conséquence n'y avoir lieu de prononcer à l'encontre de M. Guito B... l'une quelconque des sanctions personnelles prévues par les articles L. 625 – 2 et L. 625 – 8 du code de commerce.

Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur François CREZE, Président de Chambre, et par Mme Annick PICOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 07/00369
Date de la décision : 18/02/2008
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Responsabilité - Faillite et interdiction personnelle - Faillite personnelle - / JDF

Si les documents comptables versés aux débats sont insusceptibles de permettre une reconstitution comptable des flux financiers et de l'utilisation des fonds de la SARL par le débiteur, on ne saurait assimiler cette production à un défaut de comptabilité. Par ailleurs, ni son enrichissement personnel ni le détournement des fonds sociaux à son usage personnel ne sont pas démontrés et ce, en dépit de l'utilisation d'un compte personnel pour pallier l'interdiction bancaire frappant la SARL. Dès lors, la décision prononçant la faillite personnelle pour une durée de dix ans du débiteur, avec les interdictions et déchéances corrélatives n'est pas ju- stifiée


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2008-02-18;07.00369 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award