La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2007 | FRANCE | N°06/00828

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, Chambre commerciale, 03 décembre 2007, 06/00828


Chambre Commerciale

Arrêt No

R.G : 06/00828

LECHEVIN

C/

La SARL HADIMMO

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 03 DECEMBRE 2007

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE SAINT-DENIS en date du 17 MAI 2006 suivant déclaration d'appel en date du 12 JUIN 2006

rg no 05/282

APPELANTE :

Madame Nelly X... épouse Y...

Appt 60, - Résidence les Cytises

...

97400 SAINT-DENIS

Représentant : la SCP CANALE GAUTHIER ANTELME (avocats au barreau de SAINT-DEN

IS)

INTIMEE :

La SARL HADIMMO

...

97400 SAINT-DENIS

Représentant : Me Patrick Z... (avocat au barreau de SAINT-DENIS)

CLOTURE LE : 20 août 2007
...

Chambre Commerciale

Arrêt No

R.G : 06/00828

LECHEVIN

C/

La SARL HADIMMO

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 03 DECEMBRE 2007

Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE SAINT-DENIS en date du 17 MAI 2006 suivant déclaration d'appel en date du 12 JUIN 2006

rg no 05/282

APPELANTE :

Madame Nelly X... épouse Y...

Appt 60, - Résidence les Cytises

...

97400 SAINT-DENIS

Représentant : la SCP CANALE GAUTHIER ANTELME (avocats au barreau de SAINT-DENIS)

INTIMEE :

La SARL HADIMMO

...

97400 SAINT-DENIS

Représentant : Me Patrick Z... (avocat au barreau de SAINT-DENIS)

CLOTURE LE : 20 août 2007

DÉBATS : en application des dispositions des articles 785 et 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 Novembre 2007 devant Mr François CREZE, Président qui en a fait un rapport, assisté de Annick PICOT, Adjoint administratif faisant fonction de greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 03 Décembre 2007.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président : Monsieur François CREZE

Conseiller : Madame Gilberte PONY

Conseiller : Monsieur Yves BLOT

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 03 Décembre 2007.

Greffier : assisté de Annick PICOT, Adjoint administratif faisant fonction de greffier.

***************

Origine du litige

Mme Nelly Y... concluait le 09 juillet 1999 avec la SARL Hadimmo une convention dénommée : « contrat de mandat à statut d'agent commercial ». En exécution de ce contrat , elle était chargée de vendre, louer et gérer des immeubles pour le compte de la société immobilière mandante à partir du 15 juillet 1999 et pour une durée indéterminée avec possibilité de résiliation par l'une ou l'autre des parties au moyen d'une simple lettre recommandée.

Dans le courant de l'année 2003, les relations entre les deux parties se détérioraient et Mme Y... contestait le calcul de ses commissions qu'elle estimait minorées par la SARL Hadimmo.

Le 09 décembre 2003, Mme Y... faisait délivrer à la société Hadimmo une assignation en référé aux fins d'obtenir la communication, pour certaines ventes expressément énumérées, des mandats de vente et des conventions de commercialisation conclues entre la SARL Hadimmo et différents promoteurs immobiliers, avec mention du montant de la commission versée par le promoteur immobilier à la SARL Hadimmo, outre les factures établies par celle-ci au nom des promoteurs en vue du règlement de sa commission.

Par ordonnance du 28 janvier 2004, le juge des référés commerciaux donnait acte à Mme Y... de son désistement d'instance, constatait l'extinction de l'instance et sa radiation du rôle des affaires en cours.

Suivant acte du 27 janvier 2005, Mme A... faisait assigner la SARL Hadimmo devant le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis aux fins de l'entendre condamner à lui payer l'arriéré des commissions qui lui sont dues ainsi qu'une indemnité compensatrice par application de l'article L. 134 – 12 du code de commerce liée à sa qualité d'agent commercial ou à défaut au mandat d'intérêt commun. Elle reprochait à la SARL Hadimmo un comportement déloyal avec dénigrement de sa personne, détournement de clientèle et volonté d'éviction, le tout entraînant la rupture contractuelle aux torts exclusifs du mandant.

En réplique, la société Hadimmo concluait à la nullité du contrat en raison de l'incompatibilité entre le statut d'agent commercial et la fonction de négociateur immobilier, avec pour conséquence l'absence de droit pour Mme Y... à une indemnité compensatrice. Elle soutenait que la rupture des relations professionnelles entre les parties incombait exclusivement à Mme Michel qui disposerait de tous les éléments nécessaires au calcul de ses commissions.

État de la procédure

Par jugement du 17 mai 2006, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion déboutait Mme Nelly Y... de toute ses demandes , et la société Hadimmo de ses prétentions reconventionnelles.

Suivant déclaration du 12 juin 2006, Mme Nelly Y... interjetait appel de cette décision.

Par conclusions récapitulatives du 16 avril 2007, elle demande à la cour au visa des articles 1134, 1147, 1184 et 1984 du code civil d'infirmer la décision entreprise, de requalifier le contrat du 09 juillet 1999 en mandat d'intérêt commun, et de condamner la société Hadimmo à lui verser :

la somme de 7 573,20 €à titre de rappel de commission (promotion Royal Palmier)

la somme de 11 503,19 €à titre de dommages et intérêts pour le préjudice résultant de l'impossibilité de vérifier le calcul des commissions qui lui sont dues sur les promotions Mathilde, Amazonite, et Alexandrite.

la somme de 9 604 €à titre de dommages et intérêts pour perte d'une chance de réaliser un gain sur la vente d'un appartement.

la somme de 98 927 €à titre d'indemnité compensatrice pour rupture du contrat d'agent commercial avec résiliation prenant effet à compter du 06 octobre 2003.

Elle sollicite en outre la condamnation de la société Hadimmo à lui verser la somme de 6 000€ en application de l'articles 700 du nouveau code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 18 juin 2007, la société SARL Hadimmo demande à la cour, au visa de l'article L. 134 – 12 et suivants du code de commerce, 1147 du code civil et 9 du code de procédure civile, de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a retenu l'existence d'un mandat d'intérêt commun, de prononcer la nullité du contrat d'agent commercial liant les parties, de dire et juger qu'il n'y a pas mandat d'intérêt commun entre les parties, subsidiairement de rejeter des débats les pièces numérotées 25 et 26 1 126 –4 produites par Mme Y... en violation de l'article 9 du nouveau code de procédure civile, d'imputer à Mme Y... la rupture des relations contractuelles, de constater que la société Hadimmo n'a pas manqué à son devoir de loyauté et d'information envers Mme Y..., de rejeter toutes les demandes de cette dernière et de la condamner à lui verser la somme de 3000 €au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 20 août 2007 , et l'affaire renvoyée pour être plaidée le 05 novembre 2007.

Sur quoi, la cour

L'appel interjeté dans les délais et forme légale sera déclaré recevable.

La cour se réfère au jugement entrepris et aux écritures récapitulatives pour plus ample exposé des faits , prétentions et moyens des parties.

Sur la qualification du contrat

L'article L. 134 – 01 du code de commerce qui définit l'agent commercial comme un mandataire indépendant chargé de négocier et conclure des contrats de vente, d'achat ,de location ou de prestation de services stipule dans son deuxième alinéa que « ne relèvent pas des dispositions du présent chapitre les agents dont la mission de représentation s'exerce dans le cadre d'activités économiques qui font l'objet de dispositions législatives particulières » parmi lesquels les agents immobiliers, lesquels sont soumis aux règles de la loi du 2 janvier 1970 dite loi Hoguet. Il s'ensuit que le contrat du 9 juillet 1999 improprement qualifié de « contrat de mandat à statut d'agent commercial » doit être requalifié en contrat de mandat de droit commun selon les dispositions de la convention, le débat portant également sur la qualification de mandat d'intérêt commun soutenue par Mme Y....

Sur ce dernier point, si la convention du 9 juillet 1999 présente certaines caractéristiques du mandat d'intérêt commun en ce qu'il existe un lien entre la rémunération du mandataire et les profits du mandant (Mme Y... doit percevoir une commission de 30 à 50 % du montant de la commission perçue par la société Hadimmo), on y retrouve aucune des autres caractéristiques nécessaires : ainsi, chaque partie conserve sa propre clientèle sans qu'il y ait développement d'une clientèle commune; il n'y a pas d'exclusivité réciproque (aux termes de l'article 2 du contrat, Mme Y... conserve la faculté d'effectuer des opérations pour son compte personnel, de travailler pour tout autre établissement, et n'est pas tenue d'exercer sa profession de façon exclusive ; elle peut encore faire toutes opérations commerciales pour son compte personnel ou pour le compte de tiers en dehors de la convention.) Enfin, l'article 5 du contrat prévoit que la résiliation peut intervenir à tout instant à l'initiative de l'une ou l'autre partie par l'envoi d'une simple lettre recommandée, alors qu' un mandat d'intérêt commun ne peut être révoqué que du consentement mutuel des parties , ou pour une cause légitime reconnue en justice.

Il s'ensuit que la qualification de mandat d'intérêt commun est directement contraire à la volonté exprimée par les parties dans la convention du 9 juillet 1999, et qu'elle ne peut être retenue par l'application de l'article 1134 du Code civil.

Ainsi, les droits des parties, les fautes contractuelles éventuellement commises, et les dommages intérêts pouvant en découler le cas échéant , doivent être examinés au regard des seules règles conventionnelles définies dans la convention du 9 juillet 1999.

Sur le rappel de commission .

Mme Y... a procédé pour le compte de son mandant à la vente de huit appartements situés dans la résidence Royal Palmier. Il n'est pas contesté que les commissions perçues par elle l'ont été sur la base de 6 % des commissions réglées à la société Hadimmo.

Or, les documents versés au débat par Mme Y... (factures émises par la société Hadimmo) ainsi que la convention de commercialisation de la résidence « Royal Palmier » établissent que la commission du mandant a été calculée sur la base de 8 % du prix de vente et non de 6% auquel s'ajouteraient des frais de publicité pour lesquels aucun justificatif n'a été fourni.

Il n'est pas établi par ailleurs que la mandataire se soit procuré les documents versés au débat par des moyens déloyaux, et il n'y a pas lieu de rejeter des débats les pièces produites et contradictoirement discutées.

Il y a lieu en conséquence de faire droit au rappel de commission selon le calcul opéré par l'appelante et non contesté par la partie adverse. Ce calcul fait apparaître que Mme Y... aurait dû percevoir la somme de 25 478,40 €au lieu de 17 905,20 €, soit une différence de 7 573,20 €en sa faveur.

Sur les dommages et intérêts.

S'agissant des ventes réalisées par elle dans les résidences Mathilde, Alexandrite et Amazonite, Mme Y... formule une demande de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 11 503,19€ représentant un rappel de commissions supposé lui être dû si celles ci avaient été calculées sur la base d'un pourcentage de 8 % des ventes réalisées(au lieu de 6 %).

Pour justifier cette demande de dommages-intérêts, Mme Y... argue en premier lieu de la minoration des commissions perçues par la société Hadimmo sur la promotion Royal Palmier et d'autre part sur l'impossibilité pour elle de vérifier le calcul des commissions réellement perçues par son mandant, ce dernier n'ayant pas versé aux débats les conventions de commercialisation conclues avec les promoteurs, ni les factures portant demande de règlement de la commission.

Cependant, la preuve apportée dans le cas de la résidence Royale Palmier n'est pas nécessairement transposable aux autres résidences, et Mme Y... a elle-même renoncé à obtenir les documents nécessaires à sa démonstration en se désistant de son action en référé du 9 décembre 2003, laquelle avait précisément pour but d'obtenir la communication des mandats de vente et convention de commercialisation conclues entre la société Hadimmo et les différents promoteurs immobiliers , outre les factures établies au nom des promoteurs en vue du règlement de la commission.

Il s'ensuit que Mme Y... ne justifie pas du préjudice qu'elle invoque de ce chef , et que cette demande sera rejetée.

Sur la perte d'une chance.

Il résulte d'une attestation régulière de Mme Dominique C... en date du 03 décembre 2003 que celle-ci était intéressée par l'acquisition d'un appartement dans la résidence Royal Palmier à Saint-Denis , et qu'elle avait pris contact dans un premier temps avec Mme Michel qui lui avait indiqué qu'elle serait prioritaire au cas ou la vente pourrait avoir lieu . Ce témoin précisait qu'elle avait par la suite été contactée par M. D... de l'agence Hadimmo qui lui avait fait signer le contrat de réservation en la priant de ne pas en parler à Mme Y....

Or d'une part, rien ne permet de douter de la sincérité de cette attestation et d'autre part, diverses attestations versées aux débats montrent que le directeur et les agents de la société Hadimmo ont essayé d'évincer Mme Y... d'autres ventes immobilières (attestations Gemri; Talon ; Boussard ; Planet ; Y...).

Or, il n'est pas contesté que cet appartement numéroté B0 44 a été vendu à Mme C... pour la somme de 320 140 €sur laquelle Mme Y... aurait perçu une commission de 3 % sur le prix de vente, soit la somme de 9 604 €.

Il y a lieu en conséquence de condamner la société Hadimmo à verser à Mme Michel la somme susdite en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de son éviction , et alors qu'il n'avait pas été mis fin au mandat par lettre recommandée conformément à la convention du 9 juillet 1999.

Sur l'indemnité compensatrice.

Ne pouvant se prévaloir de la qualité d'agent commercial, Mme Nelly Y... ne peut prétendre au titre de l'article L. 132 – 12 du code de commerce au versement d'une indemnité compensatrice liée à la rupture des relations contractuelles avec son mandant.

Il s'ensuit que par adoption des motifs les premiers juges, il y a lieu de rejeter cette demande.

Les demandes de dommages-intérêts fondées sur l'existence d'un mandat d'intérêt commun ne peuvent davantage prospérer, pas plus que celles qui reposent sur les conditions de la rupture alors même que la convention stipule que " le mandat est susceptible d'être résilié à tout instant par l'une ou l'autre des parties par l'envoi d'une simple lettre recommandée."

Sur les frais irrépétibles d'instance

Il paraît équitable de décharger Mme Nelly Y... des frais exposés par elle en cause d'appel à hauteur de la somme de 2000 €.

Par ces motifs

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort.

Déclare l'appel recevable.

Infirme le jugement entrepris.

Condamne la SARL Hadimmo à payer à Mme Nelly Y... :

la somme de 7 573,20 €à titre de rappel de commission.

la somme de 9 604 €à titre de dommages et intérêts.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Condamne la SARL Hadimmo à payer à Mme Nelly Y... la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du NC PC.

Condamne la SARL Hadimmo aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur François CREZE Président, et par Madame Annick PICOT , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER signé LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 06/00828
Date de la décision : 03/12/2007
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

AGENT IMMOBILIER - Mandat - Validité - Conditions - / JDF

Les agents immobiliers ayant une mission de représentation ne sont pas soumis aux dispositions du Code de commerce régissant la profession d'agent commercial. Dès lors, une convention prévoyant la vente, la location et la gestion d'immeubles pour le compte de la société immobilière improprement qualifiée de « contrat de mandat à statut d'agent commercial » doit être requalifiée en contrat de mandat de droit commun. Par ailleurs, nonobstant le lien entre la rémunération du mandataire et les profits du mandant, la convention prévoyant la vente, la location et la gestion d'immeubles pour le compte de la société immobilière ne peut être qualifiée de mandat d'intérêt commun en ce qu'on n'y retrouve aucune des autres caractéristiques nécessaires de ce contrat. En effet, la conservation en l'espèce par chaque partie de sa clientèle propre, l'absence d'exclusivité réciproque et la résiliation à tout moment à l'initiative de l'une ou l'autre partie sont autant d'élements qui démontrent que la qualification de mandat d'intérêt commun est directement contraire à la volonté des parties


Références :

Décision attaquée : Tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion, 12 juin 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2007-12-03;06.00828 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award