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17/08/2024 | FRANCE | N°24/02968

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre des etrangers, 17 août 2024, 24/02968


N° RG 24/02968 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JXVS





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 17 AOUT 2024









Christine FOUCHER-GROS, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,



Assistée de Solange SANNIER, greffier ;



Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile ;



Vu l'arrêté du préfet de Loire-Atlantique en date du 13 juin 2024 portant obligation de quitter le territoire français p...

N° RG 24/02968 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JXVS

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 17 AOUT 2024

Christine FOUCHER-GROS, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,

Assistée de Solange SANNIER, greffier ;

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du préfet de Loire-Atlantique en date du 13 juin 2024 portant obligation de quitter le territoire français pour M. [C] [O] né le 3 août 2003 à [Localité 1] (Algerie) de nationalité algérienne ;

Vu l'arrêté du préfet de Loire-Atlantique en date du 11 août 2024 de placement en rétention administrative de M. [C] [O] ayant pris effet le 11 août 2024 à 14h55 ;

Vu la requête du préfet de Loire-Atlantique tendant à voir prolonger pour une durée de vingt six jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise à l'égard de

M. [C] [O] ;

Vu l'ordonnance rendue le 15 août 2024 à 16h57 par le juge des libertés et de la détention de Rouen, déclarant la décision de placement en rétention prononcée à l'encontre de M. [C] [O] régulière, et ordonnant en conséquence son maintien en rétention pour une durée de vingt six jours à compter du 15 août 2024 à 14h55 jusqu'au 10 septembre 2024 à la même heure ;

Vu l'appel interjeté par M. [C] [O], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 16 août 2024 à 13h04 ;

Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :

- aux services du directeur du centre de rétention de [Localité 3],

- à l'intéressé,

- au préfet de Loire-Atlantique,

- à Me Bilal YOUSFI, avocat au barreau de Rouen, avocat choisi,

- à M. [Z], interprète en langue arabe ;

Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 3] ;

Vu la demande de comparution présentée par M. [C] [O] ;

Vu l'avis au ministère public ;

Vu les débats en audience publique, en présence de M. [Z], interprète en langue arabe, expert assermenté, en l'absence du préfet de Loire-Atlantique et du ministère public ;

Vu la comparution de M. [C] [O] par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 3] ;

Me Bilal YOUSFI, avocat au barreau de Rouen, étant présent au palais de justice ;

Vu les réquisitions écrites du ministère public ;

Vu les pièces transmises par le Préfet de la Loire Atlantique ;

Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;

L'appelant et son conseil ayant été entendus ;

****

Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

****

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS

Le 13 juin 2024, le Préfet de la Loire Atlantique a pris à l'encontre de M. [O] un arrêté emportant obligation de quitter le territoire français assortie d'une interdiction de retour d'une durée de deux années.

Monsieur [O] a été interpellé le 10 août 2024 à [Localité 2], cours des 50 otages.

Le 11 août 2024 le Préfet de la Loire Atlantique a pris à son encontre un arrêté de placement en rétention administrative.

Le 14 août 2024, le Préfet de la Loire Atlantique a saisi le juge des libertés et de la détention d'une mesure de prolongation de la rétention administrative.

Par ordonnance du 15 août 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rouen a déclaré la procédure régulière et fait droit à la requête du préfet de la Loire Atlantique.

Mr [O] a interjeté appel de cette décision le 16 août 2024.

Au soutien de son appel, il fait valoir que :

- Il ne peut comparaître par un moyen de visioconférence ;

- La requête en prolongation est irrecevable ;

- Le contrôle d'identité mebnant à son interpellation est irrégulier ;

- L'administration n'a pas effectué les diligences suffisantes ;

- Il présente les garanties permettant de l'assigner à résidence.

MOTIVATION DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel

Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par M. [C] [O] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 15 août 2024 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.

Sur le fond

Sur le recours à la visio-conférence :

Le moyen de M. [O] ne soutient pas que le procédé de visio conférence a été uilisé par le premier juge mais s'oppose à ce qu'il soit utilisé par la juridiction d'appel.

Aux termes de l'article L 743-7 du ceseda : 'Afin d'assurer une bonne administration de la justice et de permettre à l'étranger de présenter ses explications, l'audience se tient dans la salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention.

Le juge des libertés et de la détention peut toutefois siéger au tribunal judiciaire dans le ressort duquel se situe le lieu de rétention. Les deux salles d'audience sont alors ouvertes au public et reliées entre elles en direct par un moyen de communication audiovisuelle garantissant la confidentialité et la qualité de la transmission.

Dans le cas mentionné au deuxième alinéa, le conseil de l'étranger, de même que le représentant de l'administration, peut assister à l'audience dans l'une ou l'autre salle. Il a le droit de s'entretenir avec son client de manière confidentielle. Une copie de l'intégralité du dossier est mise à la disposition du requérant. Un procès-verbal attestant de la conformité des opérations effectuées au présent article est établi dans chacune des salles d'audience.

Le juge des libertés et de la détention peut, de sa propre initiative ou sur demande des parties, suspendre l'audience lorsqu'il constate que la qualité de la retransmission ne permet pas à l'étranger ou à son conseil de présenter ses explications dans des conditions garantissant une bonne administration de la justice.

Par dérogation au premier alinéa, lorsqu'aucune salle n'a été spécialement aménagée à proximité immédiate ou en cas d'indisponibilité de la salle, l'audience se tient au siège du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se situe le lieu de rétention.

Par dérogation au présent article, lorsqu'est prévue une compétence territoriale dérogatoire à celle fixée par voie réglementaire, l'audience se tient au siège du tribunal judiciaire auquel appartient le juge des libertés et de la détention compétent. Le juge peut toutefois décider que l'audience se déroule avec l'utilisation de moyens de communication audiovisuelle, dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas.'

En premier lieu, M. [O] soutient que des proches de M. [O] pourraient craindre de se rendre au lieu de rétention. Nénamoins, il ne justifie ni même n'allègue que ce centre n'est pas ouvert au public souhaitant assister à l'audience.

En second lieu,les dispositions précitées ne font pas obstacle, à défaut de salle attribuée au ministère de la justice à proximité du lieu de rétention, à ce que l'utilisation d'un procédé de visio conférence, le juge d'appel siégeant à la cour d'appel dans le ressort duquel se situent le tribunal du juge ayant statué en première instance, et au surplus, le lieu de rétention.

Il n'y a pas lieu en conséquence, de lever la mesure de rétention à défaut de présence du retenu dans les locaux de la cour d'appel.

Sur l'irrecevabilité de la requête en prolongation :

Monsieur [O] soutient qu'entre la notification de la décision de rétention administrative et l'arrivée au centre de rétention de [Localité 3], aucun acte ne permet de vérifier si ses droits ont été respectés.

L'arrêté de placement en rétention administrative a été notifié à M.[O] ainsi que ses droits le 11 août 2024 à 14h55 alors qu'il se trouvait à [Localité 2]. Ses droits dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitenciaire lui ont été notifiés dans les mêmes circonstances de temps et de lieu. M. [O] est arrivé au centre de rétention de [Localité 3] (Seine Maritime) le 11 août 2024 à 19h10, ce qui correspond à la durée de trajet (377 km).

Cette durée ne pouvant être qualifiée d'excessive et aucune disposition n'imposant qu'il soit dressé un acte relatant d'éventuelles demandes du retenu entre la notification de ses droits et son arrivée au centre de rétention. M. [O] ne peut utilement invoquer qu'il a été privé de l'exercice de ses droits.

Sur la régularité de la mesure de placement en rétention :

Aux termes de l'article 78-2 du code de procédure pénale : « Les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux article 20 et 21-1°peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l'égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner :

-qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ;

-ou qu'elle se prépare à commettre un crime ou un délit ;

-ou qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou de délit ;

-ou qu'elle a violé les obligations ou interdictions auxquelles elle est soumise dans le cadre d'un contrôle judiciaire, d'une mesure d'assignation à résidence avec surveillance électronique, d'une peine ou d'une mesure suivie par le juge de l'application des peines ;

-ou qu'elle fait l'objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire.

Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite d'infractions qu'il précise, l'identité de toute personne peut être également contrôlée, selon les mêmes modalités, dans les lieux et pour une période de temps déterminés par ce magistrat. Le fait que le contrôle d'identité révèle des infractions autres que celles visées dans les réquisitions du procureur de la République ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. »

Monsieur [O] s'est fait interpeller le 10 août 2024 à [Localité 2], cours des 50 otages, les services de police précisant agir conformément aux dispositions de la réquisition n°5701/2024 du Procureur de la République de Nantes. La période de temps déterminée par le procureur de la République ne ressort pas de la copie des réquisitions jointes à la procédure. Mais en tout état de cause, M. [O] a été interpellé alors qu'à la vue des policiers, il s'est retourné et s'est éloigné en jetant des regards dans leur direction. Ce comportement, qui caractérise une tentative d'échapper au contrôle, était à lui seul suffisant pour laisser soupçonner de façon plausible que l'intéressé se trouvait dans l'une des situations visées à l'article 78-2 du code de procédure pénale. Il en résulte que même à supposer que les policiers aient agi de leur initiative, ce contrôle était justifié et n'a pas entaché la procédure d'une irrégularité.

Sur les diligences de l'administration :

Le Préfet de la Loire Atlantique justifie qu'il a, dès le 13 juin 2024, saisi les autorités consulaires algériennes aux fins d'obtention d'un laissez-passer et qu'il les a relancées le 12 août 2024. En outre, il a procédé, le 12 août 2024 à une demande de routing.Il a ainsi satisfait à sas obligations.

Sur l'erreur manifeste d'appréciation :

Monsieur [O] soutient qu'il présente des garanties suffisantes pour être assigné à résidence.

Aux termes de l'article L731-1 du ceseda : 'L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :

1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;

2° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;

3° L'étranger doit être éloigné pour la mise en 'uvre d'une décision prise par un autre État, en application de l'article L. 615-1 ;

4° L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ;

5° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l'article L. 622-1 ;

6° L'étranger fait l'objet d'une décision d'expulsion ;

7° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ;

8° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction administrative du territoire français.

L'étranger qui, ayant été assigné à résidence en application du présent article, ou placé en rétention administrative en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2, n'a pas déféré à la décision dont il fait l'objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette décision est toujours exécutoire, peut être assigné à résidence sur le fondement du présent article.'

Aux termes de l'article L741-1 du même code : 'L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente'.

Outre que M. [O] a été interpellé alors qu'il détenait des substances classées comme psychotrope, il a déclaré aux services de police être sans domicile fixe, sans profession et sans ressources.

Ainsi, nonobstant l'attestation d'hébergement qu'il produit au soutien de son appel, il ne dispose pas des garanties permettant de l'assigner à résidence.

Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de l'autorité administrative sera rejetée ainsi que la demande présentée par M.[O].

L'ordonnance entreprise sera confirmée en toute ses dispositions.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,

Déclare recevable l'appel interjeté par M. [C] [O] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 15 août 2024 par le Juge des libertés et de la détention de Rouen ordonnant son maintien en rétention pour une durée de vingt six jours,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.

Rejette la demande de M. [O] tendant à ce qu'il soit assigné à résidence.

Fait à Rouen, le 17 août 2024 à 14 h 55

Le greffier, La présidente de chambre,

NOTIFICATION

La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre des etrangers
Numéro d'arrêt : 24/02968
Date de la décision : 17/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-17;24.02968 ?
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