N° RG 24/02656 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JXAH
COUR D'APPEL DE ROUEN
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 24 JUILLET 2024
Nous, Véronique DE MASCUREAU, conseillère à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,
Assistée de Mme RIFFAULT, greffière ;
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la requête du Préfet du Cher tendant à voir prolonger pour une durée supplémentaire de quinze jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise le 22 mai 2024 à l'égard de Monsieur [F] [J] né le 10 décembre 1992 à [Localité 1] (Algérie) de nationalité Algérienne ;
Vu l'ordonnance rendue le 22 juillet 2024 à 14 heures 10 par le juge des libertés et de la détention de Rouen autorisant le maintien en rétention de Monsieur [F] [J] pour une durée supplémentaire de quinze jours à compter du 22 juillet 2024 à 8 heures 30 jusqu'au 06 août 2024 à la même heure ;
Vu l'appel interjeté par Monsieur [F] [J], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 23 juillet 2024 à 12 h 05 ;
Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :
- aux services du directeur du centre de rétention de [Localité 2],
- à l'intéressé,
- au Préfet du Cher,
- à Me Ernestine Marianne NJEM EYOUM, avocat au barreau de ROUEN, de permanence,
- à M. [K] [E], interprète en langue arabe ;
Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2] ;
Vu la demande de comparution présentée par Monsieur [F] [J];
Vu l'avis au ministère public ;
Vu les débats en audience publique, en présence de M. [K] [E], interprète en langue arabe, expert assermenté, en l'absence du PREFET DU CHER et du ministère public ;
Vu la comparution de Monsieur [F] [J] par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2];
Me Véronique PARAISO, avocat au barreau de ROUEN étant présent au palais de justice;
Vu les réquisitions écrites du ministère public ;
Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;
L'appelant et son conseil ayant été entendus ;
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Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS
Monsieur [F] [J] a été placé en rétention administrative le 23 mai 2024. Une première ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rouen en date du 25 mai 2024 a autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours, ordonnance confirmée par décision de la Cour d'Appel du 27 mai 2024.
Une seconde ordonnance du juge des libertés et de la détention du 22 juin 2024 a autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de trente jours supplémentaires, décision confirmée par décision de la Cour d'Appel du 25 juin 2024.
Saisi d'une requête du Préfet du Cher aux fins de troisième prolongation de la rétention administrative de Monsieur [F] [J], par ordonnance en date du 22 juillet 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rouen a autorisé la prolongation du maintien en rétention de Monsieur [F] [J] pour une durée supplémentaire de 15 jours à compter du 22 juillet 2024 à 8 h 30, soit jusqu'au 6 août 2024 à la même heure, décision dont l'intéressé a interjeté appel.
A l'audience, Monsieur [F] [J] confirme qu'il est de nationalité algérienne et n'est en possession d'aucun document d'identité ni de voyage. Il indique qu'il n'a pas pu aller au consulat car il devait voir le médecin et qu'en tout état de cause, d'autres ressortissants algériens lui avaient dit que le consul n'était pas là. Son conseil sollicite l'infirmation de la décision attaquée. Elle reprend le moyen soulevé dans sa déclararion d'appel, à savoir la violation de l'article L 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soutenant que le refus de Monsieur [F] [J] de se rendre au consulat n'était pas volontaire mais relevait de circonstances indépendantes de sa volonté puisqu'il était souffrant.
MOTIVATION DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel
Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par Monsieur [F] [J] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 22 Juillet 2024 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.
Sur le fond
D'après l'article L 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours.
En l'espèce, il résulte des éléments du dossier et des débats que dès le 23 mai 2024, jour du placement en rétention de Monsieur [F] [J], le préfet du Cher a sollicité auprès des autorités consulaires algériennes la délivrance d'un laissez-passer. Le 27 mai, ces dernières l'ont invité à prendre les dispositions nécessaires pour présenter l'intéressé aux auditions consulaires qui se tiennent chaque mercredi au centre de rétention administration de [Localité 4].
Saisie à cette fin dès le 3 juin 2024 par la préfecture du Cher, une date d'audition consulaire a été délivrée à Monsieur [F] [J] le 17 juillet 2024 à 11 heures, première date utile.
Toutefois, il est établi par les pièces du dossier que le 17 juillet 2024 à 8 h 40, Monsieur [F] [J] a refusé catégoriquement son transfert pour se rendre à cette audition consulaire, l'intéressé indiquant qu'il devait voir un médecin ou une infirmère. Informé par le gardien de la paix que son refus constituait un refus de se soumettre à une mesure d'éloignement prévu à l'article L 824-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il encourait à ce titre une peine d'emprisonnement, Monsieur [F] [J] a persisté dans son refus.
Au vu de ce refus, le Préfet du Cher a, le jour même, sollicité un entretien téléphonique, sans qu'aucune suite ne soit donnée à sa demande, puis une autre date de présentation, laquelle pourrait être le 7 août.
Si aujourd'hui devant la Cour, Monsieur [F] [J] ne conteste pas son refus de se rendre au rendez vous consulaire mais soutient que ce refus n'était pas volontaire mais résultait de circonstances médicales indépendantes de sa volonté, force est de constater qu'aucun élément ne vient accréditer l'hypothèse d'un état de santé de Monsieur [F] [J] incompatible avec son transfert et son audition. Il convient en outre de relever que ses explications sur cette non présentation à l'audition consulaire n'ont cessé de varier puisque devant le premier juge, il a affirmé avoir été conduit à [Localité 3] le 17 juillet et que devant la Cour, après avoir invoqué des motifs médicaux, il a expliqué que cela ne servait à rien d'y aller puisqu'il savait par d'autres ressortissants algériens que le consul n'était pas là.
Il résulte de ce qui précède que non seulement le Préfet du Cher a effectué les diligences nécessaires en vue du départ de l'intéressé mais également que Monsieur [F] [J] a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement en refusant de se présenter au rendez vous consulaire en vue de la délivrance d'un laissez-passer.
En conséquence, la décision attaquée qui a fait droit à la demande de prolongation du maintien en rétention administrative de Monsieur [F] [J] doit être confirmée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel interjeté par Monsieur [F] [J] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 22 Juillet 2024 par le juge des libertés et de la détention de Rouen, prolongeant la mesure de rétention administrative le concernant pour une durée supplémentaire de quinze jours;
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.
Fait à Rouen, le 24 juillet 2024 à 11 h 45
LE GREFFIER, LA CONSEILLERE,
NOTIFICATION
La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.