La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2024 | FRANCE | N°24/02056

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre des etrangers, 12 juin 2024, 24/02056


N° RG 24/02056 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JVXJ





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





ORDONNANCE DU 12 JUIN 2024









Mariane ALVARADE, Présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,



Assistée de Marion DEVELET, Greffier ;



Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile ;



Vu l'arrêté du Préfet du Nord en date du 8 juin 2024 portant obligation de quitter le territoire français pour Madame [P] [D]...

N° RG 24/02056 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JVXJ

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 12 JUIN 2024

Mariane ALVARADE, Présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,

Assistée de Marion DEVELET, Greffier ;

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du Préfet du Nord en date du 8 juin 2024 portant obligation de quitter le territoire français pour Madame [P] [D] [X] née le 06 Avril 1984 à [Localité 1] (PARAGUAY)

de nationalité PARAGUAYENNE ;

Vu l'arrêté du Préfet du Nord en date du 8 juin 2024 de placement en rétention administrative de Madame [P] [D] [X] ayant pris effet le 8 juin 2024 ;

Vu la requête de Madame [P] [D] [X] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative ;

Vu la requête du Préfet du Nord tendant à voir prolonger pour une durée de vingt huit jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise à l'égard de Madame [P] [D] [X] ;

Vu l'ordonnance rendue le 10 Juin 2024 à 11 heures 55 par le Juge des libertés et de la détention de ROUEN, déclarant la décision de placement en rétention prononcée à l'encontre de Madame [P] [D] [X] régulière, et ordonnant en conséquence son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours à compter du 10 juin 2024, 10 heures 10 jusqu'au 8 juillet 2024 à la même heure ;

Vu l'appel interjeté par Madame [P] [D] [X], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 11 juin 2024 à 10h26 ;

Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :

- aux services du directeur du centre de rétention de [Localité 2],

- à l'intéressé,

- au Ministère public

- à Me Gaëlle RIPOLL, avocat au barreau de ROUEN, de permanence,

- à M. Le Préfet du Nord ;

Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2] ;

Vu la demande de comparution présentée par Madame [P] [D] [X] ;

Vu l'avis au ministère public ;

Vu les débats en audience publique, en présence de XXXXX, qui a prêté serment - expert assermenté, en l'absence du Préfet du Nord et du ministère public ;

Vu la comparution de Madame [P] [D] [X] par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2] ;

Me Gaëlle RIPOLL, avocat au barreau de ROUEN, étant présente au palais de justice ;

Vu les réquisitions écrites du ministère public ;

Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;

L'appelant et son conseil ayant été entendus ;

****

Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

****

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS

Mme [P] [D] [X] a été placée en rétention administrative le 8 juin 2024.

Saisi d'une requête du préfet du Nord en prolongation de la rétention et d'une requête de Mme [P] [D] [X] contestant la mesure de rétention, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rouen a, par ordonnance du10 juin 2024 autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours, décision contre laquelle Mme [P] [D] [X] a formé un recours.

A l'appui de son recours, par la voie de son conseil, l'appelant allègue l'irrégularité de la procédure antérieure au placement en rétention tenant à la notification des droits en garde à vue, au recours à l'interprétariat, avis au procureur de la République, outre l'irrégularité de la procédure de placement en rétention, arguant d'une insuffisance de la motivation de l'arrêté de placement en rétention, d'une erreur de fait. Elle conclut également au défaut de diligencespour parvenir à son éloignement. Elle demande l'infirmation de l'ordonnance et sa remise en liberté.

A l'audience, son conseil a réitéré les moyens développés dans l'acte d'appel. Mme [P] [D] [X] a été entendue en ses observations.

Le préfet du Nord n'a pas formulé d'observations.

Le dossier a été communiqué au parquet général qui, par conclusions écrites non motivées du 11 juin 2024, requiert la confirmation de la décision.

MOTIVATION DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel

Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par Madame [P] [D] [X] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 10 Juin 2024 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.

A titre liminaire,

Le conseil de Mme [P] [D] [X] a indiqué avoir eu tardivement le complet dossier et ne pas avoir été en mesure d'assurer pleinement la défense de sa cliente.

La cour observe que l'entier dossier lui a été communiqué avant le début de l'audience, qu'il a donc pu en prendre connaissance et été en mesure de défendre l'intéressée, en développant des moyens et arguments, de sorte qu'il n'en est résulté aucune atteinte aux droits de la défense.

Sur la régularité de la procédure antérieure au placement en rétention

C'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il convient d'adopter que le premier juge a statué sur les moyens de nullité de la procédure soulevés devant lui et repris en appel, sans être plus amplement critiqués, sans qu'il soit nécessaire d'apporter quelque observation complémentaire, quant la notification des droits lors de la garde à vue, que celle-ci a été effectuée par le truchement d'un interprète physiquement présent de 15h20 à 15h30, le procureur ayant été avisé par courriel à 15h20, que l'arrêté portant obligation de quitter le territoire et placement rétention administrative lui a été notifiée au terme de sa garde à vue de 10 heures à 10h20, que les voies de recours et les droits afférents à la mesure de rétention ont été portés à sa connaissance de 10h20 à 10h40, et que le procureur de la République de Rouen a été avisé de son placement rétention à 10h16.

La procédure est par conséquent entachée d'aucune irrégularité. Y ajoutant, l'appelante allègue qu'aucun élément de la procédure ne permet d'attester la réalité de la falsification de son passeport autre que le procès-verbal du 7 juin 2024, et qu'elle n'a au demeurant fait l'objet d'aucune poursuite pour usage de faux, qu'il en résulte un détournement de procédure, que ce moyen de nullité tenant au détournement de procédure n'est toutefois pas recevable en appel.

Sur les moyens pris ensemble tenant à l'insuffisance de motivation de la décision de placement en rétention et à l'erreur de fait

Il résulte de l'article L.741-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la décision de placement en rétention est écrite et motivée.

Cette motivation doit retracer les motifs de fait et de droit qui ont guidé l'administration pour prendre sa décision, ce qui signifie que l'autorité administrative n'a pas à énoncer, puis à expliquer pourquoi elle a écarté les éléments favorables à une autre solution que la privation de liberté.

Pour autant, l'arrêté doit expliciter la raison ou les raisons pour lesquelles la personne a été placée en rétention au regard d'éléments factuels pertinents liés à la situation individuelle et personnelle de l'intéressé, et ce au jour où l'autorité administrative prend sa décision, sans avoir à relater avec exhaustivité l'intégralité des allégations de la personne concernée.

Par ailleurs, l'article L. 731-1 du code précité énonce l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable et l'article L. 733-4 que l'autorité administrative peut prescrire à l'étranger la remise de son passeport ou de tout document justificatif d'identité.

En l'espèce, la décision de placement en rétention cite les textes applicables à la situation de Mme [P] [D] [X] et énonce les circonstances qui justifient l'application de ces dispositions.

Elle a été édictée notamment sur la base des déclarations de l'intéressé et précise

qu'elle est entrée récemment en France,

qu'elle a présenté un passeport paraguayen, qui après vérification du service de police interpellacteur s'est avéré falsifié, que son entrée sur le territoire et par conséquent irrégulière,

qu'elle ne justifie pas se trouver dans l'un des cas dans lesquels un étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français,

qu'elle ne présente pas de garanties de représentation suffisantes puisqu'elle est sans-domicile-fixe,

qu'elle est dépourvue de document d'identité ou de voyage en cours de validité,

qu'elle a déclaré être séparée avec deux enfants à charge et n'établit pas ce être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où réside sa famille, qu'elle a quitté son pays d'origine pour des raisons touristiques et vouloir se rendre au Royaume-Uni, sans pour autant justifier qu'elle y est légalement admissible,

qu'elle n'allègue pas et en tout état de cause n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la Convention européenne des droits de l'homme en cas de retour dans son pays.

Ces circonstances correspondent aux éléments dont le préfet disposait au jour de sa décision.

En conséquence, Mme [P] [D] [X] a pu être regardée comme ne présentant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'elle se soustraie à l'obligation de quitter le territoire. C'est donc sans méconnaître le principe de proportionnalité et de nécessité et en procédant à un examen sérieux de sa situation que la décision de placement en rétention a été prise, n'étant retenue aucune erreur de fait, dès lors que le procès-verbal de police mentionne que les policiers ont effectué un examen approfondi du passeport qui était en possession de l'intéressé, constaté que celui-ci été falsifié par contrefaçon de la page d'identité, en ce qu'il comportait les anomalies suivantes : ' forte réaction de la page d'identité aux UV, impression au jet d'encre au lieu du laser, imitation des hologrammes'.

Le moyen, pris en ses deux branches, sera écarté.

Sur la demande de prolongation et sur les diligences

En application des dispositions de l'article L. 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration devant exercer toute diligence à cet effet.

Au cas d'espèce, il est établi en procédure que l'administration préfectorale a saisi les autorités paraguayennes d'une demande aux fins d'identification et de délivrance d'un laissez-passer consulaire le 8 juin 2024, soit dès le placement en rétention, celles-ci ayant également été informées du placement en rétention administrative de Mme [P] [D] [X], que parallèlement a été effectuée une demande de routing reçue le 8 juin 2024, ces diligences apparaissant suffisantes au regard des exigences textuelles, étant observé qu'aucun élément du dossier ne permet d'affirmer que les courriels adressés par la préfecture ne sont pas parvenus à leurs destinataires.

L'ordonnance déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a autorisé le maintien de la rétention administrative.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,

Déclare recevable l'appel interjeté par Mme [P] [D] [X] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 10 Juin 2024 par le Juge des libertés et de la détention de ROUEN ordonnant son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.

Fait à Rouen, le 12 Juin 2024 à 14h00

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,

NOTIFICATION

La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre des etrangers
Numéro d'arrêt : 24/02056
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;24.02056 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award