N° RG 23/02173 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JMXG
COUR D'APPEL DE ROUEN
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 26 JUIN 2023
Nous, Mariane ALVARADE, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées ;
Assistée de M. GEFFROY, greffier ;
Vu les articles L.740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la requête du Préfet de la Loire-Atlantique tendant à voir prolonger pour une durée supplémentaire de quinze jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise le 24 avril 2023 à l'égard de M. [N] [B], né le 06 Mars 1996 à [Localité 1], de nationalité algérienne ;
Vu l'ordonnance rendue le 24 juin 2023 à 13 heures 55 par le juge des libertés et de la détention de Rouen autorisant le maintien en rétention de M. [N] [B] pour une durée supplémentaire de quinze jours à compter du 23 juin 2023 à 09 heures 47 jusqu'au 08 juillet 2023 à la même heure ;
Vu l'appel interjeté par M. [N] [B], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 24 juin 2023 à 20 heures 37 ;
Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :
- aux services du directeur du centre de rétention de[Localité 2],
- à l'intéressé,
- au Préfet de la Loire Atlantique,
- à Mme Bérengère GRAVELOTTE, avocat au barreau de ROUEN, choisie en vertu de son droit de suite,
- à M. [F] [P] [I] interprète en langue arabe ;
Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2] ;
Vu la demande de comparution présentée par M. [N] [B] ;
Vu l'avis au ministère public ;
Vu les débats en audience publique, en présence de M. [F] [P] [I] interprète en langue arabe, expert assermenté, en l'absence du Préfet de la Loire-Atlantique et du ministère public ;
Vu la comparution de M. [N] [B] par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2];
Mme Bérengère GRAVELOTTE, avocat au barreau de ROUEN, étant présente au palais de justice ;
Vu les réquisitions écrites du ministère public ;
Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;
L'appelant et son conseil ayant été entendus ;
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Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS
M. [N] [B] a été placé en rétention le 24 avril 2023, une première ordonnance du juge des libertés et de la détention de Rouen en date du 26 avril 2023 a autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours, ordonnance confirmée par décision de la cour d'appel du 27 avril suivant.
Une seconde ordonnance du juge des libertés et de la détention du 24 mai 2023 a autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de trente jours supplémentaires, décision confirmée par décision de la cour d'appel du 25 mai 2023.
Le Préfet de la Loire-Atlantique a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande pour voir une troisième fois autoriser le maintien en rétention, et ce, pour quinze jours.
Le juge des libertés et de la détention a fait droit à cette requête par une ordonnance du 24 juin 2023 dont M. [N] [B] a interjeté appel.
A l'appui de son appel, l'appelant allègue l'irrecevabilité de la requête en prolongation en ce qu'il n'est pas justifié de l'empêchement simultané des autres délégataires et conclut à l'absence de diligences suffisantes en vue de la prolongation, la préfecture ne démontrant pas que le consulat délivrera le laissez-passer consulaire à bref délai.
Il demande l'infirmation de l'ordonnance et sa remise en liberté.
A l'audience, son conseil a réitéré les moyens développés dans l'acte d'appel. M. [N] [B] a été entendu en ses observations.
Le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas formulé d'observations.
Le dossier a été communiqué au parquet général qui, par conclusions écrites non motivées du 26 juin 2023, sollicite la confirmation de la décision.
MOTIVATION DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel
Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par M. [N] [B] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 24 juin 2023 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.
Sur la recevabilité de la requête
Il résulte des dispositions de l'article R. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.
Lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2.
Il appartient au juge judiciaire de vérifier la régularité de l'acte qui le saisit, y compris au regard de la qualité du signataire de la requête et de vérifier si les délégations de signature couvrent la compétence spécifique de la signature des actes tels qu'une requête de prolongation de la rétention.
Il ressort de l'arrêté préfectoral du 30 janvier 2023 portant délégation de signature, lequel est joint à la requête en prolongation, que Mme [Y] avait délégation de signature du préfet, sans qu'il y ait lieu à vérifier un quelconque empêchement puisque cette compétence n'est pas subsidiaire mais relève d'une délégation préalable, l'apposition de sa signature sur ladite requête présupposant l'empêchement des autres personnes ayant délégation par préférence, le retenu ne rapportant pas la preuve contraire ainsi que cela lui incombe en application de l'article 9 du code de procédure civile.
Le moyen d'irrecevabilité doit donc être écarté.
Sur la prolongation
Selon l'article L 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L.742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9 °de l'article L. 611-3 ou du 5° de l'article L. 631- 3
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3°La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application du huitième alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours.
Il résulte de ce texte que les conditions d'une troisième prolongation sont restrictives et vont au-delà de la simple exigence de réalisation de diligences par l'administration en vue de l'identification et de l'éloignement de l'étranger, il faut établir que l'une des circonstances de l'article L 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est caractérisée dans les quinze derniers jours de la précédente prolongation.
Au cas d'espèce, s'il n'est démontré ni une obstruction de M. [N] [B], ni une demande dilatoire de protection ou d'asile qu'il aurait formée, comme justement relevé par le premier juge, l'intéressé a été reconnu par le consulat d'Algérie le 6 juin 2023, la préfecture produisant en outre un routing d'éloignement avec un vol à destination de l'Algérie pour le 4 juillet 2023, transmis au consulat le 22 juin 2023, de sorte qu'il est suffisamment justifié de la possibilité d'un éloignement à bref délai, peu important que le consulat d'Algérie n'ait pas spécifiquement précisé dans son courriel du 6 juin 2023 être dans l'attente d'un routing, alors qu'il a par ailleurs été informé de la réservation d'un vol.
L'ordonnance qui a fait droit à la demande de prolongation sera en conséquence confirmée.
Sur la demande au titre des frais irrépétibles
M. [N] [B] sollicite la condamnation du préfet au paiement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, avec distraction au profit de son conseil, sous réserve de renonciation à l'aide juridictionnelle.
Il ne sera pas fait droit à ladite demande, injustifiée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel interjeté par M. [N] [B] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 24 juin 2023 par le juge des libertés et de la détention de Rouen, prolongeant la mesure de rétention administrative le concernant pour une durée supplémentaire de quinze jours ;
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.
Rejette la demande au titre des frais irrépétibles.
Fait à Rouen, le 26 juin 2023 à 18 heures 45.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,
NOTIFICATION
La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.