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26/06/2023 | FRANCE | N°23/02172

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre des etrangers, 26 juin 2023, 23/02172


N° RG 23/02172 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JMXE





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





ORDONNANCE DU 26 JUIN 2023









Nous, Mariane ALVARADE, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées ;



Assistée de M. GEFFROY, greffier ;



Vu les articles L.740-1 et suivants du code de l'entrée et du séj

our des étrangers et du droit d'asile ;



Vu la requête du Préfet de la Loire-Atlantique tendant à voir prolonger pour une durée supplémentaire de trente jours la m...

N° RG 23/02172 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JMXE

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 26 JUIN 2023

Nous, Mariane ALVARADE, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées ;

Assistée de M. GEFFROY, greffier ;

Vu les articles L.740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la requête du Préfet de la Loire-Atlantique tendant à voir prolonger pour une durée supplémentaire de trente jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise le 24 mai 2023 à l'égard de M. [I] [S], né le 19 novembre 2000 à [Localité 4], de nationalité Algérienne ;

Vu l'ordonnance rendue le 24 juin 2023 à 13 heures 35 par le juge des libertés et de la détention de Rouen autorisant le maintien en rétention de M. [I] [S] pour une durée supplémentaire de trente jours à compter du 23 juin 2023 à 16 heures 15 jusqu'au 23 juillet 2023 à la même heure ;

Vu l'appel interjeté par M. [I] [S], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 24 juin 2023 à 20 heures 29 ;

Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :

- aux services du directeur du centre de rétention deOissel,

- à l'intéressé,

- au Préfet de la Loire-Atlantique,

- à Mme Bérengère GRAVELOTTE, avocat au barreau de ROUEN, choisie en vertu de son droit de suite,

- à M. [G] [W] [M], interprète en langue arabe ;

Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 3] ;

Vu la demande de comparution présentée par M. [I] [S] ;

Vu l'avis au ministère public ;

Vu les débats en audience publique, en présence de M. [G] [W] [M] interprète en langue arabe, expert assermenté, en l'absence du Préfet de la Loire Atlantique et du ministère public ;

Vu la comparution de M. [I] [S] par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 3] ;

Mme Bérengère GRAVELOTTE, avocat au barreau de ROUEN, étant présente au palais de justice ;

Vu les réquisitions écrites du ministère public ;

Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;

L'appelant et son conseil ayant été entendus ;

****

Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

****

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS

M. [I] [S] a été placé en rétention le 24 mai 2023. Une première ordonnance du juge des libertés et de la détention de Rouen en date du 27 mai 2023 a autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours, ordonnance confirmée par décision de la cour d'appel du 1er juin 2023.

Une seconde ordonnance du juge des libertés et de la détention du 24 juin 2023 a autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de trente jours supplémentaires, décision contre laquelle M. [I] [S] a formé un recours.

A l'appui de son appel, l'appelant allègue l'irrecevabilité de la requête en prolongation en ce qu'il n'est pas justifié de l'empêchement simultané des autres délégataires, l'incompatibilité de son état de santé avec la mesure de rétention administrative. Il conclut à l'absence de diligences suffisantes en vue de la prolongation, en ce qu'il n'est pas démontré que l'impossibilité d'exécuter la mesure d'éloignement résulte de manoeuvres dilatoires de sa part, du défaut de délivrance ou la délivrance tardive d'un laissez-passer consulaire ou encore de l'absence de moyens de transport.

Il demande l'infirmation de l'ordonnance et sa remise en liberté.

A l'audience, son conseil a réitéré les moyens développés dans l'acte d'appel. M. [I] [S] a été entendu en ses observations.

Le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas formulé demande la confirmation de l'ordonnance.

Le dossier a été communiqué au parquet général qui, par conclusions écrites non motivées du 26 juin 2023, sollicite la confirmation de la décision.

MOTIVATION DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel

Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par M. [I] [S] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 24 juin 2023 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.

Sur la recevabilité de la requête en prolongation

En application des dispositions de l'article R. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.

Lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2.

Il appartient au juge judiciaire de vérifier la régularité de l'acte qui le saisit, y compris au regard de la qualité du signataire de la requête et de vérifier si les délégations de signature couvrent la compétence spécifique de la signature des actes tels qu'une requête de prolongation de la rétention.

Il ressort de l'arrêté préfectoral du 30 janvier 2023 portant délégation de signature, lequel est joint à la requête en prolongation, que Mme [K] avait délégation de signature du préfet, sans qu'il y ait lieu à vérifier un quelconque empêchement puisque cette compétence n'est pas subsidiaire mais relève d'une délégation préalable, l'apposition de sa signature sur ladite requête présupposant l'empêchement des autres personnes ayant délégation par préférence, le retenu ne rapportant pas la preuve contraire ainsi que cela lui incombe en application de l'article 9 du code de procédure civile.

Le moyen d'irrecevabilité doit donc être écarté.

Sur l'incompatibilité de l'état de santé du retenu avec la mesure de rétention administrative

Le droit à la santé de valeur constitutionnelle et l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales autorisent le juge des libertés et de la détention usant des pouvoirs de gardien des libertés individuelles garantis par l'article 66 de la constitution, à mettre fin à une mesure de rétention s'il résulte des pièces soumises à son appréciation que le droit à la santé d'une personne retenue n'est pas garanti dans la situation concrète qui lui est présentée.

Il est rappelé qu'en application de l'article R. 744-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pendant la durée de leur séjour en rétention, les étrangers, s'ils en font la demande, sont examinés par un médecin de l'unité médicale du centre de rétention administrative, qui assure, le cas échéant, la prise en charge médicale durant la rétention administrative.

M. [I] [S] indique présenter des difficultés de santé, et en particulier d'allergies et d'urticaire et que le traitement qui lui a été administré par le médecin du CRA est sans effet.

La cour observe que ce moyen avait déjà été soulevé lors de la demande de première prolongation, rejeté en l'absence de justifications. Il n'est pas plus produit à ce stade d'élément nouveau au soutien d'un état de santé d'une gravité exceptionnelle nécessitant de mettre fin à la mesure de rétention, étant rappelé, qu'il est loisible au retenu qui allègue des difficultés de santé et argue de l'inefficacité de son traitement de solliciter un nouvel examen par un médecin de l'unité médicale du centre de rétention administrative.

Le moyen sera écarté.

Sur la demande de prolongation

Selon l'article L.742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :

1°En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;

2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement

3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;

b) de l'absence de moyens de transport.

L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.

Par ailleurs, en application des dispositions de l'article L. 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration devant exercer toute diligence à cet effet.

Il n'est pas discuté que M. [I] [S] est dépourvu tout document d'identité en cours de validité, ce qui justifie à tout le moins la prolongation de la mesure en application du 2° de l'article L.742-4 précité.

Il est par ailleurs établi en procédure que l'administration préfectorale s'est rapprochée des autorités tunisiennes et algériennes en effecuant une demande de reconnaissance et de délivrance laissez-passer consulaire les 25 mai et 9 juin 2023, les dites autorités, qui en ont accusé réception, ayant été relancées les 9 et 13 juin 2023. Il est donc justifié de diligences suffisantes, sans que le retenu ne puisse venir soutenir que les autorités marocaines auraient dû être contactées, au motif qu'il se nomme qu'il se nomme [F] [S], né le 19 juillet 2005 à [Localité 2] et qu'il avait toujours signalé cette identité à la préfecture, alors que l'examen des pièces révèlent qu'il est connu sous plusieurs alias, qu'il a ainsi été condamné le 8 juin 2022 par le tribunal correctionnel de Nantes sous l'identité de [I] [S], né le 19 novembre 2000 à [Localité 4] en Algérie, alias [F] [R], né le 19 juillet 2005 à [Localité 4], alias [F] [R], né le 19 juillet 2001 à [Localité 1] et que lors de son audition du 24 mai 2023, dans le cadre de la procédure ouverte pour infraction à la législation des stupéfiants, il a déclaré, en présence de son avocat, se nommer [I] [S], né le 19 novembre 2000 à [Localité 4] en Algérie.

.

Il sera à toutes fins rappelé que la préfecture n'a aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires d'une part, pour que celles-ci reçoivent rapidement l'étranger, d'autre part, quant à la délivrance éventuelle d'un document de voyage. Un laissez-passer ou tout autre document de voyage ne peut être délivré que dès lors que la nationalité et donc l'identité de l'intéressé a été formellement établie. En l'état d'une personne dépourvue de pièces d'identité et de droit au séjour, les recherches propres à identifier l'origine et la nationalité de celle-ci sont incontournables et retardent d'autant la délivrance du titre de voyage, d'autant plus que cette dernière utilise des alias.

En outre, l'exigence de la démonstration par l'administration d'un éloignement à bref délai n'est stipulée que pour les troisièmes et quatrièmes prolongations de la rétention et l'administration justifie de diligence pour exécuter la mesure d'éloignement comme rappelé ci-dessus.

Il sera en conséquence fait droit à la prolongation de la mesure, l'ordonnance étant confirmée.

Sur la demande au titre des frais irrépétibles

M. [P] [V] sollicite la condamnation du préfet au paiement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, avec distraction au profit de son conseil, sous réserve de renonciation à l'aide juridictionnelle.

Il ne sera pas fait droit à ladite demande, injustifiée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,

Déclare recevable l'appel interjeté par M. [I] [S] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 24 juin 2023 par le juge des libertés et de la détention de Rouen, prolongeant la mesure de rétention administrative le concernant pour une durée supplémentaire de trente jours ;

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.

Rejette la demande au titre des frais irrépétibles.

Fait à Rouen, le 26 Juin 2023 à 18 heures 50.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,

NOTIFICATION

La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre des etrangers
Numéro d'arrêt : 23/02172
Date de la décision : 26/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-26;23.02172 ?
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