N° RG 23/01612 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JLQG
COUR D'APPEL DE ROUEN
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 10 MAI 2023
Nous, Mariane ALVARADE, présidente de chambre près de la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,
Assistée de Fanny GUILLARD, greffière ;
Vu les articles L.740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu l'arrêté du Préfet d'Ille-et-Vilaine en date du 02 octobre 2022 portant obligation de quitter le territoire français pour M. [U] [D], né le 05 Mai 1998 à [Localité 3] (MAROC) ;
Vu l'arrêté du Préfet d'Ille-et-Vilaine en date du 04 mai 2023 de placement en rétention administrative de M. [U] [D] ayant pris effet le 04 mai 2023 à 18 heures 35 ;
Vu la requête du Préfet d'Ille-et-Vilaine tendant à voir prolonger pour une durée de vingt-huit jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise à l'égard de M. [U] [D] ;
Vu l'ordonnance rendue le 07 Mai 2023 à 11 heures 00 par le juge des libertés et de la détention de ROUEN, déclarant la décision de placement en rétention prononcée à l'encontre de M. [U] [D] régulière, et ordonnant en conséquence son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours à compter du 06 mai 2023 à 18 heures 35 jusqu'au 03 juin 2023 à la même heure ;
Vu l'appel interjeté par M. [U] [D], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 09 mai 2023 à 10 heures 27 ;
Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :
- aux services du directeur du centre de rétention de [Localité 2],
- à l'intéressé,
- au Préfet d'Ille-et-Vilaine,
- à Mme Ernestine Marianne NJEM EYOUM, avocat au barreau de ROUEN, de permanence,
- à Mme [Z] [H], interprète en langue arabe ;
Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2] ;
Vu la demande de comparution présentée par M. [U] [D] ;
Vu l'avis au ministère public ;
Vu les conclusions de Mme Amina MERHOUM-HAMMICHE, avocat au barreau de ROUEN ;
Vu les débats en audience publique, en la présence de Mme [I] [S], interprète en langue arabe, expert assermenté, en l'absence du Préfet d'Ille-et-Vilaine et du ministère public ;
Vu la comparution de M. [U] [D] en présentiel à la cour d'appel de Rouen en raison d'une panne de la visioconférence ;
Mme Amina MERHOUM-HAMMICHE, avocat au barreau de ROUEN, de permanence en sa qualité de suppléante, étant présente au palais de justice ;
Vu les réquisitions écrites du ministère public ;
Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;
L'appelant et son conseil ayant été entendus ;
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Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS
M. [U] [D] a été placé en rétention administrative le 4 mai 2023.
Saisi d'une requête du préfet de l'Ille et Vilaine en prolongation de la rétention, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rouen a, par ordonnance du 7 mai 2023 autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours, décision contre laquelle M. [U] [D] a formé un recours.
A l'appui de son recours, l'appelant allègue la violation de ses droits fondamentaux et indique reprendre les moyens de nullité soulevés en première instance tenant à l'absence physique d'interprète sans que ne soient établies des circonstances insurmontables expliquant le recours à un interprète par téléphone.
Il fait en outre valoir que les diligences de l'administration préfectorale pour parvenir à son éloignement sont insuffisantes.
Son conseil a réitéré les moyens développés dans l'acte d'appel et M. [U] [D] a été entendu en ses observations.
Le préfet de l'Ille et Vilaine n'a pas formulé d'observations.
Le dossier a été communiqué au parquet général qui, par conclusions écrites non motivées du 9 mai 2023, requiert la confirmation de la décision.
MOTIVATION DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel
Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par M. [U] [D] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 07 Mai 2023 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.
Sur le recours à l'interprétariat par téléphone pendant la garde à vue
Aux termes de l'article 63-1 du code de procédure pénale , la personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu'elle comprend des droits afférents à cette mesure et si la personne ne comprend pas le français, ses droits doivent lui être notifiés par un interprète, le cas échéant après qu'un formulaire lui a été remis pour son information immédiate.
L'article 706-71 alinéa 7 du même code dispose qu'en cas de nécessité, résultant de l'impossibilité pour un interprète de se déplacer, l'assistance de l'interprète au cours d'une audition, d'un interrogatoire ou d'une confrontation peut également se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunications.
L'article L.743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile énonce par ailleurs : « En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger. »
Il est établi en procédure qu'un interprète en langue arabe a été requis le 4 mai 2023 à 4h07, l'assistance s'étant effectuée par téléphone et que 'des imprimés', dont il n'est pas contesté qu'il s'agit des formulaires de notification des droits, ont été remis à l'intéressé.
Au regard de ces éléments, la procédure ne saurait être déclarée irrégulière, les textes visés ci-avant n'imposant pas de caractériser une impossibilité de l'interprète de se déplacer, ni d'en expliciter les motifs ou encore d'établir un procès-verbal de carence dès lors que les diligences accomplies sont retracées en procédure, alors qu'il s'agit de notifier à l'intéressé le plus rapidement possible ses droits et qu'il n'est pas démontré en tout état de cause l'existence d'un grief, étant au demeurant pas précisé qu'il a été privé concrètement d'un droit spécifique .
Il conviendra en conséquence de rejeter l'exception de nullité concernant la notification du placement en garde à vue, par confirmation de l'ordonnance déférée.
Sur les diligences
Sur l'absence de saisine des autorités marocaines, il ressort du dossier que le retenu a été identifié comme étant [U] [D], né le 5 mai 1988 à [Localité 1] en Algérie. A l'audience, il a soutenu être né à [Localité 3] au Maroc sans toutefois apporter aucun élément venant contredire les constatations faites en procédure, de sorte qu'il ne peut être fait grief à l'administration préfectorale de ne pas avoir saisi les autorités consulaires marocaines.
L'absence de diligences n'est pas caractérisée, étant par ailleurs établi une saisine des autorités algériennes aux fins d'obtention d'un laissez-passer consulaire dès le 5 mai 2023.
Sur le fond
Aucun autre moyen n'étant formulé au soutien de l'irrégularité de la procédure, l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a ordonné la prolongation de la mesure de rétention administrative.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel interjeté par M. [U] [D] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 07 Mai 2023 par le juge des libertés et de la détention de ROUEN ordonnant son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.
Fait à Rouen, le 10 Mai 2023 à 11 heures 10.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,
NOTIFICATION
La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.