N° RG 23/01226 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JKVP
COUR D'APPEL DE ROUEN
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 05 AVRIL 2023
Nous, Mariane ALVARADE, présidente de chambre près de la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,
Assistée de Mme GUILLARD et de M. GEFFROY, greffiers ;
Vu les articles L.740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu l'arrêté du Préfet de l'Aisne en date du 1er avril 2023 portant obligation de quitter le territoire français pour Mme [V] [D], née le 07 Septembre 2002 à [Localité 1] (ROUMANIE) ;
Vu l'arrêté du Préfet de l'Aisne en date du 1er avril 2023 de placement en rétention administrative de Mme [V] [D] ayant pris effet le 1er avril 2023 à 22 heures 35 ;
Vu la requête de Mme [V] [D] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative ;
Vu la requête du Préfet de l'Aisne tendant à voir prolonger pour une durée de vingt-huit jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise à l'égard de Mme [V] [D] ;
Vu l'ordonnance rendue le 04 Avril 2023 à 11 heures 20 par le juge des libertés et de la détention de ROUEN, déclarant la décision de placement en rétention prononcée à l'encontre de Mme [V] [D] régulière, et ordonnant en conséquence son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours à compter du 03 avril 2023 à 22 heures 35 jusqu'au 1er mai 2023 à la même heure ;
Vu l'appel interjeté par Mme [V] [D], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 04 avril 2023 à 14 heures 15 ;
Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :
- aux services du directeur du centre de rétention de [Localité 2],
- à l'intéressée,
- au Préfet de l'Aisne,
- à M. [M] [Z], avocat au barreau de ROUEN, de permanence,
- à Mme [K] [O], interprète en langue roumaine;
Vu les dispositions des articles L.743-8 et R.743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2] ;
Vu la demande de comparution présentée par Mme [V] [D] ;
Vu l'avis au ministère public ;
Vu les débats en audience publique, en la présence de Mme [K] [O], interprète en langue roumaine, expert assermenté, en l'absence du Préfet de l'Aisne et du ministère public ;
Vu la comparution de Mme [V] [D] par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2] ;
M. [M] [Z], avocat au barreau de ROUEN, étant présent au palais de justice ;
Vu les réquisitions écrites du ministère public ;
Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;
L'appelante et son conseil ayant été entendus ;
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Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS
Mme [V] [D] a été placée en rétention administrative le 1er avril 2023.
Saisi d'une requête du préfet de l'Aisne en prolongation de la rétention et d'une requête de Mme [V] [D] contestant la mesure de rétention, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rouen a, par ordonnance du 4 avril 2023 autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours, décision contre laquelle Mme [V] [D] a formé un recours.
A l'appui de son recours, l'appelante allègue le défaut de motivation de l'ordonnance déférée et l'absence de diligences de l'administration pour parvenir à son éloignement, sollicitant en outre le prononcé de son assignation à résidence.
Elle demande l'infirmation de l'ordonnance et sa remise en liberté.
A l'audience, son conseil a indiqué reprendre les seuls moyens tenant à l'irrégularité de la procédure antérieure au placement en rétention en ce qu'il n'est pas justifié de l'information du procureur de la République et à la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que la décision de placement porte une atteinte disproportionnée à la vie familiale de l'intéressée, mère de deux enfants restés en Allemagne.
Mme [V] [D] a déclaré vouloir quitter la France pour se rendre en Allemagne.
Le dossier a été communiqué au parquet général qui, par conclusions écrites non motivées du 4 avril 2023, requiert la confirmation de la décision.
MOTIVATION DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel
Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par Mme [V] [D] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 04 Avril 2023 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.
Sur l'avis au procureur de la République du placement en garde à vue
Mme [V] [D] poursuit l'irrégularité de la procédure au motif que si figure au dossier un procès-verbal d'avis à parquet, celui-ci est imprécis et ne permet pas à la juridiction d'exercer son entier contrôle.
Aux termes de l'article 63 du code de procédure pénale, un officier de police judiciaire peut placer une personne en garde à vue ; dès le début de la mesure, il informe le procureur de la République, par tous moyens, du placement de la personne en garde à vue en lui donnant connaissance des motifs le justifiant et l'avise de la qualification des faits qu'il a notifiée à la personne, que le procureur peut modifier.
En l'espèce, Mme [V] [D] a été placée en garde à vue le 1er avril 2023 à compter de 14h15, heure de son interpellation, ses droits découlant de cette mesure lui ayant été notifiés suivant procès-verbal du même jour entre 14h23 et 14h27. Le procès-verbal d'avis au parquet tant du placement en garde à vue que des qualifications retenues figure en procédure et justifie de ce que cette démarche a été effectuée régulièrement à 14h30, sans qu'il soit requis de mentionner le mode d'information.
Le moyen sera en conséquence écarté.
Sur la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
Une mesure de rétention administrative, qui a pour but de maintenir à disposition de l'administration un ressortissant étranger en situation irrégulière sur le territoire français n'entre pas en contradiction, en soi, avec le droit au respect de la vie privée et familiale prévu à l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La mesure prononcée doit toutefois être proportionnée au but poursuivi.
Mme [V] [D] fait valoir qu'elle est mère de deux enfants français, âgés d'1 an et de 3 mois, que son compagnon avec qui elle est en couple depuis trois ans et qui est le père de ses enfants, vit en France, qu'ensemble, ils sont hébergés chez son cousin à [Adresse 3]. Il apparaît toutefois que ses deux enfants se trouvent en Allemagne avec leurs grands-parents. Elle a par ailleurs déclaré à l'audience vouloir repartir en Allemagne auprès d'eux.
Au regard de ces éléments, il ne peut être considéré que l'arrêté de placement en rétention porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. En soutenant que la renvoyer dans son pays romprait ses liens familiaux revient en fait à critiquer la décision d'éloignement, laquelle ne dépend pas du juge judiciaire.
Le moyen sera également écarté.
Sur la demande de prolongation
Pour le surplus, la cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qui seront intégralement adoptés au visa de l'article 955 du code de procédure civile, que le premier juge a statué sur le fond en ordonnant la prolongation de la rétention.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel interjeté par Mme [V] [D] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 04 Avril 2023 par le juge des libertés et de la détention de ROUEN ordonnant son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.
Fait à Rouen, le 05 Avril 2023 à 14 heures 10.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,
NOTIFICATION
La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.