N° RG 22/03959 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JHRM
COUR D'APPEL DE ROUEN
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 09 DECEMBRE 2022
Nous, Anne-Laure BERGERE, Conseillère à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,
Assistée de Jean-François GEFFROY, Greffier ;
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu l'arrêté du PREFET DE LA DE SEINE-MARITIME en date du 06 mai 2022 portant obligation de quitter le territoire français pour Monsieur [H] [T], né le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 4] de nationalité Algérienne ;
Vu l'arrêté du PREFET DE LA DE SEINE-MARITIME en date du 05 décembre 2022 de placement en rétention administrative de Monsieur [H] [T] ayant pris effet le 06 décembre 2022 à 10 heures 11 ;
Vu la requête de Monsieur [H] [T] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative ;
Vu la requête du PREFET DE LA DE SEINE-MARITIME tendant à voir prolonger pour une durée de vingt huit jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise à l'égard de Monsieur [H] [T] ;
Vu l'ordonnance rendue le 08 Décembre 2022 à 15 heures 45 par le Juge des libertés et de la détention de ROUEN, déclarant la décision de placement en rétention prononcée à l'encontre de Monsieur [H] [T] régulière, et ordonnant en conséquence son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours à compter du 08 décembre 2022 à 10 heures 11 jusqu'au 05 janvier 2023 à la même heure ;
Vu l'appel interjeté par Monsieur [H] [T], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 09 décembre 2022 à 10 heures 56 ;
Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :
- aux services du directeur du centre de rétention de [Localité 2],
- à l'intéressé,
- au PREFET DE LA DE SEINE-MARITIME,
- Ã Me Amina MERHOUM, avocat au barreau de ROUEN, de permanence,
- à M. [M] [R] interprète en langue arabe ;
Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2] ;
Vu la demande de comparution présentée par Monsieur [H] [T];
Vu l'avis au ministère public ;
Vu les débats en audience publique, en l'absence du PREFET DE LA DE SEINE-MARITIME et du ministère public ;
Vu la comparution de Monsieur [H] [T] par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 2];
Me Amina MERHOUM, avocat au barreau de ROUEN étant présent au palais de justice ;
Vu les réquisitions écrites du ministère public ;
Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;
L'appelant et son conseil ayant été entendus ;
****
Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
****
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS
Monsieur [H] [T] a été placé en rétention administrative le 6 décembre 2022.
Le Préfet de Seine-Maritime a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rouen pour voir autoriser le maintien en rétention de Monsieur [H] [T]. Parallèlement, ce dernier a également saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative.
Suivant ordonnance du 8 décembre 2022, le juge des libertés et de la détention a déclaré régulière la décision de placement en rétention administrative et autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours, décision contre laquelle Monsieur [H] [T] a formé un recours.
A l'appui de son recours, il invoque la violation de l'article 8 de la CEDH au motif qu'il n'a aucune famille en Algérie, mais qu'en revanche, sa compagne et son fils vivent en Belgique. En outre, il invoque le manque de diligence de l'administration, le défaut d'examen de sa situation personnelle permettant une assignation à résidence et l'absence de nécessité de sa rétention, eu égard à la stabilité de sa situation en Belgique.
A l'audience, le conseil de Monsieur [H] [T] a développé les moyens soulevés dans la déclaration d'appel, insistant également sur l'état de santé de ce dernier qui souffre d'épilepsie sévère et de tuberculose.
Monsieur [H] [T] a indiqué qu'il souhaitait retourner en Belgique auprès de son fils, demandant à ce qu'on lui laisse une dernière chance.
MOTIVATION DE LA DECISION
I- Sur la recevabilité de l'appel
Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par Monsieur [H] [T] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 08 Décembre 2022 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.
II- Sur le fond
II - a) Sur la violation du droit à la vie privée et familiale
L'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme pose le principe selon lequel toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
Une mesure de rétention administrative, qui a pour but de maintenir à disposition de l'administration un ressortissant étranger en situation irrégulière sur le territoire français, et qui refuse de partir par ses propres moyens, constitue une ultime procédure afin de faire respecter une décision administrative.
Une telle procédure étant encadrée afin d'être limitée dans le temps et strictement proportionnée à l'objectif de reconduite à la frontière poursuivi, elle n'entre pas en contradiction, en soi avec le droit au respect de la vie privée et familiale.
En l'espèce, la motivation du premier juge sur ce moyen étant tout à fait pertinente tant en droit qu'en fait, il convient de l'adopter et par suite de rejeter ledit moyen.
II- b) Sur la prolongation de la rétention administrative
Aux termes des articles L. 742-1 et L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L. 741-1.
Et selon l'article L. 741-3 du même code, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.
Il résulte de ce texte que l'étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention au titre du 1° bis du I de l'article L. 751-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que pour le temps strictement nécessaire à la détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, et le cas échéant, à l'exécution d'une décision de transfert et qu'en cas d'accord d'un Etat requis, la décision de transfert est notifiée à l'étranger dans les plus brefs délais.
En l'espèce, les services de la préfecture justifie avoir saisi les autorités algériennes qui ont reconnu le retenu le 16 novembre 2022. Un vol a été demandé et est prévu pour le 12 décembre prochain.
En outre, si Monsieur [H] [T] tente aujourd'hui de mettre en avant la stabilité de sa situation en Belgique, où il aurait compagne et enfant, force est néanmoins de constater que depuis 2013, date à laquelle il réside de manière régulière en France d'après ses propres explications, cette situation familiale ne l'a pas empêché de faire de très nombreux allers-retours entre la France et la Belgique et de commettre des infractions sur le territoire français, puisqu'il a notamment été condamné le 6 mai dernier pour des faits de vol par effraction et violation de domicile. Au demeurant, lors de son audition du 5 mai dernier par les forces de police, il leur a indiqué qu'il ne voyait pas son fils et qu'il était séparé de sa compagne, donnant uniquement comme adresse un hébergement situé à [Localité 3] et non une adresse stable en Belgique.
Enfin, bien qu'il soit constant que Monsieur [H] [T] ait un état de santé fragile, puisqu'epileptique et atteint de la tuberculose, il n'est pas justifié d'un état qui ne pourrait pas être pris en charge médicalement dans le cadre de la retention, de sorte que son état serait incompatible avec cette dernière.
Au vu de ces éléments, la mesure de rétention apparait parfaitement justifiée et proportionnée à la situation et les diligences entreprises par la préfecture sont suffisantes.
En conséquence, la décision entreprise est confirmée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel interjeté par Monsieur [H] [T] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 08 Décembre 2022 par le Juge des libertés et de la détention de ROUEN ordonnant son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.
Fait à Rouen, le 09 Décembre 2022 à 16 heures 15.
LE GREFFIER, LE CONSEILLER,
NOTIFICATION
La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.