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02/12/2008 | FRANCE | N°08/01918

France | France, Cour d'appel de Rouen, 02 décembre 2008, 08/01918


R. G. : 08 / 01918-08 / 02055




COUR D'APPEL DE ROUEN


CHAMBRE SOCIALE


ARRET DU 02 DECEMBRE 2008










DÉCISION DÉFÉRÉE :




Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 10 Avril 2008




APPELANT ET INTIME :




Monsieur Ludovic X...


...

27380 BOURG BEAUDOUIN


représenté par Me Michel DUBOS, avocat au barreau de ROUEN










INTIMEE ET APPELANTE :




Société GEORGIA PACIFIC <

br>ZI boulevard Lénine no518
76800 SAINT ETIENNE DU ROUVRAY


représentée par Me Eric DI COSTANZO, avocat au barreau de ROUEN




INTIMEE :




Société ADECCO
1 rond Point des Bruyères
76300 SOTTEVILLE-LES-ROUEN


représentée par Me F...

R. G. : 08 / 01918-08 / 02055

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU 02 DECEMBRE 2008

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 10 Avril 2008

APPELANT ET INTIME :

Monsieur Ludovic X...

...

27380 BOURG BEAUDOUIN

représenté par Me Michel DUBOS, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE ET APPELANTE :

Société GEORGIA PACIFIC
ZI boulevard Lénine no518
76800 SAINT ETIENNE DU ROUVRAY

représentée par Me Eric DI COSTANZO, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE :

Société ADECCO
1 rond Point des Bruyères
76300 SOTTEVILLE-LES-ROUEN

représentée par Me Franck DELAHOUSSE, avocat au barreau d'AMIENS substitué par Me Audrey MARGRAFF, avocat au barreau D'AMIENS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 23 Octobre 2008 sans opposition des parties devant Madame RAYNAL-BOUCHÉ, Conseiller, magistrat chargé d'instruire seul l'affaire,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame PAMS-TATU, Président
Madame RAYNAL-BOUCHÉ, Conseiller
Monsieur MOUCHARD, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Monsieur CABRELLI, Greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 23 Octobre 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 02 Décembre 2008

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 02 Décembre 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame PAMS-TATU, Président et par Monsieur CABRELLI, Greffier présent à cette audience.

EXPOSÉ SUCCINCT DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. X...a effectué diverses missions de travail temporaire par l'intermédiaire de la société ADECCO, à compter du 2 juillet 2001, au bénéfice de la société GEORGIA PACIFIC FRANCE, entreprise utilisatrice ; la dernière mission s'est achevée le 18 avril 2004.

Le 6 février 2008, M. X...a saisi le conseil de prud'hommes de ROUEN d'une demande tendant notamment à la requalification de ses contrats et à la condamnation in solidum des deux sociétés au paiement de diverses sommes dont celles dues au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, conséquences de la requalification.

Par jugement du 10 avril 2008, le conseil de prud'hommes a :

- requalifié les contrats de mission successifs en contrat à durée indéterminée ;

- mis hors de cause la société ADECCO ;

- condamné la société GEORGIA PACIFIC à verser à M. X...les sommes de :

• 2. 809, 28 € au titre de la requalification,
• 1. 404, 64 € au titre du préavis,
• 140, 46 € au titre des congés payés y afférents,
• 2. 809, 28 € à titre de dommages-intérêts,

- débouté M. X...de ses autres demandes ;

- condamné la société GEORGIA PACIFIC à verser au salarié la somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 1. 404, 64 €.

Appel de cette décision a été interjeté par M. X...et par la société GEORGIA PACIFIC.

M. X...expose que :

la société GEORGIA PACIFIC pratique à une grande échelle le recours à des intérimaires en méconnaissance des règles impératives du Code de travail, ce qui a été le cas pour lui-même ; cette pratique a déjà été sanctionnée par la Cour, selon arrêt du 11 mars 2008 intervenu dans une autre affaire et par d'autres affaires prud'homales ;

la société ADECCO n'ignorait pas l'illicéité de cette pratique dont elle bénéficiait, ce qui commande une condamnation in solidum ;

l'ensemble de la relation contractuelle doit être requalifié en contrat à durée indéterminée ;

un rappel de salaires est dû car un salarié intérimaire ne peut percevoir de rémunération inférieure à celle du salarié qu'il remplace ;

le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

la société GEORGIA PACIFIC n'a pas rempli son obligation de formation, ni d'information.

En conclusion, il est demandé :

- la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la requalification et son infirmation pour le surplus, la Cour devant condamner in solidum les sociétés GEORGIA PACIFIC et ADECCO à lui régler les sommes de :

• 2. 169, 89 € à titre de rappel de salaires,
• 216, 99 € à titre de congés payés y afférents,
• 3. 979, 81 € à titre de rappel de 13ème mois,
• 6. 800 € à titre de rappel de primes,
• 2. 809, 28 € à titre d'indemnité de requalification,
• 2. 809, 28 € à titre de préavis,
• 280, 93 € à titre des congés payés sur préavis,
• 482, 85 € au titre de l'indemnité de licenciement,
• 11. 237, 12 € à titre de dommages-intérêts pour absence de motifs,
• 2. 809, 28 € à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure,
• 3. 000 € à titre de dommages-intérêts pour carence dans l'obligation de formation,
• 3. 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société GEORGIA PACIFIC demande elle aussi la réformation de la décision en toutes ses dispositions et sollicite la somme de 5. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, elle soutient pour l'essentiel que :

s'agissant des contrats à durée déterminée,

- le délai de carence a été respecté quand il devait être appliqué,
- la preuve de la réalité des motifs énoncés est rapportée,
- M. X...n'a jamais occupé un emploi durable et permanent,

si la Cour venait à requalifier les divers contrats, elle devrait réduire les sommes allouées au titre du préjudice ;

s'agissant du rappel de salaire, rappel de 13ème mois, cette réclamation, à la supposer fondée, ne pourrait porter que sur la période du 6 février 2003 au 18 avril 2004 ;

la réclamation pour manquement à l'obligation de formation ne saurait aboutir car les dispositions du Code de travail sont postérieures à l'entrée en vigueur des textes applicables au travail temporaire.

La société ADECCO a conclu à la confirmation du jugement qui l'a mise hors de cause et à la condamnation de M. X...à la somme de 2. 000 € en sa faveur.

Elle soutient que sa responsabilité ne pourrait être engagée que dans l'hypothèse où elle aurait méconnu les obligations lui incombant, ce qui n'est pas le cas, et c'est très subsidiairement qu'elle a conclu au fond.

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la Justice, il convient de joindre les dossiers no 1918 / 08 et 2055 / 08.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I-Sur la requalification des missions d'intérim en contrat à durée indéterminée

M. X...a travaillé :

en 2001

- du 2 juillet au 14 juillet } soit 5 contrats pour le
-du 16 juillet au 28 juillet } remplacement de salariés
-du 30 juillet au 18 août } absents
-du 20 août au 25 août }
- du 27 août au 1er septembre }

en 2002

- du 1er juillet au 20 juillet } pour le remplacement de
-du 22 juillet au 27 juillet } salariés absents
-du 29 juillet au 10 août }
- du 12 août au 24 août }
- du 26 août au 31 août }
- du 2 septembre au 6 septembre }
- du 9 septembre au 13 septembre }
- du 16 septembre au 20 septembre }
- du 23 septembre au 27 septembre }
- du 4 octobre au 4 octobre } remplacement de salariés
-du 14 octobre au 21 octobre } absents
-du 28 octobre au 31 octobre }
- du 7 novembre au 7 novembre } accroissement d'activité
-du 8 novembre au 11 novembre } remplacement d'un salarié
-du 12 novembre au 15 novembre }
- du 18 novembre au 23 novembre }
- du 28 novembre au 3 décembre }
- du 18 décembre au 19 décembre }

en 2003

- du 3 janvier au 3 janvier }
- du 31 janvier au 31 janvier }
- du 12 février au 12 février }
- du 17 février au 21 février } remplacement de salariés
-du 24 février au 28 février } absents
-du 5 mars au 18 mars } accroissement d'activité
-du 21 mars au 22 mars } remplacement d'un salarié absent
-du 24 mars au 29 mars }
- du 1er avril au 5 avril }
- du 7 avril au 10 avril } salariés absents
-du 11 avril au 22 avril }
- du 6 mai au 7 mai }
- du 13 mai au 16 mai }
- du 19 mai au 23 mai }
- du 26 mai au 28 mai }
- du 4 juin au 6 juin }
- du 11 juin au 12 juin } salariés absents
-du 18 juin au 27 juin }
- du 30 juin au 18 juillet }
- du 21 juillet au 2 août }
- du 4 août au 30 août } accroissement d'activité
-du 3 septembre au 13 septembre } remplacement d'un salarié
-du 17 septembre au 4 octobre }
- du 7 octobre au 18 octobre }
- du 19 octobre au 8 novembre } accroissement d'activité
-du 16 novembre au 30 novembre } accroissement d'activité
-du 1er décembre au 21 décembre }
- du 26 décembre au 29 décembre }

en 2004

- du 1er janvier au 31 janvier }
- du 1er février au 29 février } 4 contrats
-du 9 mars au 30 mars }
- du 6 avril au 18 avril }

Il a été conclu avec M. X...55 contrats de mission pour la période du 1er juillet 2001 au 18 avril 2004 pour des motifs de remplacement d'un salarié absent ou d'accroissement temporaire d'activité, le salarié étant engagé pour occuper divers postes, le plus souvent conducteur.

Vainement la société fait plaider que la succession de ces contrats n'avait pas pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'établissement ; le seul document versé par elle pour établir la variation des ventes en tonnes DPH qui expliquerait le recours à du personnel intérimaire n'est pas probant dans la mesure où cette pièce, n'est pas corroborée par d'autres éléments et qu'elle comporte une signature dont la qualité de son auteur n'est pas précisée ; la société doit donc être considérée comme défaillante dans l'administration de cette preuve.

S'agissant des remplacements liés à des absences de salariés, ce motif n'est pas contestable car justifié dans sa réalité.

Cependant en dépit de l'apparente autonomie des contrats entre eux et de l'alternance des motifs de recours à M. X...pour effectuer des missions, la multiplicité de ces contrats et leur succession, même interrompue, dans les cas prévus, par un délai de carence, démontre que M. X...a été utilisé au gré des besoins non pas ponctuels mais permanents de l'entreprise.

Cette méconnaissance des dispositions de l'article L. 1251-5 du Code de travail justifie la requalification de l'ensemble de la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée ayant pris effet le 2 juillet 2001, et dont la rupture valant licenciement est intervenue le 18 avril 2004 ; ce point de la décision sera confirmé.

II-Sur les réclamations financières

1) Sur la prescription

M. X...ne peut solliciter un rappel de salaire, ainsi qu'un rappel de 13ème mois et de primes sur la période antérieure au 5 février 2003.

2) Sur le rappel de salaires

Cette prétention a été écartée, à juste titre, en première instance, faute par M. X...d'établir que pour les divers postes occupés par lui, il était dans la même situation (qualification-ancienneté) que celle du salarié qu'il remplaçait.

3) Sur l'indemnité de requalification

Celle-ci est due conformément à l'article L. 1251-41 du Code de travail, soit la somme de 1. 404, 64 €, correspondant à un mois de salaire ; il y a lieu à réformation sur ce point.

4) Sur la prime de 13ème mois

Cette prime a été versée sous la rubrique " avantages annuels ".

5) Les autres primes

M. X...ne donne aucune précision sur ce point.

6) Le préavis

M. X...est fondé à obtenir la somme de 2. 809, 28 € puisque son ancienneté est supérieure à 2 années, compte tenu de la requalification, outre celle de 280, 92 € au titre des congés payés y afférents.

7) Sur l'indemnité de licenciement

Celle-ci est due, soit la somme de 482, 85 €.

8) Les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Compte tenu de l'ancienneté de M. X..., de sa rémunération et des circonstances de la rupture, il convient de lui allouer la somme de 8. 500 €.

9) Sur les dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure

L'absence de procédure de licenciement a nécessairement causé un préjudice au salarié qui sera réparé par la somme de 500 €.

Sur les dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de formation

Cette prétention doit être écartée car reposant sur une loi intervenue postérieurement au dernier contrat de mission.

Sur la condamnation in solidum des deux sociétés

La preuve de l'entente illicite entre les deux sociétés ne saurait résulter de la simple passation de 55 contrats successifs, alors que le salarié ne démontre pas un non-respect par la société ADECCO des obligations mises à sa charge en la matière.

C'est pourquoi la décision des premiers juges qui l'ont mise hors de cause doit être confirmée.

Enfin, l'équité et les circonstances de la cause justifient qu'il soit alloué à M. X...la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile mais non à la société ADECCO.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Joint les dossiers no 1918 / 08 et 2055 / 08 ;

Confirme la décision entreprise en ce qu'elle a :

- requalifié les contrats de mission à durée déterminée ;

- mis hors de cause la société ADECCO ;

- débouté M. X...de ses demandes à titre de rappel de salaires, de primes de 13ème mois et autres primes, ainsi que de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de formation ;

- condamné la société GEORGIA PACIFIC à payer à M. X...la somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

L'infirmant pour le surplus ;

Condamne la société GEORGIA PACIFIC à payer à M. X...les sommes de :

• 1. 404, 64 € au titre de l'indemnité de requalification,

• 2. 809, 28 € au titre du préavis, outre celle de 280, 93 € au titre des congés payés y afférents,

• 482, 85 € au titre de l'indemnité de licenciement,

• 8. 500 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

• 500 € à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure,

• 1. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés par lui en appel ;

Ordonne le remboursement par la société GEORGIA PACIFIC aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à M. X...du jour du licenciement au jour de l'arrêt dans la limite de six mois ;

Déboute les parties du surplus de leur demande ;

Condamne la société GEORGIA PACIFIC aux dépens.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Numéro d'arrêt : 08/01918
Date de la décision : 02/12/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Rouen


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-12-02;08.01918 ?
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