La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/07/2008 | FRANCE | N°07/02205

France | France, Cour d'appel de Rouen, 02 juillet 2008, 07/02205


R.G : 07/02205





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE 1 CABINET 1



ARRÊT DU 2 JUILLET 2008









DÉCISION DÉFÉRÉE :



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BERNAY du 30 août 2006



APPELANTS :



SOCIÉTÉ KARST CORPORATION

34 Moreton Street

SW 1 V2PD

LONDRES (ROYAUME-UNI)



représentée par la SCP COLIN-VOINCHET RADIGUET-THOMAS ENAULT, avoués à la Cour



assistée de Me Olivier JOLLY, avocat au Barreau d'EVREUX



Monsie

ur Pascal Y...


...


27300 BERNAY



représenté par la SCP COLIN-VOINCHET RADIGUET-THOMAS ENAULT, avoués à la Cour



assisté de Me Olivier JOLLY, avocat au Barreau d'EVREUX





INTIMÉS :



Monsieur Z...


...


75010 ...

R.G : 07/02205

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE 1 CABINET 1

ARRÊT DU 2 JUILLET 2008

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BERNAY du 30 août 2006

APPELANTS :

SOCIÉTÉ KARST CORPORATION

34 Moreton Street

SW 1 V2PD

LONDRES (ROYAUME-UNI)

représentée par la SCP COLIN-VOINCHET RADIGUET-THOMAS ENAULT, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier JOLLY, avocat au Barreau d'EVREUX

Monsieur Pascal Y...

...

27300 BERNAY

représenté par la SCP COLIN-VOINCHET RADIGUET-THOMAS ENAULT, avoués à la Cour

assisté de Me Olivier JOLLY, avocat au Barreau d'EVREUX

INTIMÉS :

Monsieur Z...

...

75010 PARIS

représenté par Me COUPPEY, avoué à la Cour

assisté de Me LASKAR, avocat au Barreau de PARIS

Madame Z...

...

75010 PARIS

représentée par Me COUPPEY, avoué à la Cour

assistée de Me LASKAR, avocat au Barreau de PARIS

Madame Sylvie B...

...

14100 LISIEUX

représentée par la SCP LEJEUNE MARCHAND GRAY C..., avoués à la Cour

assistée de Me FILIPOWICZ, avocat au Barreau de PARIS

Madame Christelle E... épouse F...

27230 LE PLANQUAY

représentée par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assistée de Me Alain FREZEL, avocat au Barreau de BERNAY

Monsieur David E...

...

27300 CARSIX

représenté par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assisté de Me Alain FREZEL, avocat au Barreau de BERNAY

Monsieur Franck E...

27230 LE PLANQUAY

représenté par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assisté de Me Alain FREZEL, avocat au Barreau de BERNAY

Madame Chantal FLEURANT veuve DULONG

Le Manauparc

27230 LE PLANQUAY

représentée par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assistée de Me Alain FREZEL, avocat au Barreau de BERNAY

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 19 mai 2008 sans opposition des avocats devant Madame LE CARPENTIER, Conseiller, rapporteur, en présence de Monsieur GALLAIS, Conseiller,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur BOUCHÉ, Président

Madame LE CARPENTIER, Conseiller

Monsieur GALLAIS, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Jean Dufot

DÉBATS :

A l'audience publique du 19 mai 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 2 juillet 2008

ARRÊT :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 2 juillet 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Monsieur BOUCHÉ, Président et par Jean Dufot, greffier présent à cette audience.

*

* *

LES FAITS ET LA PROCEDURE :

M. et Mme Z... désirant effectuer des travaux d'aménagement et de transformation de leur propriété de SAINT MARDS-DE-FRESNE (27),ont choisi Monsieur Y... comme maître d'œuvre ; ils ont postérieurement conclu avec lui en sa qualité de représentant en France de la société londonienne KARST CORPORATION, un contrat de maîtrise d'oeuvre le 18 janvier 2000 ;

Le lot peintures a été confié à M. Bruno E..., suivant marché conclu lui aussi après le début de ses travaux , le 7 juillet 2001 pour un prix de 254 606 F (38 814,43 €) TTC.

Les époux Z... souhaitaient des poutres et colombages semblables à ceux de l'ancien couvent des Dominicaines à Pont-l'Evèque ;

Constatant dès la pose de la couche d'apprêt par Monsieur E... que le résultat ne leur convenait pas, ils ont fait appel pour réaliser la teinte à une décoratrice, Madame B... ; ils ont mis fin au contrat de Monsieur E... qui les a assignés en référé en paiement de sa facture ; le reste du lot peinture a été réalisé par l'entreprise B... ;

Par ordonnance de référé du 7 mars 2002, les époux Z... ont été condamnés à payer à M. E... la somme de 9 421,28 € de provision au titre des travaux et 182,33 € de provision pour les frais d'une étude préalable réalisée par M. I... ; Monsieur J... a été désigné en qualité d'expert afin de rechercher l'existence de désordres relatifs à la peinture et la couleur des colombages, rechercher les responsabilités et chiffrer les préjudices ; l'expertise a été étendue au maître d'œuvre ;

L'expert a déposé son rapport le 15 mai 2003 ; il évalue les travaux de décapage des bois et de pose de lasure à la somme de 61 924.95 euros T.T.C. et partage la responsabilité entre Monsieur Y... et Monsieur E... ;

Sur appel de Monsieur Y..., par arrêt du 8 juin 2004, l'expertise a été étendue à Madame B... ; l'expert a déposé son rapport complémentaire le 20 mai 2005 ; il considère que « l'intervention de Madame B... n'avait pas lieu d'être si Monsieur Y... avait rempli sa mission » ;

Par actes du 18 novembre 2003, M. et Mme Z... ont fait assigner M. Y..., la société KARST CORPORATION et M. E... devant le Tribunal de grande instance de BERNAY en paiement des travaux de reprise chiffrés par l'expert ;

M. Y... et la société KARST CORPORATION ont ensuite fait assigner Mme Sylvie B... en intervention forcée et garantie par acte du 18/06/05.

M. E... est décédé le 2/02/06. Mme Christelle E... épouse F..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG sont intervenus volontairement à l'instance et ont réclamé l'indemnisation du préjudice résultant de la résiliation fautive du contrat ;

Par jugement du 30 août 2006, le Tribunal de Grande Instance de BERNAY a statué comme suit :

Rejette les fins de non-recevoir soulevées,

Dit n'y avoir lieu à sursis à statuer ;

Condamne in solidum la société KARST CORPORATION, M. Pascal Y..., Mme Christelle E... épouse F..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG à payer à M. et Mme Robert Z... la somme de 61 924,95 € ;

Condamne in solidum la société KARST CORPORATION, M. Pascal Y..., Mme Christelle E... épouse F..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG à payer à M. et Mme Robert Z... la somme de 3 000 € à titre de dommages intérêts ;

Déboute M. et Mme Robert Z... de leur demande en paiement de la somme de 182,33 € ;

Condamne solidairement M. et Mme Robert Z... à payer à Mme Christelle E... épouse F..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG la somme de 7 490,12 €;

Condamne M. et Mme Robert Z... à payer à la société KARST CORPORATION la somme de 1 643,17 € ;

Dit n'y avoir lieu à compensation entre les créances résultant de ces condamnations ;

Déboute la société KARST CORPORATION et M. Pascal Y... de leur demande de garantie dirigée contre Mme Sylvie B... ;

Condamne in solidum la société KARST CORPORATION et M. Pascal Y... à payer à Mme Sylvie B... la somme de 1 500 € de dommages intérêts,

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement ;

Condamne in solidum la société KARST CORPORATION, M. Pascal Y..., Mme Christelle E... épouse F..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG aux dépens de l'instance les opposant à M. et Mme Robert Z..., comprenant les frais d'expertises, dont distraction au profit des SCP MESNILDREY GIRARD et FREZEL COTE,

Condamne in solidum la société KARST CORPORATION et M. Pascal Y... aux dépens de l'instance les opposant à Mme Sylvie B..., dont distraction au profit de la SCP BRIL TOUZE ;

Condamne in solidum la société KARST CORPORATION, M. Pascal Y..., Mme Christelle E... épouse F..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG à payer à M. et Mme Robert Z... la somme de 1 800 € au titre des frais irrépétibles ;

Condamne in solidum la société KARST CORPORATION et M. Pascal Y... à payer à Mme Sylvie B... la somme de 1 300 € au titre des frais irrépétibles ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La société KARST CORPORATION et Monsieur Y... ont interjeté appel de cette décision ; les consorts E... ont formé appel incident ;

A la demande de Monsieur et Madame Z..., le Conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 15 mai 2007 radié l'affaire pour non exécution des condamnations par les appelants ; l'affaire a été rétablie après exécution ;

LES PRETENTIONS DES PARTIES :

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 7 décembre 2006, auxquelles la Cour se réfère expressément pour l'exposé des moyens, conformément aux dispositions de l'article 455 du Nouveau code de procédure civile, la société KARST CORPORATION et Monsieur Y... exposent notamment que :

- Monsieur Y... est représentant légal, fiscal et salarié de la société KARST CORPORATION, ce que les maîtres d'ouvrage savaient ;

- du 17 septembre 1993 au 26 septembre 2003, Monsieur Y... était à titre personnel en liquidation judiciaire ; celle-ci ayant été clôturée pour insuffisance d'actif ; les actes de procédure et l'expertise lui sont donc inopposable ;

- l'ensemble des essais de mise en couleur a été avalisé par les maîtres de l'ouvrage ;

-les fournitures de matériaux ne sont pas contestables ;

Ils demandent en conséquence à la Cour de :

Faisant droit à l'appel de la société KARST CORPORATION et de Monsieur Pascal Y... ;

Réformant le jugement du Tribunal de Grande Instance de Bernay en date du 30 août 2006 ;

Déclarer irrecevables les demandes dirigées à l'encontre de Monsieur Y...;

Dire que Monsieur Y... ne peut être considéré comme maître d'oeuvre à titre personnel ;

Déclarer mal fondées les demandes dirigées à l'encontre de la société KARST CORPORATION ;

Débouter les demandeurs de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

Condamner les intimés aux entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 4 000 € tant à Monsieur Y... qu'à la société KARST CORPORATION au titre de l'article 700 NCPC ;

A titre subsidiaire

Condamner Madame Sylvie B... à garantir et relever intégralement la société KARST CORPORATION et/ou Monsieur Pascal Y... des condamnations qui pourraient être confirmées contre eux par la Cour au titre de la non conformité du produit mis en oeuvre sur les colombages ;

Condamner Madame B... au paiement de la somme de 4000 Euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux entiers dépens ;

Dans les motifs des conclusions il est demandé en outre la condamnation de Monsieur et Madame Z... au paiement de 16 397.41 euros au titre du solde des honoraires et des fournitures ;

******

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 12 mars 2008, auxquelles la Cour se réfère expressément pour l'exposé des moyens, les consorts E... demandent à la Cour de :

Statuer ce que de droit sur l'appel régularisé par la société KARST CORPORATION et Monsieur Pascal Y... à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de BERNAY en date du 30 août 2006.

Recevant les consorts E... en leur appel incident et y faisant droit,

Réformer le jugement entrepris du chef de ses dispositions ayant condamné les consorts E... in solidum avec la société KARST CORPORATION et Monsieur Pascal Y..., à régler aux époux Z... la somme de 61.924,95 € et celle de 3.000 € à titre de dommages-intérêts et en ce qu'il a condamné solidairement les époux Z... à leur régler la somme de 7.490,12 € ainsi que en ce qu'il les a condamnés à verser in solidum avec la société KARST CORPORATION et Monsieur Pascal Y... une indemnité de 1.800 € au titre des frais inrépétibles aux époux Z... ainsi que les dépens.

Statuant à nouveau,

Débouter les époux Z... de toutes leurs demandes, fins et conclusions en tant que dirigées à l'encontre des consorts K....

En tout état de cause, dire et juger qu'il ne peut y avoir de condamnation in solidum au titre de la reprise des désordres, ainsi qu'au titre des dommages et intérêts.

Plus subsidiairement dire et juger que la part de responsabilité de Monsieur E... ne peut excéder 5%.

Condamner solidairement Monsieur et Madame Robert Z... à payer à Madame E... épouse F..., Monsieur David E..., Monsieur Franck E... et Madame Chantal FLEURANT veuve DULONG la somme de 14.920,83 €.

Condamner in solidum Monsieur et Madame Robert Z... à payer à Madame Christelle E... épouse F..., Monsieur David E..., Monsieur Franck E... et Madame Chantal FLEURANT veuve DULONG la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamner in solidum Monsieur et Madame Robert Z... ou toute autre partie qui succombera aux entiers dépens de première instance et d'appel qui comprendront les fais d'expertise ;

******

Aux termes de ses conclusions du 29 août 2007, Madame B... demande à la Cour de :

DIRE KARST CORPORATION et Monsieur Y... irrecevables et mal fondés en leurs demandes fins et conclusions d'Appel et les en débouter,

METTRE Madame B... hors de cause,

CONDAMNER in solidum KARST CORPORATION et Monsieur Y... à payer à Madame B... la somme de 10.000 € pour appel abusif,

CONDAMNER in solidum KARST CORPORATION et Monsieur Y... à payer à Madame B... la somme de 5.000 €pour les frais irrépétibles d'Appel,

CONFIRMER le jugement entrepris en ses autres dispositions,

CONDAMNER in solidum KARST CORPORATION et Monsieur Y... aux dépens de première instance et d'appel ;

******

Par conclusions du 21 avril 2008, Monsieur et Madame Z... demandent à la Cour de :

- rejeter les demandes de sursis à statuer présentées par M. Y... et la société KARST CORPORATION,

- dire et juger que la peinture des colombages de la maison et de l'atelier n'est pas conforme au modèle désigné au maître d'oeuvre et à l'entreprise de peinture, et qu'elle présente de nombreux défauts et malfaçons ;

- retenir la responsabilité in solidum de KARST CORPORATION, de M. Y... à titre personnel et de l'entreprise E... ;

- condamner solidairement KARST CORPORATION, M. Y... et Mme Christelle E..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG, venant aux droits de M. Bruno E... à leur payer :

* 67 155594 euros TTC pour les travaux de reprise de la peinture

* 30 000 € de dommages intérêts pour la réparation des préjudices moral et de jouissance ;

- déclarer irrecevables les demandes de la société KARST CORPORATION

- débouter Christelle E..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG, venant aux droits de M. Bruno E..., Monsieur Y... et KARST CORPORATION, de leurs demandes ;

- à titre subsidiaire ordonner la compensation judiciaire entre les sommes qui pourraient être dues à M. E... et/ou M. Y... / KARST CORPORATION et toutes les sommes que ceux-ci seraient amenés à leur devoir,

- condamner Mme Christelle E..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG, venant aux droits de M. Bruno E... à leur rembourser la somme de 182,33 € au titre des frais de l'expertise de son propre expert M. I..., qu'il avait présenté de façon erronée lors de l'audience de référé comme un expert conjoint des deux parties ;

- condamner solidairement de KARST CORPORATION, de M. Y... et de Mme Christelle E..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG, venant aux droits de M. Bruno E... à leur payer 10 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour les frais engagés lors de la procédure de référé, l'expertise et la présente instance ;

- condamner solidairement KARST CORPORATION, M. Y... et de Mme Christelle E..., M. David E..., M. Franck E... et Mme Chantal FLEURANT veuve DULONG, venant aux droits de M. Bruno E... aux dépens, comprenant les frais d'expertise de M. J... soit 5 146,13 €, ;

SUR CE LA COUR :

-les fins de non-recevoir de la société KARST CORPORATION et Monsieur Y...

La société KARST CORPORATION avec laquelle Monsieur et Madame Z... ont traité suivant contrat du 18 janvier 2000, signé bien après le début des prestations de Monsieur Y..., est d'après les pièces produites une société de droit britannique dont Monsieur Y... est le seul membre depuis le 22 juin 1999 pour l'avoir acquise de Monsieur L... pour le prix de un dollar US ;

Elle a été inscrite à l'INSEE comme « société étrangère non immatriculée au registre du commerce » à l'adresse de Monsieur Y... le 1er juillet 2000 et déclarée à la Caisse Régionale d'Assurances Maladie « pour un salarié » le 31 janvier 2002 ;

Le contrat de travail de Monsieur Y... avec cette société a été signé le 26 octobre 2000 (soit postérieurement à la signature du contrat avec Monsieur et Madame Z...) et à une date où Monsieur Y... en était le seul membre ;

Les recherches faites par Monsieur et Madame Z... aux adresses successives de la société en Angleterre, démontrent que ces adresses sont fictives ;

Enfin, après avoir assisté à l'expertise « tant à titre personnel qu'en qualité de gérant de la société KARST CORPORATION » assisté d'un avocat (lettre de ce dernier à l'expert), Monsieur Y... a soutenu devant le tribunal qu'il ne pouvait être mis en cause à titre personnel car il avait été déclaré en liquidation judiciaire le 17 septembre 1993, la clôture pour insuffisance d'actif n'étant intervenue qu'en 2003 ;

Il produit pour en justifier le jugement rendu le 26 septembre 2003 par le Tribunal de Commerce de PONT-AUDEMER se saisissant d'office et prononçant effectivement la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actif ;

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que Monsieur Y... a sciemment dissimulé sa situation de liquidation judiciaire et continué à travailler sous le couvert d'une société étrangère sans aucune surface financière et d'ailleurs non assurée, et dont il ne pouvait à l'évidence, puisqu'en liquidation judiciaire, être comme il le prétend « le représentant légal et fiscal » en France ;

Compte tenu de cette fraude manifeste et du fait que Monsieur Y... est maintenant « in bonis », le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté les fins de non-recevoir présentées et l'expertise à laquelle Monsieur Y... a assisté sans réserve lui est bien opposable ;

-les désordres :

Monsieur et Madame Z... se plaignent de deux types de désordres :

-la différence entre la peinture exécutée sur les colombages par Monsieur E... sous la maîtrise d'œuvre de Monsieur Y... et ce qu'ils souhaitaient c'est-à-dire la texture et la couleur des colombages du couvent des Dominicaines à Pont-L'Evêque ;

-les malfaçons dans la pose de la peinture qui s'écaille et a disparu notamment sur les appuis de fenêtres ;

L'historique des relations entre les parties relatives à la peinture des colombages aux termes des pièces produites et du rapport d'expertise est le suivant :

Le compte-rendu de chantier du 2 juin 2001 adressé par Monsieur Y... à Monsieur E... fait état des divers travaux de peinture, intérieurs et extérieurs et, concernant les colombages extérieurs, mentionne :

« Sur les colombages extérieurs vous devez appliquer la même couleur de peinture que le palais de justice de Pont-l'Evêque ; vous devrez vous rendre sur les lieux avec Monsieur Y... pour déterminer le RAL.

Avant chaque intervention vous devrez réaliser un échantillon devant faire l'approbation de Mme Z... et de Monsieur Y... »

Vous devez planifier une intervention pour peindre en impression les colombages avant le ravalement du maçon semaine 24 et 25 » (soit à compter du 11 juin).

Monsieur Y... n'est pas allé voir le couvent des Dominicaines avec Monsieur E... avant le début des travaux et Monsieur E... a seulement montré ses échantillons de peinture à Monsieur Y... ;

Monsieur E... a donc commencé à poser la couche d'impression sur les colombages le 11 juin 2001 ; il s'agissait d'après l'expertise d'une préparation acrylique bleu/vert ;

Le 17 juin 2001 Monsieur Z... a adressé à Monsieur Y... la télécopie suivante : « après m'être rendu à PONT L'EVEQUE, j'ai pu constater que nous étions loin de la peinture des colombages de l'office culturel, aussi j'ai demandé à Monsieur E... d'arrêter de peindre les colombages et de faire analyser la peinture utilisée, sans doute une lasure passée en deux ou trois couches et non une peinture ; Si besoin est, il faudra faire décaper et remettre dans l'état désiré, voir SVP ce problème » ;

Les comptes-rendus de chantier des 30 juin et 7 juillet mentionnent qu'un rendez-vous est organisé à Pont-l'Evêque le 18 juin (soit antérieurement) pour analyser avec un spectroscope les composants de la couleur des colombages ;

Cependant le 7 juillet 2001, Monsieur et Madame Z... signent le marché de Monsieur E..., établi par Monsieur Y... et qui concerne non seulement les boiseries extérieures mais tout l'intérieur de la maison ;

Aux termes de ce marché Monsieur E... devait sur les colombages réaliser les prestations suivantes : « brossage et nettoyage des colombages, une couche d'impression, deux couches de lasure, teinte à déterminer »

Il est constant qu'aucun décapage n'a été demandé à Monsieur E... après le 17 juillet 2001, alors qu'il n'avait peint que 40% de la partie principale et aux termes du compte rendu de chantier du 28 juillet 2001 établi par Monsieur Y..., il est indiqué à Monsieur E... « après concertation avec Monsieur Z..., il sera fait appel à une décoratrice afin de travailler en collaboration avec votre entreprise » ;

L'intervention de la décoratrice, Madame B..., aux termes de son devis du 30 juillet 2001 et de sa lettre explicative à Monsieur Z... du 4 avril 2002, a consisté en la reprise de la mise en couleur, sans décapage préalable et sur l'impression existante ;

Elle a réalisé des essais de couleur et le maître de l'ouvrage a accepté un échantillon dont la couleur se rapprochait de celle constatée à Pont-l'Evêque ; ordre a alors été donné par Monsieur Y... à l'entreprise E... de poursuivre les travaux (page 5 du rapport et lettre de Monsieur Y... du 3 mai 2002 à l'expert) ;

Monsieur E... a donc continué de poser la même couche d'impression en septembre 2001, puis, en octobre 2001, a appliqué la première couche de lasure (couleur faite par Madame B...) ;

Le lundi 15 octobre 2001, Monsieur Z... a adressé à Monsieur Y... la télécopie suivante ; « le peintre est venu dimanche et je ne suis pas sur qu'il ait bien compris ce que nous voulions, après l'énorme bévue qu'il a commise au début je voulais l'exclure et j'espère que nous n'aurons pas de nouvelles déconvenues ; bien amicalement »

Par fax du 31 octobre 2001, Monsieur Z... a demandé à Monsieur Y... de révoquer Monsieur E... dans les termes suivants :

« concernant Monsieur E..., ses ouvriers ne sont pas surveillés, le travail n'est pas fait dans les règles de l'art ; pourtant nous pensions qu'il ferait le nécessaire pour réparer ses erreurs du début ; par ailleurs il ne semble pas avoir le sens des délais ; aussi je vous demande de dénoncer le marché qui lui a été confié ; »

Le 17 novembre 2001 Monsieur et Madame Z... ont fait établir un constat par Maître M..., Huissier de Justice qui pour les colombages relève :

« Maison d'habitation :

teinte différente à plusieurs endroits ;

décollement de peinture,

manque de peinture

bâtiment : colombages décollement de peinture ;

Le 3 décembre 2001, Monsieur N..., architecte qui a constaté l'état des travaux à la demande de Monsieur E... mentionne :

« Vous m'avez indiqué que vous n'aviez pas terminé l'ouvrage puisqu'il vous reste à réaliser la deuxième couche de lasure…

Sur les supports sains, la réalisation n'attire pas de remarque particulière, les ouvrages adhèrent aux supports, il n'est pas noté de craquelure, ni de défauts d'adhérence ;

Pour les supports altérés, que j'estime à 5%, ils auraient dus être grattés, purgés, voire changés par un charpentier, vous ne pouvez prétendre au règlement des travaux correspondants ; »

(et c'est sur la base de ce rapport que Monsieur E... a obtenu en référé paiement de la somme de 9 421.28 euros et que Monsieur J... a été désigné) ;

Le 17 décembre 2001, Monsieur Z... a écrit à Monsieur E... :

« Je tiens à vous rappeler que le litige porte sur plusieurs points :

1ola couleur et la texture de la peinture ou lasure ne sont pas conforme au modèle qui vous a été désigné (bâtiment situé à Pont L'Evêque);

2ovos ouvriers n'ont ni gratté, ni nettoyé les poutres avant la première couche de peinture ; par endroit ils ont peint suivant remarque qui m'a été faite par Monsieur Y... sur de la boue !

3oA certains endroits il a été peint sur de l'aubier en décomposition et ce sans aucun grattage et sans même me le signaler pour envisager une solution si nécessaire ;

4oUne partie du bâtiment a été peinte sous la pluie et les traces sont visibles par exemple sur les appuis de fenêtres et ailleurs ;

5o tout n'a pas reçu deux couches et il y a même des manques ;

Monsieur J... dans son rapport conclut que la couleur a été sur le principe acceptée mais que l'effet de transparence a été rendu impossible, d'où le désaccord entre les parties ;

L'expert précise : « Monsieur Y... n'a pas établi de CCTP pour le lot peinture comme une mission complète le demande ; de ce fait l'entreprise n'était pas en possession des critères techniques pour réaliser la prestation particulière demandée sur les colombages …. Monsieur Y... se devait de faire des recherches en amont ; l'information était facile à remonter » ;

Il résulte de cet historique que la seule référence donnée à Monsieur E... avant le début de ses travaux est relative à la « couleur » des colombages, et qu'il n'a été fait état de « lasure » que dans le marché conclu après la pose de la première couche d'impression, qui n'est pas à priori la même s'il s'agit de poser ensuite une peinture ou une lasure ;

Il est certain, et l'expert le constate, qu'il n'existait pas d'autre solution pour obtenir l'effet de transparence recherchée que de décaper la peinture posée, alors en outre que cette pose n'était que partielle ;

Or tout au contraire, avec l'accord des maîtres de l'ouvrage, Monsieur E... a terminé la couche d'impression, et a ensuite posé une lasure et il résulte des mentions du constat et du fax demandant la révocation de Monsieur E... que ce ne sont que les malfaçons de pose qui ont été relevées ; ce n'est que dans son courrier de décembre après la révocation et la naissance du litige que Monsieur Z... fait état de « texture » ;

Monsieur et Madame Z... font valoir qu'ils ont été trompés car Monsieur Y... et le peintre leur auraient affirmé qu'avec un brossage de la couche d'impression, l'effet de transparence voulu pourrait être obtenu ; cela n'est cependant pas justifié et Madame B... n'en fait pas davantage état, indiquant au contraire qu'il était acquis lors de son intervention que l'effet de transparence, propre aux lasures ne pourrait en tout état de cause pas être obtenu ;

Il résulte de l'ensemble de cet historique que contrairement aux conclusions de l'expert, il ne peut plus être reproché au maître d'œuvre et au peintre de ne pas s'être conformé au souhait du maître de l'ouvrage relatif à « l'effet de transparence » et que la couleur réalisée à la demande des maîtres de l'ouvrage par un intervenant extérieur a été acceptée ;

En conséquence, seules les malfaçons dans la pose de la peinture doivent être prises en compte et la mise hors de cause de Madame B... doit être confirmée ;

Les malfaçons sont constantes : elles sont surtout relatives au défaut de préparation des colombages relevé par Monsieur I... puisque la seconde couche de lasure prévue n'a pas été appliquée ; le constat fait cependant état aussi de décollement de peinture et l'expert mentionne que la peinture bleue réapparaît par endroit ;

Si Monsieur E... n'a pas facturé la pose de la peinture sur les colombages altérés, le coût de la réparation des désordres est cependant plus important puisque le manque de préparation et l'obligation de changer certains colombages obligent à effectuer des travaux plus lourds et la pose de la seconde couche de lasure n'aurait pas réparé les décollements ;

Dans ces conditions, les travaux nécessaires à la réparation des malfaçons sera évaluée à la somme de 5 000 euros qui sera mise à la charge in solidum de la société KARST CORPORATION, de Monsieur Y... et des consorts E..., l'expert ayant relevé la carence manifeste du maître d'œuvre dans la définition et le suivi des travaux ;

-les demandes reconventionnelles :

Monsieur E... qui a été révoqué par les maîtres de l'ouvrage et n'a donc pas effectué les travaux prévus au devis, accepté à l'origine pour un montant de 38 814.43 euros, sollicite au titre du manque à gagner correspondant la somme de 14 920.83 euros ;

Il apparaît cependant que les maîtres de l'ouvrage ont fait appel à une autre entreprise de peinture pour les travaux intérieurs dès le mois de juillet 2001, sans protestation particulière de Monsieur E..., et que les malfaçons et les difficultés relatives à la teinte des colombages, pouvaient entraîner un manque de confiance pour le reste des travaux, et donc justifier la rupture du contrat aux torts de l'entreprise ;

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a accordé au titre du manque à gagner la somme de 7 490.12 euros et les consorts E... seront déboutés de cette demande ;

La société KARST CORPORATION reprend ses demandes initiales en paiement du solde de ses honoraires et de factures de matériaux ;

Le tribunal a cependant exactement considéré qu'aucune pièce justifiant de la fourniture effective de matériaux n'était produite et en particulier pas les factures d'achat ou les bons de livraison au nom de la société KARST CORPORATION sur le chantier ;

En outre, compte tenu de la carence de la société KARST CORPORATION et de Monsieur Y... dans l'exécution de la mission de maître d'œuvre, Monsieur et Madame Z... étaient bien fondés à ne pas régler le solde des honoraires ;

Compte tenu du montant des condamnations finalement prononcées, l'équité ne commande d'allouer une indemnité pour frais irrépétibles qu'au profit de Madame B... ; celle-ci sera cependant déboutée de ses demandes de dommages intérêts en l'absence de justification d'un abus du droit d'ester en justice ;

Les frais de référé et d'expertise seront partagés entre les parties perdantes ; Monsieur et Madame Z..., ayant donné leur accord à l'intervention de Monsieur I..., sont mal fondés à demander le remboursement de la moitié des frais correspondants qu'ils ont pris en charge ;

******

PAR CES MOTIFS :

Réformant et statuant à nouveau :

Rejette les fins de non-recevoir présentées par Monsieur Y... ;

Met hors de cause Madame B... ;

Condamne in solidum les consorts E..., la société KARST CORPORATION, et Monsieur Y... à payer à Monsieur et Madame Z... la somme de 5 000 euros à titre de dommages intérêts ;

Condamne in solidum la société KARST CORPORATION et Monsieur Y... à payer à Madame B... la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Met les dépens de première instance comprenant les frais d ‘expertise à l'exception de ceux relatifs à la mise en cause de Madame B..., à la charge in solidum de la société KARST CORPORATION, Monsieur Y... et les consorts E... ;

Met les dépens d'appel à la charge par moitié, d'une part de Monsieur et Madame Z..., d'autre part in solidum de la société KARST CORPORATION, Monsieur Y... et les consorts E... avec droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Condamne in solidum Monsieur Y... et la société KARST CORPORATION aux dépens relatifs à la mise en cause de Madame B... avec droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le greffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Numéro d'arrêt : 07/02205
Date de la décision : 02/07/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bernay


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-07-02;07.02205 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award