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29/05/2008 | FRANCE | N°07/1621bis

France | France, Cour d'appel de Rouen, Ct0043, 29 mai 2008, 07/1621bis


R.G : 07/01621

COUR D'APPEL DE ROUEN

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 29 MAI 2008

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ROUEN du 03 Avril 2007

APPELANTE :

COMITÉ D'ORGANISATION DE MANIFESTATIONS ÉCONOMIQUES ET TOURISTIQUES - COMET -

Parc des Expositions de l'Agglomération de Rouen

BP.1135

76172 ROUEN CEDEX 1

représentée par la SCP LEJEUNE MARCHAND GRAY SCOLAN, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry CLERC, avocat au barreau de Rouen

INTIMÉ :

S.A.R.L. ASIAN CONCEPT

8 Aven

ue Paul Langevin

95220 HERBLAY

représentée par Me COUPPEY, avoué à la Cour

assistée de Me Stéphanie PAVIOT, avocat au barreau de Beauvais

COMPOSITIO...

R.G : 07/01621

COUR D'APPEL DE ROUEN

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 29 MAI 2008

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ROUEN du 03 Avril 2007

APPELANTE :

COMITÉ D'ORGANISATION DE MANIFESTATIONS ÉCONOMIQUES ET TOURISTIQUES - COMET -

Parc des Expositions de l'Agglomération de Rouen

BP.1135

76172 ROUEN CEDEX 1

représentée par la SCP LEJEUNE MARCHAND GRAY SCOLAN, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry CLERC, avocat au barreau de Rouen

INTIMÉ :

S.A.R.L. ASIAN CONCEPT

8 Avenue Paul Langevin

95220 HERBLAY

représentée par Me COUPPEY, avoué à la Cour

assistée de Me Stéphanie PAVIOT, avocat au barreau de Beauvais

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 26 Mars 2008 sans opposition des avocats devant Madame BARTHOLIN, Présidente, rapporteur, en présence de Madame ROBITAILLE, Conseiller.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame BARTHOLIN, Présidente

Madame VINOT, Conseiller

Madame ROBITAILLE, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Madame DURIEZ, Greffier

D1BATS :

A l'audience publique du 26 Mars 2008, où la présidente a été entendue en son rapport oral et l'affaire mise en délibéré au 29 Mai 2008

ARRÊT :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 29 Mai 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame BARTHOLIN, Présidente et par Madame DURIEZ, Greffier.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE

Faits et procédure :

Le Comité d'organisation de Manifestations Economiques et touristiques ci-après désigné COMET organise chaque année la Foire de Rouen qui rassemble différents exposants regroupés par thèmes dans des halls d'exposition.

La société ASIAN CONCEPT qui commercialise du mobilier sous l'enseigne "Exotica" a contacté en janvier 2006 le COMET dans le but de louer un emplacement lors de la foire devant se tenir du 31 mars au 9 avril 2006 ; elle s'est vue proposer un emplacement d'une superficie légèrement supérieure à celle de l'année précédente, dans le hall no 1 dédié aux exposants de meubles et en face de l'une des principales entrées de la foire.

La société ASIAN CONCEPT expose qu'à proximité immédiate de son emplacement, et sans qu'elle en ait été avertie préalablement, a été installé un podium d'animation musicale occupé par la station de radio Nostalgie et que cette animation a engendré des nuisances sonores telles - constatées par un huissier de justice qu'elle a requis à cet effet - qu'elle a vu son chiffre d'affaires baisser par rapport aux années précédentes du fait des difficultés de communiquer avec les clients.

C'est dans ces conditions qu'après l'envoi d'une lettre recommandée au COMET, elle l'a assigné devant le tribunal de grande instance de Rouen en indemnisation de son préjudice évalué alors à 50 500 euros.

Le tribunal de grande instance de Rouen, par jugement en date du 3 avril 2007, a condamné le COMET à payer à la société ASIAN CONCEPT la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts outre 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires et condamné le COMET aux dépens avec droit de recouvrement au profit des avocats ; l'exécution provisoire a été ordonnée.

Le COMET a interjeté appel de cette décision et demande à la cour de :

Donner acte à la SCP Lejeune Marchand Gray Scolan de ce qu'elle se constitue aux lieu et place de la SCP Gallière Lejeune Marchand Gray ;

Recevant le COMET en son appel, le dire bien fondé et réformer le jugement déféré,

Ecarter des débats les pièces communiquées par la société ASIAN CONCEPT le 10 mars 2008 (pièces no 5 et 6),

Statuant à nouveau,

Débouter la société ASIAN CONCEPT de toutes ses demandes et la condamner à verser au COMET la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

La condamner à verser au COMET la somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens de première instance et d'appel que la SCP Lejeune Marchand Gray Scolan sera autorisée à recouvrer par application de l'article 699 du code de procédure civile.

La société ASIAN CONCEPT conclut à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a limité le quantum du préjudice à la somme de 20 000 euros ; formant appel incident, elle demande de porter à la somme de 50 500 euros le quantum de son préjudice et de condamner le COMET à lui verser cette somme, de condamner le COMET à lui verser la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première et d'appel qui seront recouvrés par Me Couppey avoué sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs conclusions signifiées le 29 février 2008 pour le COMET et le 3 janvier 2008 pour la société ASIAN CONCEPT;

Les moyens invoqués seront examinés dans le cadre de la discussion.

DISCUSSION

Par conclusions de procédure signifiées le 21 mars 2008, la société ASIAN CONCEPT a sollicité le rejet des pièces 16 à 24 communiquées par le COMET le 17 mars 2008.

Par conclusions signifiées le 26 mars 2008, le COMET conclut au débouté de cette demande.

Sur les demandes tendant au rejet des pièces :

1 - La société ASIAN CONCEPT, par conclusions du 21 mars 2008, a demandé que soient écartées des débats les pièces communiquées par le COMET le 17 mars 2008 - pièces 16 à 24 - consistant dans le plan de réhabilitation du Parc des Expositions - pièce 16 - et des photographies couleur de l'emplacement du stand de la société ASIAN CONCEPT - pièces 17 à 24 - aux motifs qu'elles ont été produites tardivement et sont illisibles de sorte qu'elles n'ont pu être étudiées par la société ASIAN CONCEPT qui n'a pu y répondre utilement.

Or, ces pièces ont été produites le 17 mars 2008, soit 4 jours avant l'ordonnance de clôture et 3 jours avant les nouvelles conclusions signifiées par le COMET le 20 mars 2008 dont la recevabilité n'est pas en cause ; la tardiveté de cette communication n'est donc pas établie et le délai dans lequel les pièces ont été communiquées avant l'ordonnance de clôture permettait à la société ASIAN CONCEPT de protester contre le caractère "illisible" des photographies et solliciter une nouvelle communication plus lisible.

Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu au rejet des pièces no 16 à 24 communiquées par le COMET le 17 mars 2008.

2 - Par conclusions signifiées le 20 mars 2008, le COMET a sollicité que soient écartées des débats les attestations de M. Julien A... et de M. Michel A... aux motifs :

- s'agissant de l'attestation de M. Michel A..., que celle-ci n'est pas conforme aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile,

- s'agissant de celle de M. Julien A..., que le texte du témoignage fait douter de son authenticité, que l'écriture ne semble pas correspondre à celle de M. Julien A..., que la signature diffère de celle de la pièce d'identité et qu'elle n'est pas non plus celle figurant sur le procès-verbal d'assemblée générale du 3 juin 2006.

Au surplus ni M. Michel A... ni M. Julien A... ne sont recevables à attester alors qu'ils sont associés au sein de la SARL ASIAN CONCEPT qui n'est que l'émanation d'eux-mêmes.

Or, tant M. Michel A... que M. Julien A... sont en tant

personnes physiques, et bien qu'associés dans la société ASIAN CONCEPT et gérant de ladite société pour l'un, parfaitement habilités à témoigner qu'ils ont personnellement constaté.

Si leur témoignage n'est pas conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile qui ne sont pas prescrites à peine de nullité, elles sont accompagnées de la carte d'identité des deux auteurs et présentant des garanties suffisantes pour être admises aux débats en tant qu'éléments de preuve.

L'allégation de ce que la signature de M. Julien A... figurant sur l'attestation est différente de celle figurant sur la pièce d'identité jointe et le procès-verbal de l'assemblée générale du 3 juin n'est pas étayée tant la similitude des signatures est grande et aucun élément ne permet de retenir que l'écriture manuscrite ne correspond pas à celle de l'auteur de l'attestation.

En conséquence, les 2 attestations émanant de M. Michel A... et de M. Julien A... sont recevables en tant qu'éléments de preuve.

Sur la faute :

Le COMET fait valoir qu'il n'est tenu à l' égard des exposants que d'une obligation de moyens, celle de mettre un stand à leur disposition sans garantie quant au chiffre d'affaires réalisé, que cette obligation a été réalisée pour la société ASIAN CONCEPT par la mise à disposition d'un emplacement conforme au souhait exprimé par celle-ci puisqu'il s'agissait du même emplacement que précédemment qu'elle désirait se voir attribuer à nouveau alors que, selon le règlement général des foires, salons et congrès applicable, la participation à la foire n'impliquait aucun droit à un emplacement déterminé.

Elle soutient qu'elle n'est tenue en outre d'aucune obligation particulière de conseil ou d'information à l'égard de son cocontractant qui connaît le fonctionnement d'une foire dont le concept implique des animations identiques à celle de Radio Nostalgie, animations souhaitées par l'ensemble des exposants dès lors qu'elle exercent un pouvoir attractif certain sur la clientèle et qui ont en l'espèce donné satisfaction tant aux visiteurs qu'aux exposants, y compris ceux se trouvant à un emplacement voisin de celui d'ASIAN CONCEPT.

Elle argue que, de surcroît, la présence du podium n'a entraîné aucune nuisance particulière sur l'activité du stand de ASIAN CONCEPT, que les animations ne se sont pas produites de manière ininterrompue, que la société ASIAN CONCEPT ne s'est plainte ni auprès des responsables du COMET ni auprès des personnes présentes sur le podium de l'anormalité du bruit et de la gêne occasionnée à l'exploitation du stand.

Elle fait enfin valoir que l'huissier qui a diligenté son constat à l'intérieur de la foire sans se présenter au bureau du COMET ou signaler sa présence n'a procédé qu'à des constations sporadiques et subjectives puisque réalisées sans support technique .

Il ne peut être contesté que l'obligation à laquelle est tenu le COMET envers les exposants est de leur fournir un emplacement leur permettant d'exposer leurs produits dans le cadre de la foire qu'il organise sans être tenu d'une quelconque obligation de résultat quant au chiffre d'affaires pouvant être réalisé ; que l'inexécution de cette obligation s'apprécie au regard de ce que le créancier de l'obligation est en droit d'attendre d'un débiteur normalement diligent.

A cet égard, le COMET a procuré à la société ASIAN CONCEPT un emplacement conformément à sa demande.

Il n'est pas contesté en outre que l'emplacement procuré à la société ASIAN CONCEPT se trouvait sur le passage des visiteurs sortant de l'exposition remarquée des pharaons, ce qui était susceptible de lui procurer un afflux de clientèle.

Et il importe peu de savoir s'il s'agit du même emplacement que celui qu'elle occupait les années précédentes (sous l'enseigne "Casa") ; le COMET produit de façon contradictoire un plan de la foire de 2003 laissant apparaître que Casa occupait un emplacement identique dans le hall no 1 et un communiqué de presse où il est indiqué que les exposants en meubles ont changé de hall en 2006 passant du hall no 2 au hall no 1.

Le COMET admet en effet qu'à l'entrée de ce hall no 1 et, contrairement à ce qui se pratiquait les années précédentes, il a fait installer un podium d'animations (jeux et concerts) occupé par Radio Nostalgie ; le communiqué de presse paru dans le journal Paris Normandie précise en effet que les organisateurs ont voulu donner un autre esprit à la foire, celui d'une grande fête.

Le COMET fait justement observer qu' une foire implique nécessairement animations et bruit, que la société ASIAN CONCEPT sous l'enseigne CASA avait l'habitude de telles manifestations de sorte qu'il n'était tenu d'aucune obligation particulière de conseil et d'information à son égard.

Il reste cependant à déterminer si le choix de l'emplacement - à proximité du podium de Radio Nostalgie et compte tenu du bruit généré par la présence de celui-ci - a pu occasionner des nuisances excédant les bruits normaux et prévisibles procurés par ce genre de manifestation.

Des plans et photographies produits aux débats, il apparaît que l'emplacement de ASIAN CONCEPT se trouvait accolé au local toilettes à proximité immédiate duquel se trouvait le podium occupé dans l'entrée du hall par Radio Nostalgie ; que le local toilettes est constitué d'une sorte de bloc en béton d'une largeur comparable à celle de l'emplacement mais dont la hauteur est loin d'atteindre le plafond du hall de sorte que les bruits du podium se propageaient facilement et nécessairement vers l'emplacement de la société ASIAN CONCEPT.

L'huissier requis par la société ASIAN CONCEPT a constaté, étant sur le stand de la requérante le vendredi 7 avril à 17 heures 55 que la musique du podium est d'un niveau sonore "très important", qu'il n'est pas possible de parler sans élever la voix, que devant le podium de Radio Nostalgie sont installés de très gros et volumineux hauts parleurs, que le spectacle sur le podium s'est terminé à 18 heures 45 pour reprendre à 20 heures, la musique atteignant à nouveau un niveau sonore "très important" jusqu'à 20 heures 40 ; que, se présentant à nouveau sur le stand de la société ASIAN CONCEPT le lendemain 8 avril à 14 heures 15, il a constaté qu'à 14 heures 30, la musique a repris avec un niveau sonore "très important" , qu'il n'est plus possible de converser à voix normale et que jusqu'à 20 heures 40 environ, un spectacle a eu lieu interrompu 5 fois entre 14 heures 30 et 20 heures 40 pendant environ quinze minutes.

L'huissier a encore constaté que très peu de chalands s'arrêtaient sur le stand, ceux qui s'arrêtaient regardant les objets sans engager la conversation avec les vendeurs ; ses constatations ont cessé à 21 heures 05.

Vainement le COMET reproche à la société ASIAN CONCEPT d'avoir fait diligenter un constat d'huissier sans y avoir été autorisé par les organisateurs de la foire, assimilant la foire à un espace privé ; or la Foire de Rouen constitue un espace ouvert au public moyennant droit d'entrée et sans autre restriction de sorte que le moyen de preuve constitué par un constat d'huissier pratiqué dans un tel lieu est parfaitement admissible.

L'huissier s'est d'ailleurs borné à faire des constatations depuis le stand occupé par la société ASIAN CONCEPT sans interpeller lui-même aucune autre personne.

Et ses constatations ne sont pas contredites par le témoignage de Sophie B... gérante de la société GSA productions qui n'atteste que des animations du podium pour la seule journée du 7 avril 2006, faisant état de deux spectacles à partir de 18 heures et 20 heures de 20 minutes chacun, l'huissier ayant noté pour sa part qu'ils avaient duré de 40 à 45 minutes ; aucune indication n'est donnée en revanche dans l'attestation quant aux animations ou spectacles pour la journée du 9 avril sur laquelle portent également et principalement les constatations de l'huissier.

Enfin, l'attestation de Monsieur Bruno B..., responsable des animations, selon laquelle il n'a été contacté par aucune personne en vue de faire diminuer le volume sonore ne contredit pas davantage les attestations précises de Monsieur Julien A... responsable du stand de la société ASIAN CONCEPT qui atteste avoir rencontré à plusieurs reprises et durant toute la durée de la foire de Rouen Madame C... Denise, une des responsables de l'organisation de la foire, pour "les problèmes sonores et de vibrations sur le stand EXOTICA" ; il précise que celle-ci n'a jamais voulu prendre en compte sa demande, qu'il a donc averti son oncle Michel A... "pour qu'il vienne sur place entamer des négociations" ; Monsieur Michel A... gérant de la société atteste s'être déplacé pour rencontrer Madame C..., lui exprimer son mécontentement et pouvoir trouver une solution amiable à ce problème d'emplacement en vain.

L'attestation de Monsieur Bruno B... confirme d'ailleurs les propos de Messieurs A... selon lesquels leurs demandes ont été vaines, en soulignant qu'il n'a été averti à aucun moment d'un problème lié au niveau sonore des animations.

Dans ces conditions, l'envoi d'une mise en demeure aux organisateurs avertis des difficultés que rencontraient la société ASIAN CONCEPT était inutile sans compter qu'elle était difficile à mettre en oeuvre dans le temps relativement court de la foire et alors que les constatations de l'huissier ont été faites à la fin de celle-ci.

La circonstance que d'autres exposants MCR et VOGICA aient été satisfaits des animations de même que les visiteurs dans leur ensemble n'est pas de nature à combattre utilement les constatations de l'huissier et les dires de la société ASIAN CONCEPT dans la mesure où ces exposants étaient situés à distance du podium et que les visiteurs qui circulaient dans l'enceinte de la foire n'avaient pas des animations la même perception que la société ASIAN CONCEPT.

Quant à l'exposant Château d'Ax dont le stand se tenait en face de celui d'EXOTICA, il a lui-même attesté que ses vendeurs ont été satisfaits des animations "même s'il y a eu un peu de bruit quelquefois" ; il faut toutefois relever que le stand de la société Château d'Ax est situé en face et à environ sept mètres de celui occupé par la société ASIAN CONCEPT de sorte que sa perception du bruit n'est pas non plus strictement la même.

Il en résulte qu'il est suffisamment démontré que le niveau sonore qualifié de très important des animations empêchant toute conversation à voix normale, ce qui suffit à le quantifier, a procuré à la société ASIAN CONCEPT, compte tenu de son emplacement à proximité d'un podium d'animations dont elle n'avait pas été avertie de la présence, une gêne anormale que les organisateurs bien qu'avertis n'ont cherché ni à supprimer ni même à atténuer.

Sur le préjudice :

Des constatations de l'huissier, il résulte que des conversations à voix normale étaient impossibles pendant la durée des animations fréquentes sur le podium .

Compte tenu du temps nécessaire pour conclure une vente de meubles, la société ASIAN CONCEPT démontre ainsi suffisamment que l'environnement sonore a constitué une gêne pour les contacts avec les visiteurs.

La société ASIAN CONCEPT fait valoir que son chiffre d ‘affaires réalisé au cours de la foire a été de 71 270 euros ttc alors qu'elle avait réalisé en 2005 un chiffre de 111 500 euros ttc , qu'elle a dû payer tous frais compris pour participer à la foire une somme de 32 914,73 euros de sorte qu'il aurait été plus intéressant pour elle de ne pas participer à la foire, compte tenu du coût des investissements.

Or, le COMET fait justement observer que les chiffres produits par la société ASIAN CONCEPT concernant ses ventes sur la foire ne sont pas certifiés par un expert comptable.

A supposer néanmoins exacte la perte de chiffre d'affaires, il doit être rappelé que le chiffre d'affaires procède d'éléments qui ne sont pas seulement constitués par l'environnement commercial mais résulte également de l'attractivité et du coût des produits, de la qualité des vendeurs ...

En effet, la société Château d'AX bien qu'un peu plus éloignée du stand de la société ASIAN CONCEPT mais dans un environnement sensiblement comparable atteste des variations de son chiffre d'affaires à la hausse en 2006 de + 46 % par rapport à 2005 au contraire de la société ASIAN CONCEPT dont le chiffre d'affaires a été nettement plus élevé en 2005 qu'en 2006.

De plus, cette baisse s'inscrit pour la société ASIAN CONCEPT dans une conjoncture globalement difficile attestée par son gérant dans son rapport à l'assemblée générale de juin 2006 puisque les résultats de la société ont été négatifs en 2005, accusant un déficit de 15 000 euros.

Il s'ensuit que la société ASIAN CONCEPT échoue à faire la preuve d'un lien de causalité direct entre les nuisances sonores et la baisse de son chiffre d'affaires.

Et le tribunal a justement retenu que les nuisances constatées ont simplement constitué une perte de chance de réaliser de meilleures affaires dans un contexte plus serein.

En allouant à la société ASIAN CONCEPT une somme de 20 000 euros, il a justement évalué cette perte de chance ; sa décision sera confirmée en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes :

Le COMET qui succombe en ses prétentions sera débouté de ses demandes en dommages-intérêts pour procédure abusive et fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Il supportera les entiers dépens et paiera à l'intimée la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en outre de la somme allouée sur ce fondement en première instance.

PAR CES MOTIFS

Donne acte à la SCP Lejeune Marchand Gray Scolan de sa constitution aux lieu et place de la SCP Gallière Lejeune Marchand Gray ;

Dit n'y avoir lieu de rejeter des débats les pièces communiquées par le COMET le 17 mars ;

Dit que les deux attestations communiquées par la SARL ASIAN CONCEPT le 10 mars 2008 sont recevables en tant qu'éléments de preuve ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Déboute le Comité d'Organisation des Manifestations Economiques et Touristiques de toutes demandes ;

Condamne ce dernier aux entiers dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement au profit de Me Couppey avoué en application de l'article 699 du code de procédure civile et le condamne à payer à la société Asian Concept une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Ct0043
Numéro d'arrêt : 07/1621bis
Date de la décision : 29/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Rouen, 03 avril 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rouen;arret;2008-05-29;07.1621bis ?
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