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14/05/2008 | FRANCE | N°06/01650

France | France, Cour d'appel de Rouen, 14 mai 2008, 06/01650


R. G : 06 / 01650




COUR D'APPEL DE ROUEN


CHAMBRE 1 CABINET 1


ARRÊT DU 14 MAI 2008








DÉCISION DÉFÉRÉE :


TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DU HAVRE du 9 février 2006


APPELANTES :


Madame Sylvie X... épouse Y...


...

76930 OCTEVILLE SUR MER


représentée par la SCP DUVAL BART, avoués à la Cour


assistée de Me Sébastien Z..., avocat au Barreau d'EVREUX


Madame Béatrice X... épouse A...


...

27500 CORNEVILLE SUR

RISLE


comparante à l'audience


représentée par la SCP DUVAL BART, avoués à la Cour


assistée de Me Sébastien Z..., avocat au Barreau d'EVREUX








INTIMÉS :


Monsieur René B...


...

76930 OC...

R. G : 06 / 01650

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE 1 CABINET 1

ARRÊT DU 14 MAI 2008

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DU HAVRE du 9 février 2006

APPELANTES :

Madame Sylvie X... épouse Y...

...

76930 OCTEVILLE SUR MER

représentée par la SCP DUVAL BART, avoués à la Cour

assistée de Me Sébastien Z..., avocat au Barreau d'EVREUX

Madame Béatrice X... épouse A...

...

27500 CORNEVILLE SUR RISLE

comparante à l'audience

représentée par la SCP DUVAL BART, avoués à la Cour

assistée de Me Sébastien Z..., avocat au Barreau d'EVREUX

INTIMÉS :

Monsieur René B...

...

76930 OCTEVILLE SUR MER

représenté par la SCP LEJEUNE MARCHAND GRAY C..., avoués à la Cour

assisté de Me Bernard D..., avocat au Barreau du HAVRE

Madame Françoise E... épouse B...

...

76930 OCTEVILLE SUR MER

représentée par la SCP LEJEUNE MARCHAND GRAY C..., avoués à la Cour

assistée de Me Bernard D..., avocat au barreau du HAVRE

Madame Evelyne B... épouse X...

...

76110 ECRAINVILLE

représentée par Me Marie-Christine COUPPEY, avoué à la Cour

assistée de Me Nicole F..., avocat au Barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 19 mars 2008 sans opposition des avocats devant Monsieur BOUCHÉ, Président, rapporteur, en présence de Monsieur GALLAIS, Conseiller,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur BOUCHÉ, Président
Madame LE CARPENTIER, Conseiller
Monsieur GALLAIS, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Jean Dufot

DÉBATS :

A l'audience publique du 19 mars 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 mai 2008

ARRÊT :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 14 mai 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Monsieur BOUCHÉ, Président et par Jean Dufot, greffier présent à cette audience.

*
* *

Georges B..., né le 27 mai 1913 et son épouse, Henriette G..., née le 11 mai 1911, anciens exploitants agricoles à Octeville-sur Mer, sont décédés respectivement le 22 octobre 1999 et le 10 mai 2001, laissant pour leur succéder :

- René B... et Evelyne B... épouse X..., leurs enfants,

- et Sylvie X... épouse Y... et Béatrice X... épouse A..., deux de leurs petits-enfants venant en représentation de Micheline B... épouse X... leur mère décédée en 1982 ;

René B... a mandaté maître Michel H..., notaire à Montivilliers, pour régler sa succession, tandis que Béatrice et Sylvie X... se sont fait assister par leur propre notaire, respectivement maître Sylvain I... et maître Jean-Marie J... ;

A l'occasion de la communication de la déclaration de la succession de Georges B... établie par maître H..., Béatrice et Sylvie X... ont constaté que plusieurs avantages avaient été consentis en 1997 et 1998 par leurs grands-parents à leur fils :

- le 29 mars 1997,

* une dation en paiement à René B... au titre d'un salaire différé sur la période du 17 novembre 1966 au 17 novembre 1974,
* une donation à René B... portant sur la nue-propriété de diverses parcelles de terre de la " ferme de Villequier " situées sur la commune d'Octeville sur Mer,
* une dation en paiement au profit de René B... et de son épouse d'un montant de 1 131 170, 73 francs (172 445, 86 €) au titre des diverses factures de travaux payées par ces derniers en lieu et place des parents leurs bailleurs,

- le 30 mai 1998,

* une donation à René B... portant sur un corps de ferme situé à Octeville-sur Mer ;

Maître I... a rencontré de grandes difficultés pour obtenir de maître H... la communication de certains documents et les soeurs Sylvie et Béatrice X... ont finalement encore appris l'existence d'un legs de la quotité disponible de ses biens consenti par Henriette G... le 10 avril 2000 à son fils René et à sa fille Evelyne ;

Aucun partage amiable des successions n'a pu intervenir ;

Par acte des 3 et 4 décembre 2003, Béatrice et Sylvie X... ont assigné devant le tribunal de grande instance du Havre René B... et Evelyne K... sa soeur, puis le 22 septembre 2004, Françoise E..., l'épouse de René B... ;

Suivant jugement du 9 février 2006, le tribunal de grande instance du Havre, au visa du décret du 4 janvier 1955 et des articles 815 et suivants du code civil, a :
- ordonné qu'il soit procédé aux opérations de compte liquidation et partage des successions des époux B...,
- commis le président de la chambre des notaires de Seine Maritime avec faculté de désigner tel notaire de son choix pour y procéder à l'exception de Maîtres H... et AMOUR ou de leurs associés,
- dit que René B... n'a pas commis de recel successoral ;
- dit que Béatrice L... et Sylvie M... bénéficieront sur les successions d'une créance de salaire différé de 36 812, 65 € avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,
- dit que Evelyne K... bénéficiera d'une salaire différé de 62 121, 57 € avec mêmes intérêts,
- ordonné, avant dire droit, une expertise et désigné pour y procéder Jean-Pierre N... avec pour mission de :
- évaluer l'ensemble des biens immobiliers et mobiliers dépendant des successions ainsi que ceux ayant fait l'objet des donations et dations en paiement par les de cujus au profit de René B... et le cas échéant au profit de René B... et de Françoise E... son épouse,
- dit que Béatrice X..., Sylvie X... et Evelyne K... consigneront solidairement au greffe la somme de 1 200 €,
- condamné René B... à payer à chacune des demanderesses la somme de 1 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

***

Sylvie et Béatrice X... ont relevé appel de ce jugement assorti de l'exécution provisoire ;
Evelyne O...
X... a formé un appel incident ;

***

Sylvie X... épouse Y... et Béatrice X... épouse A...- les soeurs X...- demandent à la cour dans leurs écritures signifiées le 14 mars 2007, de juger que :
- René B... a commis un recel successoral ; par conséquent, les dations en paiement qui ont pu lui être consenties par le ou les de cujus doivent être déclarées nulles,
- celui-ci doit être privé de tout droit sur les biens recelés objets des dations et sur le prix du cheptel en application de l'article 792 ancien du code civil,
- quant aux donations, elles devront faire l'objet de rapports sur le fondement de l'article 860 ancien du code civil ;
subsidiairement, les appelantes demandent de dire que les dations en paiement et le non-paiement du cheptel constituent des donations déguisées au profit de René B... et que leur rapport doit être ordonné ;
enfin, elles demandent la condamnation de René B... à leur payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Elles font valoir que les dations en paiement, malgré leur publication, sont constitutives de fraudes au droit des héritiers réservataires qualifiables de recels, ce que démontrent la minoration systématique des biens et l'inexistence des créances censées fonder les dations ;

Evelyne B..., épouse de Philippe X..., dans ses écritures du 23 janvier 2008, reprend à son compte les conclusions des appelantes en les complétant et demande la condamnation de l'intimé à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Elle se prévaut du refus par René B... d'informations spontanées sur l'actif successoral et s'empare du rapport de l'expert Jean-Pierre N... déposé depuis le jugement déféré en septembre 2006 pour conclure que les dations en paiement ont eu pour objet de rompre l'égalité du partage ;

Aux termes de leurs écritures, signifiées le 30 janvier 2008, René B... et Françoise E... son épouse demandent à la cour, par confirmation du jugement entrepris, de condamner les appelantes et Evelyne K... au paiement de la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ils contestent le recel successoral, puisque les actes litigieux n'ont pas été faits dans la clandestinité et qu'ils ont été notariés et publiés à la Conservation des Hypothèques ;

SUR CE LA COUR,

Les appelantes limitent leur recours aux seules dispositions du jugement qui ont refusé de qualifier de recels les donations et les dations consenties à René B... et à son épouse ; elles n'ont par ailleurs jamais contesté la valeur et la portée du testament signé par leur grand-mère au profit de ses deux enfants ;

Ainsi, sont désormais définitives pour n'être pas critiquées la décision d'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage et la mission donnée à cette fin au président de la chambre des notaires, ainsi que les dispositions du jugement qui admettent le principe et les montants des créances de salaires différés d'Evelyne K... (62 121, 57 €) et des soeurs Sylvie et Béatrice X... en représentation de leur mère décédée (36 812, 65 €) ;

S'agissant des points litigieux, les appelantes procèdent désormais à une différence de régime entre les dations au nombre de deux, qu'elles qualifient de frauduleuses, et les donations, pour lesquelles le tribunal a ordonné une mesure d'expertise dont le rapport déposé en septembre 2006 leur permet de prétendre à des rapports à la succession, étant souligné que les parties ne demandent pas à la cour d'évoquer sur ce rapport ;

Sur les dations en paiement

L'article 792 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006 applicable en l'espèce, dispose que " les héritiers qui auraient diverti ou recelé des effets de succession, sont déchus de la faculté d'y renoncer ; ils demeurent héritiers purs et simples, nonobstant leur renonciation, sans pouvoir prétendre aucune part dans les objets divertis ou recelés " ;

Les appelantes soutiennent que les deux dations du 29 mars 1997 ont été faites ou acceptées en fraude dans le but de rompre l'égalité entre héritiers, donc en fraude de leurs droits, peu important que cette fraude ait été commise de concert avec les de-cujus ou même, ainsi que l'a retenu à tort le tribunal pour en écarter l'existence, et que les dations n'aient pas été clandestines pour avoir adopté l'apparence de la régularité d'actes rédigés en l'étude de maître H... et publiés ; en l'espèce, selon elles, la minoration volontaire de la valeur ou son exagération caractérisent ces recels ;

S'agissant de la dation consentie à René leur fils par les époux P... le 29 mars 1997 sur la nue-propriété d'une maison et de son terrain cadastrés ZA no327 sur le hameau d'Ecqueville à Octeville-sur mer, en compensation d'une créance de salaire différé de 420 548 francs (64 112, 15 €) pour une période de travail sur le fonds parental entre le 17 novembre 1966, jour de ses dix-huit ans, jusqu'au 17 novembre 1974, de très nombreuses attestations complétées par un contrôle de l'expert N... sont venues confirmer la réalité et la durée de ce travail et le mariage de l'intéressé en 1975 ; les contestations par les appelantes du bien-fondé du droit de leur oncle à un salaire différé pour les huit années considérées sont sans fondement ;

Les soeurs X..., auxquelles se joint Evelyne K..., soulignent l'artifice mis en place par les époux P... avec l'accord de leur fils pour faire coïncider le montant de sa créance de salaire et la valeur des immeubles donnés ; elles soutiennent que cette valeur a été sciemment sous-estimée, ce qui caractérise le recel, puisque l'expert l'a chiffrée en 2006 à 230 000 € ou à 135 000 €, selon qu'il est libre ou loué (soit le double) ;

Or, eu égard aux neuf années écoulées depuis la dation, le doublement de la valeur du bien occupé n'est pas démonstrateur d'une fraude et, fondée sur une exacte créance de René B..., cette dation n'est pas frauduleuse et ne doit pas même donner lieu à rapport à succession ;

S'agissant de la seconde dation consentie à René B... et à Françoise E... son épouse le 29 mars 1997 sur la nue-propriété d'un corps de ferme de plusieurs bâtiments avec maison d'habitation et de 9 hectares environ l'entourant en parcelles de labour, de valeurs respectives estimées de 750 000 francs et de 232 000 francs, en compensation de factures de travaux d'un montant total de 1 131 170, 73 francs (172 445, 90 €) déclarées payées en lieu et place des époux DEGENETAIS-PREUD'HOMME, force est de constater que les intimés ont tardé à produire et n'ont finalement produit tant devant le tribunal que devant l'expert que de rares factures qui, selon les appelantes, concernent des travaux d'entretien relevant de l'obligation du locataire et non des travaux d'amélioration pour lesquels, au demeurant, l'accord des propriétaires doit préalablement être sollicité et obtenu ;

Cependant, dès lors qu'il n'y a jamais eu de désaccord entre les parents et leur fils preneur sur la nature et l'étendue des travaux d'amélioration au sens de l'article L 411-69 du code rural, au point que ceux-ci ont fait l'objet de la part des bailleurs d'une indemnisation en nature de terre et de bâtiments, la question d'une omission d'autorisation préalable des bailleurs ne se pose pas ;
de même, toujours dans le souci d'éviter un démantèlement de l'exploitation familiale et " afin de réunir l'usufruit au décès du survivant de Mr et Mme Georges B... " (suivant les termes de l'acte), ce qui ne saurait se confondre avec une volonté de nuire à l'égalité des cohéritiers, n'est ni frauduleuse, ni entachée de nullité une dation au motif qu'elle a été consentie par les propriétaires en anticipation sur l'issue du bail et qu'elle a pour objet d'indemniser le locataire dont la créance de restitution ne naît normalement qu'en fin de ce bail en application de l'article L 411-69 sus-visé ;

René B... produit une vingtaine de factures et récapitulations de travaux immobiliers : selon l'expert, elles sont davantage la preuve de réalisations faites pour les besoins propres de l'exploitant, que celle d'améliorations apportées au fonds loué ;

Cependant, avec l'accord implicite incontestable des bailleurs, il convient de souligner que la réalisation par René B... d'un bâtiment agricole en bois traités achetés le 31 juillet 1989 pour le prix de 52 114 francs, à une époque où ses parents étaient déjà en retraite, a eu pour effet d'améliorer la valeur de l'exploitation et mérite récompense ;
il en est de même en 1981, ainsi qu'en fait foi le journal " TVA " tenu par René B..., lors de l'achat de matériaux précisément destinés à la construction d'une stabulation à hauteur totale de 59 874, 54 francs ;
il en va également de la création, puis de l'agrandissement d'un poulailler successivement en juillet 1977 et en août 1980 pour un coût total de 2 745, 96 francs ;

Par la suite, le 9 décembre 1995, Moïse Q..., entrepreneur de maçonnerie, s'est livré à un récapitulatif des travaux qu'il a réalisés chez René B... au cours des années, sans cependant les dater : une partielle confrontation avec des factures d'achat et la seule page du livre " TVA " que ce dernier a versées aux débats permettent de considérer pour acquis les autres dépenses d'amélioration suivantes :
- fosse à lisier 54 836, 82 francs,
- salle de traite construite en août 1981 137 812, 64 francs,
- hangar 121 552, 74 francs,
- bâtiment à veaux no1 46 768, 20 francs,
- silo à maïs construit en juin 1981 32 845, 41 francs ;
(les autres factures relèvent de l'entretien des bâtiments ou de la maison et restent à la charge du locataire) ;

Ainsi, contrairement aux prétentions des appelantes, la reconnaissance de dettes des époux P... n'est pas totalement dénuée de cause et, sous réserve de nouvelles justifications qu'apporterait encore René B... en cours de procédure, le montant total des améliorations justifiées à ce jour atteint approximativement la moitié de la dation, soit 508 550, 31 francs (77 528 €) ;

Ces exemples suffisent à affirmer que les soeurs X... et Evelyne K... n'établissent pas que René B... a de mauvaise foi soustrait ou caché aux successions de ses parents un bien qu'il aurait diverti pour rompre l'égalité du partage ; au demeurant, une libéralité, à la supposer déguisée, ne suffit pas en soi à caractériser un recel successoral ;

Il appartiendra seulement au bénéficiaire de la dation litigieuse de faire rapport dans les conditions de l'article 860 du code civil et sous le contrôle par le notaire liquidateur, au vu des conclusions de l'expertise et d'éventuelles nouvelles justifications, de la différence entre la valeur réelle des biens donnés et le total des améliorations apportées à l'exploitation au sens de l'article L 411-69 du code rural à hauteur de 77 528 € ;

Sur les donations

Les soeurs X..., qui avaient en première instance conclu à l'annulation de toutes les dations, donations et testament, sans distinction, pour cause de recel, se contentent en appel, sur le fondement de l'article 860 du code civil, de demander le rapport des donations : en effet, expressément faites " en avancement d'hoirie " et dénuées par là même de toute intention dissimulatrice, sont ainsi concernées la donation du 29 mars 1997 portant sur des parcelles de la " ferme de Villequier " d'une surface de près de 29 hectares, et celle du 30 mai 1998 portant sur un corps de ferme, tous biens situés à Octeville ;

L'article 860 dans son ancienne rédaction applicable dispose que " le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation " ;

S'agissant de la donation du 29 mars 1997 pour une valeur de biens déclarée de 587 000 francs (89 487 60 €) à une époque où ils étaient libres de toute occupation, par différence aux parcelles de " La Brière " données à bail par les grands-parents de Sylvie X... à celle-ci et à Vincent Y... son mari et ayant servi de comparaison à l'expert, les appelantes font observer que maître H... en a fait une sous-estimation manifeste, à l'hectare, ainsi qu'en atteste maître J... ;

S'agissant de la donation du 30 mai 1998 pour une valeur déclarée de 170 330 francs (25 966, 65 €) portant sur près de 5 hectares sur lesquels existe la maison d'habitation objet de la donation du 29 mai 1997, les appelantes soutiennent que plusieurs de ces parcelles ont constructibles et ont été délibérément sous-évaluées ;

Sans nécessité de se prononcer sur leurs valeurs réelles à l'époque des donations et à celle du partage, qui feront l'objet d'un débat devant le tribunal que les parties n'ont pas souhaité dessaisir, il convient d'inviter les bénéficiaires à rapporter tous ces biens à la succession dans les conditions de l'article 860 sus-visé, le notaire devant au demeurant prendre en considération l'attribution de la quotité disponible faite par Henriette P... dans son testament non contesté du 10 avril 2000 au profit d'Evelyne et de René B... ;

Sur l'achat du cheptel

Les soeurs X... soutiennent que René B... et son épouse n'ont jamais payé le cheptel que les parents leur ont donné à leur départ en retraite, suivant reconnaissance de dette du 29 juin 1974 de montants de 132 400 francs en animaux et de 82 700 francs en matériels : soit 215 100 francs (32 791, 80 €) ;

Or, en retrouvant, certes tardivement en octobre 2007, mais de manière efficace, trace de partie du paiement sous forme d'un avis de débit bancaire de 120 000 francs en faveur de Georges B... le 3 avril 1975, les intimés font la preuve, au moins partielle, de l'acquittement du prix ;

Toujours sous réserve de plus amples justifications, notamment d'un prêt escompté visé dans la reconnaissance de dette, René B... et son épouse doivent rapport à succession de la somme de 95 100 francs (14 498 €) ;

L'attitude morosive adoptée par René B... en première instance justifiait sa condamnation à indemniser les soeurs X... et Evelyne K... de leurs frais irrépétibles, d'autant que l'intéressé demande à la cour la confirmation du jugement ;

En appel, sous réserve de certains rapports à succession restés en suspens par la mesure d'instruction ordonnée, la confirmation du jugement déféré conduit à exclure toute indemnisation des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Comme en première instance, les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage ;

PAR CES MOTIFS, statuant dans les limites des appels,

Confirme le jugement du 9 février 2006 en ce qu'il a exclu l'existence de recel successoral ;

Précise que ne donne pas lieu à rapport aux successions des époux Georges et Henriette P... la dation du 29 mars 1997 en compensation de la créance de salaire différé de René B... ;

Sous réserve de l'exécution du testament de Henriette G... du 10 avril 2000 et de nouvelles justifications apportées par René B..., devront faire l'objet de sa part de rapports aux successions dans les termes de l'article 860 ancien du code civil :
- la dation du 29 mars 1997 en compensation des améliorations apportées au fonds loué dans la limite de 94 917, 91 euros,
- les donations des 29 mars 1977 et 30 mai 1998,
- la somme de 14 498 euros au titre du solde du prix du cheptel ;

Déboute les parties de toutes leurs autres prétentions complémentaires ou contraires ;

Renvoie les parties devant le tribunal de grande instance du Havre pour qu'il soit statué sur le rapport d'expertise judiciaire ;

Ordonne l'emploi des dépens d'appel en frais privilégiés de partage, et autorise les avoués de la cause à recouvrer ceux dont ils ont fait l'avance dans les conditions définies par l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Numéro d'arrêt : 06/01650
Date de la décision : 14/05/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance du Havre


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-05-14;06.01650 ?
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