R.G : 06/05047
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DES APPELS PRIORITAIRES
ARRET DU 18 DECEMBRE 2007
DÉCISION DÉFÉRÉE :
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ROUEN du 16 Novembre 2006
APPELANTE :
Madame Marie-Fanny X... épouse Y...
...
76560 BOUDEVILLE
représentée par la SCP GALLIERE LEJEUNE MARCHAND GRAY, avoués à la Cour
assistée de Me Guy Z..., avocat au barreau de ROUEN
INTIMEE :
M. LE DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DE SEINE-MARITIME
...
76037 ROUEN CEDEX
représentée par la SCP DUVAL BART, avoués à la Cour
et Monsieur B..., Inspecteur Général des Impôts
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré :
Madame PLANCHON, Président
Madame PRUDHOMME, Conseiller
Madame MANTION, Conseiller
Madame le Président a été entendue en son rapport oral de la procédure avant plaidoiries
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme NOEL-DAZY, Greffier
DEBATS :
A l'audience publique du 16 Octobre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 Novembre 2007 date à laquelle le délibéré a été prorogé au 11/12/2007 puis à ce jour
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 18 décembre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,
signé par Madame PLANCHON, Président et par Mme NOEL-DAZY, Greffier présent à cette audience.
*
* *
Faits et procédure :
Madame Jacqueline C... est décédée le 22 octobre 2000, laissant pour lui succéder sa fille adoptive, Marie Fanny X..., née le 14 avril 1966. Celle-ci, devenue par la suite Madame Y..., avait fait l'objet d'un jugement prononçant le 14 février 1992 son adoption simple par Madame C....
Les déclarations de succession ont été déposées le 24 avril et le 19 juin 2001, lesquelles ont fait l'objet d'un contrôle. Le service de fiscalité immobilière a adressé à Me D..., notaire chargé de la succession, le 24 août 2001, une lettre lui demandant d'apporter la preuve des soins ininterrompus exigés par l'article 786-3 du Code Général des Impôts.
Pour le calcul de l'impôt, l'héritière avait déclaré bénéficier du régime de faveur applicable aux enfants, à savoir l'abattement de 300 000 F sur sa part taxable et le tarif réduit des droits.
Au vu des documents justificatifs produits, le service vérificateur a adressé une notification de redressement n 2005 25 le 20 juin 2002, informant le contribuable de son intention d'intégrer à l'actif successoral un compte bancaire non déclaré et de rejeter du passif pour partie la somme indiquée au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2000. En outre sur le fondement de l'article 786 du Code Général des Impôts, le service a remis en cause la liquidation des droits de succession en appliquant, sur la part taxable de l'héritière, l'abattement de 10 000 F visé à l'article 788-II du Code Général des Impôts et le tarif des droits à 60 % entre non-parents.
Madame X... le 16 juillet 2002 a contesté la position de l'Administration Fiscale. Toutefois, le 30 juin 2003, l'Administration, maintenant sa position quant à l'application de l'article 786-3 , a mis en recouvrement l'imposition pour un montant de 374 234.
Par décision du 13 janvier 2004, le directeur des services fiscaux a prononcé le dégrèvement intégral du redressement en raison d'une irrégularité de la procédure.
Le 25 février 2004, une nouvelle notification de redressement, numéro 2120, a été adressée par le service, fondée sur les mêmes éléments que la précédente, pour la somme de 427 940 €.
Le 24 mars 2004, Mme X... a contesté ce redressement en ce qu'il remet en cause les droits de succession initialement acquittés s'agissant d'une adoption simple.
À titre subsidiaire, elle acceptait le principe du redressement sur le rejet partiel du passif, sous réserve d'une vérification ultérieure de son montant.
Le 3 novembre 2004, un avis de mise en recouvrement pour la somme de 427 940 € a été émis.
Madame X... a formé une réclamation contentieuse qui a été rejetée.
Le 28 juillet 2005, Madame X... a fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de ROUEN le Directeur des services fiscaux de SEINE-MARITIME pour se voir décharger de l'imposition mise en recouvrement.
Par jugement du 16 novembre 2006, le Tribunal de Grande Instance de ROUEN a débouté Madame Marie Fanny X... de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens.
Madame X... a relevé appel le 15 décembre 2006 de ce jugement.
Prétentions des parties :
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 28 septembre 2007 et expressément visées, l'appelante demande à la Cour de réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau, de :
-déclarer mal fondée la décision de mise en recouvrement du redressement de M. Le Directeur Des Services Fiscaux de SEINE-MARITIME en date du 30 mai 2005,
-prononcer la décharge des droits en principal s'élevant à la somme de 420 940 ,
-prononcer la déchéance des intérêts de retard et pénalités,
-condamner L'Administration Fiscale à lui verser la somme de 4500 en application de l'article 700 du N.C.P.C. et en tous les dépens de première instance et d'appel.
Mme X... estime que le juge a fait une mauvaise application de l'article 786-3 du Code Général des Impôts en refusant de la faire bénéficier de l'exception prévue à cet article prévoyant le régime fiscal applicable aux transmissions en ligne directe en faveur des adoptés qui, soit dans leur minorité et pendant cinq ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité et pendant 10 ans au moins, auront reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus. Elle lui reproche d'avoir rajouté au texte et érigé en condition subordonnant l'application de l'article 786-3 du Code Général des Impôts la démonstration de la charge exclusive par l'adoptant des soins et des secours apportés à l'adopté. Mme X... critique aussi la position de l'Administration Fiscale qui considère que les soins et secours visés par cet article doivent s'entendre comme la totalité des frais d'éducation et d'entretien à l'adopté pendant le délai prévu. Elle se réfère à la jurisprudence du Tribunal de Grande Instance de la Roche-sur-Yon en date du 31 janvier 1978. Elle fait grief aussi au jugement d'avoir rajouté une condition de recevabilité en exigeant la preuve de secours et de soins non interrompus durant sa minorité et d'avoir retenu une appréciation restrictive de la notion de secours et de soins. Elle rappelle que l'institution de l'adoption simple qui n'a pas pour vocation de substituer l'adoptant aux parents et de rompre tout lien entre l'adopté et ses parents et que l'Administration Fiscale ne peut invoquer à son encontre l'instruction administrative du 20 décembre 1996.
Elle estime rapporter la preuve de ce qu'elle remplit les conditions visées par l'article 786-3 pour bénéficier du régime fiscal spécial.
Mme X... conteste aussi le taux d'intérêt de retard cumulé atteignant 25,5 % pour 34 mois, ces intérêts de retard n'étant que la conséquence directe de l'irrégularité de la procédure suivie à son encontre. En outre, le taux pratiqué excède ce qu'il est nécessaire pour réparer le préjudice financier subi par l'Administration Fiscale du fait d'un encaissement tardif et constitue en réalité des pénalités qui, en tant que telles, auraient dû être motivées.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 30 mai 2006 et auxquelles la Cour se réfère pour l'exposé des moyens et prétentions soulevées, le Directeur Des Services Fiscaux de SEINE-MARITIME demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
- dire et juger que Mme Marie-Fanny X... épouse Y... ne saurait obtenir le dégrèvement de l'imposition supplémentaire mise à sa charge,
- confirmer en conséquence la décision de rejet de sa réclamation prise par l'administration le 30 mai 2005,
- rejeter la demande de Mme X... fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et la condamner aux entiers dépens de l'instance avec droit de recouvrement direct au profit de la S.C.P. DUVAL BART.
L'Administration Fiscale soutient que Mme X... ne remplit pas les conditions pour bénéficier du régime de faveur prévue à l'article 786-3 du Code Général des Impôts dès lors qu'il n'est pas établi que l'adoptant a assuré la totalité des frais d'entretien et d'éducation de l'adopté pendant le délai requis, sa seule participation étant insuffisante et la charge de cette preuve incombant à l'adoptée qui, en l'occurrence, échoue à le faire.
S'agissant des intérêts de retard, l'Administration Fiscale fait valoir que le décompte des intérêts de retard a été établi conformément à l'article L. 180 du Livre Des Procédures Fiscales , soit jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle de l'enregistrement de la déclaration. Madame X... n'est pas fondée à invoquer les dispositions de l'article 6 de la Convention Européenne Des Droits De L'Homme dès lors qu'il s'agit d'intérêts de retard. L'Administration Fiscale soutient en outre que ces intérêts de retard ne constituent pas des sanctions mais seulement une réparation du préjudice financier du fait du paiement tardif des impôts exigibles.
SUR CE,
Attendu que selon l'article 786-3 du Code Général des Impôts, pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il n'est pas tenu compte du lien de parenté résultant de l'adoption simple ; cette disposition n'est pas applicable aux transmissions entrant dans les prévisions de l'alinéa 1er de l'article 368-1 du Code Civil ainsi qu'à celles faites en faveur :
….
3 d'adoptés qui soit dans leur minorité et pendant 5 ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité et pendant dix ans au moins, auront reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus.
Attendu qu'il en résulte que le principe est de ne pas tenir compte du lien de parenté de l'adoption simple ; que le 3 constitue une exception et il incombe en conséquence à Mme X... qui prétend en bénéficier d'établir qu'elle en remplit les conditions ;
Que s'agissant de la preuve d'un fait, elle peut être rapportée par tous moyens et les prescriptions édictées par la circulaire évoquée par l'administration fiscale et selon laquelle cette preuve devrait être rapportée selon des modes de preuve compatibles avec la procédure écrite au moyen de documents tels que quittances, facture, lettres missives et papiers domestiques, ne sont pas opposables au contribuable ;
Attendu que si la preuve n'est pas rapportée de secours et de soins non interrompus pendant une durée de 5 ans durant la minorité, le jugement n'est pas critiquable en ce qu'il a relevé que les secours et les soins devaient avoir commencé pendant la minorité dès lors que la période de dix ans prévue à l'article 786-3 du Code Général des Impôts doit chevaucher la minorité et la majorité ;
Que les secours consistent en une aide financière et matérielle pouvant être donnée en nature tandis que les soins ne doivent pas être entendus comme destinés uniquement à assurer le maintien de la santé ou sa restitution mais aussi comme l'activité autour de quelqu'un en vue de pourvoir à ses besoins matériels mais aussi intellectuels et affectifs ;
Que l'article 786-3 ne requiert nullement la preuve de ce que l'enfant a été à la charge exclusive de l'adoptant ni qu'il ait assumé en totalité les frais d'éducation et d'entretien de l'adopté ; qu'en effet, le législateur n'aurait pas manqué de le préciser ; que toutefois, cette prise en charge doit être continue et principale pour être éligible au régime de cette exception, et non pas subsidiaire, étant rappelé que le principe en matière d'adoption simple est de ne pas tenir compte de ce lien de parenté ;
Attendu que dans sa réclamation contentieuse du 5 août 2003, Mme Marie-Fanny X... expose que Mme C... et son mari l'ont hébergée les mercredis, les fins de semaine, les jours fériés et les vacances ;
qu'elle précise dans un mémoire que lorsque ses parents ont loué à partir de 1971 et jusque 1992 la maison de Mme SAVOYE située à côté de son cabinet de kinésithérapie à YVETOT, elle s'y rendait journellement, les mercredis, les fins de semaine et les vacances ;
Que la déclaration de succession reprenait les termes de l'acte de notoriété adoptive du 21 septembre 1991 précisant que Mme C... accueillait Mademoiselle E... pendant ses vacances scolaires et au minimum une fois par semaine et qu'elle a acquitté diverses dépenses pour le compte de cette dernière et notamment une année complète d'études (année 1987-1988 2ème année de BTS) et qu'elle a toujours suivi Mademoiselle E... tant dans ses problèmes personnels que financiers ;
Attendu que Madame X... verse aux débats l'attestation de sa mère, Madame France E... qui confirme ces circonstances, expliquant qu'absorbée à partir de 1982 par la tenue de son magasin à Yvetot, elle ne pouvait s'occuper de sa fille et Madame C... qui venait de perdre son mari et de prendre sa retraite, s'est beaucoup occupée de Fanny, la cherchant au lycée et la ramenant chez elle à DOUDEVILLE, l'emmenant dans ses sorties et voyages ; que ce témoin précise l'aide très importante que Mme C... lui apportée à elle et son mari en leur louant un logement pour un prix modique, en se portant caution pour des prêts professionnels et en les aidant financièrement lorsqu'ils ont été licenciés l'un et l'autre en 1987 par la SARL qui les employait à la suite d'une mésentente avec la gérante ; que c'est encore elle qui les aida à remonter une entreprise d'ambulances en 1987 ;
Attendu que le père de Mme X... confirme les termes de cette attestation :
Que ces déclarations sont également confirmées par l'attestation de Mme Florence F... qui a travaillé deux étés dans le cabinet de kinésithérapie de Madame
C...
et par l'attestation de Monsieur G..., maire de DOUDEVILLE qui souligne la forte implication de Madame C... dans son éducation et son entretien après le décès de son mari ;
Qu'en outre sont versées aux débats des photographies, correspondances diverses témoignant de ce que Fanny X... était présente et associée à de nombreuses séquences et manifestations familiales chez Madame C... et réciproquement ;
Attendu qu'il ressort de ces différents éléments de preuve qu'avant la retraite et le veuvage de Madame C... en 1982, cette dernière s'occupait de Fanny E... de manière très régulière, assimilable aux soins et attentions prodigués par une grand-mère à sa petite fille mais qui ne correspondent pas à la notion de secours et de soins non interrompus exigée par l'article 786-3 alors que l'enfant n'a jamais cessé d'habiter chez ses parents qui pourvoyaient à titre principal à son éducation, à son entretien et à ses soins ;
Attendu que la récapitulation dressée par Mme X... des dépenses effectuées par Madame C... à son profit à partir du cahier rouge (annexe 9) et autres pièces versées aux débats (souches de chèques, relevés de compte...) amène les observations suivantes :
1983 : le total des dépenses consigné au cahier rouge ne dépasse pas au plus la somme 3300 F et concerne parfois plusieurs personnes (Mme C..., Mme X... et sa sœur Marie)
1984 : le total des dépenses invoquées ne dépasse pas 3327 F et Mme X... n'est pas toujours en mesure de justifier de ce que la dépense la concerne ;
1985 : un total de dépenses de 15197 F dont 14326 F la concerne exclusivement et correspondant en grande partie à l'achat de meubles de valeur et de cadeaux ;
1986 : total de dépenses de 9610 F correspondant à l'achat de cadeaux divers et à un versement de 3000 F pour le financement de sa première année de BTS chez Pigier
1987 : un total de dépenses de 20.660 F dont 15.000 F correspondant au financement de sa première année de BTS, les autres dépenses correspondant à des cadeaux ou des dépenses de voyage profitant à plusieurs personnes ;
1988 : un total de dépenses de 15.883 F dont 14.000 F correspondant au financement de la seconde année de BTS de Mme X..., la différence à des cadeaux et dépenses de voyages et de vacances communes à plusieurs personnes ;
1989 : 5720 F dont 5000 F à titre d'aide pour l'installation de Mme X... dans un studio à PARIS où elle a trouvé du travail, le reste pour l'achat d'éléments d'équipement
1990 : un total de 5588 F correspondant surtout à des cadeaux et des petits séjours effectués avec Mme C... et donc à des frais communs pris en charge par Mme C... ;
1991 : un total de 11.372 F dont 2000 F à titre de premier versement des études de Mme X... à l'INFATH, le reste à titre de cadeaux et de dépenses de voyage donc communes à deux personnes ;
1992 : total de dépenses de 16.872 F dont 9750 F au titre du financement des études à l'INFATH et le solde essentiellement au titre des honoraires d'avocat pour la procédure d'adoption , le reste en cadeaux et loisirs ;
1993 : un total de dépenses de 6804 F correspondant pour l'essentiel à des cadeaux
1994 : un total de dépenses de 50.310 F dont cadeaux et participation aux frais pour la naissance de sa fille Pauline et 20.174 F pour les travaux d'aménagement (peinture, carrelage, parquets, électricité) de la maison du ... appartenant à Mme C... qui l'a mis à disposition de Mme X... et de son mari ;
1995 : 111.450 F correspondant pour l'essentiel aux travaux d'aménagement de la maison de la rue Bellanger (couverture, isolation, chape de béton pour une chambre, électricité, travaux de chauffage, plomberie, sanitaires, réfection des chêneaux)
1996 : 16.845 F dont 3120 F pour les travaux d'aménagement de la maison et 12.000 F à titre de « don » pour compensation des loyers dus à Mme C... (1000 F par mois)
1997 : 8458 F correspondant à des cadeaux, participation à des frais de vacances, cadeau de 5000 F à titre de dépannage
1998 : 14.568 F travaux d'édification d'une cloison dans la maison de la rue Bellanger
1999 : 16.850 F dont 14.343 F de travaux d'aménagement de la maison et deux cadeaux ;
2000 : 3.307 F : travaux d'aménagement de la maison (électricité) ;
Attendu qu'il ressort de cette comptabilité tenue par Mme C... dans son livre rouge qu'à partir de 1982, devenue veuve, elle s'est davantage consacrée à Fanny E... ; qu'elle l'a emmenée en voyage, prenant en charge les frais d'hostellerie et de restaurant ; qu'elle lui a offert des vêtements et divers cadeaux parfois de valeur importante ;
Attendu que Fanny E... est devenue majeure en 1984 ;
qu'entre 1982 et 1984 et jusqu'à sa majorité, la participation de Mme C... aux frais d'entretien et d'éducation de Fanny E... reste limitée ;
qu'il est établi que Madame C... a entièrement financé sa scolarité aux cours PIGIER en BTS de Tourisme à ROUEN en 1987 et 1988 et a exposé ainsi la somme totale de 21.000 F en 12 virements ;
Que Madame C... a aussi apporté son aide à Madame X... lorsqu'elle s'est installée à PARIS en 1987, l'aidant à trouver un logement ; qu'en 1991, Madame C... finance les études reprises par Fanny E... à l'INFATH et a versé à ce titre la somme de 11.750 F en 9 versements ;
Qu'en 1996, Mme C... a souscrit une assurance vie au profit de Mme X... pour un montant de 210.288 F ;
Attendu que Madame C... a mis à la disposition de Madame Marie-Fanny X... et de son mari en 1995 une maison lui appartenant moyennant un loyer modique de 1000 F par mois ; que les travaux effectués dans cette maison pour son amélioration ne peuvent être pris en compte au bénéfice de Fanny E... poursuivant aussi un intérêt fiscal même s'ils profitaient aussi à l'appelante et son mari ;
Attendu qu'hormis deux périodes durant lesquelles Madame C... a assumé les frais de scolarité de Fanny E... de manière continue, la condition de secours et de soins ininterrompus n'est pas réalisée ;
Attendu que les secours non interrompus exigés par l'article 786-3 du Code Général des Impôts, à défaut d'hébergement et de prise en charge par l'adoptante à son domicile de sa fille adoptive, ne pouvaient se traduire que par le versement d'une pension ou de toute aide permanente et régulière et suffisamment significative ;
que tel n'a pas été le cas ;
Attendu que le jugement sera en conséquence confirmé par motifs propres et adoptés en ce qu'il a débouté Madame X... de sa contestation du principal du redressement litigieux ;
Sur la contestation les intérêts de retard :
Sur leur décompte
Attendu que Mme X... soutient que les intérêts de retard auraient dû être limités au montant figurant dans la première procédure de redressement ;
Attendu que selon l'article 1727 et 1727A du Code Général des Impôts, toutes sommes dont l'établissement ou le recouvrement incombe à la Direction Générale Des Impôts, qui n'a pas été acquitté dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. À cet intérêt de retard s'ajoute, le cas échéant, des sanctions prévues au présent code ; l'intérêt de retard est calculé à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel l'impôt devait être acquitté jusqu'au dernier jour du mois du paiement ;
Attendu que selon l'article L. 180 du Livre des Procédures Fiscales, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle de l'enregistrement de la déclaration ;
Que l'administration fiscale a décompté les intérêts comme suit :
- le point de départ des intérêts, correspondant au 1er jour du mois suivant le délai légal pour souscrire la déclaration de succession est le 1er mai 2001 ;
- le point d'arrivée, correspondant au dernier jour du mois de la notification de redressement, est le 29 février 2004, le nombre de mois entre ces dates étant de 34, le taux mensuel des intérêts de 0,75 % multiplié par ce nombre aboutit au taux cumulé de 25,50 % ; que le total cumulé des intérêts a été fixé à la somme de 86 952 € ;
Attendu que la Cour constate que l'Administration Fiscale a effectué un calcul exact et conforme aux textes précités ; qu'en effet, la notification du deuxième redressement après annulation du premier a été effectuée à une date proche de l'expiration du délai pour le notifier mais à l'intérieur du délai de reprise, de sorte que cette taxation n'encourt aucune critique sur le plan de la stricte conformité à l'article 1787 du Code Général des Impôts ;
Sur leur compatibilité à la Convention Européenne des Droits de l'Homme :
Attendu que Madame Marie-Fanny X... soutient que les droits et les intérêts de retard réclamés, dès lors qu'ils la contraignent à réaliser l'ensemble de l'actif de la succession, revêtent un caractère confiscatoire et par conséquent un caractère de sanction qui aurait dû faire l'objet d'une motivation spéciale de l'administration fiscale ; qu'il y a déséquilibre entre la situation du contribuable qui ne peut prétendre qu'à la perception de l'intérêt au taux légal en cas de sommes dues par l'administration fiscale et l'intérêt de retard dû à cette dernière par le contribuable ;
qu'elle invoque les dispositions de l'article 14 de La Convention Européenne Des Droits De L'Homme lequel dispose que « la jouissance des droits et libertés reconnues dans la présente convention doit être assurée sans distinction aucune , fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toutes autres situations » ; qu'elle invoque aussi un avis du Conseil d'Etat en date du 12 avril 2002 (affaire SA Financière LABEYRIE) qui juge critiquables les intérêts de retard au regard de cet article 14 précité ;
Attendu que même si l'article 1787 du Code Général des Impôts trouve place dans le chapitre intitulé « Sanctions fiscales », il est jugé de manière constante par le Conseil d'Etat et par la Cour de Cour de Cassation que l'intérêt de retard n'est pas une sanction, qu'il vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat et que la différence entre l'intérêt légal et l'intérêt de retard ne viole pas la CEDH ; que l'article 1787 précise que les intérêts de retard sont dus indépendamment de toutes sanctions ce qui implique qu'ils n'en ont pas le caractère ;
Qu'il en résulte aussi que les intérêts de retard n'ont pas lieu d'être motivés ;
Sur les frais et dépens :
Attendu que Madame Marie-Fanny X... qui succombe en son appel et ses prétentions sera condamnée aux dépens ;
Que l'équité doit conduire à rejeter la demande de l'administration Fiscale fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile eu égard aux circonstances de la cause, au montant des droits de mutation dus et à la situation financière difficile de Madame X... ainsi que de ses charges de famille ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, et en dernier ressort :
Déclare Madame Marie-Fanny X... recevable mais non fondée en son appel et en ses prétentions. L'en déboute.
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré.
Condamne Madame X... aux dépens de première instance et d'appel.
Déboute l'Administration Fiscale de sa demande fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le Greffier Le Président