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31/10/2007 | FRANCE | N°06/701

France | France, Cour d'appel de Rouen, Ct0038, 31 octobre 2007, 06/701


R.G : 06/00701

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE 1 CABINET 1

ARRÊT DU 31 OCTOBRE 2007

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'EVREUX du 20 janvier 2006

APPELANTS :

Madame Laurette X... épouse Y...

...

94120 FONTENAY SOUS BOIS

représentée par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assistée de Me Yves Z..., avocat au Barreau d'EVREUX

Monsieur Bertrand X...

...

76150 MAROMME

représenté par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assisté de Me Yves Z..., avocat au B

arreau d'EVREUX

Monsieur Bruno X...

...

27460 IGOVILLE

représenté par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assisté de Me Yves Z..., avocat au Barreau d...

R.G : 06/00701

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE 1 CABINET 1

ARRÊT DU 31 OCTOBRE 2007

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'EVREUX du 20 janvier 2006

APPELANTS :

Madame Laurette X... épouse Y...

...

94120 FONTENAY SOUS BOIS

représentée par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assistée de Me Yves Z..., avocat au Barreau d'EVREUX

Monsieur Bertrand X...

...

76150 MAROMME

représenté par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assisté de Me Yves Z..., avocat au Barreau d'EVREUX

Monsieur Bruno X...

...

27460 IGOVILLE

représenté par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assisté de Me Yves Z..., avocat au Barreau d'EVREUX

INTIMÉS :

Madame Gisèle A... épouse B...

Chez M. Bernard X...

...

27460 IGOVILLE

représentée par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

assistée de Me Gérard C..., avocat au Barreau d'EVREUX

Monsieur Bernard X...

...

27460 IGOVILLE

représenté par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

assisté de Me Gérard C..., avocat au Barreau d'EVREUX

Monsieur Christophe X...

...

76520 LES ANTHIEUX PORT-SAINT-OUEN

représenté par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

assisté de Me Gérard C..., avocat au Barreau d'EVREUX

Madame Pierrette X... épouse D...

...

27460 IGOVILLE

représentée par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

assistée de Me Gérard C..., avocat au Barreau d'EVREUX

Madame Antoinette X... épouse E...

...

77400 LAGNY SUR MARNE

représentée par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

assistée de Me Gérard C..., avocat au Barreau d'EVREUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 24 septembre 2007 sans opposition des avocats devant Monsieur BOUCHÉ, Président, en présence de Madame LE CARPENTIER, Conseiller, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur BOUCHÉ, Président

Madame LE CARPENTIER, Conseiller

Monsieur GALLAIS, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Jean Dufot

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 septembre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 31 octobre 2007

ARRÊT :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 31 octobre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,

signé par Monsieur BOUCHÉ, Président et par Jean Dufot, greffier présent à cette audience.

*

* *

LES FAITS ET LA PROCEDURE :

Madame Gisèle A..., née le 25 avril 1934 et Monsieur Bernard Marcel X..., né le 2 novembre 1925, se sont mariés le 13 novembre 1954, sans contrat de mariage préalable. Ils ont eu neuf enfants : Antoinette, Pierrette, Laurette, Bruno, Christophe, Stéphane (décédé), Bertrand, Bernard F..., Gilles (décédé).

Leur divorce a été prononcé par un jugement rendu le 24 juin 1981 par le Tribunal de grande instance de ROUEN.

Madame A... s'est remariée le 3 septembre 1983 avec Monsieur B..., aujourd'hui décédé.

Par acte du 9 janvier 2003 Monsieur Bernard Marcel X... et Madame A... ont vendu à leur fils, Monsieur Bernard Gérard X... la maison d'habitation dépendant de leur communauté et habitée par Monsieur X... située ..., moyennant un prix de 46.000€, revenant :

- à Monsieur X... pour 23.000€, convertie en bail à nourriture,

-à Madame A... pour 23.000€ quittancée à l'acte.

Monsieur Bernard Marcel X... est décédé le 17 novembre 2003, soit 10 mois plus tard ;

Par acte du 26 juillet 2004, Madame Laurette X..., épouse Y..., Monsieur Bertrand X... et Monsieur Bruno X... ont fait assigner devant le Tribunal de grande instance d'EVREUX Madame Gisèle A..., leur mère et leurs frères et sœurs, Monsieur Bernard Gérard X..., Monsieur Christophe X..., Madame Pierrette X..., épouse D..., Madame Antoinette X..., épouse E... afin, notamment qu'il soit ordonné de procéder aux opérations de compte liquidation et partage de la succession de Monsieur Bernard Marcel X..., d'ordonner la réintégration dans le patrimoine du défunt de la maison située à IGOVILLE, condamner Monsieur Bernard Gérard X... à payer à la succession la moitié de la contre-valeur de cet immeuble au jour du partage, prononcer en effet la nullité de la vente pour vice du consentement sur le fondement des articles 1108 et suivants du Code civil ou du fait de la conversion du prix payé en bail à nourriture pour défaut de prix sérieux et défaut d'aléa, subsidiairement, prononcer la nullité de la vente du bien pour lésion sur le fondement des articles 1304 et suivants du Code civil, et prononcer en tout état de cause la résiliation de la vente faute par le bénéficiaire d'avoir rempli les obligations qui étaient les siennes en vertu du bail à nourriture.

Les défendeurs ont sollicité, outre le rejet des demandes adverses, l'ouverture des opérations de liquidation de la communauté ayant existé entre Monsieur Bernard Marcel X... et Madame A... ainsi que la condamnation de la succession de Monsieur Bernard Marcel X... à payer à Madame A... la somme de 7.340€ à titre d'indemnité d'occupation.

Par jugement du 20 janvier 2006, le Tribunal de Grande Instance d'EVREUX a :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la communauté ayant existé entre Monsieur Bernard X... et Madame Gisèle A... et de la succession de Monsieur Bernard X... décédé le 17 novembre 2003 à SAINT AUBIN LES ELBEUF,

- dit que dans le cadre desdites opérations, il sera fait application des dispositions de l'article 918 du Code civil en ce qui concerne l'immeuble situé ... vendu le 9 janvier 2003 à Monsieur Bernard X... fils,

- dit que la succession de Monsieur Bernard X... est redevable envers l'indivision post communautaire THENARD-SANDRET d'une indemnité d'occupation de 5 520€,

- condamné la succession de Monsieur Bernard X... à payer à Madame Gisèle A... la somme de 2 760€ au titre de sa part dans l'indemnité d'occupation,

- ordonné le rapport à la succession par Monsieur Bernard X... fils de la somme de 3 400€,

- débouté Madame Laurette X..., Monsieur Bertrand X..., et Monsieur Bruno X... de leurs demandes suivantes :

= la nullité de la vente du 9 janvier 2003 de l'immeuble situé ... suivant acte authentique de Me G... pour vice du consentement sur le fondement des articles 1108 et suivants du Code civil ou du fait de la conversion du prix payé en bail à nourriture pour défaut de prix sérieux et défaut d'aléa,

=.la nullité de la vente de cet immeuble pour lésion sur le fondement des articles 1304 et suivants du Code civil,

= l'expertise pour déterminer la valeur de cet immeuble dans le cadre de rescision pour lésion,

= la nullité de la vente dudit immeuble faute par le bénéficiaire, Monsieur Bernard Gérard X... d'avoir rempli les obligations qui étaient les siennes en vertu du bail à nourriture,

= la condamnation de Monsieur Bernard X... fils à payer à la succession les sommes de 24 000€, 7 700€, 11 000€ et 3 400€ (sous réserve du rapport à la succession sur la somme de 3 400 euros avec intérêts au taux légal à compter de chaque prélèvement,

= l'application à Monsieur Bernard X... fils des sanctions du recel successoral prévues à l'article 792 du Code civil,

= l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation partage ;

Madame Laurette Y..., née X..., Monsieur Bertrand X... et Monsieur Bruno X... ont relevé appel de cette décision.

LES PRETENTIONS DES PARTIES :

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 12 septembre 2006, auxquelles la Cour se réfère expressément pour l'exposé des moyens, conformément aux dispositions de l'article 455 du Nouveau code de procédure civile, Madame Laurette Y..., née X..., Monsieur Bertrand X... et Monsieur Bruno X... exposent notamment que :

- l'acte de vente litigieux a été signé au domicile de Monsieur Bernard Marcel X... âgé de 77 ans, qui avait du mal à marcher et ne sortait plus ; il résulte des certificats médicaux de novembre 2003, lors de l'hospitalisation que son état de santé était obligatoirement très dégradé en janvier 2003 en raison notamment d'ulcères aux jambes non soignés ; il vivait confiné à son domicile, refusant les visites ; il était hors d'état de manifester sa volonté ;

- le prix de 46 000 euros n'est pas sérieux ; le bien ayant une valeur de au moins 120 000 euros d'après les attestations d'agences immobilières ;

- Monsieur Bernard X... n'a pas rempli ses obligations puisqu'il n'a pas fait soigner son père ni ne justifie lui avoir fait des courses alors qu'il était régulièrement sur le terrain pour son activité de mécanique automobile ; c'est une de ses sœurs qui a fait intervenir un médecin en novembre 2003 ; il n'a fourni aucune contre partie à la vente qui doit être déclarée nulle ; son père avait une retraite tout à fait suffisante et le bail à nourriture ne présentait aucun intérêt pour lui ;

- la communauté ayant existé entre Madame A... et son premier mari a été liquidée lors de la vente de l'immeuble qui constituait le seul actif et Madame A... ne peut demander d'indemnité d'occupation ;

Ils demandent en conséquence à la Cour de :

Les recevoir en leur appel ;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- ordonné qu'il soit procédé aux opérations de compte liquidation et partage de la succession de Monsieur Bernard Marcel X... né à SAUSSEUZEMARE EN CAUX (Seine-Maritime) le 2 novembre 1925, décédé le 17 novembre 2003 à SAINT AUBIN LES ELBEUF.

- désigné Monsieur le Président de la Chambre des Notaires de l'Eure ou son délégataire pour procéder auxdites opérations.

- Commis Monsieur CARRIERE H... vice-Président ou son délégataire pour surveiller lesdites opérations et faire rapport s'il y a lieu.

- Dit qu'en cas d'empêchement des Juge ou Notaire commis, il sera procédé à leur remplacement par ordonnance du Président du Tribunal de Grande Instance d'EVREUX rendue sur simple requête.

Réformer pour le surplus le jugement entrepris et statuant à nouveau.

Dire et juger n'y avoir lieu à ouverture des opérations de liquidation partage de la communauté THENARD - SANDRET.

Prononcer la nullité de la vente du bien immobilier intervenue aux termes d'un acte reçu par Maître G..., Notaire à PONT DE L'ARCHE le 9 janvier 2003, - pour vice du consentement sur le fondement des articles 1108 et suivants du Code Civil, ou du fait de la conversion du prix payé en bail à nourriture pour défaut de prix sérieux et défaut d'aléa.

Dire la décision à intervenir opposable à la co-venderesse Madame Gisèle A... veuve B....

Dans le cadres des opérations de succession de Monsieur Bernard Marcel X... ordonner la réintégration dans le patrimoine du défunt du bien immobilier qui lui appartenait en communauté avec son ex-épouse, sis sur la commune d'IGOVILLE ..., cadastré lieudit « Le Village » section C no672, 675, 676 et 677, le tout pour une contenance de 17 ares 11 centiares:

A tout le moins, condamner Monsieur Bernard Gérard X... fils à payer à la succession de Monsieur Bernard X... père, la moitié de la contre-valeur de cet immeuble au jour du partage.

Subsidiairement, prononcer la nullité de la vente de l'immeuble pour lésion sur le fondement des articles 1304 et suivants du Code Civil.

Plus subsidiairement encore, voir désigner tel expert qu'il plaira à la Cour à l'effet de déterminer la valeur du bien immobilier situé sur la commune d'IGOVILLE (Eure) ..., cadastré lieudit « Le Village ».

Prononcer en tout état de cause la nullité de ladite vente, faute par le bénéficiaire Monsieur Bernard Gérard X... d'avoir rempli les obligations qui étaient les siennes en vertu du bail à nourriture.

En tout état de cause, débouter Madame Gisèle A... de sa demande au titre d'une indemnité d'occupation due pour la période de janvier 2000 à janvier 2003.

Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le Notaire devra se faire remettre une copie de tous les relevés de banque du défunt et dire et juger qu'il en sera donné connaissance aux consorts X....

Débouter les consorts X... et I... A... de toutes autres demandes, fins et conclusions.

Confirmer le jugement entrepris en ses autres dispositions non contraires.

Y ajoutant,

Condamner Monsieur Bernard Gérard X... ou subsidiairement les consorts X... à payer à chacun des appelants une somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamner les consorts X... et I... A... en tous les dépens de première instance et d'appel ;

******

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 2 février 2007, auxquelles la Cour se réfère expressément pour l'exposé des moyens, Madame Gisèle A..., Monsieur Bernard Gérard X..., Monsieur Christophe X..., Madame Pierrette X..., épouse D..., Madame Antoinette X..., épouse E... soutiennent essentiellement que :

- la communauté n'a jamais été liquidée et Madame A... a droit à une indemnité d'occupation pour la période non prescrite ;

- aucun élément ne démontre que l'état mental de leur père était dégradé à la date de la vente litigieuse ; il voyait certains membres de sa famille ;

- ils produisent un avis d'une agence immobilière qui a visité l'immeuble en 2004 et qui a évalué l'immeuble à 64 000 euros et un constat d ‘huissier du 9 mars 2006 qui établit que l'intérieur du pavillon est en mauvais état, sale et vétuste ;

- Monsieur Bernard X... justifie s'être bien occupé de son père ;

Ils demandent donc à la Cour de :

Déclarer Madame Laurette Y..., Monsieur Bertrand X..., Monsieur Bruno X... irrecevables et mal fondés en leur appel du jugement rendu le 20 janvier 2006 par le Tribunal de grande instance d'EVREUX,

Confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, sauf à porter le montant de l'indemnité d'occupation à une somme de 7.340 €,

Les débouter de l'intégralité de leurs demandes,

Condamner les consorts Y... X..., in solidum, à verser à chacun des intimés 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et procédure abusive,

Les condamner au versement d'une indemnité de 3.000€ en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Les condamner aux entiers dépens ;

******

SUR CE LA COUR :

-l'acte du 9 janvier 2003 :

La vente de la maison indivise a été consentie pour le prix de 46 000 Euros dont 23 000 Euros revenant à Madame A..., « comptant ainsi qu'il résulte de la comptabilité du Notaire » et 23 000 Euros revenant à Monsieur Bernard Marcel X..., converti en bail à nourriture ;

La clause relative au bail à nourriture est ainsi rédigée :

- « BAIL A NOURRITURE - La somme de 23.000€ représentant la moitié du prix revenant à Monsieur X... est convertie, d'un commun accord entre les parties, en l'obligation que prend l'acquéreur de loger, nourrir, entretenir, vêtir, blanchir, raccommoder et soigner tant en santé qu'en maladie Monsieur Bernard X..., son père, en un mot lui fournir tout ce qui est nécessaire à l'existence en ayant pour lui les meilleurs soins et de bons égards aussi. En cas de maladie, de lui faire donner tous les soins médicaux et chirurgicaux nécessaires et de lui faire administrer tous les médicaments prescrits. Cette obligation court à partir de ce jour jusqu'au jour du décès du bénéficiaire ou du survivant en cas de pluralité, et lors de son décès de pourvoir à ses frais funéraires d'une manière conforme à sa position ».

L'article 918 du Code civil dispose :

« La valeur en pleine propriété des biens aliénés, soit à charge de rente viagère, soit à fonds perdus, ou avec réserve d'usufruit à l'un des successibles en ligne directe sera imputée sur la portion disponible ; et l'excédent s'il y a lieu, sera rapportée à la masse » ;

Les premiers juges ont exactement considéré que la vente d'une maison moyennant un prix converti en totalité en bail à nourriture constituait une « vente à fonds perdus » et que cette disposition, qui assimile une telle vente à une donation préciputaire était applicable ;

Ils ont de même justement considéré qu'aucun élément ne permettait de considérer qu'à la date de cette vente, Monsieur X... se serait trouvé dans l'incapacité de contracter, tous les documents produits se rapportant à un état constaté onze mois plus tard et résultant de l'encéphalopathie hépatique qui, associée à une septicémie, devait l'emporter en quelques jours ; en janvier 2003, il est seulement avéré que Monsieur X... se déplaçait difficilement, -l'acte de vente a été signé chez lui-, qu'il souffrait donc déjà des ulcères aux jambes constatées lors de son hospitalisation ; si le certificat médical établi lors de l'hospitalisation fait état d'un possible éthylisme qui aurait conduit à l'encéphalopathie hépatique constatée, aucun autre élément ne permet de le confirmer et de retenir l'existence d'une dégradation de l'état mental de Monsieur X... mettant en cause sa capacité de contracter ; il n'est pas davantage justifié de l'existence de violence ou de dol de la part de Monsieur X..., alors qu'au contraire les témoins attestent de son dévouement à l'égard de son père ;

En outre l'acte ne comporte pas en lui-même la preuve d'un trouble mental et n'apparaît pas dépourvu de cause, puisque même si à la date de la vente, 9 janvier 2003, Monsieur Bernard Marcel X... âgé de 77 ans, avait des ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins, puisqu'il disposait d'une retraite mensuelle de 574.81 euros, il présentait des problèmes de santé et il refusait les soins et les visites médicales ainsi que le démontrent les attestations de l'aide soignante et de l'infirmière que sa fille, a fait intervenir pour obtenir son hospitalisation, et il n'avait pas vu de médecin depuis trente ans ; il pouvait donc souhaiter que ce soit son fils, dont plusieurs témoignages de voisins, attestent, qu'avec sa sœur, il était très présent auprès de son père, qui s'occupe de lui ; il ne peut davantage être soutenu qu'i n'existait pas d'aléa, alors que de simples ulcères aux jambes n'apparaissent pas comme devoir entraîner une fin prochaine ;

L'éventuelle vileté du prix est sans incidence sur la validité de l'acte, qui se trouve, par application des dispositions de l'article 918 du Code civil requalifié en donation préciputaire ;

Enfin il est de même sans importance que Monsieur Bernard X... ait ou non rempli les obligations mises à sa charge par le bail à nourriture, puisque d'une part, ses héritiers sont irrecevables à engager une action en résiliation pour inexécution qu'il n'avait pas lui-même envisagée de son vivant et en outre la requalification de l'acte emporte rapport de la valeur de la maison acquise ;

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande d'annulation et de résiliation de la vente par Monsieur Bernard Marcel X... de la moitié indivise de l'immeuble du ..., à son fils et a dit que l'article 918 du Code civil était applicable à cette vente ;

Il appartiendra au Notaire commis d'évaluer dans ce cadre la valeur de cet immeuble ;

-l'indemnité d'occupation

Les appelants considèrent que la communauté ayant existé entre leurs parents a été liquidée lors de la vente de la maison qui constituait le seul actif, qu'il n'y a donc lieu ni à comptes, liquidation et partage de cette communauté, ni à indemnité d'occupation jusqu'à la date de cette vente ;

Il résulte de la lettre écrite par le Notaire de Monsieur X... et Madame A..., Maître G... le 19 février 2004, à Monsieur Bruno X..., faisant le point sur le dossier de succession de Monsieur X..., qu'un fonds de commerce dépendant de la communauté avait été vendu en février 1990 et le prix consigné à l'étude et que le solde « leur a été débloqué, à hauteur de moitié chacun, sous déduction des frais le 26 octobre 2001, suivant leur accord » ;

Il apparaît que, si Madame A... avait entendu réclamer une indemnité d'occupation à son ex-mari pour l'occupation de la maison indivise, elle l'aurait fait à cette occasion puisqu'il existait des fonds et qu'un compte pouvait être établi, Monsieur X... ayant vraisemblablement continué l'exploitation du fonds depuis la séparation du couple en 1981 et réglé les impôts et assurance de la maison indivise; Maître G... qui a aussi vendu 14 mois plus tard la maison restée indivise, n'envisageait d'ailleurs pas une liquidation de la communauté, considérant manifestement qu'un accord était intervenu entre les ex-époux sur cette liquidation ;

Le jugement sera donc infirmé sur ces points ;

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais exposés en marge des dépens en cause d'appel ;

******

PAR CES MOTIFS :

La Cour :

Réforme le jugement en ce qu'il a :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la communauté ayant existé entre Monsieur Bernard X... et Madame Gisèle A... ;

- dit que la succession de Monsieur Bernard X... est redevable d'une indemnité d'occupation envers l'indivision post-communautaire THENARD/SANDRET ;

Le confirme en toutes ses autres dispositions ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Laisse à la charge de chacune des parties ses propres dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Ct0038
Numéro d'arrêt : 06/701
Date de la décision : 31/10/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Evreux, 20 janvier 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rouen;arret;2007-10-31;06.701 ?
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