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16/01/2007 | FRANCE | N°06/2484

France | France, Cour d'appel de Rouen, Ct0037, 16 janvier 2007, 06/2484


R.G : 06 / 02484

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DES APPELS PRIORITAIRES

ARRET DU 16 JANVIER 2007

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Ordonnance de référé du TRIBUNAL DE COMMERCE D'EVREUX du 18 Mai 2006

APPELANTE :

S.A. TACHON CHAUSSURES
34 Grande Rue
27430 ST PIERRE DU VAUVRAY

représentée par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

assistée de Me Stéphane CAMPANARO, avocat au barreau d'EVREUX

INTIMES :

Monsieur Dominique Y...
...
27100 LE VAUDREUIL

représenté par la SCP G

ALLIERE LEJEUNE MARCHAND GRAY, avoués à la Cour

assisté de Me Michel DUBOS, avocat au barreau de ROUEN

S.A.R.L. NORD SUD SHOES
...
27100 LE V...

R.G : 06 / 02484

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DES APPELS PRIORITAIRES

ARRET DU 16 JANVIER 2007

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Ordonnance de référé du TRIBUNAL DE COMMERCE D'EVREUX du 18 Mai 2006

APPELANTE :

S.A. TACHON CHAUSSURES
34 Grande Rue
27430 ST PIERRE DU VAUVRAY

représentée par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

assistée de Me Stéphane CAMPANARO, avocat au barreau d'EVREUX

INTIMES :

Monsieur Dominique Y...
...
27100 LE VAUDREUIL

représenté par la SCP GALLIERE LEJEUNE MARCHAND GRAY, avoués à la Cour

assisté de Me Michel DUBOS, avocat au barreau de ROUEN

S.A.R.L. NORD SUD SHOES
...
27100 LE VAUDREUIL

représentée par la SCP GALLIERE LEJEUNE MARCHAND GRAY, avoués à la Cour

assistée de Me Michel DUBOS, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 27 Novembre 2006 sans opposition des avocats devant Madame AUBLIN-MICHEL, Conseiller, rapporteur, entendue en son rapport oral de la procédure avant plaidoiries

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame PLANCHON, Président
Madame PRUDHOMME, Conseiller
Madame AUBLIN-MICHEL, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme NOEL-DAZY, Greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 27 Novembre 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 16 Janvier 2007

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Janvier 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,

signé par Madame PLANCHON, Président et par Mme NOEL-DAZY, Greffier présent à cette audience.

*
* *

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur Dominique Y... a été salarié de la société TACHON CHAUSSURES jusqu'à son licenciement pour motif économique en mai 2004.

Il a contesté ce licenciement devant le Conseil des Prud'hommes de ROUEN et par procès-verbal de conciliation en date du 29 juin 2004, une transaction est intervenue entre les parties par laquelle la société TACHON CHAUSSURES consentait à verser à Monsieur Y... une indemnité transactionnelle de 157. 560 euros en contrepartie d'une clause de confidentialité d'une durée de deux ans.

Par assignation en date du 18 avril 2006, la société TACHON CHAUSSURES a saisi le Juge des référés du Tribunal de commerce d'EVREUX d'une demande de désignation d'un huissier de justice, afin de prouver que Monsieur Y... n'aurait pas respecté les termes de la transaction, et qu'il se serait en outre livré à une concurrence déloyale envers elle avec la complicité de la société NORD SUD SHOES dont il est le gérant et l'associé.

Par ordonnance de référé en date du 18 mai 2006, le Président du Tribunal de commerce d'EVREUX s'est déclaré compétent, a constaté l'existence d'une contestation sérieuse et dit n'y avoir lieu à référé.

La société TACHON CHAUSSURES a interjeté appel de cette décision le 9 / 06 / 2006.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 17 / 11 / 2006, elle demande à la Cour au visa des articles 11,142 et 145 du nouveau code de procédure civile de :

-désigner un huissier de justice avec mission de se faire remettre par Monsieur Y... et / ou la société NORD SUD SHOES les documents suivants :

• les factures clients et le journal des ventes du mois de juin 2004 au mois de mars 2006 ainsi que les déclarations de TVA y relatives
• le registre du personnel de la société NORD SUD SHOES
• les déclarations DADS 1 et 2 de la société NORD SUD SHOES pour les années 2004 à 2005
• les contrats de travail de Mrs A... et W...

-dire qu'il devra dresser constat du contenu desdits documents et en effectuer aux frais avancés de la société TACHON CHAUSSURES des photocopies certifiées conformes aux originaux

-condamner les intimés in solidum ou l'un à défaut de l'autre au paiement d'une indemnité de 1. 000 euros sur le fondement de l'article 700 Nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de son appel elle expose que :

La société NORD SUD SHOES dont le gérant était à l'époque M. B...gros client de TACHON, (400 00 euros par saison) a été constituée en juin 2004 ;

Monsieur Y... est devenu gérant de la société NORD SUD SHOES en juillet 2005 date à laquelle le siège social a été transféré du Lot et Garonne à l'Eure, mais également à laquelle la totalité de l'indemnité transactionnelle lui a été versée ;

M. COUDRAY et la société NORD SUD SHOES ont délibérément recruté trois VRP de la société TACHON CHAUSSURES qui ont fait l'objet d'un licenciement économique pour détourner de la clientèle, en distribuant notamment la marque MARC C...dont l'intimé est titulaire de la licence d'exploitation ; Ces trois commerciaux ont pourtant perçu à leur départ une indemnité de clientèle leur interdisant d'exploiter aujourd'hui leurs anciens fichiers clientèle au profit de NORD SUD SHOES ;

Le chiffre d'affaires de cette dernière correspond par ailleurs à celui qu'elle réalisait avec les sociétés de M. B...soit 400000 euros ;

Monsieur Y... ne saurait se réfugier derrière le principe de la liberté du commerce et d'embauche d'anciens salariés de sa société pour éluder la transaction signée le 29 / 06 / 2004 ;

La remise des pièces sollicitées permettra d'établir les faits de concurrence déloyale qui lui sont reprochés ainsi qu'à la société NORD SUD SHOES ;

Elle justifie par conséquent d'un motif légitime à voir ordonner la mesure d'instruction litigieuse, conformément aux dispositions de l'article 145 du nouveau code de procédure civile ;

Dans leurs dernières conclusions en date du 3 / 11 / 2006, Monsieur Y... et la société NORD SUD SHOES demandent à la Cour de débouter la société TACHON CHAUSSURES et de la condamner à leur régler une indemnité de 3. 000 euros au titre de l'article 700 Nouveau code de procédure civile.

Ils font valoir que :

• Aux termes du procès-verbal de transaction en date du 29 / 06 / 2004, M. COUDRAY n'a souscrit aucune clause de non concurrence mais une clause de confidentialité ainsi que l'engagement de ne pas démarcher les forces humaines de TACHON DIFFUSION et LABEL du Vauvray, ni les titulaires ou propriétaires des marques exploitées par ces sociétés ainsi que les clients stratégiques ;

• La société NORD SUD SHOES dont l'objet était d'importer des chaussures de l'étranger n'a pas été créée par lui, mais par Mme D...et M. B...qui en exerçait au début les fonctions de gérant, mais n'était nullement lié par un engagement d'exclusivité à l'égard de la société TACHON ;

• En juillet 2005, M. B...constatant que l'activité d'importateur n'est pas satisfaisante, cède la société NORD SUD SHOES à la SAS DAUPHICUIR pour 1140 parts sociales et à lui-même pour 360 parts sociales (soit 26 %) ;

• Le 8 / 09 / 05 la société TACHON a licencié pour motif économique trois salariés commerciaux, invoquant alors une baisse de 73 % du chiffre d'affaires et les a libérés de leur clause de non concurrence le 13 / 09 suivant ;

• Aucun acte de concurrence déloyale ne peut être reproché à M. COUDRAY, alors qu'il dispose de la liberté d'exercer une activité directement concurrente de son ancien employeur TACHON ;

• La société NORD SUD SHOES n'a recruté aucun des trois VRP de la société TACHON qui lui ont effectivement offert leurs services, M.A... ayant obtenu de celle-ci la somme de 84580 € au titre de l'indemnité de clientèle ;

• Les causes des pertes économiques subies par la société TACHON s'expliquent notamment par l'abandon de la plupart des marques pour lesquelles elle avait une licence et par la prétention d'imposer à la clientèle française des chaussures portugaises inadaptées au marché français, outre le licenciement économique et collectif de salariés dont le remplacement s'est avéré infructueux ;

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 / 11 / 2006.

SUR CE,

Il résulte des dispositions de l'article 145 du nouveau code de procédure civile que s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de fait dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé ;

Aux termes du procès-verbal de conciliation signé par la société TACHON et Monsieur Y... en date du 29 / 06 / 2004, Monsieur Y... « s'interdit de communiquer tous les renseignements de tous ordres, et notamment les renseignements techniques financiers, commerciaux qu'il a été amené à connaître dans l'exercice de ses fonctions. Il s'interdit de porter atteinte à l'image de la Direction et à ses actionnaires, notamment par déclarations, dénigrement, etc …
Dans le cadre de sa future activité professionnelle, il s'engage à ne pas démarcher les forces humaines des sociétés TACHON DIFFUSION et LABELLE DU VAUVRAY en vue d'un débauchage, ni les titulaires ou propriétaires des marques exploitées par ces sociétés, ainsi que les clients stratégiques ; le tout pour une durée de deux années à compter de la notification du licenciement. »

L'appelante dont l'activité consiste en le négoce auprès des détaillants en chaussures, soutient avoir besoin de la remise des pièces sollicitée pour démontrer contre Monsieur Y... des faits de concurrence déloyale ;

Il est constant en l'espèce que M. B...client important de la société TACHON, a créé en juin 2004 la société NORD SUD SHOES dont il a été nommé gérant et que Monsieur Y... est devenu gérant et associé minoritaire de ladite société dont il a acquis 360 parts sociales le 28 / 07 / 2005, après que M. B...ait démissionné de ses fonctions de gérant ;

Au vu des statuts versés aux débats, cette société a pour objet le commerce de gros d'articles chaussants etc …

Il apparaît à l'examen du dossier que M. B...était auparavant un acheteur important de la société TACHON puisqu'il possédait dans plusieurs villes des commerces de chaussures de détail, et représentait pour elle un chiffre d'affaires de 400000 euros ;

Il est acquis que la concurrence en soi n'est pas interdite à l'ancien salarié qui en l'espèce occupait les fonctions de directeur commercial de la société TACHON, mais seulement l'emploi de moyens fautifs, et qu'elle l'est encore moins à un ancien client tel que Monsieur B...;

Or, en l'état la société TACHON ne rapporte pas le moindre commencement de preuve de man œ uvres frauduleuses caractérisant la concurrence déloyale, alors même que contrairement à ses allégations, Monsieur Y... conteste formellement avoir embauché ses trois anciens salariés « VRP », et que de plus ces derniers licenciés pour motif économique le 8 / 09 / 2005, ont été libérés de la clause de non concurrence ; A cet égard, il est de principe que la responsabilité de l'employeur qui fait appel aux services d'un salarié libre de tout engagement vis-à-vis de son ancien employeur pour l'utiliser au mieux de ses propres intérêts, seraient-ils concurrentiels de ceux de l'ancien employeur, n'est pas engagée ;

Le détournement de clientèle par ces trois salariés n'est pas davantage établi par la société TACHON, qui se borne à affirmer qu'ils auraient exploité leurs anciens fichiers, bien qu'elle ne démontre pas qu'ils travailleraient désormais au service de la société concurrente ;

Dès lors, l'appelante qui ne justifie pas que ses pertes économiques soient consécutives à des agissements anticoncurrentiels fautifs de la société NORD SUD SHOES, ne dispose d'aucun motif légitime à l'appui de sa demande, et doit en être déboutée ;

L'ordonnance sera confirmée par substitution de motifs en ce qu'elle a écarté la demande ;

Sur les demandes au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Il n'apparaît pas équitable de laisser à Monsieur Y... et à la société NORD SUD SHOES la charge de leurs frais irrépétibles et non compris dans les dépens ; Il convient de leur allouer une indemnité de 1000 euros à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare recevable l'appel de la société TACHON CHAUSSURES.

Confirme par substitution de motifs l'ordonnance entreprise.

Y ajoutant,

Condamne la société TACHON CHAUSSURES à payer à Monsieur Dominique Y... et à la société NORD SUD SHOES une indemnité de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La condamne aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause selon les dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Ct0037
Numéro d'arrêt : 06/2484
Date de la décision : 16/01/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce d'Evreux, 18 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rouen;arret;2007-01-16;06.2484 ?
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