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06/12/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000007626748

France | France, Cour d'appel de Rouen, Ct0125, 06 décembre 2006, JURITEXT000007626748


R.G. : 06/00776COUR D'APPEL DE ROUENCHAMBRE DES APPELS PRIORITAIRESSection SÉCURITÉ SOCIALEARRET DU 06 DECEMBRE 2006DÉCISION DÉFÉRÉE :Jugement du TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE ROUEN du 20 Décembre 2005APPELANTE :Société GRANDE PAROISSE A.Z.F.Rue de l'IndustrieBP.20476121 GRAND QUEVILLY CEDEXReprésentée par Maître MORAS, avocat au barreau de VALENCIENNESINTIMES :Monsieur Denis X...9 rue Louise Michèle76530 GRAND COURONNEReprésenté par Maître BODSON de la SCP LEDOUX ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARISCAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE ROUEN50 avenue de Bre

tagne76039 ROUEN CEDEXReprésentée par Mr BARTLET muni d'un pouv...

R.G. : 06/00776COUR D'APPEL DE ROUENCHAMBRE DES APPELS PRIORITAIRESSection SÉCURITÉ SOCIALEARRET DU 06 DECEMBRE 2006DÉCISION DÉFÉRÉE :Jugement du TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE ROUEN du 20 Décembre 2005APPELANTE :Société GRANDE PAROISSE A.Z.F.Rue de l'IndustrieBP.20476121 GRAND QUEVILLY CEDEXReprésentée par Maître MORAS, avocat au barreau de VALENCIENNESINTIMES :Monsieur Denis X...9 rue Louise Michèle76530 GRAND COURONNEReprésenté par Maître BODSON de la SCP LEDOUX ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARISCAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE ROUEN50 avenue de Bretagne76039 ROUEN CEDEXReprésentée par Mr BARTLET muni d'un pouvoirPARTIE AVISEE :D.R.A.S.S.Immeuble le Mail31 rue Malouet76017 ROUEN CEDEXNon Comparante ni représentée bien que régulièrement avisée par lettre recommandéeCOMPOSITION DE LA COUR :En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 18 Octobre 2006 sans opposition des parties devant Madame LAGRANGE, Conseiller, magistrat chargé d'instruire l'affaire, Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :Madame PLANCHON, PrésidentMadame LAGRANGE, ConseillerMadame PRUDHOMME, ConseillerGREFFIER LORS DES DEBATS :Mme LOUE-NAZE, GreffierDEBATS :A l'audience publique du 18 Octobre 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Décembre 2006ARRET : REPUTE CONTRADICTOIREPrononcé publiquement le 06 Décembre 2006, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile signé par Madame PLANCHON, Président et par Mme LOUE-NAZE, Greffier présent à cette audience.

Monsieur X... a été salarié de la société LA GRANDE PAROISSE AZF du 10 juillet 1957 au 31 décembre 1997.

Il a établi une déclaration de maladie le 20 mai 2003 avec certificat médical initial daté du 9 mai 2003 faisant état d'une affection entrant dans le cadre du tableau 30 du régime général. Le caractère professionnel de la maladie a été reconnu le 7 octobre 2003 par la C.P.A.M. de ROUEN qui lui a attribué une rente forfaitaire pour un taux d'incapacité de 5% à compter du 9 mai 2003.

Monsieur X... a fait assigner son employeur devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Rouen aux fins que sa maladie soit considérée comme ayant été causée par la faute inexcusable de celui-ci.

Par jugement avec exécution provisoire en date du 20 décembre 2005, le tribunal a fait droit à sa demande et a ordonné le doublement de la rente qui lui est allouée et a fixé à 5000 ç la réparation des préjudice des douleurs physiques et morales et à 8 000 ç celle du préjudice d'agrément, avec intérêts au taux légal et a dit que la C.P.A.M. de Rouen fera l'avance des sommes qui lui seront remboursées par la société Grande paroisse.

La société Grande Paroisse a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 7 février 2006.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe de la Cour le 18 octobre 2006, la société Grande Paroisse demande à la Cour, infirmant le jugement entrepris, de déclarer Monsieur X... mal fondé en ses demandes et, subsidiairement, de prononcer l'inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle et de débouter la C.P.A.M. de sa demande au titre de l'action récursoire.

Elle rappelle qu'elle vient aux droits de la société des POTASSES ET ENGRAIS CHIMIQUES DE GRAND COURONNE dont Monsieur X... est devenu salarié en 1957 en tant qu'agent d'entretien jusqu'au 1er janvier 1977, date à laquelle il a accédé au grade d'agent de maîtrise dans le service de bureau d'études jusqu'au 31 décembre 1997. Elle

soutient que les conditions de la faute inexcusable ne sont pas remplies aux motifs que :1/. Monsieur X... n'a pas été réellement exposé à l'amiante. Elle fait valoir que, de 1957 à 1977, avec interruption pour service militaire de 1959 à 1963, Monsieur X... faisait partie d'une équipe volante et n'intervenait donc qu'épisodiquement sur la remise en état des installations dont certains éléments nécessitaient la mise en place de joints en plaque ou en tresse d'amiante et qu'à partir de 1977 il ne se rendait sur les chantiers qu'à titre d'encadrement. Elle ajoute que la fabrication du sulfate de potasse mis en cause pour l'exposition à l'amiante a cessé à l'usine de GRAND COURONNE et que l'atelier a été rasé par une entreprise spécialisée de démolition. 2/. Les mesures avaient été prises dès 1953 pour faire respecter l'hygiène et la sécurité au travail. Elle produit les comptes-rendus des C.H.S. montrant qu'elle imposait depuis le début des années 50 le port d'une protection individuelle notamment les masques et les gants alors même que l'Etat et les institutions tardaient à reconnaître les dangers de l'amiante.

La société appelante ajoute qu'elle n'était pas soumise au décret du 31 août 1950 introduisant l'asbestose comme maladie professionnelle, car il ne s'imposait pas aux entreprises fabriquant des produits chimiques, et que le calorifugeage visé dans le tableau 30 à partir de 1951 ne concernait que "les travaux de calorifugeage au moyen d'amiante", c'est à dire dans le bâtiment alors qu'en l'espèce il s'agit d'une utilisation ponctuelle de vêtements d'amiante ou d'isolation en amiante.

Elle en conclut qu'elle ne pouvait avoir conscience du danger de sorte qu'elle n'a pas commis de faute inexcusable.

Enfin, à titre subsidiaire, elle fait valoir qu'elle na pas disposé du temps suffisant pour consulter le dossier dès lors qu'elle en a

été informée par lettre du 23 septembre 2003 et que la décision date du 7 octobre 2003 et qu'elle n'avait pas eu connaissance de la date à laquelle cette décision serait prise.

Dans ses dernières conclusions déposées au Greffe de la Cour le 18 juillet 2006, la C.P.A.M. de Rouen demande à la Cour de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur la reconnaissance d'une faute inexcusable de l'employeur, de constater que la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie de Monsieur X... est opposable à la société GRANDE PAROISSE et, en cas de reconnaissance de la faute inexcusable, de condamner l'employeur à lui rembourser le montant des indemnités qui pourraient être allouées à Monsieur X....

La Caisse soutient avoir informé la société appelante selon les règles prévues aux articles L 452-2 et 452-3 du code de la sécurité sociale.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe de la Cour le 18 octobre 2006, Monsieur Denis CHARLES (et non Monsieur X... DENIS comme il est écrit dans les conclusions) demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la maladie professionnelle dont il est atteint est due à la faute inexcusable de son employeur, a ordonné le doublement de la rente qui lui est allouée et a condamné la société Grande Paroisse à lui payer une indemnité de procédure de 2 000 ç. Par appel incident, Monsieur X... demande à la Cour de :- dire que la majoration maximum de la rente qui lui est allouée suivra l'évolution de son taux d'I.P.P. en cas d'aggravation de son état de santé, - fixer son indemnisation aux sommes de 12 000 ç au titre des souffrances physiques, 20 000 ç au titre des souffrances morales et 16 000 ç au titre du préjudice d'agrément,- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,- condamner la société Grande

Paroisse à lui verser une indemnité de procédure de 3 500 ç.

Après avoir rappelé l'évolution des connaissances scientifiques sur l'amiante et la chronologie de la prise de conscience des dangers ainsi que de l'évolution législative et jurisprudentielle, Monsieur Denis X... fait valoir que l'usine du GRAND QUEVILLY fabriquait notamment des engrais chimiques à partir d'ammoniac qu'elle produisait à base de gaz de houille, que la technologie de production des engrais reposait sur la liquéfaction des gaz impliquant la maîtrise des basses et très basses températures qui nécessitait d'utiliser de l'amiante comme calorifuge sur l'ensemble des canalisations et des liquéfacteurs. A l'appui de ces rappels, il produit des témoignages sur les conditions de travail. Il soutient que la société Grande Paroisse ne pouvait ignorer les dangers de ces utilisations de l'amiante sous prétexte d'une "compétence" sélective et n'a pas respecté les règles de sécurité prévues dès le début du 20o siècle alors même qu'elle utilisait de l'amiante et que c'est à l'employeur de rapporter la preuve de la mise en place des mesures protectrices appropriées et efficaces alors même que les témoignages démontrent sa carence.

S'agissant de l'indemnisation de ses préjudices, Monsieur X... fait valoir l'importance de ses souffrances physiques, l'intensité de son anxiété face à l'avenir et la nécessité de réduire ses activités quotidiennes et de loisirs.SUR CE

1/. Sur la faute inexcusable de la société Grande Paroisse.

Attendu que la notice de carrière de Monsieur Denis X... établie par la société Grande Paroisse montre que celui-ci à été employé en qualité de chaudronnier de juillet 1957 à juillet 1959, qu'après son service militaire il a été affecté à l'entretien en équipe volante ou en dépannage à domicile de 1964 à 1974, que de 1974 à 1977, il travaillait en chaudronnerie ; qu'à partir de 1977 Monsieur X...

est devenu agent de maîtrise pour l'entretien dans les ateliers de production ; qu'en 1992, il était affecté à la chaudronnerie ;

Attendu qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait de produits fabriqués ou utilisés dans l'entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; que, cependant, s'il n'utilisait pas l'amiante comme matière première, l'employeur pouvait ne pas avoir conscience que l'utilisation de simples éléments de protection constituait un risque pour le salarié ;

Attendu que la société Grande Paroisse soutient qu'elle n'utilisait pas l'amiante comme matière première et que Monsieur X... effectuait certes des travaux de calorifugeage mais qui ne correspondaient pas à la définition qui en est donnée dans le tableau no30 des maladies professionnelles et en tout état de cause qui étaient épisodiques ; qu'elle oppose en outre à sa mise en cause par Monsieur X... le fait que depuis les années 1950 elle a toujours été vigilante en matière d'hygiène et de sécurité au travail en donnant des protections à ses salariés ;

Attendu que Monsieur Denis X... a été employé comme ouvrier chaudronnier, que ce soit à la production ou à l'entretien de 1957 à 1959 puis de 1964 à 1977 et même ultérieurement en tant qu'agent de maîtrise ; que cette activité, comme le rappellent tant le service de médecine du travail dans son courrier du 10 mars 2003 que le rapport d'enquête administrative de la C.P.A.M. produits par l'appelante,

consistait au grattage et au meulage de joints en amiante et décalorifugeage des tuyauteries et des fours entraînant une exposition directe à l'amiante ; qu'après 1977, Monsieur X... a été en contact indirect avec l'amiante dès lors qu'il participait aux arrêts d'unités et travaillait à proximité des calorifugeurs et ce jusqu'en 1990 ;

Attendu, au vu de ce rappel de la carrière et des activités de Monsieur X..., que la société Grande Paroisse ne peut utilement soutenir que son salarié n'a été exposé qu'épisodiquement aux poussières d'amiante ;

Attendu que la société appelante ne peut pas plus utilement soutenir que l'activité de chaudronnier affecté à l'entretien de la tuyauterie, de la tôlerie et des fours dans ses usines, c'est à dire au décalorifugeage, n'est pas comparable à celle de chaudronnier calorifugeur dans le bâtiment ; que les techniques de régulation de la chaleur étaient les mêmes quel que fût le secteur d'activité ;

Attendu que la société Grande Paroisse soutient que l'exposition à l'amiante de Monsieur X... est antérieure à la mise en place des premiers textes réglementant l'utilisation de l'amiante et qu'elle ne pouvait avoir connaissance des dangers liés à l'amiante dès lors qu'elle n'avait pas une activité recensée par le tableau des maladies professionnelles et alors même qu'elle s'était pourtant impliquée dès les années 50 dans le respect des règles d'hygiène et de sécurité ;

Attendu qu'il n'est pas contestable que des consignes de sécurité ont été données aux salariés dès 1953 ; que, cependant, ces consignes évoquent les produits chimiques et non pas particulièrement les poussières d'amiante même si des masques respiratoires sont recommandés de manière générale ; que les procès-verbaux de réunions du Comité d'hygiène et de sécurité produits aux débats pour les années 1957, 1959, 1960 et 1961, ne mentionnent à aucun moment le mot

amiante ce qui démontre le défaut d'information des salariés à ce sujet alors que sont évoqués les problèmes de l'entretien des sols pour éviter les glissades ou l'entretien des bennes ou la manipulation de produits chimiques toxiques avec des gants ou des masques ; que les procès-verbaux des années suivantes montrent que le C.H.S. était principalement préoccupé par la prévention des risques d'accidents au point de faire un classement de sécurité selon les ateliers mais uniquement sur la base des statistiques d'accidents ; que les maladies professionnelles évoquées étaient le saturnisme et le benzolisme (1963) ; que, certes, en 1955, le C.H.S a évoqué les protections contre les poussières mais a considéré que les seuls points les plus poussiéreux se trouvaient à l'ensachage ; ce n'est qu'à la réunion du 8 décembre 1977 que l'utilisation de l'amiante est évoquée en précisant "il s'agit surtout pour notre personnel d'interventions pour le découpage de joints, ce qui, raisonnablement, ne devrait pas poser de problèmes. Toutefois, des mesures d'atmosphère seront effectuées par un organisme agréé, sur les lieux du découpage pour savoir si un problème se pose et où il se pose" ;

Attendu, à l'évidence, que la société Grande Paroisse ne prenait pas en compte les risques liés à l'exposition à l'amiante de ses salariés ; qu'elle ne peut se justifier en énonçant qu'elle les ignorait parce qu'elle n'était pas utilisatrice directe et donc pas informée ;

Attendu, en effet, que dès le décret du 3 octobre 1951, l'asbestose était inscrite au tableau no30 des maladies professionnelles avec mention des travaux de calorifugeage au moyen de produits à base d'amiante comme pouvant la provoquer; que le décret du 5 janvier 1976 a ajouté le mésothéliome primitif et, au titre des complications de l'asbestose, l'insuffisance respiratoire aigue, et le cancer bronchio-pulmonaire ; que le décret du 19 juin 1985 portant création des tableaux no30 1, B, C, D et E a ajouté les plaques pleurales et

les tumeurs pleurales primitives comme maladies professionnelles ;

Attendu, de surcroît, que depuis le décret du 10 juillet 1913 les poussières incommodes, insalubres ou toxiques devaient être évacuées directement en dehors des locaux et l'air des ateliers devait être renouvelé par une ventilation efficace ; que les compte-rendus du C.H.S. ci-dessus rappelés montrent que la société Grande Paroisse n'avait envisagé aucune mesure de cette nature pour les salariés travaillant sur les tuyauteries ;

Attendu que la société Grande Paroisse ne précise d'ailleurs pas à quel moment elle a pris les mesures nécessaires pour adapter les mesures de sécurité aux dispositions réglementaires renforcées à partir de 1977 ; qu'elle ne peut pas se retrancher derrière la carence de l'Etat et de ses institutions alors même que les maladies liées à l'amiante étaient répertoriées par le tableau des maladies professionnelles que ne pouvaient ni ne devaient ignorer les employeurs ;

Attendu que, dès 1951 au moins, quelle que fût la pathologie concernée et les incertitudes scientifiques, il appartenait à tout employeur avisé d'adopter une attitude de vigilance et de prudence dans l'usage encore licite de l'amiante ;

Attend, pour ces motifs, que la société Grande Paroisse avait conscience des risques encourus et n'a pas pris les mesures nécessaires pour en préserver ses salariés ; que le manquement à cette obligation constitue une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du code du travail ;

2/. Sur la demande de majoration de la rente allouée à Monsieur Denis X....

Attendu que l'article L 452-2 alinéas 2 et 3 du code de la sécurité sociale dispose que la majoration de la rente et du capital alloué à la victime d'une maladie professionnelle consécutive à la faute

inexcusable de son employeur est calculée en fonction de la réduction de capacité dont elle est atteinte ;

Attendu qu'en l'état des connaissances scientifiques sur l'évolution des pathologies dues à l'exposition à l'amiante, il convient de dire que la majoration de la rente allouée à Monsieur Denis X... sera automatiquement appliquée en cas d'aggravation de l'état de celui-ci et dans les limites des plafonds prévus par l'article L 452-2 du même code ;

3/. Sur l'indemnisation des préjudices subis par Monsieur Denis X....

Attendu que Monsieur X... est atteint de plaques pleurales partiellement calcifiées, latérales et gouttières costo-vertébrales sans lésion nodulaire et sans syndrome interstitiel mais avec quelques formations ganglionnaires hypertrophiques au niveau du médiastin ; qu'il n'est pas constaté de dyspnée d'effort ; qu'au visa de ces éléments médicaux, il sera alloué la somme de 5 000 ç au titre de l'indemnisation des souffrances physiques de Monsieur X... ;

Attendu que Monsieur X... produit aux débats des attestations de ses proches faisant état de son anxiété pour l'avenir et l'évolution de sa maladie ainsi que de son repli sur lui-même ; que les souffrances morales des victimes de l'exposition à l'amiante sont spécifiques en raison des incertitudes , même scientifiques, sur l'évolution des pathologies et des décès de collègues ou proches ayant aussi été victimes ; que ce préjudice moral spécifique sera indemnisé à hauteur de la somme de 14 000 ç ; que le jugement sera réformé en ce sens ;

Attendu que la pathologie de Monsieur X... implique une diminution des possibilités de profiter des joies normales de la vie quotidienne et des activités sportives ; que le tribunal a fait une exacte appréciation de la somme à allouer au titre du préjudice d'agrément

de Monsieur X..., soit 8 000 ç ;

Attendu que l'indemnité totale due à Monsieur X... est donc de 27 000 ç ;

4/. Sur l'opposabilité à la société Grande Paroisse de la décision de la C.P.A.M. de prise en charge de la maladie professionnelle de Monsieur X....

Attendu qu'en application des dispositions de l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale, la C.P.A.M., hors les cas de reconnaissance implicite et en l'absence de réserves de l'employeur, assure l'information de la victime et de l'employeur préalablement à sa décision sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de lui faire grief ;

Attendu qu'avant de se prononcer sur le caractère professionnel de la maladie, la Caisse doit aviser l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ;

Attendu que l'employeur a le droit légitime de disposer d'un délai suffisant pour consulter et surtout pour répondre aux éléments lui faisant grief dont il ne pouvait avoir connaissance qu'en consultant le dossier ;

Attendu que, par lettre avec accusé de réception daté du 25 septembre 2003, la C.P.A.M. de Rouen a informé la société Grande Paroisse de ce que l'instruction était terminée et que l'employeur avait la possibilité de consulter les pièces constitutives du dossier pendant un délai de dix jours à compter du 23 septembre 2003 ; que cette lettre ne contient aucune indication de la date à laquelle la C.P.A.M. doit statuer ; qu'en outre le délai effectif dont a pu disposer la société était nécessairement inférieur à huit jours eu égard à une fin de semaine intégrée dans le délai ;

Attendu que la C.P.A.M. de Rouen n'a pas satisfait aux exigences

d'information de l'employeur ; que la décision de prise en charge de la maladie professionnelle intervenue le 7 octobre 2003 est, en conséquence, inopposable à la société Grande Paroisse ; que le jugement sera donc infirmé en ses dispositions contraires ;

5/. Sur les frais de procédure.

Attendu qu'il est équitable que Monsieur Denis X... n'assume pas les frais qu'il a dû engager en cause d'appel ; que la société Grande Paroisse sera condamnée à lui payer la somme de 2 000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;PAR CES MOTIFSLA COURStatuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

Confirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions relatives au montant de l'indemnité allouée à Monsieur Denis X... et à l'opposabilité à la société Grande Paroisse de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle,

Et statuant à nouveau de ces chefs,

Alloue à Monsieur Denis X... la somme totale de 27 000 ç en indemnisation de ses différents préjudices,

Déclare inopposable à la société Grande Paroisse la décision de la C.P.A.M. de ROUEN du 7 octobre 2003 ayant admis la prise en charge au titre de la légisaltion professionnelle de la maladie de Monsieur Denis X...,

Y ajoutant,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt,

Dit que la majoration de la rente allouée à Monsieur Denis X... suivra l'évolution de son taux d'incapacité permanente partielle en cas d'aggravation de son état de santé,

Condamne la société Grande Paroisse à payer à Monsieur Denis X... la somme de 2 000 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à paiement du droit prévu par l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale.Le Greffier,

Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Ct0125
Numéro d'arrêt : JURITEXT000007626748
Date de la décision : 06/12/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rouen;arret;2006-12-06;juritext000007626748 ?
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