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21/02/2006 | FRANCE | N°05/00526

France | France, Cour d'appel de Rouen, 21 février 2006, 05/00526


R.G. : 05/00526 COUR D'APPEL DE ROUEN CHAMBRE SOCIALE ARRET DU 21 FEVRIER 2006 DÉCISION DÉFÉRÉE : Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 13 Décembre 2004 APPELANTE : SA SEA INVEST FRANCE Immeuble "Le Charlebourg" 14/30 rue de Mantes 92700 COLOMBES représentée par Me Laurent MOREUIL, avocat au barreau de PARIS INTIMES : Monsieur Alain X... 28, résidence les Bocages 76480 ROUMARE comparant en personne, assisté de Me Eric BAUDEU, avocat au barreau de ROUEN Société SAGA TRANS BP 1365 76119 ROUEN CEDEX représentée par Me Pascal GEOFFRION, avocat au barreau de PARIS COMPOSITION

DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 94...

R.G. : 05/00526 COUR D'APPEL DE ROUEN CHAMBRE SOCIALE ARRET DU 21 FEVRIER 2006 DÉCISION DÉFÉRÉE : Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 13 Décembre 2004 APPELANTE : SA SEA INVEST FRANCE Immeuble "Le Charlebourg" 14/30 rue de Mantes 92700 COLOMBES représentée par Me Laurent MOREUIL, avocat au barreau de PARIS INTIMES : Monsieur Alain X... 28, résidence les Bocages 76480 ROUMARE comparant en personne, assisté de Me Eric BAUDEU, avocat au barreau de ROUEN Société SAGA TRANS BP 1365 76119 ROUEN CEDEX représentée par Me Pascal GEOFFRION, avocat au barreau de PARIS COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 11 Janvier 2006 sans opposition des parties devant Madame RAYNAL-BOUCHÉ, Conseiller, magistrat chargé d'instruire seul l'affaire, Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : Madame PAMS-TATU, Président Madame RAYNAL-BOUCHÉ, Conseiller Madame AYMES-BELLADINA, Conseiller GREFFIER LORS DES DEBATS : Monsieur Y..., Greffier DEBATS : A l'audience publique du 11 Janvier 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 Février 2006 ARRET : CONTRADICTOIRE Prononcé publiquement le 21 Février 2006, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Madame PAMS-TATU, Président et par Monsieur Y..., Greffier présent à cette audience.

EXPOSE SUCCINCT DES FAITS, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS DES PARTIES

M. X..., dont l'ancienneté remonte à janvier 1970, date à laquelle il a obtenu le statut de docker, a été engagé en contrat à durée

indéterminée, en date du 1er avril 1980, par le Groupement d'Intérêt Economique ROUEN MANUTENTION, en qualité de contremaître, puis par la société ROUEN MANUTENTION, appartenant au Groupe SAGA.

La société ROUEN MANUTENTION a fait l'objet d'une liquidation judiciaire en décembre 1998 et M. X... a été reclassé en qualité de contremaître docker au sein de la société SAGA TERMINAUX PORTUAIRES (S.T.P), filiale du groupe SAGA ; cette société développait notamment une activité de "consignation et manutention engrais" que lui sous-traitait la société SAGA TRANS, société du groupe BOLLORE.

A compter du 31 mars 2000, STP n'appartenait plus au groupe SAGA mais au groupe SEA INVEST, et s'appelait désormais SEA INVEST FRANCE.

Au début de l'année 2001, la société SAGA TRANS rompait ses relations contractuelles avec la société SEA INVEST FRANCE au profit du GIE NORMANDE DE MANUTENTION, appartenant aussi au groupe BOLLORE ; compte tenu de cette situation, la société SEA INVEST envisageait la suppression des deux postes dockers occupés par Messieurs X... et Z... et d'un poste de secrétaire.

Le 11 juillet 2001, le Comité Régional extraordinaire d'établissement SEA INVEST FRANCE/NORD était consulté sur l'opportunité de l'arrêt de l'activité manutention, et sur les mesures de reclassement pouvant être prononcées ; ses membres concluaient la séance en ces termes :

"...conçoivent que l'activité Manutention de Rouen n'était plus rentable, il est impossible de laisser les choses s'aggraver. Cependant, ils demandent que toutes les dispositions soient prises pour le reclassement des personnes et comptent aussi sur la direction pour que tout soit mis en oeuvre pour un éventuel retour au BCMO".

La société SEA INVEST FRANCE proposait à M. Z..., tout comme à M. X..., un poste similaire sur le site de Dunkerque qu'ils refusaient.

Le 16 juillet 2001, M.DUPUIS était convoqué à un entretien préalable

à son licenciement et licencié le 13 août 2001 pour motif économique. Contestant le bien-fondé de son congédiement, il saisissait le conseil de prud'hommes de ROUEN qui, selon jugement du 13 décembre 2004, décidait que l'employeur unique de M.DUPUIS était la société SEA INVEST FRANCE et condamnait en conséquence cette société à lui payer la somme de 98.786,96 ç à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre celle de 450 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, le conseil de prud'hommes considérant que l'employeur n'avait pas satisfait sérieusement à son obligation de reclassement.

Appel de cette décision était interjeté par la société SEA INVEST FRANCE qui fait valoir :

à titre principal, -

les difficultés économiques de la société sur le site de Rouen étaient incontestables, les membres du comité régional d'établissements l'ont reconnues ; -

la même situation se retrouvait dans le secteur d'activité concerné du groupe qui était déficitaire ; -

le reclassement a été tenté avant le licenciement, tant au plan interne qu'externe ;

à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour confirmerait le jugement entrepris, il conviendrait de réduire les indemnités allouées.

En conclusion, il est demandé à la Cour :

au principal, de débouter M. X... de sa demande,

et subsidiairement, de limiter le montant des dommages-intérêts à la somme de 6 mois de salaire,

en toute hypothèse, il est réclamé la somme de 1.500 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société SAGA TRANS a conclu à la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que l'employeur unique était la société SEA INVEST FRANCE ; elle demande la somme de 2.000 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, et très subsidiairement, si une condamnation solidaire devait être prononcée, une réduction des dommages-intérêts.

Elle soutient que depuis la cession de STP au groupe SEA INVEST (31 mars 2000), elle est étrangère à la société SEA INVEST FRANCE, dès lors que ces deux entités appartiennent à des groupes différents, SEA INVEST FRANCE, au groupe SEA INVEST et SAGA TRANS au groupe SAGA intégré au groupe BOLLORE, et que s'il doit être fait application de la recherche de l'influence déterminante au sein d'un groupe, pour examiner l'obligation de reclassement, cette recherche doit être effectuée au sein des entités appartenant à un même groupe, soit dans le périmètre du groupe SEA INVEST, ce qui exclut SAGA TRANS.

M. X... a conclu, au principal, à la confirmation de la décision ; subsidiairement, il demande à la Cour de dire que la société SEA INVEST et la société SAGA TRANS n'ont pas respecté leur obligation de reclassement et que le motif économique avancé ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, sollicitant pour cette raison la condamnation solidaire, ou l'une à défaut de l'autre à lui payer la somme de 98.786,96 ç à titre de dommages-intérêts, et celle de 2.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

A l'audience, la société SAGA TRANS a demandé à ce que soit écartée des débats l'attestation de M. A..., à elle communiquée le 10 janvier 2006, par la société SEA INVEST FRANCE et qu'il n'a pu transmettre à sa cliente ; il sera fait droit à cette demande dans la mesure où cette communication tardive porte atteinte au principe du contradictoire.

DECISION

I - Sur le reclassement

Il est constant qu'un poste a été proposé au salarié à Dunkerque, mais ainsi que le fait observer M. X..., ce qui est d'ailleurs consigné dans le procès-verbal de la réunion du Comité Régional extraordinaire d'établissement SEA INVEST FRANCE/NORD tenu le 11 juillet 2001, la société reconnaissait, dans le même temps, que cette solution paraissait inadaptée, étant donné "les charges de famille" pesant sur le salarié.

La société a adressé deux courriers le 16 juillet 2001 au syndicat des manutentionnaires et employeurs de main d'oeuvre du port de Rouen, ainsi qu'au Bureau Central de la main d'oeuvre afin de solliciter sa réintégration au sein du BCMO, et le même jour, elle le convoquait à un entretien préalable.

Cette précipitation traduit le peu de sérieux de la tentative de reclassement : la proposition de poste de docker à Dunkerque, à supposer même qu'il en ait été informé avant l'entretien préalable, n'a été présentée au salarié que lors de celui-ci et la société ne saurait, sans se contredire, justifier, a posteriori, par les raisons données par M. X... pour la refuser, les recherches "limitées" selon son expression qu'elle dit avoir entreprises avant le licenciement ; à cet égard, rien ne permet de dire que la société qui possédait des sites d'exploitation, non seulement à l'étranger mais en France, au Havre, Boulogne et Calais, en sus de Dunkerque, ait interrogé ces établissements.

C'est pourquoi, et sans même qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens, le licenciement de M. X... doit être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse ; ce point de la décision est confirmé.

Pour apprécier les dommages-intérêts, la société SEA INVEST FRANCE

s'interroge sur la volonté de M. X... de poursuivre son contrat au sein de la société SEA INVEST ; elle en veut pour preuve que ses prestations sociales sont équivalentes à son salaire, ce que

Pour apprécier les dommages-intérêts, la société SEA INVEST FRANCE s'interroge sur la volonté de M. X... de poursuivre son contrat au sein de la société SEA INVEST ; elle en veut pour preuve que ses prestations sociales sont équivalentes à son salaire, ce que semble confirmer le fait qu'il n'ait pas usé de la priorité de réembauchage. Mais M. X... qui bénéficiait d'une ancienneté de 32 ans, et avait 52 ans au moment de son licenciement, il n'a pas retrouvé du travail et a pris une retraite anticipée, dans le cadre du plan amiante en janvier 2003 ; compte tenu de ces éléments et des circonstances de son licenciement, la somme de 98.786,96 ç allouée à titre de dommages-intérêts correspond à une juste évaluation de préjudice subi par lui ; ce point de la décision sera confirmé.

II - Sur la condamnation solidaire de la société SAGA TRANS appartenant au groupe BOLLORE

M. X... fait plaider que la société SAGA TRANS avait, à l'égard de la société SEA INVEST une influence déterminante car la société SAGA TRANS était le seul et unique client de la société SEA INVEST sur l'agence de Rouen, qu'ainsi elle contrôlait la société SEA INVEST quant à son activité manutention et que le reclassement devait être recherché également au sein de la société SAGA TRANS du groupe BOLLORE.

Mais pour apprécier le groupe dans lequel doit s'effectuer le reclassement du salarié licencié pour motif économique, il doit être recherché l'influence déterminante que peut avoir une société sur une autre et cet examen ne peut porter que sur des sociétés appartenant au même groupe ; en l'espèce la société SEA INVEST FRANCE appartient

au groupe SEA INVEST et la société SAGA TRANS au groupe SAGA, dépendant du groupe BOLLORE et si des relations commerciales existaient entre la société SAGA TRANS et la société SEA INVEST FRANCE, cette circonstance n'autorise pas pour autant M. X... à reprocher à la société SAGA TRANS une absence de tentative de reclassement, dès lors qu'elle n'appartenait pas au même groupe que la société SEA INVEST FRANCE.

C'est donc à juste titre que les premiers juges ont mis hors de cause la société SAGA TRANS.

L'équité et les circonstances de la cause justifient que la société SEA INVEST FRANCE alloue à M. X... la somme supplémentaire de 1.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés par lui en appel et que la société SAGA TRANS soit déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la société SEA INVEST FRANCE à payer à M. X... la somme de 1.000 ç au titre des frais irrépétibles par lui engagés en appel ;

Rejette les autres demandes ;

Condamne la société SEA INVEST FRANCE aux dépens.

Le greffier

Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Numéro d'arrêt : 05/00526
Date de la décision : 21/02/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-02-21;05.00526 ?
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