DOSSIER N 99/00185-
ARRÊT DU 16 FEVRIER 2000
INTERETS CIVILS
N
COUR D'APPEL DE ROUEN CHAMBRE CORRECTIONNELLE
Sur appel d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de DIEPPE du 24 novembre 1998, la cause a été appelée à l'audience publique du mercredi 12 janvier 2000, COMPOSITION DE LA COUR , lors des débats et délibéré
Président :
Monsieur CATENOIX, Conseillers : Monsieur X...,
Monsieur Y..., Ministère Public :
représenté aux débats par le Substitut Général Monsieur Z... A... :
Mademoiselle B... aux débats
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
PILLE Patrick né le 8 Juin 1950 à SAINT-MANDE (94) de Gauthier et de LAMBOLEZ Lucienne de nationalité française, marié Nombre d'Enfants :
3 Medecin demeurant
18 route Newton Longville
76590 LONGUEVILLE SUR SCIE
libre
Intimé
PRESENT Assisté de Maître VOISIN-DAMBRY Avocat au barreau de DIEPPE
CONTRADICTOIRE
LA COMMUNE DE LONGUEVILLE SUR SCIE, demeurant xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx xxxxx
partie civile, appelante
ABSENTE Représentée par Maître VIGIER Avocat au barreau de ROUEN
EN CAUSE MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL Maître VIGIER a déposé des conclusions, lesquelles datées et contresignées par le greffier ont été visées par le Président puis jointes au dossier. DÉROULEMENT DES DÉBATS : Monsieur le Président a été entendu en son rapport après avoir constaté l'identité de Patrick PILLE Patrick PILLE a été interrogé et a présenté ses moyens de défense Maître VIGIER a plaidé Le Substitut Général Monsieur Z... a été entendu Maître VOISIN-DAMBRY a plaidé Puis la Cour a mis l'affaire en délibéré et le Président a déclaré que l'arrêt serait rendu le 16 FEVRIER 2000 Et ce jour 16 FEVRIER 2000 :
Patrick PILLE étant présent, la partie civile absente, Monsieur le Président CATENOIX a, en audience publique, donné seul lecture de l'arrêt en application des dispositions de l'article 485 dernier alinéa et 512 du Code de Procédure Pénale en présence du Ministère Public et de Annie B... A.... RAPPEL DE LA PROCÉDURE PREVENTION
M. C... a été à la requête du Ministère Public cité directement par exploit délivré le 24 septembre 1998 à domicile (AR signé le 26 septembre 1998) devant le Tribunal Correctionnel de DIEPPE à l'audience du 10 novembre 1998.
Il était prévenu d'avoir à LONGUEVILLE-SUR-SCIE le 12 octobre 1996 exécuté des travaux en méconnaissance du plan d'occupation des sols de la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE, en l'espèce un abri de chevaux alors que toute installation ou construction de quelque nature qu'elle soit est interdite dans la zone ND2 prévue par le plan d'occupation des sols ; Infraction prévue par l'article L.160-1 al.1
du Code de l'Urbanisme et les articles L.480-4, L.480-7, L.480-5 du Code de l'Urbanisme. JUGEMENT
Le Tribunal par jugement contradictoire à l'égard de M. C... et contradictoire à signifier à l'égard de la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE du 24 novembre 1998 a renvoyé M. C... des fins de la poursuite et déclaré la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE irrecevable en sa constitution de partie civile.
Cette décision a été signifiée à la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE par exploit délivré en la personne de son maire le 23 décembre 1998. APPEL
Par déclaration au greffe du Tribunal en date du 28 décembre 1998, la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE, partie civile, a interjeté appel de cette décision sur les dispositions civiles.
DÉCISION
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi. En la forme
Au vu des énonciations qui précèdent et des pièces de la procédure, l'appel interjeté par la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE, partie civile, dans les forme et délai des articles 498 et suivants du Code de procédure pénale est régulier ; il est donc recevable.
A l'audience de ce jour, 12 janvier 2000,M. C... , régulièrement cité par exploit délivré le 28 septembre 1999 à domicile (AR signé le 30 septembre 1999), est présent et assisté. La partie civile, à l'égard de laquelle l'examen de la cause fut renvoyé contradictoirement lors de l'audience du 15 septembre 1999, est représentée. Il sera donc statué par arrêt contradictoire à l'égard des parties. Au fond Rappel des faits
Le samedi 12 octobre 1996, en service de surveillance sur le territoire de la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE rue Berthet Burlet, les gendarmes de cette localité constataient que M. C... avait entrepris la construction d'un abri pour ses chevaux dans un pré situé, sur la parcelle 68 au cadastre de la commune, en zone ND du plan d'occupation des sols et qu'aucun permis de construire n'était visible.
Cette construction en cours d'édification à la date du 12 octobre 1996, étant d'une superficie de 15 m et réalisée sur un terrain libre de toute occupation et ne répondant donc pas aux exigences de l'article R. 222-2 du Code de l'Urbanisme ne relevait pas du régime spécifique de la déclaration de travaux et était soumise à l'obtention d'un permis de construire, ce dont n'était pas titulaire M. C... .
Par ailleurs, cette construction était en infraction avec le règlement de la zone ND du plan d'occupation des sols de LONGUEVILLE-SUR-SCIE approuvé le 18 décembre 1979 qui aux termes de son article ND 1, interdisait toute construction ou installation de quelque nature qu'elle soit.
Des investigations effectuées allaient résulter les éléments suivants :
Le 11 juin 1996,M. C... , désireux de procéder à la construction d'un abri pour ses deux chevaux sur ce terrain dont il s'était porté acquéreur quelques mois auparavant tout en sachant, disait-il, qu'il était interdit d'y construire une maison d'habitation, déposait en mairie une déclaration de travaux sous le numéro 397 96 A 0008.
Cette déclaration de travaux faisait l'objet d'une décision d'opposition par arrêté municipal du 13 juillet 1996 au motif que toute construction était interdite en zone ND du plan d'occupation
des sols. Cet arrêté n'était pas notifié à M. C... par envoi recommandé avec accusé de réception ou remise contre décharge mais simplement, aux dires de la partie civile, déposé dans sa boîte aux lettres par un agent communal.
M. C... a contesté avoir reçu de la mairie l'arrêté interdisant la construction et déclaré qu'en l'absence d'une réponse de la mairie à sa déclaration de travaux dans le mois du dépôt de celle-ci, à l'expiration duquel il était dans ce cas autorisé à commencer les travaux, il avait passé commande de l'abri à la fin du mois de juillet 1996 et en avait commencé la construction le 4 septembre 1996.
Dans un courrier daté du 10 septembre 1996 et adressé en recommandé avec accusé de réception, le contrôleur principal, M. D... , de la Direction Départementale de l'Équipement informait M. C... que sa déclaration de travaux avait fait l'objet d'une opposition par un arrêté municipal du 13 juillet 1996 qu'il joignait à sa correspondance, que ce refus était motivé par le fait que toute construction était interdite en zone ND du plan d'occupation des sols de LONGUEVILLE-SUR-SCIE, que la construction de l'abri à chevaux débutée le 4 septembre 1996 constituait une infraction à la législation sur le droit de construire réprimée par l'article L 480-4 du Code de l'Urbanisme et il l'invitait à arrêter les travaux en cours et lui donnait un rendez-vous le 4 octobre 1996 à la Direction de l'Équipement pour un entretien.
M. C... a déclaré qu'il n'a eu connaissance de l'arrêté municipal portant opposition à sa déclaration de travaux que le 11 septembre 1996 par le courrier précité, qu'au cours de l'entretien du 4 octobre 1996 il lui a été expliqué les données juridiques de la situation et notamment les contraintes liées au plan d'occupation des sols et que finalement, se trouvant en possession du matériel par suite des
négligences de la mairie, il avait décidé de poursuivre les travaux jusqu'à leur achèvement. Prétentions des parties
Devant la Cour, M. C... réitère ses déclarations. Reprenant la même argumentation et les mêmes moyens de défense que devant le Tribunal, il soutient et fait plaider essentiellement qu'en l'absence de refus de la mairie dans le délai imparti et n'ayant pas reçu de celle-ci l'arrêté interdisant la construction, il s'est cru autorisé à commander le matériel et les travaux et il estime qu'il n'a commis aucune infraction au motif que l'expiration du délai d'opposition au soir du 11 juillet 1996 lui conférait un droit individuel de réaliser les travaux et que l'arrêté du 13 juillet 1996 est irrégulier au motif que pris après l'expiration du délai d'un mois et non notifié dans les formes requises.
Dans des conclusions développées à l'audience par son avocat, la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE estime que l'infraction était caractérisée à la charge de M. C... et demande sa condamnation au paiement de la somme de 1 Franc à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et d'une somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale.
A l'appui de ses prétentions, il est exposé :
- que M. C... a eu en tout état de cause connaissance de la décision d'opposition au plus tard le 11 septembre 1996 et que dûment informé par M. D... , notamment après son entretien du 4 octobre 1996, il a délibérément poursuivi les travaux et décidé de les achever et ce en violation des obligations du plan d'occupation des sols et des dispositions du Code de l'Urbanisme ;
- que de surcroît l'arrêté portant opposition à la déclaration de travaux pris le 13 juillet 1996, postérieurement à l'expiration du délai d'un mois, doit s'analyser comme un retrait de l'autorisation tacite de travaux, que ce retrait est régulier car survenu dans le
délai de recours contentieux et concernant une autorisation tacite elle-même irrégulière comme contraire aux dispositions du plan d'occupation des sols, que le 11 septembre 1996 M. C... était donc informé qu'il ne disposait plus d'une autorisation tacite pour les travaux et que ce retrait s'ajoute à l'interdiction qui lui fut faite de poursuivre les travaux par la Direction Départementale de l'Équipement dans son courrier du 10 septembre 1996.
Ceci étant exposé,
Attendu que d'une part l'arrêté municipal du 13 juillet 1996 portant opposition à la déclaration de travaux, intervenu dans le délai de deux mois de recours contentieux suivant la décision tacite en date du 12 juillet 1996 et prononcé pour cause de violation des dispositions du plan d'occupation des sols et donc régulier en la forme, doit s'analyser comme un retrait de l'autorisation tacite de travaux, dont la notification au tiers intéressé n'est soumise à aucune forme particulière ;
que d'autre part, le délit de construction sans permis de construire prévu et réprimé par les articles L.421-1 et L.480-4 du Code de l'Urbanisme s'accomplit pendant tout le temps où les travaux sont exécutés, que sa perpétration s'étend donc jusqu'à l'achèvement des travaux ;
Attendu que M. C... a poursuivi au-delà du 11 septembre 1996 les travaux de construction jusqu'à leur achèvement en octobre 1996 tout en sachant à compter de cette date non seulement que sa déclaration de travaux avait fait l'objet d'un refus mais surtout que la construction de l'abri à chevaux constituait une violation des dispositions du plan d'occupation des sols de la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE et que leur méconnaissance caractérisait une infraction à la législation sur le droit de construire ;
que la poursuite de la construction en toute connaissance de cause
implique de la part de son auteur l'intention exigée par l'article 121-3 du Code pénal ;
que le délit prévu et réprimé par l'article L.480-4 du Code de l'Urbanisme étant caractérisé postérieurement au 11 septembre 1996, il convient, dans les limites de l'appel, d'infirmer le jugement déféré en ses dispositions civiles, M. C... , en poursuivant la construction postérieurement à cette date ayant commis une faute de nature à engager sa responsabilité civile ;
Attendu que la constitution de partie civile de la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE est recevable et bien fondée, et qu'il convient de faire droit à sa demande tendant à obtenir 1 Franc à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge la totalité des frais irrépétibles par elle exposés pour assurer la défense de ses intérêts ; PAR CES MOTIFS LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement, En la forme
Déclare l'appel recevable, Au fond
Statuant dans la limite de cet appel ;
Infirme le jugement déféré en ses dispositions civiles ;
Déclare la commune de LONGUEVILLE-SUR-SCIE recevable en sa constitution de partie civile ;
Condamne M. C... à lui payer une somme de 1 Franc à titre de dommages et intérêts et une somme de 3.000 Francs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale ;
Condamne M. C... aux dépens de l'action civile. EN FOI DE QUOI LE PRESENT ARRET A ETE SIGNE PAR LE PRESIDENT ET LE A...